Les statues de la destinée

J’ai fait tout ce chemin, j’ai traversé le désert pour arriver jusqu’ici. J’ai supporté la chaleur et la soif, le froid de la nuit et la solitude, dans le seul et unique but de voir ces lieux. Appuyé sur mon bâton, j’ai continué jusqu’à ne plus sentir mes jambes.

Aujourd’hui, je suis là. Devant ce temple fade dont uniquement trois colonnes subsistent, me laissant un goût amer en bouche. J’ai cru à toutes ses fables. À ces racontars sur l’existence d’un lieu où bascule la destinée.

Vais-je vraiment trouver de l’aide dans ces ruines balayées par le vent et le sable ? Je m’approche parce que je n’ai plus que ça à faire. Plus je suis près, plus je crois entendre des voix souffler mon nom à mon oreille. Cela ne fait que m’exaspérer encore plus. Cela dit, je n’ouvre pas la bouche, j’avance et c’est tout.

Devant la plus haute colonne, je lève la tête, la main sur le front pour me protéger du soleil. Dois-je faire une offrande ? Je dépose sur le sable le reste de ma nourriture. De toute façon, je ne pourrais plus faire marche arrière, alors autant aller jusqu’au bout.

Malsan est venu ici, il a obtenu une épée qui lui a permis de terrasser le mal. Il a pu sauver son pays puis devenir un roi respecté. Le temple a été son libérateur et a fait sa renommée.

Varlo est venu en ces lieux pour chercher la gloire. On raconte qu’un serpent géant l’a engloutie.

Et moi ? Que va-t-il m’arriver ?

Je guette les statues sur les colonnes comme si elles pouvaient m’apporter la réponse pour mon futur. Rien ne vient. Je ne bouge pourtant pas. On ne sait jamais. Peut-être faut-il montrer sa détermination ?

– Salis…

À nouveau, j’entends qu’on murmure mon prénom. Je ferme les yeux afin de chuchoter une vague prière protectrice. J’avoue ne pas y croire, mais je veux mettre toutes les chances de mon côté.

– Pourquoi es-tu ici ?

Pourquoi ? Parce que j’ai eu le malheur de dire que je viendrais, sûrement.

– Parce que mon peuple souffre et que je veux lui rendre le sourire. Je veux que les gens puissent être heureux.

Je ne parle pas des combats contre ceux qui nous oppressent. À la vérité, me battre me terrifie. J’aimerais trouver une solution qui contente tout le monde.

– Qu’es-tu prêt à donner pour obtenir un présent ?

Mon regard se tourne vers la nourriture à mes pieds. Je me sens gêné. C’est tout ce que j’ai.

– Tout ce que j’ai pour me nourrir.

Aucune réponse ne me parvient. Dans un silence de mort, j’attends. J’imagine déjà le serpent fondre sur moi, après que j’ai commis un affront. J’espère que ma fin ne sera pas trop douloureuse. Les battements de mon cœur résonnent à mes oreilles.

Brusquement de la bouche de l’une des statues sort une multitude d’oiseaux. Leurs plumes colorées ressortent encore plus sur les tons beiges et jaunes du paysage. Je les fixe alors qu’ils volent un peu partout dans le ciel.

– Voilà ton présent.

Au sol, la nourriture à disparu.

J’ai levé la tête, ils étaient tous là comme s’ils attendaient mes ordres. J’ai soupiré… Qu’est-ce que je vais faire avec une armée de volatile ?