Chapitre 4

Notes de l’auteur : Ce chapitre étant très long je vous le mets tous seul, c'est la première scène de bataille de mon récit, j'espère qu'elle vous plaira, bonne lecture ;)

Chapitre 4

Alka dévala la montagne au pas de course, après sa vision Udiir avait renfilé son plastron et avait scellé sa monture en catastrophe. Déboulant sur la place du village Gal‘Rash à la ceinture, Udiir chercha ses sœurs et Mathias du regard. Mais il ne les trouva pas.

« Udiir qu’est-ce que c’est que cet accoutrement ?

Le guerrier tourna la tête, sa mère et son père se tenait à quelques mètres de lui.

        -Où sont les filles et Mathias ? Demanda-t-il.

        -Eh bien, ils sont retournés au front hier soir en urgence.

Le sang d’Udiir ne fit qu’un tour et des sueurs froides lui coulèrent le long du dos.

        -Ils sont en danger.

        -Quoi ?

-Papa, envoie un message d’urgence au seigneur Jayce, le front va avoir besoin de renfort. Une escouade ennemie va prendre nos forces à revers, ils viennent de longer la vallée par l’est. Je pars devant.

-Mais comment...

Udiir ne laissa pas le temps à sa mère de protesté et lança Alka à nouveau au pas de course.

L’ours franchit la porte du village avant de bifurquer vers l’est en s’enfonçant dans la forêt de conifère qui recouvrait le relief montagneux. La nuit tomba rapidement le ciel était chargé de lourd nuage, la température chuta. Cela ne plut pas à Udiir, l’automne était certes bien entamé, mais il était encore un peu tôt pour les premières neiges. Si la météo s’en mêlai les choses se compliquerait davantage et il n’en avait vraiment pas besoin.

Il talonna sa monture et l’ours accéléra, Alka appartenait à une race d’ours plus grande que la moyenne. Elle était plus rapide et plus endurante que toutes les autres espèces d’ursidé existante, cela lui permettait de courir plus vite et plus longtemps. La pleine lune se leva, sa lumière argentée éclaira la forêt donnant ainsi une meilleure visibilité.

Udiir traversa la chaîne de montagne avec la célérité du vent. Son lien avec les esprits de la terre fonctionnait mieux qu'une boussole, l'empêchant de se perdre.   Vers minuit il quitta la montagne pour déboucher sur une large lande jalonnée de collines verdoyantes. Il avait quitté le domaine des Star-Hammer, il entrait dans le domaine de la reine Artha.

Soudain la douleur le frappa une fois de plus, mais en moins brutal. Les forces ennemies l'avait dépassé il le sentait. Il lui restait encore 2 heures de route et les forces ennemies seraient sur place avant lui malgré la vitesse d'Alka.

Terrifié par cette simple pensée, le chaman réfléchit à toute vitesse. Il relança sa monture au galop et invoqua les esprits du vent et de la terre.    

-Bal'Ash seigneur des vents, si vous m’entendez, si vous voulez que j'accomplisse    ma tâche, alors permettez-moi d'aller aussi vite que le vent.

D'abord il ne se passa rien, puis le vent se mit à tourbillonner tout autour de l'ours et de son cavalier. Udiir vit alors le paysage s'étirer autour de lui. Alka fonçait à toute allure sur la lande nimbée de son propre ouragan, le chaman avait la sensation d'être aussi léger qu'une plume. En quelques minutes Udiir dépassa les troupes du chaos.

Une heure plus tard, le paysage devint marécageux. Udiir approchait enfin de la ligne de front. Durant les premiers mois du conflit, le front avait oscillé de plusieurs kilomètres avant de finalement se stabiliser. La magie et les armes de guerres des deux camps, sans oublier l’énergie corruptrice des démons, avaient ravagé les terres alentours les rendant tantôt calcinées, désertiques ou encore marécageuses comme dans le cas présent. 

Udiir n’était plus très loin de sa destination. Mais l’avance qu’il avait pris sur les forces ennemies semblait se réduire constamment, comme si les soldats avaient forcé l’allure. Le chaman ouvrit son esprit à la terre, ses sens à nouveau décuplés, il sentit la présence brûlante du chaos venant du nord, et à moins de 10km celles des militaires et soldats, toutes races confondues, de l’alliance du royaume Erganane.

Udiir savait qu’il ne pouvait pas aller directement vers le camp militaire, on risquait de lui tirer dessus à vue. Il fit alors le choix le plus radical : couper la route à l’ennemi. Il bifurqua et fonça droit sur la trajectoire des forces chaotiques.

 

***

Le camp des forces erganiennes était situé sur ce qu’il restait de la rive ouest du Tangra, un large fleuve ayant pendant longtemps servi de frontière naturelle avec Inguadia. Si une partie des soldats était installée dans les fortins de bois, le reste des forces, y compris l’état-major de l’armée était regroupé à l’extérieur pour superviser les assauts. Le tout était entouré de hautes palissades elles aussi faites de rondins.

Bien que beaucoup des membres des forces armées soient des soldats professionnels d’autres étaient des aventuriers, des combattants indépendants qui embrassaient un mode de vie certes dangereux mais libre de beaucoup de problèmes et promettant son lot de gloire et de sensations fortes.

 Bien que certains étaient tentés de les comparer à de vulgaires mercenaires, la réalité était légèrement plus compliquée : un mercenaire n’était utile qu’en temps de guerre et n’acceptait que de combattre des races mortelles. Mais les aventuriers étaient les seuls à être vraiment qualifiés pour combattre les monstres et devaient rendre un minimum de compte à leurs guildes respectives sur les missions qu’ils accomplissaient.

 Et malgré l'excellente formation qu’offrait l’académie militaire du royaume, rien ne valait l’expérience qu’avaient accumulé les aventuriers au cours de leurs pérégrination. La force individuelle et l’expérience de certains rivalisait avec celles des soldats les plus aguerris.

C’est donc parmi eux que l’on trouvait les meilleurs guerriers, mages et combattants, toutes professions et races confondues. Il était donc naturel que le royaume d’Erganane fasse appel à une telle force de frappe.

Parmi cet attroupement hétéroclite d’énergumènes, on trouvait de tout : des nains, des elfes des bois, des hauts elfes et des drow (elfe noirs), des humains, des tériants (hommes bêtes) et des amazones. Rien qu’en observant un regroupement d’aventuriers on pouvait voir toutes les races qui peuplaient la terre.

Au centre du camp se dressait une tente à la toile bleu orage arborant les armoiries du royaume : un trident et deux éclairs entrecroisés. C’était là que les dirigeants des forces erganiennes se réunissaient pour discuter des différentes stratégies à adopter sur le champ de bataille. 

Sous la tenture bleue se dressait une grande table de chêne brut sur laquelle était étalée une immense carte de la région. Sur ce même plan étaient déposés des pions représentant les troupes alliés et ennemis.

Quatre personnes étaient regroupées autour de la table : Arya et Kiara Arginane se tenaient à gauche de la table, à l’opposé se tenait Loriane la lieutenante en chef des archers et des rôdeurs, une elfe des bois à la peau olive et au cheveux blonds, d’un mètre quatre-vingts, vêtue d’une tenue de cuir par-dessus une cotte de mailles ainsi qu’un arc long en bandoulière et un khopesh à la ceinture. 

Et à ses côtés se dressait Kalishera, une tériante panthère grande de deux mètres dix au pelage noir onyx, la porte-parole des aventuriers. Elle était équipée d’une armure de mailles et de plaques sombre et un espadon, à lame moyenne en d’acier noir, était accroché dans son dos. 

Rien qu’en observant sa stature, n’importe qui pouvait comprendre qu’elle était une combattante expérimentée. Elle n’était certes pas la plus âgée des aventuriers mais elle avait fait rapidement ses preuves au début du conflit contre les forces chaotiques. Cela lui avait valu le respect de l’armée et de la famille royale ainsi que la confiance de la guilde.

Arya et Kiara quant à elles étaient les dirigeantes des mages de bataille et chevaliers sacrés (aussi appelé paladins) du royaume d’Erganane. 

Fatiguée d’attendre la jeune sorcière prit la parole et s’adressa à ses camarades :

« Quelqu’un sait pourquoi nous avons été convoqués ?

-Hé bien…Commença Loriane.

-Je vais répondre à cette question dame Arginane.

Une voix féminine ferme et autoritaire avait coupé l’elfe dans son élan. L’instant suivant une humaine d’âge mûr entra dans la tente, ses cheveux châtains coiffés en une queue de cheval et le visage à la fois dur et serein la rendait aussi splendide qu’intimidante. Elle était vêtue d’une armure de plaques bleue azure et de mailles dont le plastron était orné de l’emblème royal d’Erganane : un trident et deux éclairs croisés.

-Reine Artha ! S’exclama Arya en s’inclinant.

Les trois guerrières imitèrent la magicienne presque aussitôt. La reine guerrière du royaume d’Erganane leur rendit la parole avant de contourner la table et de se positionner à son extrémité. 

Puis d’une voix ferme elle déclara :

-Bien mesdames, commençons.

La réunion commença donc, les quatre lieutenantes firent leurs rapports. Les jumelles Arginanes formulèrent leur inquiétude vis à vis du risque de famine parmi les troupes. Les vagues d’assaut violents répétées avaient certes été repoussées mais cela les avait coupés de potentiels renforts et de ravitaillement poussant l’armée à rationner ses troupes. 

Artha savait que la situation devenait critique et que ses troupes ne tiendraient pas face à un nouvel assaut. Elle devait faire venir des renforts et des vivres.

-Bien donc comme convenu Lieutenante Arya vous et votre escouade allez ouvrir un portail de téléportation vers les lieux de ravitaillement. Vos troupes sont-elles prêtes ?

-Oui votre altesse, prêtes et…

CRAC !!!BOUM !!

Le tonnerre retentit au dehors, coupant la parole à la jeune fille.

-Qu’est-ce que… ??

BOUM !!

Puis la terre trembla coupant la reine dans sa question.

Une sentinelle fit irruption dans la tente, alors que le camp était une fois encore ébranlé par un séisme. Comme elles lui demandèrent un rapport sur la situation, le jeune soldat suggéra à ses supérieures de venir voir d’elle-même.

Les cinq femmes sortirent de la tente en courant, et le spectacle qu’elles virent les laissèrent sans voix. Là, à moins de 5 km du camp, les éclairs pleuvaient sur la plaine marécageuse et la terre s’ouvrait pour laisser sortir des gerbes de lave. 

Les flashs de lumière produits par la lave et les éclairs, permirent aux soldats et aventuriers de voir le ce qui se déroulait sur la plaine dévastée : une horde de démons et d’amazones du chaos avançait sur la zone marécageuse, et face à eux se tenait une grande silhouette autour de laquelle tourbillonnait une véritable tempête.

En voyant cela Kiara déglutit bruyamment et Arya souffla dans un murmure :

- Udiir »

 

***

Udiir vit les ennemis avant eux, et ce qu’il vit, éveilla en lui une soif de combat et de sang qu’il avait enfouie en lui depuis des années. La troupe ennemie était une lente marée de monstres cornus à la peau rouge ou noire et de guerrières en armure rouge sang arborant l’emblème d’une lune sanglante.

Le jeune chaman déglutit bruyamment à la vue de la horde mortelle qui lui faisait face, il se retourna un instant, embrassant les lueurs que lui renvoyaient les torches et feux de camps du campement des forces alliées. Il repensa à ses sœurs et à Mathias qui s’y trouvaient à cet instant, la simple pensée du sort que leur réservait les démons le faisait trembler d’horreur et de colère.

Udiir se focalisa sur ce dernier sentiment, et lança Alka à pleine vitesse, en pleine charge il lâcha les rênes de sa monture et tendit ses bras vers le sol. Il invoqua le pouvoir de Gaïa. Aussitôt les quelques pierres qui jonchaient le sol du marécage furent comme attirées à lui et commencèrent à former une sphère de roche palpitante entre les mains du chaman. Un sourire carnassier se dessina sur le visage d’Udiir.

L’armée chaotique n’eut que le temps d’apercevoir la silhouette du forgeron. D’un coup, Udiir relâcha la pression et abattit l’orbe d’énergie terrestre pure sur le sol en clamant :

« RASH’ANGUE GAÏA !! »

CRAC !!!BOUM !!

Le sol explosa, des piques de pierre jaillirent sous l’effet de la force tectonique colossale. La secousse fit trembler la plaine ravagée. Les soldats à pied furent balayés comme des fétus de paille ou empalés. Les cavaliers furent quant à eux engloutis par les crevasses creusées pas le séisme.

Udiir ne laissa pas à ses ennemis le temps de se ressaisir, il dégaina Gal’Rash et fonça dans la mêlée en poussant un rugissement bestial qui retentit dans tout le marécage. Il fit appel à la foudre, son marteau s’imprégna de la force de Bal’Ash et se mit à briller comme une étoile. 

Alka franchie la crevasse d’un bond, et Udiir abattit Gal’Rash sur le crâne du premier démon qui passa à sa portée. La tête de la créature fut broyée et un éclair balaya le champ de bataille grillant tout sur son passage. Alka saisit une amazone entre ses mâchoires et lui broya l’échine d’un coup de dents avant de balayer un démon cornu à la peau noire d’un coup de patte.

Udiir poursuivit sa charge pendant quelques secondes avant de se dégager de la mêlée pour franchir à nouveau la crevasse. Le chaman invoqua une fois encore le pouvoir de la reine de la terre, les piliers de pierres se multiplièrent donnant naissance à un mur de dix mètres de haut.

BOUM !!

En quelques secondes la troupe ennemie fut piégée dans un enclos d’un rayon de plus de 200 mètres. La seule sortie constituait en un passage large d’à peine plus de deux mètres dans lequel se tenait l’architecte de l’enclos et sa monture.

Udiir mit pied à terre. L’adrénaline étant retombée, il profita de ces quelques secondes de lucidité pour observer les ennemis qui lui faisait face. Les démons étaient cornus, leurs langues semblables à celles des serpents. Leurs mâchoires étaient garnies de crocs aussi effilés que des pointes de lances et des épées. 

Certains étaient de vrais mastodontes haut de trois mètres aux muscles saillants et armés de puissantes masses ou d’espadons à lame large. D’autres à l’inverse étaient sveltes et ne dépassaient pas le mètre quarante. Leur peau allait du rouge sang au bleu pâle.

S'étant remis de l’assaut éclair du jeune homme, l’ennemi se rassembla. Très remontées, les amazones étaient les premières à vouloir en découdre. L’une d’entre elles, une guerrière aux cheveux argentés armée d’une hallebarde, s’avança. Tout comme Udiir elle mesurait dans les deux mètres. Elle arborait une armure légère en maille et en cuir qui ne couvrait que sa poitrine modeste et ses épaules, laissant visible son torse musclé. Ses jambes étaient couvertes par des bandes de cuir reliées par des genouillères en plaques.

Le jeune forgeron se retint de lever les yeux au ciel à la vue de cet équipement dépourvu de la protection la plus élémentaire. Il connaissait la force hors norme des amazones ainsi que leur résistance qui dépassait l’entendement. Mais le maître forgeron qui était en lui ne pouvait ignorer l’inconscience dont faisaient preuve certains artisans et combattantes qui choisissaient de mettre en avant le physique avant de penser à leur survie au combat. 

Il n’arrivait pas à croire à l’excuse fumeuse selon laquelle ce genre de design minimaliste était nécessaire pour permettre une bonne liberté de mouvement aux combattantes. L’amazone qui se trouvait en face de lui n’avait comme protection à la tête qu’un simple serre tête en bronze. Cette dernière se lécha les lèvres comme un fauve devant une belle pièce de viande. Après une poignée de secondes la guerrière prit la parole :

« Qui es-tu, petit mâle insolent pour t’opposer à nous ?

Udiir ayant gardé sa pelisse d’ours sur le visage, l’amazone ne pouvait pas voir son visage. Le jeune chaman garda le silence, il n’avait aucune envie de fanfaronner ni de tailler une bavette avec cette harpie.

Ladite harpie se retourna vers ses camarades, l’une d’elles qui était visiblement sa supérieure dit et tendant la main :

        -Je t’en prie.

Le sourire de requin de l’amazone s’élargit davantage. Elle empoigna sa hallebarde à deux mains et s’élança droit vers sa cible, Udiir se mit en garde. Son adversaire se déplaça si vite que son corps devint flou aux yeux de beaucoup des spectateurs. Mais pas pour Udiir, il voyait parfaitement les mouvements de l’amazone. Il la vit armer son coup et exécuter une frappe verticale de bas en haut. D’un revers de son marteau Udiir repoussa l’arme de son ennemi, l’amazone perdit son équilibre et le chaman saisit l’occasion.

Il plaqua la paume de sa main sur l'abdomen de l’amazone :

-AHR'ANGUE IGNIS !!

Et une violente déflagration éclata, la balayant comme une plume soufflée par le vent. Elle effectua un vol plané d'une dizaine de mètres, puis rebondit plusieurs fois avant de finalement s'effondrer au sol, le ventre carbonisé. Elle se mit à convulser alors que ses camarades l'entouraient.

Si certains ennemis restèrent médusés devant le tour de force d’Udiir, d’autre étaient plus que déterminés à lui faire mordre la poussière. Déjà trois démons et deux amazones se lançaient à leur tour. Le premier démon, svelte et agile à la peau ocre lui fonça dessus, un poignard acéré dans chaque main.

Un rictus malfaisant aux lèvres, il s’élança avec la célérité du vent bavant à l’idée de dévorer la chaire du chaman, mais son crâne rencontra l’acier de Gal’Rash. Un écœurant son d’os et de chaire broyés suivit le choc, la mâchoire et la moitié du visage de la créature avait été broyé comme une coquille d’œuf.

Un immonde sang noirâtre gicla avec force de la blessure de la créature alors que sa tête s'enfonçait dans la boue et que sa cervelle se mêlait à l’eau du marais.

Le second à attaquer, fut un ünbolck, le monstre mi-homme mi-bouc voulut décapiter son adversaire d’un coup de hache bien placé. Mais le fer de son arme rencontra celui du marteau du chaman. Hurlant de colère le monstre réitéra son attaque, une fois, deux fois, trois fois. 

Une gerbe d’étincelle accompagnait chaque choc entre les deux armes, l’ünbolck frappa une quatrième fois et la hache se brisa. À la vue de son arme brisée l’homme bouc enragea de plus belle et voulut encorner Udiir, mais ce dernier lui enfonça le crâne d’un coup de Gal’Rash. La tête du monstre, réduit à l’état de bouillis d’os et de sang, s’enfonça entre ses épaules avant qu’il n’expire dans un immonde gargouillis.

Le troisième démon, à la peau sombre et mesurant 3 mètres de haut, tenta de broyer le chaman d’un coup de massue. Mais Alka s’interposa et plaqua l’assaillant au sol de toute sa masse, avant de l’égorger d’un vif coup de mâchoire à la jugulaire. Le colosse mourut sur coup.

Il ne restait plus que les deux amazones, l’une était armée d’un espadon à lame large l’autre maniait une hache à double tranchant. Udiir saisit Gal’Rash des deux mains et invoqua la foudre.

-BRAH’ZISH BAL’ASH !! 

Des éclairs jaillir du marteau et d’un coup bien placé Udiir l'abattit sur ses assaillantes. Une onde de choc foudroyante balaya les amazones, les repoussant de plusieurs mètres. Mais contrairement à leur consœur elles retrouvèrent leur équilibre.

-Ne nous confond pas avec cette idiote de, dit l’amazone à la hache en désignant sa comparse dont Udiir avait carbonisé l’abdomen.

La guerrière à la hache avait des cheveux blonds presque blanc coupés courts et sa partenaire de long cheveux noirs coiffé en une multitude de tresses fines. Les deux se relevèrent de concert avant de prendre une étrange posture : elles joignirent leurs mains comme pour prier, Udiir crut les entendre murmurer quelque chose.

 Puis soudain, tous les sens d’Udiir se mirent en alerte ! Des sueurs froides lui coulèrent le long du dos, il eut la chair de poule ! Les amazones invoquaient un pouvoir divin et sans trop savoir comment il le savait !

D’un coup les deux combattantes disparurent dans un éclair de lumière sanglante ! Le chaman eu tout juste le temps de lever son marteau par réflexes avant que l’énorme espadon ne le décapite. Le choc fut tel que Udiir fut éjecté plusieurs mètres en arrière.

Alors qu’il planait dans les airs, la seconde amazone bondit, pris appuie sur la paroi de pierre et se propulsa d’un puissant coup de pied. Le corps de la guerrière devint flou sous l’effet de la vitesse, elle fonça droit sur Udiir et enfonça ses talons dans l’abdomen du chaman le plaquant violemment au sol.

Les poumons de Udiir se vidèrent d’un coup, un goût cuivré lui emplit la bouche, du sang. Une douleur sourde enflamma sa poitrine : deux côtes s’étaient brisées. La situation dérapait Udiir n’arrivait plus à respirer et sa vision s’assombrissait peu. L’amazone, à présent à cheval sur lui, se pencha et agrippa sa capuche en peau d’ours.

        -Voyons à quoi tu ressembles bel ours.

Elle avait dit ça en se léchant les lèvres, comme si Udiir était une pièce de viande. Une odeur enivrante et terrifiante à la fois emplissait les narines du jeune guerrier. Il s’agrippa de toute son âme à tout ce qu’il pouvait trouver en lui. Et là il le sentit ou plutôt il l’entendit, le rugissement d’Ursun, le rugissement d’Alka.

Une vague de puissance bestiale parcourut son corps comme une décharge électrique. D’une main, il saisit le bras de l’amazone et de l’autre lui décrocha un violent crochet dans la mâchoire. Sentant la prise de son adversaire se relâcher il invoqua Bal’Ash et déclencha déferlante de foudre dans un rugissement digne d’Ursun en personne.

L’amazone fut éjectée dans la seconde, à une dizaine de mètre. Sa camarade voulut charger mais sa course fut stoppée par une tonne de fourrure et de muscle pure. Alka balaya la guerrière à l’espadon d’un puissant revers de griffe. La diablesse alla rejoindre sa comparse dans la boue.

Udiir se releva, empoignant fermement son marteau. Ses yeux irradiaient d’électricités pure et la rage lui brûlait le ventre. A présent debout Udiir, sentit quelque chose d’humide sur sa cuisse. Il voulut porter la main à la tâche d’humidité mais à l’instant où il en sentit l’odeur il comprit. L’amazone avait joui alors qu’elle était à califourchon sur lui.

Cette pensé et l’odeur de la cyprine qui lui montait aux narines, firent monter en lui à la fois une sensation de désire et de peur intense. Savoir qu’une femme avait eu un orgasme alors qu'elle l’avait plaqué au sol l’excitait certes, mais le fait qu'elle en ait un en plein combat en disait long.

A présent debout, Udiir put alors voir distinctement ses adversaires. Les deux amazones étaient nimbées d’une aura rouge sang. En voyant ça, l’instinct de survie du chaman hurla en lui, il connaissait l’origine de ce pouvoir, il venait de Djinn’Rha le roi démon.

Les amazones alliées à Erganane avaient recours à un pouvoir similaire provenant de Kali, leur déesse tutélaire. Cette aura décuplait la force et la vitesse de son utilisatrice. Le fait d’avoir mordu la poussière ne l’étonnait gère.

Udiir réfléchit à tout allure. Son duel avec les amazones ne pourrait s’éterniser et il savait que cette stratégie arrivait à ses limites. Derrière ses deux adversaires, les troupes ennemies commençaient à perdre patience. Bientôt elles chargeraient en nombre, droit sur lui et il serait submergé par la vague de chair et d’acier.

Une évidence se fit rapidement dans l’esprit du jeune homme : il allait devoir en éliminer le plus possible dans le plus court laps de temps. La cacophonie provoquée par ses prouesses avait dû alerter les forces erganiennes, et ainsi les pousser à se mobiliser. Ce qu’il pouvait faire de mieux était donc de gagner du temps et de tuer le plus d’ennemis possible.

Il invoqua le pouvoir de Gaïa et referma l’enceinte de pierres, le piégeant ainsi avec les forces ennemies.

Il en appela à Ursun, son totem, il sentit la fureur bestiale de l’esprit emplir son corps. Il serra fort Gal’Rash dans ses mains calleuses, se focalisant sur le poids de l’arme afin de ne pas être emporté par la fureur guerrière de l’ours. Ses muscles se tendirent brutalement et ses yeux se tintèrent d’une couleur sanguine.

Sans plus de cérémonie Udiir chargea, rugissant comme un ours.

-RRRAAAAAHHHH !

Sa vitesse fut telle que les amazones le perdirent de vue, avant de le voir réapparaître devant elles. Elles eurent tout juste le temps de reculer avant qu’il n’abatte Gal’Rash. La masse d’acier frappa le sol, provoquant une onde de choc surpuissante qui fit mordre la poussière aux deux guerrières.

Balayées par la puissance du coup, elles roulèrent dans la boue jusqu’à rejoindre les rangs de leurs alliés. Udiir ne leur laissa pas le temps de réagir, hurlant de plus belle il plongea la tête la première dans la mêlée.   

Il atterrit au milieu d’une cohorte de démons et d’amazones et incanta.

-RASH’ING BAL’ASH

A ces mots, la foudre éclata tout autour de Udiir et le tonnerre retentit dans un fracas cataclysmique. Tous ceux qui se trouvaient dans le rayon de l’explosion furent désintégrés, une infecte odeur de chair brûlée emplit l’air ambiant.

 

Un démon écarlate aux cornes et à l’armure de plaques noires, qui semblait être un officier, lança un ordre guttural en direction d’un groupe de créatures à l’apparence de chiroptères. Aussitôt ces derniers déployèrent leurs ailes membraneuses et s’envolèrent. Elles espéraient échapper à l’enclos de roche par les airs, mais Udiir avait plus d’un tour dans son sac et elles allaient l’apprendre à leurs dépens.

Il leva les mains, la terre sous ses pieds s’éleva en une colonne de dix mètres de haut. A présent placé à dix mètres au-dessus du sol, Udiir avait une vue parfaite sur les démons chauve-souris. Il en appela au tonnerre et à la foudre, comme sur la montagne la foudre crépita entre ses mains et d’un geste vif il tendit sa paume vers les démons et chanta.

-ZA’LINCH BAL’ASH !!!

Et à ces mots un immense arc électrique jaillit de sa paume et fondit sur les chauves-souris géantes.

La foudre se répandit de démons en démons comme une chaîne, en une seconde une vingtaine de monstres fut grillés. Malheureusement cela ne suffisait pas : plusieurs démons étaient déjà haut dans le ciel.

 

Udiir jura dans sa barbe, il se concentra davantage, leva les bras et clama de toute sa voix vers le ciel :

-Bal’Ash seigneur des tempêtes, j’en appelle à fureur du vent et au feu du ciel !!

Une énorme masse nuageuse sombre se forma et se mit à tournoyer au-dessus de la troupe démoniaque, le tonnerre gronda et des éclairs zébrèrent le ciel. Un vent violent se mit à souffler, puis bientôt se fut une vraie tempête qui secoua le ciel.

Rapidement les démons chiroptères furent incapable de voler correctement tant le vent était violent.

Mais se fut lorsque Udiir abaissa les mains que les choses se gâtèrent vraiment : à peine avait-il fait ce geste, que la foudre se mit à pleuvoir comme la pluie sur le champ de bataille et un véritable typhon se déchaîna dans le ciel.

 

C’était comme si les nuages étaient des balistes et la foudre les projectiles. Les chauves-souris furent presque toutes décimées en un clin d’œil, s’écrasant au sol dans un fracas de poussière et de flammes.

 

Udiir ne pouvait plus rester immobile : les démons qui s’étaient ressaisis, commençaient à l’encercler et à escalader le monticule de terre. Rassemblant toute la rage d’Ursun qui coulait en lui, le chaman se projeta d’un coup de pied dans la horde d’ennemis qui lui faisait face.

 

Udiir enfonça Gal’Rash dans la face de bouc du premier ünbolck qui passait, sa tête explosa comme une pastèque trop mûre.

Une amazone maniant une faux de combat, abattit son arme vers la nuque du guerrier. Il bloqua l’attaque par la hampe de l’arme avant de la briser et d’éventrer sa propriétaire avec la lame.

Udiir enchaîna les assauts de la sorte pendant d’interminables minutes. Les éclairs s’abattaient partout autour du chaman, grillant les démons et les amazones comme des pièces de viande.  Il fracassa un nombre incalculable d’os et de crâne. 

Il balaya une rangée d’amazone en furie d’un revers de marteau foudroyant, incinéra l’estomac d’un démon avec son jet de lave, avant de récidiver avec sa chaîne d’éclairs, mais il en arrivait toujours plus.

Alka enfonça le cercle d’ennemis entourant son maître, la masse de muscles et de griffes pures fonça à la vitesse d’un pur-sang arabe lancé au galop. Amazones, ünbolck et démons furent déchiquetés par les crocs et les griffes de l’immense ursidé.

A présent réunis la bête et le chaman luttaient côte à côte, décimant les troupes ennemies à grand force de griffes, d’éclairs et de jet de lave.

Griffes, cornes et lames envahissaient la moindre parcelle du champ de vision de Udiir. Le jeune chaman suait à grosses gouttes, faisant tournoyer son marteau Gal’Rash il broyait les os de ses ennemis comme du petit bois.

Mais, en dépit de sa force, il devait encaisser certains coups, son équipement neuf souffrait déjà des dégâts du combat. Son plastron était déjà troué en plusieurs endroits. Un démon à la peau pâle armé d’un sceptre jaillit de la mêlée, un sorcier.

Il entonna une mélopée gutturale en levant son bâton en os, la magie se mit à bouillonner autour de lui et l’air se glaça.  Le sorcier planta l’extrémité de son arme dans la boue et aussitôt les pieds de Udiir furent pris dans une épaisse couche de glace.

Profitant de l’immobilité apparente du jeune homme, un minotaure chargea à toute allure comptant bien le transpercer de sa corne. Sans réfléchir, le chaman invoqua le pouvoir du magma. La plante de ses pieds s'enflamma, la glace se changea en vapeur tandis que ses bottes neuves partaient en fumée.

 

Un épais nuage de vapeur d’eau sale engloutit Udiir, le minotaure fut aveuglé quelques secondes par la nuée blanchâtre. Il n’en fallait pas plus à Udiir pour riposter, il se déporta sur la gauche de son adversaire d’un pas tournant. Utilisant l’élan de son mouvement il invoqua la foudre et asséna un puissant coup circulaire.

-BRAH’ZISH BAL’ASH !! 

Le marteau foudroyant fracassa les cornes du monstre avant de lui arracher le crâne et de carboniser le reste. La tête du minotaure s’envola avant de s’écraser dans une flaque de boue. L’odeur de viande brûlée emplit à nouveau le champ de bataille.

Un trio d’ünbolck tenta de prendre le forgeron à revers, mais Alka les cueillit au passage d’un bon coup de griffes.

-ZA’LINCH BAL’ASH !!!

Une nouvelle chaîne de foudre jaillit des mains du chaman, faisant frire une ligne d’ennemis supplémentaire.

Il sentit un pouvoir devenu familier brûler dans son dos. L'amazone qui l'avait chevauché chargea en poussant un cri à réveiller les morts, irradiant de lumière rouge sang. Elle abattit son énorme hache avec la force d'une montagne.

Udiir intercepta la frappe de son adversaire d'un coup de Gal'Rash. Les deux armes s'entrechoquèrent dans un fracas d'acier et d'étincelles. L'amazone enchaîna aussitôt avec une série de taillades tourbillonnantes. Le sourire carnassier qu'elle arborait illustrait la confiance qu'elle avait en sa technique.

Pourtant, Udiir perçut chacun de ses mouvements et esquiva chaque coup de l'enchaînement avec une grande facilité. A présent pieds nus dans la boue du champ de bataille Udiir aurait dû se sentir en mauvaise posture. Mais à la grande surprise de l’amazone, il se mouvait, au contraire avec beaucoup plus d’aisance que lorsqu’il était chaussé.

C’était comme s’il avait un contrôle total du terrain sur lequel il se déplaçait, son esprit savait inconsciemment où placer correctement ses pieds. Son corps et la terre étaient en parfaite symbiose.

La danse guerrière se poursuivit pendant d’interminables secondes. Udiir ripostait coup sur coup, mais l’amazone n’était pas en reste. La hache et le marteau ne cessaient de s’entrechoquer ou de frapper dans le vide. Les deux adversaires se déplaçaient si vite, qu’ils étaient semblables à des silhouettes informes, auréolées respectivement d’une lumière rouge et bleues.

Chaque échange de coups provoquait une série de gerbes d’étincelles, Udiir suait à grosses gouttes il n’allait pas pouvoir tenir longtemps comme ça. Il en appela à la terre :

-RASH’ANGUE GAÏA !!

A ces mots, une onde de choc parcourut le sol qui se fissura à nouveau. L’explosion de propagea sur un large cercle tout autour de Udiir, expulsant l’amazone et les ennemis alentours. Il saisit cette occasion pour reprendre son souffle, ce fut une grave erreur.

Le démon à l’armure noire, qui avait ordonné aux démons chiroptères s'envoler un peu plus tôt, lui fonça dessus et lui asséna un puissant revers de sa hache à double tranchant. La cotte de maille de Udiir se déchira dans un fracas métallique avant qu’il ne soit éjecté contre le mur de roche encerclant le lieu du combat.

Udiir retomba lourdement à genou en vomissant abondamment du sang, il se releva à grand peine. Mais à peine était-il debout, qu’il fut cueilli au ventre par le genou de l’amazone aux cheveux de jais. Son abdomen fut broyé entre le muscle de la guerrière et le mur de pierre. Son marteau lui échappa des mains et sa vue se voila.

Puis un craquement retentit, la paroi de pierre céda en projetant des éclats rocheux en tous sens et Udiir s’écrasa plusieurs dizaines de mètres plus loin dans la boue. Alka jaillit du trou dans la paroi quelques secondes après lui, se précipitant auprès de son camarade en poussant un grognement d’inquiétude.

Le corps de Udiir tout entier le faisait souffrir, son plastron en mailles était en lambeaux et de nombreuses estafilades constellaient à présent son corps à la peau sombre. L’épaisseur particulière de sa peau n’avait que modérément réduit les dégâts, et à présent il se vidait lentement de son sang.  Il se releva à grand peine en s’appuyant sur son amie ursidé et  en tenant à peine debout, il incanta dans un souffle :

-ALANKI AQUOS.

L’eau boueuse du marécage se mit soudain à ondoyer autour de lui avant de s’éclaircir pour enfin venir s’accumuler sur les blessures du chaman comme des compresses liquides. Peu à peu le sang cessa de couler.

Udiir avait invoqué le pouvoir d’Aquos, le seigneur des eaux sources de la vie, afin de se soigner mais cela n’avait pas guéri les blessures plus profondes. La plaie que l’officier démon lui avait fait était encore vive.

Le jeune guerrier ramassa son marteau tandis que les forces ennemies restantes jaillissaient de l’enceinte de roche par la brèche fraîchement ouverte. Alka gratta le sol de ses griffes et poussa un rugissement de défi.

-Tu l’as dit ma grande, répondit Udiir, empoignant avec force le manche de Gal’Rash.

Les deux camarades se campèrent sur leur position, prêts à encaisser le choc. Les démons et les amazones chargeaient, les yeux rouges, assoiffés de sang. C’est alors que deux voix résonnèrent par-dessus le tonnerre et le brouhaha métallique.

        -J’invoque les vents glacés de la toundra !  VENTUM BOREUS !!

        -Que la fureur de Bal’Dar vous condamne ! MALEOUS BAL’DAR !!

 A ces mots un maelstrom de glace balaya la troupe ennemie, puis le ciel nocturne se déchira et une rafale de rayons solaires en jaillit. Les rayons se muèrent  en une myriade de lames composée de lumière pure.

En un clin d’œil les démons et amazones furent gelés par la déferlante de glace puis foudroyés par la lumière sacrée. S’ensuivit une averse de flèches et de sorts de toutes sortes qui mit en pièces les quelques survivants. L’ennemi fut happé par la vague de magie et d’acier dévastatrice, un épais nuage de vapeur et de poussière s’éleva dans les cieux.

Abasourdi Udiir mit quelques secondes avant de comprendre ce qui venait de se produire, le sourire aux lèvres il se retourna. Ses deux sœurs se tenaient face à lui. Kiara portait son armure de plaques, épée et bouclier en main, irradiait de lumière solaire pure. Arya était vêtue de sa tunique de mage de bataille, par-dessus une cotte de mailles, et était armée d’un bâton de mage décoré d’une tête de hibou grand-duc. Les yeux de la jeune femme brillaient encore d’une lumière bleu pâle, tandis qu’une vapeur givrante s’échappait de ses mains.

Udiir voulut saluer ses sœurs en faisant un trait d’esprit, mais il se ravisa aussitôt en voyant le visage de ces dernières. Les deux jeunes femmes affichaient des visages inquiets, et à juste titre : derrière elle se tenait tout une escouade de l’armée erganienne dirigée par la reine Artha en personne, secondée par Loriane à la tête des archers et de Kalishera à celle de la troupe d’aventuriers mercenaires.

-Udiir qu’est-ce que tu fais là ! S’exclama Kiara.

-Eh bien, sauf erreur de ma part je viens d’éviter à vous et vos troupes une mort certaine.

Kiara voulut répliquer avec mordant, mais s’en abstint car elle savait bien que réprimander son frère sur son action aurait été injuste et vide de sens. Udiir avait sans aucun doute sauvé la vie de toutes les forces erganiennes présentes sur le front. Mais il ne devait pas pour autant s’exposer davantage, personne ne pouvait savoir comment les soldats réagiraient en voyant le visage du chaman.

        -Udiir tu dois te…. Commença Arya.

Mais elle n’eut pas le temps de finir, un hurlement inhumain résonna par-delà la brume. Udiir se retourna Gal’Rash en main et Alka rugit à son tour. L’amazone aux cheveux noirs armée de sa hache jaillit du nuage de poussière et de givre, irradiante de son aura rouge sanguine. Elle porta un coup de bas en haut, visant Udiir à la tête. Ce dernier eut tout juste le temps de bloquer le coup à l’aide de son marteau.

Kiara, volant à la rescousse de son frère, chargea la guerrière et la repoussa d'un brutal coup de bouclier. L'amazone encaissa le choc mais Artha accompagna la riposte de sa sœur d'une rafale de piques de glace. L'amazone dut bondir en arrière pour ne pas être criblée de trous.

Elle se retrouvait à présent à dix mètres de Udiir et des deux sœurs. Elle était couverte de sang et de boue. Son corps était marqué de brûlures et de givre qui disparaissaient peu à peu.

Un second grognement se fit entendre et le   démon à l’armure noire surgit à son tour de la brume. Il était couvert de sang et son armure tombait en morceaux. La haine enflamma ses yeux lorsqu’il vit Udiir, toute son opération était partie en fumée à cause de lui et il comptait bien lui faire payer.

        « Toi ! Rugit-il en pointant le chaman de son doigt griffu

        -Qui es-tu par Djinn’Rha !! Comment ? Comment ? 

Udiir garda le silence, la rage du démon s’enflamma de plus belle.

        -Très bien, si tu refuses de parler alors j’arracherais cette information à ton âme lors…

Le démon n'eut pas le temps de finir sa phrase : sa tête cornue fut fauchée par la hache de l’amazone, jusque-là restée impassible, et son cadavre s’effondra lourdement sur le sol.

Tandis que l'amazone débarrassait son arme du sang du démon, Udiir et le reste de l'assemblée restaient pétrifié de surprise. Une fois sa hache nettoyée, l’amazone cracha sur le cadavre du démon et posa à nouveau son regard sur Udiir, ses yeux noirs scrutèrent le chaman de la tête aux pieds. Sur son visage défilaient de multiples émotions, la colère, le désir, le plaisir aussi, du moins ce fut ce que Udiir perçut.

La guerrière à la peau sombre pointa son arme vers le chaman avant de clamer d’une voix puissante sur un ton étrangement calme :

-Toi, guerrier ou sorcier qui que tu sois, j’exige le droit de terminer le duel que nous avons débuté.

Udiir voulu répondre, mais il fut pris de court :

        -Soldats avec moi ! S’exclama Kiara. Mettez-la au fer !

Aussitôt les soldats erganiens se déployèrent, mais avant même d’avoir pu faire deux mètres un cri retentit.

   -RASH’ING BAL’ASH

La foudre s’abattit avec fracas devant l’armée qui fut contrainte de stopper sa manœuvre pour ne pas être carbonisée. Interdits, tous les regards se tournèrent vers l’origine de la voix. Udiir avait fait un pas en avant, marteau en main il irradiait d’électricité.

Puis il ouvrit la bouche et parla d’une voix puissante et inflexible :

-Soldats d’Erganane ceci est un duel à mort, je ne permettrais aucune intervention de votre part, ou de vos commandants. Ajouta-t-il alors que ses yeux bleu-orage se posaient sur Kiara et Arya.

Kiara voulut rétorquer mais elle ne dit rien. Arya quant à elle eut un petit hochement de tête. Elle porta inconsciemment la main au bracelet qu’elle et Kiara portaient. C’était une pièce d’acier finement ouvragée sur laquelle était gravé l’emblème du clan Arginane : une rune d’origine inconnue et un marteau surplombé de deux cornes torsadées, en hommage à Ogun le dieu forgeron.

Tous les membres du clan recevaient ce bracelet lorsqu’ils étaient considérés comme des adultes. L’âge variait entre 19 et 21 ans en fonction des actes réalisés. Arya et Kiara faisaient exception à la règle. En effet après avoir terminé leur formation avec brio à l’académie du royaume, les deux sœurs avaient été confrontées à l’incursion amazone qui avait débouché sur la création de la ligne de front actuelle.

La chevalière sacrée et la magicienne avaient combattu  avec toute la férocité des Arginanes, et elles étaient revenues victorieuses. Lorsqu’elles avaient réclamé leur statut d’adulte au sein du clan, personne n’avait dit non, elles avaient tout juste 17 ans. Leur passage à l’âge adulte avait eu lieu sur un champ de bataille et Arya savait qu’il en serait de même pour son petit frère.

Voyant que ses sœurs et leurs hommes ne comptaient pas interférer dans son duel avec l’amazone, Udiir s’avança et se plaça face à l’amazone. La guerrière affichait un sourire carnassier qui faisait froid dans le dos à tous les soldats qui étaient à portée de vue. Elle prit la parole et d’une voix calme dit :

        -Donc finalement tu sais parler.

        -Exact.

-Mon nom est Marxia Alishera de la tribu Zarakoune.  Me feras tu l’honneur de me dire le tien ? Bel ours.

Udiir marqua une pause puis répondit sur un ton neutre :

        -Udiir, du clan Arginane.

-Et bien excuse-moi, Udiir pour l’intervention de ce porc cornu. Dit l’amazone en désignant du menton le macchabé démoniaque.

-Ce n’est rien.

Tout en parlant, les deux combattants commencèrent à se tourner autour, décrivant un cercle parfait. L’amazone jaugeait le chaman de la tête aux pieds, sa hache raclait le sol, leurs pieds nus s’enfonçaient dans le sol boueux.

        -Me feras tu le plaisir de me montrer ton visage Udiir ? Demanda Marxia.

Udiir ne répondit rien et se mit en garde, Gal’Rash en main. Marxia fronça les sourcils, contrariée par le nouveau silence du chaman.

        -Ça doit vouloir dire non, dit-elle d’un ton déçut

Sur ces paroles elle imita son rival et adopta une posture de combat. Une chape de silence s’abattit sur le champ de bataille marécageux, plus aucun son ne fut produit.

Puis tout à coup un corbeau s’envola, le claquement de ses ailes déchira le silence  et les deux combattants entrèrent en danse. Leur mouvement fut si vif qu’ils devinrent flous pour la majorité du public pendant un court instant avant de réapparaître dans un fracas d’acier et d’étincelles assourdissant.

Le chaman et l’amazone échangeaient les coups de masse et de hache à une vitesse surhumaine, chacun tentant de trouver une faille dans la garde de l’autre sans y parvenir.

Udiir frappait, parait et esquivait sans relâche, il en appelait à toute la rage et l’énergie que les esprits pouvaient lui offrir.  Durant les premières secondes du combat il put tenir le rythme mais cela ne durera pas.

Vive comme l’éclair, l’amazone lança sa hache. L’arme fendit les airs dans un sifflement mortel, le chaman eut tout juste le temps de parer l’attaque. Mais il réalisa à ses dépens que ce n’était qu’une feinte, Marxia auréolée de son aura écarlate si particulière fondit sur Udiir comme un fauve bondissant sur sa proie.

Le genou de la guerrière percuta le visage du chaman de plein fouet, arrachant le foulard voilant le bas de son visage. La vue d’Udiir se voila, le coup l’avait sonné, mais l’amazone n’en avait pas encore terminé avec lui. Elle saisit le buste de son ennemi en tenaille entre ses jambes et bascula tout son poids en arrière. La force centrifuge de Marxia souleva Udiir comme une plume, avant de le plaquer brutalement sur le sol boueux du marécage.

        -Cette fois je te tiens !

S’exclama l’amazone un sourire carnassier aux lèvres, et sans avertissement elle arracha la capuche du chaman dévoilant son visage.

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KuroTori
Posté le 21/05/2020
Alors, par où commencer ? x)
Voilà un sacré chapitre (long surtout xD) mais très bien ! J'ai personnellement bien ressentis la force "magique" (ou mana serait plus adapté ?) et le combat avec l'Amazone était vraiment bien fait, la description des attaques étaient pas mal ainsi qu'une bonne gestion de l'environnement, ça permet de ne pas oublié dans quoi ils ce situent ! On peut bien ressentir les expressions des personnages qui sont vraiment bien géré à mon goût !
Cette fin qui donne aussi envie de savoir la suite, pour connaître comment il va s'en sortir mais comment va réagir l'Amazone... Ca donne sacrément envie de connaître la suite pour le coup ! Vraiment bien joué pour ce chapitre !
Hunter_of_Shado
Posté le 21/05/2020
Merci beaucoup, c'est le chapitre que j'ai pris le plus de plaisir à écrire jusqu'ici :)
KuroTori
Posté le 21/05/2020
Oui, on voit que tu as écris avec le coeur là x))
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