Chapitre 10

Par tiyphe

Cela faisait déjà dix minutes que Carl faisait semblant de chercher quelque chose dans sa chambre. Lui-même ne savait pas quoi. Il regarda son téléphone, il était midi et demi. Le policier était à l’entrée et il le regardait sans vraiment le regarder. En entrant dans la maison il avait marmonné qu’il aurait dû être en congé ce jour-là, que cette affaire ne l’intéressait pas, qu’il avait autre chose à faire, et qu’il fallait que ça aille vite. Sauf que Carl ne voulait pas aller vite, il fallait qu’il fasse gagner du temps à Amandine. Et alors que le policier commençait à s’impatienter, Carl entendit sa copine dans la chambre de sa sœur.

_ Carl ! J’ai trouvé quelque chose !

Le jeune homme s’arrêta net. Discrète, il lui avait juste demandé d’être discrète. Il fallait qu’il trouve quelque chose à dire devant l’agent, une idée vite.

_ Tu as trouvé mon chapeau ?

_ Ton chapeau ?

La tête d’Amandine apparue dans l’encadrement de la porte. Elle semblait joyeuse. Elle bandit un objet en entrant dans la chambre. Carl le reconnu immédiatement.

_ J’ai trouvé ton ordinateur portable, c’est bien ça qu’on venait chercher ?

_ Mais ce n’est pas… Oui oui bien sûr !

Carl allait contester quand il vit le regard noir que lui lançait Amandine. Ce n’était pas son ordinateur mais celui de sa sœur. Amandine devait avoir une idée derrière la tête et Carl n’ajouta rien. Ils sortirent de la maison, remercièrent le policier, qui bougonna un vague « De rien » dans sa moustache, et rentrèrent dans leur appartement. Amandine n’avait rien voulu dire dans la voiture, mais elle semblait excitée de lui montrer ce qu’elle avait trouvé.

En arrivant, Carl ne pouvait plus tenir.

_ Alors ? Raconte-moi. Qu’as-tu trouvé dans la chambre de ma sœur ?

_ Doucement, doucement. Tiens.

                Amandine lui tendit un morceau de papier jaune. C’était une feuille à moitié déchirée, prise dans les feuilles de brouillon que sa sœur gardait pour les moindres occasions et surtout pour ne pas jeter du papier inutilement. Carl reconnu l’écriture d’Alice.

«              Amandine, si tu trouves ceci c’est que je suis déjà loin. Je suis partie avec Éric dans les Alpes. J’ai jeté mon téléphone pour qu’on ne me retrouve pas. D’après Éric, l’accident n’en est pas un. Il pense que quelqu’un en veut à mes parents et Carl en a subit les conséquences. C’est possible qu’on me recherche, je suis en danger.

Oh Amandine ! Tu dois tellement être mal, j’ai perdu un frère, mais toi, tu as perdu l’homme que tu aimes. Je suis vraiment désolée. Je ne suis pas sûre de moi-même réaliser ce qu’il m’arrive.

Je dois y aller. Éric m’attends. Mon ordinateur est sous mon lit, il y a notre destination dans mes favoris, je ne peux pas l’écrire si jamais ce n’est pas toi qui trouve le papier, et il n’y a que toi et moi qui connaissons mon mot de passe. Il ne reste plus que nous trois avec Éric maintenant. Je t’aime grande sœur !

Alice. »

_ Elle me croit mort…

_ Je pense qu’elle s’est enfuie peu après l’accident et la police était déjà sur les lieux avant que j’appelle les secours. Ils ont dû lui dire que tu n’y étais pas mais que tu n’avais aucune chance d’avoir survécut.

_ Elle me croit mort…

Carl relu la lettre, encore et encore. Sa sœur pensait qu’il était mort. Ils n’avaient jamais été vraiment proches. Depuis la naissance d’Alice, Carl ne s’était pas intéressé à ce petit bébé rose tout souriant. Il avait aimé être le seul et elle venait gâcher ça. Après il avait grandi, il était resté poli envers elle mais aucun lien ne s’était créé. C’est lorsqu’Amandine était arrivée dans la famille qu’Alice avait pu trouver ce lien de fraternité avec Amandine. Carl n’était pas jaloux, cela ne l’importait peu.

Mais aujourd’hui, c’était comme un couteau dans le cœur qu’il recevait. Sa sœur le pensait mort, et sur la lettre il n’y avait aucune émotion. Il se rendit compte alors de tout ce qu’il avait fait endurer à sa petite sœur. Lorsqu’il n’avait pas sauté de joie quand elle avait trouvé tous les œufs de Pâques dans le jardin, ou quand elle avait eu son premier 20/20, son BAC. Il n’avait pas partagé sa tristesse quand leur grand-mère était décédée. Il ne l’avait pas consolée lors de son premier chagrin d’amour. Il n’avait pas été là pour elle, comme un frère le devrait. Et il le ressentait à présent dans cette lettre qui était destinée à Amandine et qui se terminait par un « Je t’aime grande sœur ». Amandine était la grande sœur qu’Alice avait toujours voulue. Carl n’avait pas été à la hauteur.

Carl se leva d’un bond du canapé. Il attrapa sa veste et mis ses chaussures en vitesse. Il devait rattraper le passé. Il devait trouver sa sœur, lui montrer qu’il était en vie, que tout allait bien, qu’il l’aimait.

_ Carl ! Où tu vas ?

                Amandine s’était levée à son tour, surprise de la réaction de son fiancé. Elle le rejoint devant la porte d’entrée de leur appartement. Carl était figé, la porte ouverte. Devant lui se tenait Charles, son père.

***

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