11. Éirinn Bran

Dimitri gérait le bar pour elle depuis maintenant plusieurs jours. Elle se sentait à bout de force et nauséeuse. Peut-être couvait-elle quelque chose. Qui sait, avec tous ces microbes qui traînent dans l’air…

Caïn, absorbé par son travail, fut dérangé par un gémissement de sa petite sœur. Agacé, il quitta brièvement des yeux l’écran de son ordinateur portable.

— Souffre en silence, s’il te plaît.

— Je ne te souhaite qu’une chose, cher frère, c’est qu’un jour, tu te retrouves à ma place, siffla-t-elle.

Il sourit.

— Je ne suis pas comme toi, moi. Je ne tire jamais sur la corde.

Éirinn s’enfonça un peu plus dans le canapé sur lequel elle était allongée, l’air renfrogné.

— Je n’ai pas eu le choix.

— Bien sûr, soupira Caïn, sarcastique.

Il n’y eut aucun bruit dès lors, si ce n’était que le son du clavier martelé.

— Tu écris un roman, ma parole ! plaisanta Éirinn.

— J’ai un rapport à rédiger. Ne crois pas que je m’amuse, lui répondit son frère.

Caïn était professeur d’histoire-géographie dans un collège. Récemment, un de ses élèves avait fait une grosse bêtise, ce qui lui avait valu une exclusion.

— Vraiment, je ne comprends pas pourquoi tu as choisi ce métier. J’admire la patience que tu as pour supporter ces mioches.

— Gérer des gosses, c’est rien. J’ai choisi la facilité. Je suis un prof exécrable mais bizarrement, ils m’aiment bien.

— C’est vrai ? s’étonna-t-elle. Pourquoi ? Je ne vois pas ce qu’ils peuvent te trouver.

— Ils aiment ma façon de raconter l’Histoire, expliqua-t-il avec un sourire en coin. Et puis, tu sais que j’ai toujours eu une autorité naturelle.

Éirinn sourit à son tour.

— Tu devrais sortir, suggéra Caïn pour changer de sujet. Tu en as besoin.

Elle baragouina quelque chose du fond de son canapé. Elle refusait de croire une seconde que son frère s’inquiétait pour elle.

— T’as qu’à voir tes amis, là. T’es pas allée chez l’un d’eux, une fois ?

— Si. Mais je ne veux pas les voir, décréta-t-elle.

— Ah oui ? Pourtant tu en as vu un, l’autre jour.

— C’est lui qui est venu à la maison, je te rappelle. Tu étais là. Et n’insiste pas, je n’irai pas les voir. Et puis, je te signale qu’un cadavre a été retrouvé devant le Sangtuaire. Je ne dois pas faire de vagues.

— T’es trop conne de faire ça. Les flics te suspectent et toi, tu décides de faire profil bas. Tu ne fais que confirmer leurs doutes.

— Non, si les meurtres continuent, ça prouvera bien que ce n’est pas moi. Tu es idiot de me faire une telle proposition. Tu sais très bien que je n’y suis pour rien.

Ils échangèrent un regard entendu.

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