Prologue

Notes de l’auteur : Il s'agit du premier jet, donc ce n'est pas la version définitive ! Mais cela vous permet déjà de mettre un pied dans mon univers ! N'hésitez pas à me donner vos impressions. :) Bonne lecture !

— Pousse Alma ! Tiens bon !

— Vous y êtes presque, votre Majesté, encore un dernier effort !

Enfin ! Les cris du nourrisson remplacèrent ceux de sa mère.

— C’est un fils, votre Majesté.

— Un fils … chuchota son père.

La sage-femme enroula le nouveau-né dans un linge et le déposa dans les bras de sa mère épuisée mais au comble du bonheur.

— Mon petit Omael … chuchota-t-elle en le contemplant.

Le roi caressa la tête déjà chevelue de son enfant. Ce miracle de l’Empire.

— Tu as réussi, ma reine, mon amour. Tu nous as donné un héritier, quand tous ces incapables des autres royaumes ne peuvent plus procréer.

Les yeux bleus d’Alma n’en avaient qu’après son fils, le dernier-né de l’Empire de Poléneïs.

— Tu seras un grand roi, mon bébé … chuchota-t-elle.

— Que la nouvelle se répande ! proclama le roi. Que tous sachent que le roi et la reine du grand royaume de Vinsille ont eu un fils ! Un fils en parfaite santé !

— Oui, votre Majesté.

Omael téta sa mère avec application.

— Il est … magnifique … chuchota Alma.

— Un véritable chef d’œuvre, répondit le roi.

— Je ne pensais jamais voir un jour quelque chose d’aussi beau … La vie … La vie au creux de mes bras …

— Vinsille est capable de l’impossible, et nous l’avons encore prouvé aujourd’hui ! Je me gausse d’avance en imaginant la réaction de l’Impératrice. Et de ces enflures à la Capitale !

— Restons humbles, mon époux, devant le cadeau que l’on nous a fait …

— Nous ne devons rien à personne !

Le roi, excité, fit les cent pas dans la chambre.

— Ah ! Nous ne pouvons peut-être plus traverser la frontière, mais nous, notre lignée ne s’éteindra pas ! Nous n’avons pas besoin de l’extérieur !

Alma ne dit rien, puis son époux revint auprès d’elle.

— Oh, mon amour, je t’aime tant …

Il embrassa son front avec tendresse.

Omael relâcha le mamelon et étira ses petits bras fatigués au-dessus du linge.

Là, le sang du roi se glaça.

— Qu’est-ce que … Sage-femme ! N’avez-vous rien vu ! Que s’est-il passé ? Pourquoi ! Quelle est cette chose !?

Alma paniqua sous l’agitation de son époux, et elle enlaça davantage son fils qui se mit à pleurer.

— Votre Majesté, c’est une simple mal formation, mais sa santé n’est pas en danger …

— Une « simple mal formation » ? C’est immonde ! Personne ne doit savoir cela ! Personne ne saura ! Aucun prince de Vinsille n’a de telle faiblesse ! De telle immondice !

La tendresse initiale du roi laissa soudainement place à une marée de colère. Alma restait calme et foudroya son époux des yeux pour avoir osé insulter son bébé de la sorte.

— Notre fils est en parfaite santé.

— Qu’as-tu fait … grinça-t-il en reculant avant de fuir la chambre pour épargner à tous le spectacle de sa colère.

L’annonce de la naissance du fils prodige se répandit dans tout le royaume, puis dans tout l’Empire de Poléneïs qui n’avait pas connu de nouvelle naissance depuis des années.

Le même jour, dans les campagnes, une petite fille bien loin de toute la politique courait dans le champ en fleurs. Sa mère n’était pas loin. Le printemps s’était installé depuis peu et avait fait naître mille couleurs aux vertes plaines.

La fillette aux boucles blondes tomba sur une fleur magnifique et voulut, comme tout enfant, la mettre dans ses cheveux. Mais au moment de la cueillir, un givre se répandit sur ses pétales et glaça son cœur. La petite fille prit peur et sa mère la souleva du sol dévoré par le froid.

Tout autour d’elles, le givre se répandit comme un feu de forêt. Les fleurs multicolores se cristallisèrent toutes et devinrent un camaïeu de bleu. Des arbres, les oiseaux prirent leur envol en abandonnant leurs oisillons incapables de s’envoler. Des taillis, les sangliers, les biches et autres bêtes s’enfuirent à toutes pattes. La mère, elle, courut jusqu’à sa chaumière pour mettre sa petite à l’abri. Le grand frère parti pêcher arriva à son tour les mains vides.

— Maman ! La rivière s’est gelée d’un coup ! Ma canne à pêche est restée coincée ! On a pourtant passé l’hiver ! Que se passe-t-il ?

— Ne pose pas de question ! Barricadons la maison, il ne faut pas que ce froid terrible n’entre !

Ils firent rentrer leurs chèvres et leurs poules dans la maison, placèrent des tapis sur les fenêtres et les murs, et nourrirent l’âtre avec plus de bois. Puis, ils se serrèrent tous les trois près du feu alors que le blizzard balaya la campagne à l’extérieur. Ses hurlements frappaient la maison et terrifièrent la petite fille. Pour la rassurer, la mère chantonna une berceuse.

N’aie pas peur ma fille,

N’aie pas peur mon fils,

Le froid ne nous touchera pas.

Il n’est que de passage,

Et la peur ne nous atteindra pas.

Nous tous, en demeurant bien sages,

Enlacés près d’un grand feu,

Survivrons à la tempête,

Et nous resterons heureux.

Aucun d’entre eux ne pouvait sortir de la maison, car jamais le blizzard meurtrier ne s’interrompit. Tous les champs furent décimés par le gel.

D’abord, ils purent manger les œufs des poules et boire le lait des chèvres. Mais les poules stressées ne pondirent plus, et une à une, la mère les cuisina. Les rations étaient maigres à chaque repas et ils économisaient au maximum les récoltes. Mais les chèvres avaient faim, et elles ne firent bientôt plus de lait. Leurs viandes servirent à nourrir les enfants, mais arriva le jour où la famille mangea son dernier grain de blé.

La tempête n’était pas calmée.

— Je vais chercher de l’aide ! On ne peut pas rester ainsi ! proclama le fils.

— Non ! C’est trop dangereux ! Je t’en supplie ! dit la mère.

Mais le courageux jeune homme partit, et jamais il ne revint.

— Maman … J’ai si faim …

— Tiens bon ma chérie, tiens bon …

Les jours de famine s’enchaînèrent et la mère qui s’était privée de ration pour sa fille mourut.

Puis un beau jour, le blizzard s’arrêta.

La fillette amaigrie, seule, quitta la chaumière macabre, et respira l’air froid et pur. Elle erra dans l’épaisse neige à la recherche d’un autre survivant.

Tout autour d’elle, elle ne reconnut pas les champs où elle avait pris l’habitude de crapahuter. Certains arbres avaient été déracinés. Le craquement des déchets végétaux ponctuaient ses pas. Des plaines blanches. Un ciel blanc. Un calme absolu. Elle n’avait aucune idée d’où aller. Elle suivit la rivière comme lui avait appris son père de son vivant. Les poissons étaient prisonniers sous la glace et figés comme dans un tableau. La petite fille avait faim et voulait les attraper. Elle se mit à quatre pattes contre la glace, et la glace se brisa, emportant l’innocence dans son impitoyable courant.

Cet Hiver si soudain gangréna tout l’Empire de Poléneïs et jamais l’on ne revit le printemps.

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Rânoh
Posté le 09/12/2023
Sans aucun doute le plus beau texte que j'ai lu de ma vie, laissant une grande place à l'imagination et à l'interprétation du lecteur. Court mais riche.
Amatis Tibi
Posté le 14/12/2023
Oh non, et moi qui pensais que personne ne regarderait mon magnifique brouillon ...! Je suis ... heureuse de vous avoir à ce point ému avec si peu de verbe. Mais, j'espère que vous serez là le jour où j'étofferai cette modeste ligne.
Rânoh
Posté le 14/12/2023
Je n'attends que ce moment, bonne écriture.
Rânoh
Posté le 24/02/2024
Alors, maintenant qu'il y a plus d'un caractère, je peux m'attacher à un vrai commentaire.

Évidemment, en lisant ce début, on veut la suite !
C'est une très bonne base qui est posée, avec assez d'éléments pour donner goût au récit ( la malformation, le soudain hiver...).
La première partie, agencée à la manière d'une pièce de théâtre, rend bien dans son contexte, celui du roi ayant un ascenseur émotionnel, de la bonne nouvelle passant à la malédiction (comme dans un conte).

La deuxième partie est bien écrite, mais un peu trop subite de mon point de vue. Il manque de descriptions et, ou, d'actions. Je me suis retrouvé à hausser les épaules lorsque la mère est morte, il me semble nécessaire de donner les impressions de la fillette pour les transmettre au lecteur.

Une simple remarque, parce que je suis un peu maniaque, lorsque "les poules stressées" sont évoquées, j'userais plutôt du mot "angoissées", plus français. Ce n'est pas une faute en soi et peut être laissé ainsi.

Là n'est que mon avis, bien sûr, et le premier jet de ce début reste encourageant. Je suis curieux de lire la suite, bonne continuation !
Amatis Tibi
Posté le 14/03/2024
Merci beaucoup pour ton retour constructif et encourageant ! Oui, je suis d'accord pour développer davantage la seconde partie, et pour l'anglicisme à corriger (je n'y avais pas fait attention.) On m'avait aussi fait comme remarque de rendre un peu plus organique et réaliste la scène d'accouchement, qu'en penses-tu ?
Je prends note de tout cela pour ma réécriture !
Rânoh
Posté le 15/03/2024
Pour l’accouchement, tout va dépendre de ce que tu souhaites partager via cette scène. Si tu penses nécessaire d’insister sur ce dernier, non comme la venue au monde d’un enfant, mais comme processus d’aboutissement, alors le réalisme sera de circonstance.
Mais cela porterait la mère en tant qu’outil et risquerait d’éclipser le rejet de l’enfant (son mauvais départ, donc), au profit de la détresse de la mère. J’aime la scène telle qu’elle est, la chute émotionnelle est renforcée par la tournure.

En sommes, à toi de voir !
Amatis Tibi
Posté le 15/03/2024
Très bien, merci pour ton avis. Cela rejoint mon idée originelle qui est de ne pas forcer le trait sur l'organique, pour plutôt miser sur le poétique. Je vais y réfléchir !
Reveanne
Posté le 09/12/2023
XD
Je crois qu'il y a un bug dans la matrice, ou une fausse manip quelque part... bref, jolie couverture en tout cas mais le texte est fort bref, ce fut vite lu mais c'est frustrant, un peu, quand même. XD
Amatis Tibi
Posté le 14/12/2023
Ahahahah, désolée, je n'ai pas encore posté le prologue puisque je n'ai pas fini de le réécrire ... Je voulais cependant tester la publication sur le site pour voir à quoi ça ressemblait ! Merci pour la couverture, je l'ai dessinée moi-même. :) J'espère vous revoir lorsque j'aurai véritablement posté !
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