💍 29. Regagner ce qui fut perdu 💍

Un regard complice. Un sourire timide. Une complicité silencieuse. Voilà tout ce que cela prenait à Joséphine et Jonah pour indirectement et naturellement faire un pas l'un vers l'autre. Cela ne faisait que deux jours et pourtant, Joséphine ne put s'empêcher de repenser à cette après-midi, aux mots qu'elle a eu, à la colère qu'elle a ressentie et bien que rien de tout cela ne semble s'être subitement effacé, elle reconnu en elle un profond soulagement. De le voir ici et là se tenant juste devant elle. Une part d'elle se languissait de leurs discussions, de leurs promenades. De leurs moments passés ensemble. Une part d'elle se languissait de cet homme sans comprendre pourquoi ni comment il pouvait à ce point-là lui manquer.

S'apprêtant à lui adresser quelques paroles de politesse ou tout du moins d'amitié, si cette dernière avait survécu, le jeune homme vient lui couper l'herbe sous le pied, lui proposant de prendre son bras et de marcher. Ensemble.

- Me feriez-vous cet honneur ? S'il vous plaît ?

- Avec joie.

Donnant pour instruction à Maximilien et Ninon de s'éloigner, ces derniers ne se firent guère prier pour s'exécuter. Fiers d'eux, ils prirent aussitôt la poudre d'escampette, laissant aux deux jeunes gens tout le loisir de se retrouver et peut-être aussi de renouer.

- J'aimerais m'excuser, Joséphine, pour mon comportement, sort soudain le Duc en la regardant tendrement, Il est vrai que je n'ai nullement pris en compte vos sentiments et j'ai ainsi agis comme je l'entendais. Je ne regrette pas ma décision, sachez-le et je ne m'excuserais pas de celle-ci, mais j'ai eu les dernières heures pour longuement réfléchir et je tiens à dire qu'il est fort probable que la situation ait pu être réglée d'une autre manière.

- Pourquoi êtes-vous toujours celui qui s'excuse alors que je persiste à être celle qui vous blesse ? lance alors la jeune femme en arrêtant la marche et en plongeant son regard dans le sien, Depuis le début j'agis avec une grande...

- Impulsivité ? rit-il

- Nous pouvons dire cela, oui. J'agis avec une grande impulsivité, mais aussi avec une grande fierté. Vous devriez l'avoir compris maintenant, mais j'ai tendance à croire que ma seule force suffit pour régler mes problèmes. Cela me pousse à refouler toute aide que l'on m'apporte car...pour être honnête, je n'ai pas l'habitude de me reposer sur qui que ce soit. En outre, vous avez pu constater que je ne brille pas dans les cercles sociaux, je n'ai donc guère d'amis et pour avoir... et pour être toujours sujette aux moqueries de la bonne société, je n'accorde généralement pas ma confiance à la première personne venue. Je sais que cela ne justifie en rien l'horrible attitude que j'ai eu à votre égard et je prie pour que vous me pardonniez, mais...

- Je pense que l'un comme l'autre avons encore beaucoup à apprendre, la coupe le Duc, Mais vous avez raison sur un point : Je ne devrais pas me mêler de ce qui ne me regarde pas. J'ai outrepassé certaines limites et cela n'est pas convenable. Je vous prie de croire qu'une telle chose ne se reproduira pas. Jamais.

Il y avait quelque chose de blessant dans ses mots. Quelque chose d'invisible qui vient heurter la sensibilité de Joséphine. C'était là tout ce qu'elle désirait alors pourquoi l'entendre lui faisait-il aussi mal ? Pourquoi n'aimerait-elle pas qu'il s'éloigne de sa vie de famille alors qu'elle l'a silencieusement souhaité ? Peut-être parce que cela voudrait dire pour la jeune demoiselle que voici, qu'un mur invisible est en train de se dresser entre eux. Un mur que le Duc avait eu grande peine à faire s'affaisser.

Voyant son visage contrarié, ce dernier s'arrête justement pour observer l'émotion naissante sur les traits de sa compagne de promenade.

- Joséphine ?

- Je vous prie de m'excuser, pendant un instant je...

Incapable de finir sa phrase, voilà que Joséphine se retrouve de nouveau assaillit par les larmes. Ce fut comme si ces dernières avaient leur propre volonté et s'écoulaient en un flot qui ne semblait guère s'arrêter.

Ne sachant ni quoi dire ni comment réagir, le jeune Duc se retrouve à court de moyens tandis que son seul réflexe consiste à lui tendre un mouchoir dont elle se saisit sans hésitation.

- Vous ai-je offensée d'une quelconque façon que ce soit ? s'informe ce dernier en se rapprochant d'elle tandis que les passants les plus curieux commencent à marquer un arrêt autour d'eux

- Non, lui répond-t-elle d'une voix fébrile en se mouchant, Disons seulement que je viens de réaliser une bien triste chose.

- Qu'est-ce donc si ce n'est pas trop indiscret ?

- Nous ne sommes pas amis, n'est-ce pas ? Ceci n'est pas véritablement une question bien entendu.

- Pourquoi dites-vous cela ? Je dois bien admettre que vos propos me rende confus. Je pensais que c'était votre souhait ? Vous m'avez dit que...balbutine le jeune homme

- Votre Excellence, souffle Joséphine, Sachez que je dis beaucoup de choses et que parfois, mes mots dépassent ma pensée. Par exemple si je vous disais «Sautez par dessus le pont» le feriez-vous ? Je ne pense pas. Donc je ne tiens pas à être écoutée à chaque fois.

- Cela dépend. Avez-vous l'habitude que l'on ne vous écoute pas plutôt ? Si cela est votre souhait, je sauterais. Si cela me permet de gagner votre estime et votre amitié, je sauterais sans hésiter.

- Vous n'êtes pas sérieux, soupire Joséphine en le dévisageant

- Et vous ? L'êtes-vous ?

La dévisageant avec un léger sourire amusé, ce dernier déboutonne sa veste qui lui confie avant de se précipiter avec un léger élan, plongeant devant les yeux ébahis et la plus grande des surprises. Joséphine s'attendait à beaucoup de choses, mais certainement pas à ça. Elle le vit plonger sans une once d'hésitation et tandis que son esprit prit un petit moment pour comprendre et accepter ce qu'il venait de se passer devant elle, cette dernière se précipita de descendre au bord de la rivière. Les quelques marches qui la séparait du bord de cette dernière fut pour elle un enfer tandis qu'elle revit les policiers venus chez elle. Tandis qu'elle entendit de nouveau leurs mots. L'annonce. La lente descente aux enfers. La douleur du départ. Le chagrin de la mort.

Scandant son nom, cette dernière n'eut aucune réponse, si ce n'est quelques instants plus tard, alors sur ses genoux, une tête sortie de l'eau tout sourire, les cheveux plaqués en arrière et la chemise collée au torse trempé.

Voyant la détresse de son visage, mais également la furie dans ses yeux, le Duc prenant appuie sur le rebord, sortit immédiatement de l'eau, prenant la jeune femme noyée dans sa détresse, dans ses bras.

- Je suis désolé, ne cesse-t-il de lui répéter, Je suis sincèrement désolé.

- Vous êtes un idiot !

- Oui, c'est certain.

- Vous ne vous imaginez pas un instant la peur que j'ai eu !

Attendant que sa colère passe, ce dernier s'écarte avec un tendre sourire au bord des lèvres tandis que Joséphine ne cesse de le foudroyer du regard.

- Votre numéro de charme ne prendra pas avec moi ! Vous êtes...

- Incroyablement brave ?

- Idiot !

Pendant un instant, Joséphine marque un arrêt et abaisse ses yeux tandis qu'elle réalise petit à petit qu'il n'est finalement plus le seul à être mouillé.

- Je vous déteste, dit-elle en prenant grand soin de croiser les bras pour dissimuler la partie mouillée de sa robe.

- Me détestez-vous vraiment ?

- J'aimais cette robe, boude-t-elle.

- Et moi j'aimais particulièrement ma tenue du jour pourtant regardez-moi...

Effectivement, il égouttait de la tête aux pieds.

- Dites-moi au moins que j'ai regagné votre amitié, lui demande-t-il en lui prenant la main pour l'aider à se relever.

- Est-ce vraiment le moment de parler de ça ? Enfilez votre veste, vous risquez de tomber malade si vous restez dans un tel état.

- Vous n'avez pas répondu à ma question.

- Où sont partis Ninon et votre conseiller ? Au moment où nous avons besoin d'eux...

- Joséphine, insiste Jonah en retenant sa main alors qu'elle s'apprêtait à s'éloigner.

Se retournant vers ce dernier attendant une réponse, Joséphine comprit qu'elle n'aurait avec lui aucun moment de répits et pourtant, voilà qu'en quelques instants en sa compagnie, tous ses problèmes semblaient s'être envolés. Il avait avec elle, ce don là. Celui de l'apaiser, de la réconforter et de teinter son monde de couleurs alors que pour elle tout n'était que noir ou blanc.

- Bien ! se résigne-t-elle, Vous avez mon amitié. Satisfait ? Maintenant rentrons je vous prie.

- Si, par le plus grand des hasards, je venais à tomber malade, prendrez-vous soin de moi ? s'inquiète le Duc

- Je n'ai aucune raison de le faire. En outre, je suis certaine que vous avez des médecins très compétents à votre disposition.

- Malheureusement, je risque d'être souffrant d'ici la fin de semaine, continue-t-il sur sa lancée toujours aussi amusé.

- Il vous faudra vous débrouiller sans moi car d'ici la fin de semaine, je serais partie.

S'apprêtant de nouveau à s'en aller, le Duc ressert sa poigne sur sa main qu'il retient tandis que son sourire enfantin s'efface pour arborer un regard dès plus sérieux.

- Partie ? Vous en allez-vous ? lui demande-t-il tristement.

- En effet.

Posant son regard sur la main qui la retenait, Joséphine remonte délicatement ses yeux jusqu'à croiser ceux du Duc et lui dit alors de but en blanc.

- Rien ne semble être en mesure de me retenir ici.

 

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