Chapitre 5 - 20 décembre 2024

K-World - 20 décembre 2024 14:17 (heure GTM+9)

Hiewon annonce ses fiançailles en ligne !

Une semaine seulement après notre grande révélation, Hiewon annonce publiquement, sur son compte Instagram, ses fiançailles avec le mystérieux inconnu de UJC Entertainment : Kim Young, fils du PDG actuel de la firme !

On ne chôme pas dans le show-business, on dirait.

Affaire à suivre !

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Mon regard reste rivé sur mon téléphone.

Pourquoi ne sont ce que les informations sur ces médias idiots où j'arrive à glaner des nouvelles de Hiewon ?

Presque une semaine sans que je n'ai plus aucun message d'elle et sa vie est déjà bien mouvementée. Elle glisse à travers les articles racoleurs pour ne montrer que le meilleur d'elle.

Sur la photographie de l'article, je la vois heureuse, pleine de vie, le bras accroché à cet homme bien plus vieux que moi. Comment a-t-elle fait...

Combien de temps a-t-elle jonglé entre deux relations pour voir laquelle était la meilleure pour elle ? Une chose est sûre, ce n'était pas moi, son idéal. Je me demande si je serai de nouveau l'idéal de quelqu'un.

Le public entre dans le studio d'enregistrement de la chaîne TV. Je pense qu'ils sont en tout deux ou trois cents, peut être.

Bien organisé par rangées aérées (habitude post-covid que nous risquons de garder quelques années encore), le public est varié en âge et en genre.

Quelques têtes curieuses sont dirigées vers la scène centrale, où nous allons performer au fil de l'émission. Des sourires apparaissent lorsqu'ils nous aperçoivent vers les coulisses. Je préfère battre en retrait et retourne auprès des autres artistes.

Des hochements de tête et sourires polis saluent mes contemporains, lorsqu'ils me croisent. Pour les têtes les plus familières, je viens à leur rencontre et demande de leurs nouvelles. Je ne leur laisse pas le temps de me répondre pour me demander comment je vais. Je préfère soigneusement éviter le sujet, le cœur battant de manière erratique dans ma poitrine. 

Mains croisées sur mes cuisses, je reste assis à ma place, devant le miroir. La maquilleuse est déjà passée, mais je n'ai pas jugé bon de bouger. J'ai le trac. Comme lors de mes premiers concerts. Je n'ai jamais eu ce type de trac là depuis très longtemps... Être angoissé et faire quelques rituels pour me calmer : je dirais bien que je ne connais aucun artiste qui n'ait ses petites habitudes pour gérer le trac. Là, je suis figé, le souffle court, le cœur tambourinant dans mes oreilles et ma gorge. Qu'est-ce qui me fait si peur ?

Ha-Rin s'approche de moi.

Trois heures que nous sommes arrivés et je ne l'ai pas vu. Traversant de droite à gauche les couloirs des studios, je suppose qu'elle fait fonctionner son réseau : quand je me contente d'être poli, elle tisse sa toile. Est-ce qu'il s'agirait d'un contrat, d'un partenariat, d'un featuring, qui tombera dans son piège prochainement ? 

"Tu es sûr pour l'émission, Ji-Hun ? T'es pâle." Observe calmement la jeune femme.

Un étranger croise mon regard. Les yeux injectés de sang, le teint pâle qui ressort particulièrement avec les cheveux noirs, il n'est pas beau à voir. De quoi aurait-il l'air s'il n'avait pas ce maquillage sur la figure ? Un clown.

"J'ai le trac," suggéré-je en souriant un peu.

- Si y'a bien une excuse que tu m'as jamais sortie, c'est bien ça." Grince-t-elle entre ses dents. "Tout le monde comprendra si tu dois t'arrêter. Tu ne t'es posé que deux jours. Tu as peut-être trop tiré sur la corde, tu penses pas ?

- Mais non. Puis je danserai pas, là."

Elle glisse sa main dans mes cheveux et touche le pansement camouflé derrière la masse supérieure de cheveux. L'arrière du crâne est quant à lui tondu, en dégradé. Le pansement qui recouvre ma blessure m'a fait passer à la tonte à l'hôpital : heureusement que le coiffeur a rattrapé cette horreur. 

"Ça fait un pansement sexy."

Ha-Rin rigole un peu, se cachant la bouche.

"Y'a que les adolescentes pour trouver des pansements sexy.

- Détrompe-toi. Je suis sûr que le style plait..."

Elle continue de me sourire, mais la commissure de ses lèvres s'est tout de même légèrement détendue. Pensive, elle finit par dire : "J'ai demandé à ce qu'on n'aborde pas le sujet de Hiewon ni celui de ton hospitalisation. Mais, ton pansement, tout le monde le verra. Tu es ok avec ça ?

- On y peut rien."

Hochement de tête. 

Quelques techniciens viennent régler les micros, caché sous mes vêtements. Une petite boule dépasse de mon col, je souffle dedans et rigole en voyant l'un d'entre eux se crisper, la main se portant à son oreillette. Il gémit : "Ça marche..."

Je m'excuse tout en continuant de sourire. Les deux garçons passent d'une personne à l'autre, terminant les derniers réglages sonores. Cet après-midi, j'ai pu répéter le numéro sur la scène, plusieurs fois, sans anicroches. Les jours précédents, j'ai davantage exercée ma voix, encore fatiguée de la petite épreuve hospitalière qu'elle a enduré. 

C'est au tour du réalisateur de venir nous chercher. Nous montons enfin sur le plateau de télévision, où trois rangées de sièges à étage nous attendent. L'homme nous place : je me retrouve sur la rangée supérieure, entre le vide et la chanteuse Park Dambi. J'opine en la voyant, puis me courbe un petit peu. Je fais attention à ce qu'elle ait assez de place.

Quelques discussions dans le public augmentent alors que nous nous plaçons. Sacré palmarès qu'ils ont réunis, les producteurs. J'aurai assez peu de temps d'écran, ce n'est pas si mal. Souris, répond honnêtement et n'oublie pas les paroles. Surtout, oublie cette vilaine douleur qui ronge ton ventre, Ji. 

"HELLO YOUTH commence dans 15 minutes," crie le réalisateur en direction du public.

Celui-ci subit à son tour un petit échauffement. Répétition pour les applaudissements et autres joyeusetés. Les règles primaires sont rappelées.

La suite se passe comme dans un rêve. Comme si j'étais là sans vraiment l'être. 

Je ne saurai pas vraiment l'expliquer. Comment expliquer quelque chose que l'on ne comprend pas ? Pour la première fois de ma vie, j'ai l'impression que les événements se déroulent comme si je n'étais pas là. Qu'un simple spectateur. Je sais que je suis présent et applaudis aux blagues, souris lorsque les autres rient, observe les artistes à qui l'on tend le micro. 

Pourquoi ai-je si mal à la tête ?

L'émission est longue, au moins deux heures et demie de show, peut-être trois. Des quizz, interviews et mini-jeux rythment le programme. Puis, de temps à autre, les artistes se dévoilent sur scène. Des prestations de chant, de danse, parfois des deux. Je me sens revivre lorsque je les admire réaliser tout ça. Comment pourrais-je faire autre chose de ma vie ?

On m'annonce. Les deux présentateurs se tournent vers moi, souriants, me présentant :

"Pour la prochaine chanson, Ji va nous interpréter Tomorrow !"

Le public applaudit. Je souris aux présentateurs et saute de mon emplacement, me dirigeant vers eux. Un petit mouvement de la main salut le public, je me positionne devant le micro, vérifie d'un coup d'œil qu'il est bien branché, que je suis bien positionné au milieu de la scène, sur la discrète croix en duck-tape. 

"Alors, remis en forme pour ce soir ?" Commence l'autre présentateur. J'opine : "Tout à fait. Rien à signaler."

Que puis-je bien dire de plus ? Je garde le sourire. Les projecteurs s'éteignent, d'autres s'allument d'une lumière tamisée en ma direction. Le retour écran de la caméra me dévoile les milliers de LED dans mon dos qui forment des étincelles dorées. Elles s'harmonisent avec mon costume, un trois-pièce asymétrique au niveau des manches, brodés de sequins d'or. 

J'inspire. Expire.

L'instrumentale se lance et je peux enfin devenir moi-même.

Comme un poème que l'on récite sans ne plus penser au sens, mais en ne ressentant simplement que les mots, je chante sans douter. Mon souffle est calme, mes mouvements calculés. Mon regard traverse le public avec une émotion que je ne peux feindre. Qu'il est simple d'ainsi se dévoiler : la danse n'empêchant pas ma respiration d'être plus hasardeuse, je peux forcer sur ma voix. Des notes haut perché sont atteintes, je suis fier de moi.

Je baisse ma main, l'instrumentale se calme, puis se tait.

J'expire. Inspire.

Les spots lumineux se rallument et le public se lève, comme ils l'ont fait pour les autres prestations, pour saluer la performance. Je ne peux pas m'empêcher de sourire, tourner la tête vers le plateau. 

Alors que je m'apprête à revenir à ma place, le présentateur me rattrape par le bras :

"Tt tt tt, jeune homme. À votre tour de passer sur la table. 

- Oh, j'ai cru que je pouvais y échapper," réponds-je avec un sourire en coin au présentateur.

Ils se mettent à rire et l'autre fait un signe de main vers les invités : "Park Dambi, ne soyez pas timide ! Vous passez également !"

Oh, je ferai le mini-jeu avec elle. Je me pousse un peu pour la laisser venir à mes côtés, devant la table qu'ils utilisent pour faire les mini-jeux. Le temps de ma performance, des techniciens y ont installé une large boite en carton blanc. Je crois que l'on peut l'ouvrir la faisant glisser par le haut :

"Qu'est-ce que vous allez nous faire ?" demande Park Dambi, intriguée par la boite qu'elle scrute en s'y penchant.

"Ouvrez, et vous verrez."

Dambi et moi échangeons un regard, nous ouvrons à quatre mains l'objet. Un tas d'enveloppes blanches scellées s'y trouvent. Dambi croise le regard vers des présentateurs et du public, interrogée.

Ils expliquent les règles.

Je crois qu'ils ont parlé d'imitation, ou de quelque chose dans le genre. Le système de point, je ne l'ai pas compris. Je sais simplement que nous allons devoir refaire des scènes de films connus à deux pour faire gagner des points si nous arrivons à le faire efficacement.

Les détails, ils ne se sont pas imprimés dans mon esprit.

Mon regard reste figé sur les enveloppes. Je déglutis difficilement.

Je ne pourrais jamais les prendre. Pourquoi ont-ils choisi de faire ça ? Ca me fâche presque, une peur et une colère inexplicable qui me broie les entrailles. 

Mon nom est évoqué.

Je redresse le regard et sourit par réflexe aux présentateurs : "Quelle est la première étape, maintenant ?

- Piochez votre premier défi."

Nous hochons la tête avec Dambi, le présentateur m'incite à commencer. Je tends la main vers le tas d'enveloppe. La sueur froide me brûle les tempes, le sol se délite sous mes pieds et fait trembler mes jambes. J'arrive à rationaliser à l'oral : "Ah, je ne sais pas laquelle prendre... J'ai jamais de chance !"

Ils rient.

Dambi me pousse un petit peu, main sur mon épaule, l'autre qui secoue le petit tas et pioche une enveloppe. Elle me sourit et ouvre devant moi l'enveloppe. Un soupir d'effroi de ma part. La chanteuse ne peut s'empêcher de rire et montre, à la caméra qui nous fixait, le défi.

Bien, nous devons imiter un Disney. La scène où Scar commet le fratricide qui a brisé tant de cœurs juvéniles. Dambi hoche la tête, imitant une cicatrice le long de son visage, puis se pointe elle-même. Okay, elle fera Scar.

"Pas de paroles, attention." Prévient l'un des présentateurs.

La jeune femme hésite, remonte par réflexe la bretelle de sa robe, tente une pose pour imiter les griffes d'un lion. Une idée me vient, je me roule alors par terre et me met à genoux devant elle, l'air suppliant. Un sourire radieux me répond, puis elle s'agrippe à mes poignets en montrant sa longue manucure dans ma peau. Ce n'est pas très difficile de prendre un air totalement décontenancé, entre quelques rugissements de lion mal imités (les onomatopées, on a le droit). 

Les invités prennent la parole en criant, sûr de reconnaitre la scène. 

Ils trouvent la bonne réponse, je me redresse et essuie rapidement mes genoux. 

La petite comédie recommence trois autres fois : Dambi pioche une enveloppe, la dévoile et nous nous amusons devant les caméras. Mine de rien, elle n'hésite pas à se mettre en scène pour que le mime fonctionne. Je l'imaginais plus prude, et finalement, je trouve ça amusant. 

Je crois que mon imitation à plat-ventre de la sirène va tourner un peu en ligne. Tant pis. Elle m'aura permise de ne plus penser à mes crampes...

Nous retournons à nos emplacements. L'émission continue et se termine en un clin d'œil. 

Les présentateurs nous remercient, je passe le regard vers le public. D'un pas nonchalant, je me glisse en dehors du plateau pour me rapprocher du public et des spectateurs qui n'ont pas encore eu le temps de partir. Quelques agents de sécurité m'encadrent sans que je n'ai besoin de leur demander ; je salue quelques personnes et serre des mains. 

Qui parmi eux a pu bien envoyer le courrier ?

Je me fige en observant la main de la jeune fille que je saluais.

Comment puis-je penser une telle chose devant ce regard ravi ?

Un groupe d'adolescente a pu m'apercevoir au loin, a fait marche arrière et me demande une photo. Est-ce que l'une d'entre elles a pu faire cette vilaine blague ? Nous prenons une photo de groupe.

"Je dois y aller maintenant." Dis-je simplement, un dernier sourire en leur direction.

Ha-Rin m'attend dans les coulisses, me fous une lingette pour bébé dans le nez. Elle pense à tout : qu'on m'enlève ces couches de maquillage de ma peau, et vite !

Je me débarbouille en me rasseyant au siège qui m'a été attribué. Elle masse mes épaules sans me demander mon avis. Petit rituel commun : ça la détend de malaxer quelque chose, ça me détend de me faire masser. J'écoute d'une seule oreille le compte rendu de l'émission et ses impressions. 

On se racle la gorge à mes côtés et l'on s'assied à un siège non attribué. Le téléphone de Ha-Rin sonne, elle file.

Park Dambi, à mes côtés, me détaille du regard. Un technicien l'a suivi pour l'aider à enlever son micro, elle l'ignore comme s'il n'existait pas (l'aidant tout de même en bougeant ses bras comme il le faut) et s'adresse d'un ton bas :

"Ji, est-ce que ça va ? Je ne veux pas paraitre intrusive ou quoi. Mais, j'ai l'impression que ça allait moyen."

Je cligne des yeux et lui sourit poliment. Le technicien passe à mon cas et réussit à extraire le micro rapidement, pour s'en aller. Toujours sur le ton de la confidence, je cherche à la rassurer :

"J'ai peut-être un peu forcé ces jours-ci, je dois être fatigué. Ça se voyait tant que ça ?

- Non..." Elle secoue la tête en soupirant : "Ce n'est pas ça que je veux dire. Je parle de... la lettre."

Moment de flottement.

"Ji, j'ai reçu un colis piégé au début de l'année, je ne sais pas si tu es au courant ? Lorsque je l'ai vu, l'en ai parlé à mon équipe qui a pris le relai... Ça m'a beaucoup inquiété."

Je ne sais pas trop quoi lui répondre. Je n'ai pas envie de parler de ça. Pourquoi me parle-t-elle comme si nous nous connaissions depuis toujours, alors que je l'ai rencontré il y a quatre heures à peine ?

"...Même si je n'ai pas vraiment été en danger, ça m'a effrayé. Et j'en ai parlé.

- C'est... bien ? Excuse-moi Dambi je ne sais pas trop où tu veux en venir. L'incident est terminé, je n'ai pas été... été... empoisonné."

Je porte la main à l'arrière de la tête. Elle grimace :

"J'ai eu de l'aide. Un psychologue. J'ai pu en parler tu sais. Ils prennent des rendez-vous en ligne, depuis le covid. C'est plus simple, t'es chez toi, en anonyme. Personne en saura rien... Et je suis sûre que ça te ferait du bien.

- D'accord...  D'accord j'y penserai. Mais, j'aimerais qu'on arrête de parler de ça, si ça te convient."

Ma réponse ne lui plait pas, pourtant, elle n'insiste pas davantage. Une caresse effleure mon épaule, elle se redresse et arrive à sourire une dernière fois :

"Au fait, j'ai hâte de te voir dans TLDS. J'ai adoré les romans. T'as intérêt à pas rater mon perso préféré, hm ?"

Qu'est-ce qu'elles ont toutes à me foutre la pression avec leur livre ! Je ne peux pas m'empêcher de rire aux éclats. La jeune femme s'en va enfin, après un clin d'œil, rejoindre son équipe et les quatre molosses qui lui servent de garde du corps. 

En attendant Ha-Rin, je pianote sur mon portable. 

D'abord, un petit message à ma mère. Elle sera contente d'apprendre que l'émission est retransmise dans une semaine, le 27.

Ensuite, je passe rapidement sur le serveur discord :

 

🌒Dal🌘 - 00:38

Je fais que passer, bonne nuit (ou journée) à tous. Je suis claqué 😩

Tama - 00:40

Bonne nuit 🌝

LightBreeze - 00:44

Bonne nuit 😏

 

En message privé, je reçois un :

🌸🌿 Hana (she/her) - 00:41

Bonne nuit Dal

🌸🌿 Hana (she/her) - 00:41

Même si t'as dû reprendre le travail, oublie pas de prendre soin de toi

🌸🌿 Hana (she/her) - 00:42

Tchu

🌒Dal🌘 - 00:44

Merci Flora

 

Ce qu'elle est étrange, à dire autant de mots doux.

Pourtant, je crois que j'apprécie bien. Une attention désintéressée, je ne dis jamais non...

 

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