Vince 1

Notes de l’auteur : Ô toi qui je l'espère me liras et ne me tiendras pas rigueur de mes faiblesses de construction narrative, sache que mon but n'est autre que te distraire, que la folie d'un seul homme sous-tend toute l'histoire en ce qu'il la restitue par le prisme de sa pensée. Si tu entres dans cet univers, tends la main et laisse-toi guider pour. ton plaisir, je l'espère. Je précise néanmoins que certains passages peuvent éventuellement te choquer. Te voilà prévenu...

Mes Amis m’appellent vince…                                                                                                                                                               Ou la nuit du Proctologue…                                                                                                        

Une enquête de Vincent DAVID

 

 

Au moment où débute ce récit dont les péripéties et multiples rebondissements vous laisseront sans voix, contés par un narrateur hors-pair, qui n’est autre que moi-même, la criminalité avait effectué un bond prodigieux dans notre beau pays si étrangement gouverné, en raison d’une brutale paupérisation d’une frange non négligeable de la population, laquelle jusque-là avait été plus ou moins épargnée. L’instabilité sociale est mère du désordre, comme chacun sait.  Et nous, les flics, sommes parmi les premiers à en mesurer les conséquences. Nous accomplissions tous beaucoup d’heures supplémentaires défiscalisées dans la mesure où on ne nous les payait pas. Les ministres qui s’étaient succédé nous avaient tous promis beaucoup de travail et des hausses salariales conséquentes. Ces maroquins n’avaient finalement menti qu’à moitié. Nous avions beaucoup de travail.

 

Ce soir-là j’étais au poste quand un criminel fit une entrée bruyante, escorté par quelques-uns de mes collègues, fatigués et sur les nerfs, de sorte qu’ils décidèrent de me confier l’interrogatoire de ce louche individu.

En cette période agitée, où les valeurs régaliennes de notre République se trouvaient singulièrement chahutées, ce méprisable personnage avait tenté avec d’autres larrons du même acabit de cambrioler la banque du Centre, pénétrant par effraction dans l’agence avec, tel un puissant phallus métallique, leur véhicule renforcé, après avoir pulvérisé le sas de protection.

Je me dois de signaler qu’auparavant, ces bandits, manifestement pris de boisson, avaient roulé sur une infortunée vieillarde, que promenait son chien, un superbe loulou de Poméranie noir, aux boucles brillantes qu’agrémentait un habit de laine fuchsia.

Pour l’heure, il convenait d’obtenir le nom des complices du malfaisant personnage, bien loin de la rédemption. Cet homme toisait d’un air provoquant les policiers qui l’entouraient. Grand, mince, portant blouson, le visage en lame de couteau surmonté d’une épaisse tignasse grasse, couleur corbeau, il sentait très mauvais ; une sorte de remugle d’oignon, de crasse et d’huile de vidange usagée.

Mon troublant supérieur hiérarchique s’invita dans mon bureau crasseux dans lequel je rédigeais avec la concentration d’un écolier de jadis le rapport d’une affaire précédemment élucidée. L’atmosphère y était un peu lourde, car, faute de subsides, la fenêtre n’ouvrait plus, et aussi parce qu’à midi, je m’étais régalé sur le pouce d’un cassoulet aux saucisses et aux cuisses de canard.  

Mon supérieur posa une de ses grosses fesses sur le rebord du meuble et me jeta un regard profond. Je le savais secrètement amoureux de moi. Mais je n’ignorais pas qu’il ne l’avouerait pour rien au monde. C’était un bon Chrétien qui respectait son épouse, Mafalda.

« Vince, on a un problème (une de mes rares coquetteries, j’aimais que l’on prononçât mon prénom à l’Américaine, je trouvais que cela claquait mieux que Vincent).

« Ah oui, lequel, chef ?

« Tu as entendu le quidam qui criait tout à l’heure ?

« Oui chef. Les crédits pour l’insonorisation des locaux ont été refusés, je sais. En même temps, ce n’est pas grave puisque nous n’avons plus le droit de brutaliser les prévenus.

« Tu sais qu’avec sa bande, il voulait cambrioler la banque du centre ? Nous avons réussi à coincer leur véhicule au moment où ils en ressortaient. Ces malandrins se sont alors égaillés dans la nature, chargés de leur butin.

« Je croyais que c’était au milieu de la ville chef.

« J’employais une figure de rhétorique, Vince !

 « Et moi j’évoquais une figure du grand banditisme, chef.

« Quoi qu’il en soit, nous n’avons réussi à capturer que ce gaillard, les autres filous sont en fuite. Ils courent vite.

« Ils n’avaient sûrement pas la conscience tranquille.

A cet instant le chef me jette un regard circonspect. Il met sa main gauche sur sa bouche et se gratte pensivement la joue, cela râpe un peu car il ne s’est plus rasé depuis ce matin. Enfin, je me borne à l’imaginer, dans la mesure où je n’y étais pas.

« Et il faut donc qu’il nous révèle où se cachent les autres forbans qui ont porté atteinte à cette image quasi-iconique, que représente la Banque. La Banque, ça se respecte, Vince, c’est le symbole de notre civilisation, L’Institution suprême, davantage encore que la Religion. Et pourtant, vous savez si je suis croyant. Mafalda, mon épouse, et moi-même nous ne manquerions pour rien au monde une messe dominicale. Ce serait d’ailleurs bien que l’on vous y aperçoive de temps à autre.

« Chef, il m’est difficile de traverser tout PARIS pour assister à un office à l’église de RUEIL-MALMAISON. Mais le dimanche, Je fréquente assidument l’établissement qui fait face à l’église de la ville dans laquelle j’ai l’heur de résider. »

« Ce débit de boisson fréquenté par des dames de petite vertu ?

« Absolument, chef. Mais pas pour les raisons que vous pourriez imaginer. J’utilise cet estaminet comme poste d’observation. C’est l’endroit idéal pour surveiller les voyous et autres malandrins qui tenteraient de molester les honnêtes gens.

« Mais alors, Vince, vous n’arrêtez jamais.

« Non, chef. Pas quand on est policier. C’est ainsi que je conçois mon métier. Il n’y a pas d’alternative.

« C’est bien, Vince. Vous allez pouvoir exercer vos talents sur ce voleur. S’il y en a un qui peut le faire parler, c’est vous. Sans violence, j’entends. Avec les réseaux sociaux, c’est infernal. Tout le monde filme tout le monde de nos jours. Ces mêmes citoyens qui hurlent à l’atteinte de la liberté individuelle quand ils aperçoivent des caméras de surveillance. Dans ces conditions, même ici, dans ce Temple de la Loi, la prudence s’impose. Le moindre geste qui pourrait être mal interprété, et c’est le pays entier qui nous conspue. Nous représentons l’ultime étape avant l’Anarchie, « the last step before anarchy » (le Chef adore rappeler qu’il est polyglotte) mais le Peuple défèque sur sa Police.

« Quelle époque, chef !

« Je vous le prépare dans la salle d’interrogatoire. Dans dix minutes ?

« Cinq suffiront, chef. Je connais la pauvre mentalité de ces êtres en déshérence.

« Je savais que je pouvais compter sur vous, Vince.

Le chef se penche légèrement pour se redresser. Il grimace un peu, son dos lui fait mal. Mais en se posant une ultime fois sur moi, ses yeux sont humides, un bout de langue rose sort de sa bouche et humidifie les crins épais de sa moustache. Je sais qu’il rêve de se rouler avec moi dans la luzerne. Je l’envisage moi-même sans déplaisir. Mais force est de demeurer professionnel.

Je me rends aux toilettes messieurs, restitue un peu de la bière ingurgitée à midi, évacue de la vapeur parfumée aux haricots du sud, me lave les mains et me mouille le visage en me regardant dans la glace ; Ce beau visage fatigué, dont émane cette discrète virilité qui trouble les femmes et rend jaloux les hommes, du moins ceux qui ne me désirent pas. Cela fait, je réajuste sur mon crâne le chapeau melon que je ne quitte jamais, même pas pour dormir.

Un peu plus tard, je regarde en face de moi le sombre quidam qui me toise d’un air provocateur.

« Tiens, j’ai droit à l’obèse de service. Alors, flic, qu’est-ce que tu vas faire, tu crois que tu vas me faire parler avec ton look des années cinquante ? Avec ta tête de demeuré et tes yeux de gros veau ? Il ne te manque plus que du persil dans les narines pour parfaire l’illusion. »

Je ne sais pas trop ce qu’il veut. Cet idiot ricane bêtement, se donne contenance. Peut-être attend-il que je le frappe.

« Tu attends que je te frappe ?» lui demandé-je d’une voix posée.

« C’est ce que tu vas faire, flic ? D’un seul coup, son visage se ferme. Il me regarde méchamment, avec cet air de tueur, comme on en voit dans les séries.

« C’est facile, hein, je suis tout seul ici, vous pouvez tous me tomber dessus et me brutaliser. Ce serait dans la rue, ce serait différent, on serait d’homme à homme, et là tu la ramènerais moins.

Je me laisse le temps de répondre. Ses arguments se défendent. Je porte les doigts à mon nez et m’arrache un poil que je considère un instant avant de le jeter. Il ne me quitte pas des yeux, son visage est crispé, des sentiments noirs s’y inscrivent, et il me semble qu’il est dans un état de surexcitation qu’il contient difficilement. Le bougre aura absorbé quelque substance. Il n’arrête pas de se tortiller sur son siège. Il est vrai qu’il est maigre. Il n’a pas de grosses fesses comme le chef. Et à force de reposer sur l’os, cela devient inconfortable, voire douloureux.

« Tu devrais peut-être voir un kiné, non ?

« Quoi ? Pardon ?!? Qu’est-ce que ça veut dire ?

« Dès que tu seras libéré. Dans vingt ans.

« Je ne dirai rien.

« Tant mieux. Je n’aime pas trop le son de ta voix.

Et je me remets à le fixer, sans doute un peu comme un entomologiste avec un insecte. J’ignore si c’est avant ou après l’avoir tué. L’insecte, je veux dire.

« Mais vous êtes c…, ou quoi ?

« Pourquoi ?

« Pourquoi quoi ? Qu’est-ce que vous voulez ?

« Tu connais la réponse.

« Oui je la connais, mais je ne vous la dirai pas.

« Ah bon ? Mais pourquoi ?

« C’est évident, non ?

« Je ne trouve pas. Et, es-tu bien sûr que tu la connais, la réponse ? Pour bien connaître une réponse, il faut bien se connaître soi-même. Je dirais que tu t’es un peu perdu de vue, ces temps-ci, non ?

Il s’agite de plus en plus, en proie à des sentiments contradictoires. Un instant j’ai l’impression qu’il va sauter par-dessus la table, celui d’après qu’il va pleurer.

« Je ne me suis pas perdu de vue. C’est quoi, ces c…….. ?

« Tu t’appelles comment ?

Il ne répond pas, se mure dans le silence.

« Tu ne veux pas non plus répondre à cette question. Je sais bien que pour la première, tu ne connais pas la réponse, mais la seconde est facile, quand même.

« Mais arrête, flic, je la connais la réponse. A celle-là et à toutes les autres. Je peux avoir un verre d’eau ? J’ai soif. Ah oui, mais je sais bien que vous les flics, vous laissez les gens crever de soif pour les faire parler, mais je ne parlerai pas.

« Moi je trouve que tu parles beaucoup pour quelqu’un qui ne parle pas.

« Ah bon ? Vraiment ?

« Oui, vraiment. Ainsi tu as soif ?

« Oui, j’ai soif ! » crache-t-il comme un chat acculé. Mais, je l’avoue, je n’ai absolument pas envie de le tenir sur mes genoux et de le caresser. Je consulte ma montre. Il est dix-neuf heures.

« Tu ne préfèrerais pas plutôt prendre l’apéritif ?

    Il me considère, interdit.

« Le quoi ?

« L’apéritif. Mais peut-être ne veux-tu pas répondre à cette question non plus. On ne sait jamais, on pourrait te coffrer pour alcoolisme.

« Très drôle.

« Alors ton prénom, c’est Frédéric, on m’a communiqué ton pedigree. Mais dans le Milieu, c’est-à-dire dans ton quartier de tocards, tout le monde t’appelle le Détraqué.

« C’est pas vrai. Ceux qui disent ça n’auraient pas le courage de me le répéter en face. J’hésiterais pas à me battre.

« Il faudrait prendre un ticket. Tes ennemis sont trop nombreux.  Alors ? »

« Alors quoi ? Je vous ai dit que je ne parlerai pas. »

« Tu refuses de me dire si tu veux un apéro ? Pas grave, je boirai seul. »

Et je fais un grand signe du bras vers la glace sans tain derrière

laquelle mes collègues suivent et enregistrent l’échange.

« Un grand pastis avec des cacahuètes grillées, s’il te plait, Norbert.

« C’est trop la loose ton attitude, flic !

« Sois gentil, arrête de parler comme un adolescent qui découvre ses premiers poils de kiki. Tu as trente-cinq ans Frédo. »

« M’appelle pas comme ça ! Y a que ma daronne qui m’appelle comme ça. »

« Avec laquelle tu entretenais le complexe d’Œdipe, bien entendu. »

« Je ne le connais pas celui-là. Sans doute un de vos indicateurs. »

« Tu voulais faire l’amour avec ta maman, c’est ça ? Elle ne te prenait pas au sérieux. C’est pour cela que tu as cambriolé la plus grosse banque de la ville. Malheureusement, elle ne t’admirera pas. Toi et ton équipe de bras-cassés, vous lui avez roulé dessus. Mais je te rassure, le chien s’en est tiré. »

Il allait me sauter dessus, mais son geste est brusquement interrompu. Son visage se décompose. Des larmes perlent à ses cils.

« C’était maman ?

« Eh oui mon ami. Tu n’as pas reconnu le Loulou ?

« Non. Mais c’est normal. Ce matin, elle m’a dit qu’elle lui ferait faire une couleur. Avant il était gris.

Il pleure. Je me lève.

« Finalement j’irai boire l’apéro tout seul. Tu me déprimes.

Il me regarde, ses yeux sombres noyés dans une rivière d’incompréhension.

« C’est tout ?

« C’est tout, quoi ?

« L’interrogatoire est terminé. Si toi tu ne veux pas boire, moi j’ai soif.

« Je veux bien un whisky.

« Avec ou sans glaçons.

« Je le préfère sec.

« Moi je m’en tiendrai au Ricard. » Et je relève le bras.

Entre-temps, Frédéric a posé la tête contre la table. Il pleure sans retenue, un peu de morve coule de son nez, et chacune de ses expirations gonfle une grosse bulle, sous sa narine gauche.

On s’en expédie deux ou trois, lui ses whiskies, et moi mes Ricards. Je demeure patriotique jusque dans le choix de mes alcools (je précise quand même qu’aucune firme ne m’a payé pour faire la publicité de ses boissons, c’est dommage d’ailleurs). Ce breuvage a pour moi un petit goût de Marseillaise.

« Elle était dure ma daronne, tu sais. Mais j’étais mauvais, j’ai tout connu, prostitution, drogue, alcool, etc…

« Et alors ? Moi aussi. Je m’en suis sorti puisque me voilà aujourd’hui dans la Police.

Il me regarde, étonné ; malgré sa tristesse, ses lèvres esquissent une sorte de sourire railleur.

« Vous vous êtes prostitué, vous ?

« Non mais à une époque de ma vie, je l’ai envisagé. Note bien qu’avec mon physique, j’aurais refusé du monde.

«Tu doutes de rien, toi. Tu m’en sers un autre ?

« Je peux pas. Je dois partir.

« D’autres voyous à arrêter ? Maintenant que je me suis confié, je ne t’intéresse plus, c’est ça hein ?

« Je dois nourrir mon poisson rouge. Et puis c’est vrai j’en ai assez. Cet entretien s’éternise. Les interrogatoires, c’est comme avec les dames, j’aime bien conclure rapidement.

« Les anciens entrepôts MICHEMOL. Vous savez, la fabrique de slips, celle qui a fermé pour cause de délocalisation en Pologne, c’est là que mes copains se sont planqués. Ils doivent y être avec l’argent à cette heure-ci. Alors maintenant je vous intéresse ?

« Non. Toujours pas. Tu n’as pas répondu à la question.

« Je viens de le faire.

« Il a fallu que je le trouve tout seul, ton prénom.

 

            Ce fut un franc succès. Les Médias en parlèrent en boucle des jours durant. La Police avait démantelé un gang qui sévissait depuis plusieurs mois dans la région. Mais curieusement, alors que l’on pouvait m’attribuer une grande part de la réussite, cet exploit ne fut pas porté à mon crédit. Je n’en retirais qu’une défiance accrue de la part de mes collègues, lesquels me jalousaient, je suppose. Je ne leur en voulus pas. Je représentais la symbiose ultime entre un corps parfait et une intelligence hors du commun. N’eût été mon incomparable modestie, j’aurais pu faire valoir cette réussite, demander une promotion, et dominer cette masse de collègues qui ne disposait pas de cette finesse de réflexion, ce sens inné du contact humain qui me faisait obtenir les aveux des criminels les plus endurcis. J’arrivais même à les faire pleurer, comme on vient de le voir. Le dénommé Frédéric qui avait soulagé sa conscience devant moi comprit ou crut comprendre plus tard que je l’avais berné. En effet, ce n’est pas sa maman que lui et ses camarades avaient écrasée, mais une pauvre vieille anonyme. Son avocat, un homme retors, voulut utiliser ces circonstances pour invalider ses aveux. Il échoua, certes, mais je fus dès lors considéré comme un policier peu scrupuleux, qui utilisait les sentiments humains les plus douloureux pour parvenir à ses fins. Heureusement que je n’avais pas prétendu que le Loulou avait été écrasé durant l’opération, car sans nul doute on m’eût taxé de cruauté envers les animaux.

                      Pour la petite histoire, Frédéric se souvint plus tard que sa propre mère était décédée depuis dix ans et qu’elle n’avait jamais eu de chien. Je pus méditer cela plusieurs soirées d’hiver, installé dans mon canapé similicuir, en suivant d’un œil distrait les circonvolutions de mon poisson rouge dans son bocal. La bouteille de pastis jonchait le sol à quelques centimètres de mon pied droit. Brusquement le poisson rouge accéléra sa nage circulaire pour s’arrêter net et me fixer de ses yeux globuleux.

« Vince, ce n’est pas juste » déclara-t-il tout de go.

                     Un individu moyen se serait demandé comment un poisson rouge pouvait lui adresser la parole. J’avais, dans mon existence, vécu des événements extraordinaires. Aussi, le fait qu’un poisson rouge me parlât ne me parut pas si insensé.

« Qu’est-ce qui n’est pas juste ? lui dis-je

« Tu n’es pas apprécié à ta juste valeur. Il faudra bien qu’un jour tout le commissariat admette que tu es le meilleur. Il te faut une occasion pour le leur prouver.

« Je le sais bien, mon ami le poisson, les occasions, tu sais, c’est comme les trains par temps de grève, ce n’est pas parce qu’on les attend ardemment qu’ils arrivent.

Le poisson rouge arqua un sourcil.

« J’espère que cela viendra, mon vieux, car franchement tu le mérites.

« Je sais. La patience est également une des qualités des cœurs nobles. Et cela viendra mon ami à nageoires, cela viendra.

« En attendant, Vince, et sache que cela m’ennuie de te solliciter, pourrais-tu me rajouter un peu de nourriture. Je crois que mon régime est fini.

C’était vrai qu’il avait reperdu. Fut un temps où il paraissait presque aussi gros que le bocal. J’aimais sa sveltesse présente. Je lui remis donc quelques granulés, et le poisson sauta de joie avant de se ruer sur cette manne car il était boulimique. Je filai à la cuisine et sortis une autre bouteille de pastis. Je me le servis pur car j’avais été prévenu par sms que l’eau du robinet était impropre à la consommation ; une contamination du bassin qui alimentait la ville par des déjections animales, je crois bien. Me voyant lamper mon breuvage, le poisson se colla au vitrage.

« Ce n’est pas bon de boire seul, Vince, tu sais, tu finiras par ressasser des idées noires. Et si tu servais ton copain ? On pourrait siroter en parlant de nos vieux souvenirs.

« Je ne vois pas comment un poisson dans son bocal pourrait avoir des souvenirs.

« Cette conversation tourne en rond. Sers-moi plutôt.

              J’étais certainement un peu éméché. Je vidai la moitié de la bouteille dans le bocal. Quand je me levai, au petit matin, le poisson flottait sur le dos. Toujours dans le but d’éviter une accusation de cruauté envers les animaux, je crois pouvoir dire qu’il est mort sur une bonne impression. Je balançai le cyprin doré (Carassius auratus) dans le vide-ordures et jetai le bocal plein par la fenêtre, ce qui me valut des remarques acerbes de la part du voisin d’au-dessous, lequel était un homme acrimonieux. Je lui montrai ma carte de police, et je dois pouvoir dire qu’il adopta dès lors une attitude plus mesurée.

 

MERCREDI 9 DECEMBRE 2020

 

               Ayant des récupérations à prendre, je ne revins au commissariat que le mercredi suivant. Il y régnait une atmosphère encore plus bruyante et agitée que d’ordinaire. Comme j’avais commencé à le dire, nous vivions une époque crépusculaire, une transition vers autre chose, peut-être. Une époque pleine de prises de conscience, mais de violence aussi, de tensions, raciales, ah non pas raciales, aujourd’hui il convient de faire extrêmement attention à chaque mot employé, et particulièrement dans les écrits ; de tensions sociales, communautaristes, d’interrogations écologiques, nous pleurions le devenir de notre malheureuse planète alors que nombre de lobbies industriels et politiques pesaient de tout leur poids pour que rien ne change, au contraire pour que nous poursuivions notre marche forcée vers le néant ; des interrogations pressantes  relatives aux relations entre les sexes, etc…

                   C’était une époque intéressante mais pas facile, oh non, pas facile du tout, mais bon c’était comme ça, après tout, les oiseaux ne choisissent pas l’air pollué dans lequel ils volent.

        

             Le commissaire me reçut dans son bureau. C’était un être dans la force de l’âge. Il était beau comme un enfant, fort comme un homme, Il avait mis de l’ordre dans ses cheveux et un peu de noir sur ses yeux. Une simple nuisette l’habillait et il avait mis des porte-jarretelles. Je pus ainsi constater qu’il était épilé, au moins sur les parties dévoilées de son corps. Remarquant mon regard pour le moins étonné, il balbutia, rosissant légèrement :

« C’était le bal de la police hier soir. Je m’étonne du reste que l’on ne vous y ait pas vu. Et, eu égard aux circonstances, je n’ai pas eu le temps de me changer.

« Pas de souci, chef, cela vous va très bien.

« Vous trouvez ? Vous ne me dites pas cela par pure flagornerie.

« Que le ciel m’en soit témoin, chef, la vile flatterie ne figure pas au registre de mes pratiques.

« Je le sais, Vince, je voulais juste en avoir la confirmation.

« Vous l’avez, chef.

Et celui-ci ne se met-il pas à former des petits baisers avec ses lèvres, ce que je fais mine d’ignorer, eu égard au contexte.

« Mais revenons à nos moutons, Vince.

« L’image est forte, chef. Trop de gens ignorent que les policiers sont pareils à ces bergers qui veillent à leurs troupeaux de moutons.

« En effet. Et justement, je vous ai convoqué pour vous parler de moutons égorgés par le loup. Un loup insaisissable. Un loup diabolique, qui tue pour le plaisir, sans mobile apparent. Nous en sommes à la quatrième victime ».

          D’un geste de diva, à l’ampleur calculée, le Chef jette quelques agrandissements sur le bureau que je saisis avec un maniérisme cher à Clint Eastwood, époque western spaghetti. Je vous l’avoue, je suis quelque peu interloqué. Je les tends au Chef avec une lueur d’incompréhension dans mes beaux yeux de fauve qui porteraient certainement sa culotte à ébullition, si toutefois il en portait une.

Le chef regarde, esquisse un sourire contrit.

« Veuillez me pardonner, je me suis trompé de tiroir.

          Mon hiérarchique extrait cette fois les clichés idoines. Je fronce les sourcils en les examinant. Juste pour avoir l’air concerné. Les photos révèlent des individus à la rigidité cadavérique, ce qui n’a rien d’étonnant puisqu’ils sont morts, Tournés sur le ventre, le pantalon et le slip baissés, ou la jupe relevée et la culotte descendue, tous partagent un point commun : un légume du genre carotte, concombre ou autre aliment contondant sorti de la terre, est planté dans leur fondement. Je dois toutefois signaler deux variantes : l’un des cadavres avait une banane enfoncée dans la rondelle et l’autre, une femme avec de fort jolies fesses, quatre merguez décongelées qui émergeaient de son SIF, sillon inter-fessier, semblables dans leur flaccidité à l’aspect d’un membre viril après l’amour.

« Je ne comprends pas, chef. « Il » a assassiné toutes ses victimes le même jour ?

« Chaque meurtre a été perpétré à une semaine d’intervalle.

« Ce qui signifie que ces assassinats se sont déroulés sur un mois ?

« En effet, pourquoi ?

« Parce que l’on n’en a pas parlé dans les médias.

« Les médias en ont parlé. Mais pas comme des crimes commis par la même personne.

« Il a fallu un mois pour les relier les uns aux autres ?

Le chef s’empourpre.

« En effet. Il ne s’agissait jamais du même légume. Et les deux derniers sont déroutants. En lieu et place des légumes, l’assassin a employé une banane et des merguez, comme vous l’aurez sûrement constaté de visu.

« Quels services sont chargés de l’enquête ?

« La police de VILMONS-Les Hauts, Vince. VILMONS est une charmante et paisible bourgade nichée au pied des montagnes, dans nos belles Alpes Françaises. Nos collègues nous demandent de l’aide. Ils s’inquiètent. Si nous ne réagissons pas rapidement, d’autres meurtres seront commis.

« Merci de situer, Chef. En somme ces homicides furent perpétrés en fonction du panier de la ménagère.

« Je vous demande pardon ?

« Excusez-moi. Simple aparté.

« Ah ! Seulement, nous ne disposons d’aucun élément. Rien qui puisse nous conduire sur les traces de ce malfaisant personnage.

« Et comment se fait-il ? Avec les moyens d’investigation dont nous disposons aujourd’hui : ADN, empreintes de chaussures, bouts de tissu, prélèvement de sperme, etc…

« C’est toute la question, Vince. C’est comme si ces gens avaient été assassinés par un fantôme, ou par un tueur qui n’aurait pas posé les pieds au sol.

              Le Chef lève la tête vers le plafond ce qui entraîne la chute immédiate de sa perruque blonde.

« Au plus haut niveau de l’état, on s’inquiète. Vous connaissez la tension qui règne dans notre pays aujourd’hui…

« Ne m’en parlez pas, Chef,…tous ces gens de couleur, ces Beurs, ces Noirs, ces gilets Jaunes, ces Roses, ces Verts…

« Vous ne pouvez pas parler comme cela, Vince. Vos propos sont susceptibles de choquer, vous comprenez ? »

« Non. »

« Et qu’entendez-vous par « Ces roses » ?

« Les homosexuels, Chef. Et pourquoi le tueur ne serait-il pas homosexuel, étant donné le genre de signature qu’il laisse sur les cadavres ?

Le Chef s’empourpre.

« Je vous en prie, Vince, il y a des homosexuels très comme il faut. J’en connais mêmes des qui ont fait la marche contre le mariage Gay.

« Ah mais ça, j’ignorais.. Et vous, comment le savez-vous, Chef ?

« Hmmmm, j’accompagnais mon épouse aux manifestations. Mafalda est très concernée par les problème sociétaux. Mais revenons à notre affaire, si vous le voulez bien. Je disais donc que les plus hautes instances ont pensé à vous, Vince. Cette façon inimitable, tellement heu, tellement stimulante, intellectuellement parlant, s’entend, que vous avez de résoudre les énigmes les plus épineuses. Enfin bref, vos billets sont prêts, vous partez ce soir.

« Ah bon cela ne se passe pas dans notre belle Capitale ?

« Je viens d’évoquer VILMONS-Les HAUTS, Vince. Vous ne lisez donc jamais les Journaux ou les Info médias sur la toile ?

« Sur la toile ?

« Internet, Vince.

« J’évite Internet. On y colporte généralement un tissu de ragots et de mensonges, de fake news, comme ne cesse de le répéter Monsieur TRUMP, ce malheureux homme que l’on calomnie injustement à longueur de temps, tout cela parce qu’il aime son pays. Vous savez, Je n’avais déjà pas grande confiance en la nature humaine, mais si maintenant de sombres anarchistes tentent de détruire la réputation de nos guides spirituels, alors c’est tout l’édifice que l’on veut abattre, c’est le spectre de la guerre civile qui se profile. Mais je vous le dis, ces malfaisants trouveront un homme au travers de leur route : moi, Vincent David, avec ma force et mon gros pistolet.

            A ces derniers mots, les yeux du chef se révulsent, un filet de bave coule à la commissure de ses lèvres, sans doute s’imagine-t-il en train de m’administrer une monumentale fellation. Mais c’est impossible. La Police est construite sur la base d’une hiérarchie pyramidale. Le Chef ne pourrait donc sans se commettre marquer une telle preuve de considération.

« vous n’avez que le temps de retirer vos billets, Vince. Votre train est à dix-neuf heures.

                Le Chef consulte sa montre. « C’est-à-dire, dans deux heures.

« J’y serai, Chef. Mais vous ne m’avez pas donné la destination. »

« VILMONS-Les HAUTS, Vince, dans les Hautes Alpes, soupire-t-il.

 

                  La ville s’appelait donc VILMONS-Les-HAUTS, comme l’attentif lecteur l’aura sans doute compris. Une agglomération réputée pour ses monts, ses pentes neigeuses, ses Alpages, ses fromages et surtout ses stations Thermales. En effet, on y soignait diverses affections de la peau et des bronches. On y buvait de l’eau minérale, on y prenait des bains de boue. On enseignait des méthodes pour lutter contre le stress de la vie moderne. On faisait des cures pour maigrir, pour reprendre du poids, pour retrouver goût à la vie, et toutes les techniques de la création. Il y avait des Professeurs, des docteurs, des kinés, des soigneurs, des penseurs, des gourous et autres charlatans. Des structures où l’on se ressourçait. L’hiver, on descendait des pentes sur des planches ou sur une civière, selon sa chance. L’été on montait des pentes, à la découverte des loups et des ours - encore que les ours préférassent se faire occire dans les Pyrénées, me semble-t-il - que des amoureux de la nature tutoyaient à la carabine. Il était interdit de cueillir des fleurs mais on pouvait bétonner toute une zone pour que ceux qui voulaient s’éloigner de la ville sans en perdre les avantages soient le plus près possible des arbres, enfin, ceux qui restaient. Récemment, dixit la brochure que j’avais parcourue dans le train, VILMONS-Les-HAUTS s’était considérablement agrandie, au détriment économique des autres villes du département. VILMONS faisait preuve d’une dynamique stimulant le bassin d’emploi régional au point que des investisseurs Suisses et autres s’y intéressaient. J’avais eu, je l’avoue, un peu de mal à me concentrer sur ma lecture. Non pas que l’article fût rédigé en une langue si châtiée et comportant tellement de mots que cela en rendait la compréhension difficile. Juste à cause des voyageurs qui occupaient les fauteuils non loin de moi : un catarrheux qui crachait bruyamment un morceau de poumon toutes les dix secondes ; un crétin congénital qui riait fort, bavant et éternuant ; un eczéma avec psoriasis qui passait le temps à se décoller des petits morceaux de peau, les roulant en boule et les expédiant d’une pichenette dans le compartiment et à faire exploser ses boutons, libérant à chaque fois un jet de pus. Un sportif qui faisait des pompes dans le couloir, et de niaises adolescentes qui se montraient leur téléphone en gloussant et en se chuchotant des inepties à l’oreille.

                Mais j’étais arrivé à bon port. Je crois l’avoir dit sans aucune forfanterie, personnage important, reconnu et respecté dans la Police, je m’étonnai que personne ne m’attendît devant la gare. Alentour, tous les hôtels étaient pleins. De toute manière le tarif des chambres était prohibitif. Bien sûr, me direz-vous, je passerai tout en note de frais, ce qui est quand même la moindre des choses. Encore fallait-il avancer les fonds.

             Philosophe, je m’assis donc sur le banc d’un abribus dont les panneaux de verre avaient été pulvérisés à la masse ou au marteau. Pelotonné dans mon pardessus, car il soufflait un petit vent froid, j’attendais paisiblement le lendemain, quand une patrouille de police stoppa à ma hauteur.

« Hé toi ! » m’interpella le zélé défenseur de l’ordre assis à la place du mort.  « Qu’est-ce que tu fais là ?

« J’attends le bus. »

« Ah je vois. Monsieur veut plaisanter. Tu sais qu’il existe un décret municipal dans ce patelin ? Les clochards n’ont pas le droit de s’assoir dans les abribus.

« C’est une excellente initiative. Où irions-nous, grands Dieux, si tous les gueux pouvaient se prévaloir des mêmes droits que le Bourgeois.

« On est anarchiste, peut-être ?

« Du tout. Je suis dans la Police.

                 Les quatre occupants du véhicule s’esclaffèrent. Je ne voyais pas ce qui était drôle. Il est vrai que dans les villes de province, on ne pratique certainement pas le même humour qu’à PARIS. Toujours est-il que deux de ces gaillards s’extirpèrent non sans difficulté du véhicule et s’en vinrent à ma rencontre, ce qui ne représentait pas un exploit insurmontable, dans la mesure où le banc de l’abribus était grosso-modo à deux mètres de la chaussée. Un fin limier note immédiatement plusieurs choses à propos des quidams à qui il a affaire. Ces deux policiers - probablement issus de cette robuste souche montagnarde à l’accent rugueux, aux poils épais - outre une haleine pestilentielle, sentaient abominablement mauvais. A n’en pas douter, ils avaient fait honneur aux divers fromages locaux et aux vins épais kdu pays, sans compter la gnôle à quatre-vingt-dix degrés qui avaient tant facilité les mariages consanguins dans le coin. Je les soupçonnai de travailler dans une étable en dehors de leurs heures de service. Peut-être nettoyaient-ils les cochons dans la ferme familiale, épandant du purin à pleins seaux dans les champs qui brillaient sous la lune gibbeuse. A n’en pas douter, culbutaient-ils de grasses filles des fermes, sales et lubriques, à la façon dont le taureau monte sur la vache, sans jamais prendre la peine de procéder à quelques ablutions, cet acte ancestral accompli.

Le plus grand et le plus gros se pencha vers moi et je crus défaillir.

« Alors je vais être clair, le petit malin, tu vas déguerpir sur le champ ou mon camarade ici présent et moi-même te raccompagnons à la porte de la ville à coups de pieds au derrière. »

En mon for intérieur, je me disais que ce brave homme surestimait ses capacités. Et celles de son collègue. Etant donné leur corpulence, leur bedaine dépassait de la ceinture et s’affaissait sur leur pantalon, je pense qu’ils auraient fait une crise d’apoplexie s’ils avaient tenté pareille prouesse.

Je fus toutefois assez avisé pour n’en rien dire car le policeman semblait en colère sans que je susse pourquoi. J’arborai alors ce bon sourire de l’être rationnel qui s’adresse à un individu mentalement déficient, et je dis :

« J’apprécie le zèle, fonctionnaire, et sachez que je saurai faire part comme il se doit de votre conscience professionnelle à vos supérieurs. Toutefois, vous vous méprenez. Je ne suis pas le pauvre hère que vous imaginez. Je suis…

                        Et c’est là que je commis l’erreur. Je portai la main à l’intérieur de mon pardessus afin de lui montrer ma carte de police, mais cet homme fruste crut à l’évidence que j’allais sortir une arme. L’instant suivant, je reçus son poing en plein visage : l’ensemble osseux et cartilagineux d’un individu habitué à manier la hache, la tronçonneuse, à porter des cinquantaines de kilos sur son dos de mammouth. Un instant, je restai là, assis, à le dévisager avec une expression de stupeur. Puis je vis du sang couler sur les pans de mon habit, une dent tomber – celle qui était malade et pour laquelle j’avais rendez-vous la semaine suivante – et je m’affaissai, doucement, mollement, cotonneusement, dirais-je. Et je ne sais pas pourquoi, peut-être dans l’idée de parachever son travail, le policier me donna encore quelques coups de pieds, visant un peu vicieusement je dois le dire, les parties génitales, mais je sus prendre la position fœtale qui protégea mes mâles attributs. Après quoi, les deux hommes me relevèrent, j’encaissai encore quelques gifles et me retrouvai à l’arrière du véhicule. Le miracle dans tout cela, c’est que je ne perdis pas mon chapeau melon.

              Je passai une nuit agitée. Mon nez m’élançait et j’avais mal dans les côtes. J’avais tortillonné deux mouchoirs en papier pour colmater mes narines. Moyennant quoi, un beau caillot de sang s’était formé au-dessus de ma bouche. Plusieurs fois, j’avais tenté derechef de décliner mes qualités à des plantons avinés qui se contentaient de me regarder en riant et me demandaient si j’étais tenté par une nouvelle raclée. Des ivrognes ne cessèrent pas de beugler. L’un d’entre eux se mit à uriner à trente centimètres de mon chapeau et je sentis des gouttelettes m’asperger le visage. Il y avait aussi une prostituée obèse et édentée, maquillée à outrance, avec des cils de quinze centimètres, qui montrait son énorme postérieur grumeleux à tous les plantons de service, tout en les insultant copieusement dès que l’occasion lui en était donnée, lesquels en fin de nuit se trouvèrent dans un état de surexcitation indescriptible.

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