L'épreuve

Notes de l’auteur : Jusqu’où iriez-vous par amour ? ...

Avril 2011. 14h 23.France.

 

Un jeune couple d’une trentaine d’années chacun se trouvait dans leur appartement luxueux parisien, dans le salon. Le jeune homme fut de type asiatique et se nommait Antony. Son épouse quant à elle fut une caucasienne aux long cheveux noirs et se nommait Corinne. Comme le témoignait une photo encadrée, posée sur une des commodes, (juste en dessous d’un sabre accroché au mur), ils s’étaient officiellement unis devant Dieu et devant les hommes, il y a 5 ans, pour le meilleur et pour le pire. Le jeune homme habillé en costume cravate était sur le point de sortir seul. Il terminait de boire le verre de jus d’orange, que lui avait rapporté sa femme de la cuisine. Elle portait un caleçon bordeaux, sous une chemise blanche entrouverte, laissant apparaître un décolleté. 

− Alors, quel va être ton programme pour la journée  chéri ? Demanda cette dernière. 

− Je vais aller rejoindre mon pote Kevin. On ira boire un verre. Ça fait un bail qu’on ne s’est pas vu. Puis ensuite j’irai chez le tatoueur. Je rentrerai à la maison ensuite, pour retrouver ma chérie qui m’aura préparé un bon petit plat avec amour. 

Il lui fit un clin d’œil. 

− Oh mais tu le sais très bien que tous mes plats sont faits avec amour chéri, fit Corinne en lui retournant son clin d’œil.

− Je sais. C’est pour ça que je prends toujours plaisir à manger, tout ce que tu mets devant ma bouche. 

− Oh ça oui je le sais. Et t’es à chaque fois un vrai gourmand.

Antony se mit à rire.

− Et toi chérie, quel est ton programme pour la journée ? T’as prévu de sortir ?

A cette question, la jeune femme mordilla ses lèvres.

− Non, je n’ai rien de prévu comme sortie aujourd’hui. Je resterai à la maison faire un peu de ménage et laver le linge, en attendant ton retour. 

− Je pense pouvoir être là vers 19h.

− Et sinon, qu’est-ce que tu te feras tatouer chéri ?

− Tu verras ce soir c’est une surprise, rétorqua-t-il en esquissant un sourire ; tout en redéposant son verre sur la table. 

Sa femme Corinne le regardait tendrement.

− N’oublie jamais que je t’aime bébé, fit la jeune femme.

− Ne t’inquiète pas pour ça, rétorque son mari en se dirigeant vers la porte d’entrée. Moi aussi je t’aime chérie. 

− Pour le meilleur et pour le pire, bébé.

− Pour le meilleur et pour le pire, chérie. 

Le beau jeune homme asiatique lui fit un clin d’œil, puis il ouvrit la porte. 

− A ce soir bébé. 

− A ce soir, répondit sa femme en lui souriant.

− Ferme la porte à clef derrière moi. Passe une bonne journée. Bye !

Il referma la porte et son épouse s’empressa aussitôt d’exécuter l’ordre de son mari. Celle-ci ferma la porte à double-tour, se retourna et s’appuya quelques secondes contre elle. Elle esquissa un sourire et paraissait presque soulagée. 

Deux minutes plus tard, Antony se trouva au  niveau du parking. Il investissa l’habitacle de sa Ferrari noire rutilante, démarra le moteur puis se dirigea au lieu du rendez-vous ; ou l’attendait son ami Kevin : un restaurant huppé de la capitale. 

 

****

 

Quelques minutes plus tard, Antony se trouvait à table en compagnie de Kevin. Ce dernier fut un noir au corps affûté, les cheveux rasés courts, et qui portait le bouc. 

− Mon père veut que je reprenne sa société de vêtements de mode, mais cela ne m’emballe pas trop, lança Antony. J’ai envie de créer mon propre truc ; et non reprendre ce qui a déjà été fait. J’aime le challenge et les nouveaux défis. 

− Ouais j’comprends. Au pire, ton père pourra le proposer à ta petite sœur quand elle sera plus grande. 

− Ouais, à la rigueur. Mais en ce qui me concerne cela ne m’intéresse pas trop. Et c’est pourquoi j’ai voulu te voir aujourd’hui pour te faire une proposition. 

− Ah oui ? Laquelle ?

− Sachant que tu es un geek chevronné, féru d’internet et d’informatique, je souhaiterais 

savoir si tu saurais me créer un site de streaming particulier.

− Facile à faire ça. C’est dans mes cordes. 

− Génial. 

− Et ça serait pour diffuser quel type de vidéos ? Des films de boul comme « Pornhub »? Plaisanta Kevin. 

A ces mots, Antony écarquilla ses yeux, puis baissa furtivement sa tête en souriant, tout en la secouant. 

− Je vois que Monsieur est connaisseur, rétorque Antony narquoisement. 

− Toi-même tu sais.

Kevin lui fit un clin d’œil, et Antony se mit à rire.

− Sinon pour te répondre, je ne sais pas encore. Je ne sais pas quel type de vidéo il y aura. Mais ce qui est sûr, c’est que ce sera un site de streaming payant, ou les gens débourseront de l’argent pour voir du contenu inédit et original. 

− Oui je vois. Un truc original quoi, comme YouTube mais en mieux !

− Oui en quelque sorte. Et toi, ta tâche sera bien évidemment de faire un site web de streaming et de l’entretenir par des mises à jour régulières.

− Pas d’soucis. Tant que c’est bien payé, je pourrai faire tout ce que tu veux mec.

− Et ça le sera ne t’inquiète même pas.

Au même moment, une ravissante femme métisse passa près d’eux. C’était une cliente aux formes voluptueuses, une plante plantureuse a l’allure de déesse. 

Kevin, viscéralement libidineux, se mit à la regarder de manière lubrique.  

− Wow, quelle beauté ! S’exclama-t-il.

Suite à la réaction de son ami, Antony esquissa un sourire en baissant furtivement la tête. 

− Arrêtes ça Kevin purée. Sois plus discret quand même. Franchement, t’en as pas marre de t’exciter sur tout ce qui bouge ? Sois quelqu’un de mature un peu mec. Grandis.

Kevin secoua sa tête en souriant. 

− Eh mec, Les femmes ne sont que des produits de consommation pour moi. Je les prends et me comporte avec elles, uniquement pour ce qu’elles sont. 

− Ne dis pas ça mec. T’es ouf. Certains produits comme tu dis, peuvent avoir de la valeur aussi. Comme ma femme. 

− En tout cas, pas celles que je fréquente. Ce sont Toutes les mêmes j’t’assure. Sauf que certaines le cachent mieux que d’autres, en te faisant croire le contraire. 

− Toutes les mêmes sauf la mienne alors. Tu sais Robert, si tu ne cherches que du sexe, tu ne trouveras jamais l’amour. 

− Mais qui te dit que j’ai envie de le trouver ?

Le jeune asiatique secoua sa tête en souriant.

− Et puis qu’est-ce qui prouve que ta femme t’aime réellement mec ? C’est vrai quoi ! T’as de l’argent, ton père est un homme d’affaires riche, etc. Franchement, ou commence la sincérité et où s’arrête l’intérêt dans tout ça ?

Le jeune asiatique fut interpellé par ces propos, et semblait réfléchir en marquant une pause de quelques secondes. 

− Ton problème à toi c’est que tu réfléchis trop avec ta bite et non avec ton cœur, lâcha ce dernier. Et c’est ce qui va te perdre un jour. 

− Penses-tu vraiment qu’il y ait encore des gens sur terre qui peuvent s’aimer vraiment, d’un amour pur, dans cette société consumériste hyper sexuée ? Penses-tu que le vrai amour existe encore, dans cette société ou ce n’est même plus l’homme qui succombe à la tentation ; mais bien la tentation elle-même qui a succombé à l’homme ?

− Oui je le pense encore Kevin. C’est justement une preuve d’amour que de s’efforcer de rester « intègre », dans cette société consumériste à outrance. Et oui, y’a encore des gens sur terre qui s’aiment d’un amour sincère Kevin. Comme ma femme et moi. 

− Tu as vraiment une entière confiance à ta femme ?

Antony fronça légèrement les sourcils.

− Fais attention à ce que tu dis mec.

Kevin eut soudainement l’air penaud.

− Okay, excuse-moi. En tout cas je te souhaite réellement tout le bonheur du monde, si vraiment tu as trouvé l’amour. C’est tout le bien que je te souhaite mec. 

− Merci frangin. Sinon tu es partant pour m’élaborer un site de streaming payant, pour ensuite en être le webmaster ?

− Oui si je suis bien payé poto, comme je t’ai dit, rétorqua Kevin en lui faisant un clin d’œil.

− Tu le seras t’inquiète.

− Maintenant, il ne te reste plus qu'à trouver une idée, un concept.

− Je m’y attelle et te tiendrai au courant. 

− Garçon ! Interpella Antony. L’addition s’il vous plaît. 

− Nan, laisse-moi payer cette fois-ci frangin.

− Nan t’inquiète. Ça me fait plaisir. C’est moi qui régale. 

− Merci mec. La prochaine fois si tu veux.

Le jeune asiatique acquiesça de la tête, tout en voyant venir le serveur à sa rencontre.

− Tenez Monsieur, lui fit ce dernier en lui remettant la note. 

-Merci !

 

Quelques minutes plus tard, les deux trentenaires sortirent du restaurant. 

− Encore merci pour ce repas Antony.

− Pas de soucis. 

− Je vais rejoindre ma voiture garée un peu plus loin. Quel est ton programme maintenant ?

− Je vais aller me faire tatouer dans un salon.

Kevin écarquilla ses yeux.

− Sérieux ? 

Antony acquiesça de la tête. 

− Et que vas-tu te faire tatouer, si ce n’est pas indiscret ?

− Le nom de ma femme sur ma poitrine, côté cœur.

− C’est vraiment ce que tu veux ?

− Tout à fait. 

Kevin secoua sa tête. 

− fais-toi plutôt tatouer le nom de ton chien, c’est plus sage. 

Légèrement vexée par cette remarque, Antony s’approcha de son ami en faisant mine de vouloir lui donner un coup de poing. 

− Okay...Okay...désolé mec fit Kevin en reculant d’un pas ; tout en faisant barrière de sa main pour se protéger. Je retire ce que j’ai dit. Fais-toi tatouer ce que tu veux. 

− J’y compte bien. Merci !

− Okay c’est cool, dit-il en levant son pouce. A très bientôt frangin, bye.

− A plus tard. Rentre bien.  

Kevin prit congé de son ami et rejoignit son véhicule. De son côté, Antony fit de même. 

 

****

 

Au même moment, dans un appartement de la région parisienne une femme blonde se trouvait dans la cuisine. Elle se nommait Valérie, avait la trentaine et affichait un ventre ballonné par la grossesse de son futur bébé. Elle portait un teeshirt blanc et un bas de jogging noir. Ses deux bras découverts révélaient une kyrielle de dessins, de motifs et de portraits tatoués, qui évoquaient et représentaient respectivement des périodes de sa vie personnelle.  Visiblement, elle avait le tatouage dans la peau. Alors qu’elle se tenait debout près de l’évier en train d’éplucher une pomme verte, elle ressentit contre toute attente un léger malaise. Ce fut une contraction légèrement douloureuse mais néanmoins supportable. Valérie souffla et se maintenait le ventre. Par prudence, elle résolut de prendre une assiette posée sur l’égouttoir, munie de son couteau ; et de venir s’asseoir à la table qui fut à proximité.

− Mieux vaut que je m’asseye, on ne sait jamais, se dit-elle. 

Une fois attablée (après avoir déposé les restes de ses pelures dans l’assiette), Valérie entama la première bouchée de sa pomme fraîchement dégarnie. A peine avait-elle croqué ce fruit non défendu, qu’une seconde contraction bien plus douloureuse et bien plus longue se manifesta. Cette fois-ci Valérie commença à se tordre et à gémir de douleur. Elle s’empressa de déposer la pomme et le couteau dans l’assiette, comme pour mieux se délester de choses futiles. 30

Secondes plus tard, ces contractions repartirent de plus belle, au grand dam de la belle blonde tatouée. Malgré toutes ces souffrances originelles, elle trouva la force de se lever péniblement (en se maintenant toujours le ventre) et de se diriger vers le téléphone, qui fut suspendu au mur près de la porte de la cuisine. Elle y composa un numéro en grimaçant de douleur. Au bout de deux sonneries, quelqu’un décrocha. Ce fut la voix d’un homme. 

− Allo, Valérie ?

− Oui, c’est...c’est moi chéri. Faut que tu viennes au...plus vite...à...à la maison. 

− Que se passe-t-il ? Il t’est arrivé quelque chose de grave ?

− Non, c’est...c’est pas ça. Je fais des...contractions...dou...douloureuses depuis tout...Tout à l’heure. Je...je crois que le bébé...va sortir. 

− Oh bon sang ! S’exclama son compagnon.

− Appelle l’ambulance...et rejoins moi...au...aussitôt à...la maison.

− Oui, oui...j’arrive tout de suite. Ça va aller bébé. 

− Dépêche-toi...s’il te plaît. J’ai...j’ai atrocement...mal.

− Respire à fond et reste calme chérie. J’arrive tout de suite. 

Valérie raccrocha le téléphone et se dirigea tant bien que mal dans le salon, afin de s’allonger sur le canapé en cuir et de se reposer, jusqu’à l’arrivée de son copain et de l’ambulance. 

               

****

 

Quelques minutes plus tard, Antony, le jeune trentenaire asiatique nanti, arriva au seuil  de la porte d’entrée du salon de tatouage. Il était pile à l’heure pour son rendez-vous. Il pénétra dans la boutique et s’asseya dans un coin, près de la table basse sur laquelle se trouvait toute sorte de magazine divers. Il attendait qu’on vienne le chercher. Au bout de trois minutes, un homme sortit d’une des salles de tatouage, vint à sa rencontre. C’était un tatoueur caucasien quarantenaire, chauve, et portant une barbe grisonnante. Il était habillé tout de noir vêtu : baskets, jean et tee-shirt. Toute la longueur de ses bras était recouverte de tatouages, façon yakuza. 

− Bonjour Monsieur, fit ce dernier. Que puis-je pour vous ?

− J’ai rendez-vous avec Francky pour me faire tatouer.

− Ah désolé, il est parti y’a 30 minutes.

− Mais on a pris rendez-vous lui et moi pour aujourd’hui. Je ne comprends pas.

− Certes, mais il vient d’avoir un impondérable : sa femme l’a appelé en urgence et est sur le point d’accoucher. Il est parti la rejoindre. 

Antony parut enthousiaste. 

− Ah mais c’est génial ça. Il va devenir papa.

− Oui en effet. 

− Ah, je comprends dans ce cas qu’il n’ait pas pu honorer ce rendez-vous. J’aurai fait pareil. Ça n’aurait pas été une priorité.

Le tatoueur acquiesça de la tête en souriant. Antony se leva promptement.

− Bon Ben dans ce cas, je prendrai de nouveau rendez-vous avec lui, pour plus tard. 

− Pas d’soucis. Merci de votre compréhension.

− C’est normal. Souhaitez-lui de ma part toutes mes félicitations, quand vous le verrez, fit Antony en se dirigeant vers la porte de sortie afin de l’ouvrir.

− Je n’y manquerai pas. 

− A très bientôt !

Antony sortit de la boutique et referma la porte derrière lui. 

Changement de programme oblige, ce dernier résolut de rentrer chez lui plus tôt que prévu, tout en ayant pris soin néanmoins de faire au préalable un petit détour...chez un fleuriste ! Il ne souhaitait pas rentrer les mains vides et voulait faire une surprise à sa femme. 

 

Quelques minutes plus tard, Antony fut au volant de sa Ferrari noire sur le chemin du retour. Un bouquet de roses rouges, fut déposé près de lui, sur le siège côté passager.

 

****

 

Une fois arrivé devant la porte d’entrée de chez lui, le jeune trentenaire asiatique s’apprêta à sonner, le bouquet de fleurs caché derrière son dos. Contre toute attente, il hésita deux secondes puis se ravisa. 

Surprise pour surprise, autant que ce soit la totale, songea-t-il en esquissant un sourire malicieux. 

Il sortit la clef de son appartement luxueux de la poche de son pantalon, l’inséra dans la serrure puis ouvrit la porte. Une fois à l’intérieur, il referma la porte derrière lui à double tour. 

− Chérie ? C’est moi ! Lança-t-il son bouquet de fleurs à la main.

Pas de réponse. Il enleva ses chaussures de ville et les laissa près de la porte ou il vit malgré lui, une chose qui le laissa intrinsèquement perplexe : une paire de baskets Jordan noir. Visiblement celle-ci ne lui appartenait pas ; ou du moins il n’avait pas souvenir de les avoir acheté. Antony fronça instinctivement les sourcils en avançant lentement dans la pièce. 

− Chérie ? C’est moi. Tu es la ?

Toujours pas de réponse. 

Alors qu’il s’achemina au niveau de la chambre, il lui sembla entendre des gémissements émanés de la pièce. A mesure qu’il se rapprochait, il reconnût ceux de sa femme. Il avait déjà compris mais tenait à en avoir le cœur net. 

Il arriva à pas feutrés au niveau de la chambre, et vit la porte entrouverte. Antony en voyait juste assez pour apercevoir sa propre femme avec un noir, tous deux en tenue d’Ève, en train de se connaître de manière biblique. A la vue de ce spectacle tragique et humiliant, il sentit son cœur se briser en mille morceaux. Celle qui l’abreuvait sans de cesse de « Je t’aime », qui semblait lui être totalement dévouée d’un amour sincère et qui lui dévorait souvent des yeux, d’un regard enamouré, s’abandonnait allègrement à un étranger. Instinctivement, la mâchoire d’Antony  se serra aussitôt, son visage devint froid et ses yeux commencèrent à voir rouge. Son cœur s’arrêta même de battre un instant. Le temps d’accuser le coup et de boire son calice jusqu’à la lie. Contre toute attente, une pensée macabre lui traversa l’esprit. Il ne comptait pas en rester là, ni ne le pouvait d’ailleurs. Il se dirigea vers le salon d’un pas ferme. Il déposa son bouquet de fleurs sur la commode, leva légèrement sa tête et vit le sabre accroché au mur, juste au-dessus. L’air déterminé, il le décrocha et retourna dans la chambre. 

Arrivé au niveau de la porte, Antony l’ouvrit violemment, l’œil torve et le visage courroucé. Sa femme Corinne et son amant sursautèrent simultanément ; et arrêtèrent aussitôt leurs ébats. 

− Chéri c’est...c’est toi ? Dit-elle l’air effrayé, à l’image de son amant. Je...je pensais que. Tu...tu rentrerais...plus...plus tard. 

− Comme tu vois Corinne, je suis rentré plus tôt. Mais je n’aurai sûrement pas dû. Cela m’aurait évité de faire une bêtise.

Antony se rapprocha lentement du couple illégitime, toujours son sabre à la main, puis marqua une légère pause.

− Ce...Ce n’est pas...ce...ce que tu crois...ché... chéri.

La voix de Corinne était chevrotante. Quant à Antony, son visage était de plus en plus hargneux et sa voix davantage menaçante. 

− Ne m’appelle plus jamais comme ça, sale petite pute. Je vois à présent la pure vérité nue. C’que je vais vous faire à tous les deux, ne sera pas non plus c’que vous croyez.  

 

Six minutes de sauvageries et de barbaries extrêmes plus tard, Antony sortit de la chambre, maculé de sang de la tête aux pieds. Il tenait dans chacune de ses mains la tête décapitée de sa femme Corinne ainsi que celle de son amant. Toutes deux dégoulinaient encore d’hémoglobine, au niveau de leurs coups fraîchement sectionnés. Leurs visages respectifs étaient figés de terreur. Visiblement, Antony avait aussi perdu la sienne durant tout ce carnage. Mais la seule chose qui importait pour lui, était de laver son honneur...dans un bain de sang ! Il se dirigea ensuite vers la cuisine où il déposa les deux têtes sur la table. Puis il ouvrit un meuble et en sortit un grand sac poubelle. Il y jeta dedans les deux amants maudits, avant de retourner dans la chambre récupérer les restes de leurs membres atrocement mutilés. 

 

****

 

Dans la nuit, une Land Rover Discovery noire se mit à se garer près d’un chantier extérieur sur Paris qui fut fermé. Il était 3h27. Un homme muni d’un bonnet noir et de lunettes de soleil sortit discrètement de l’habitacle. Ce fut Antony. Il ouvrit le coffre de son véhicule, regarda autour de lui et prit un premier sac poubelle fermé bien rempli. Il se dirigea vers l’un des conteneurs poubelles à quatre roues qui se trouva à proximité, leva le couvercle et y balança un des premiers corps : celui de sa femme Corinne. Il balaya encore l’endroit du regard, d’un air impassible, pour s’assurer que personne ne l’observait. Puis il retourna prendre le dernier sac poubelle à l’arrière de son véhicule (celui de l’amant de sa femme) et réitérera son geste.

− C’est là où des gens comme vous ont leur place, dit-il d’un ton solennel avant de rabattre le couvercle sur le conteneur.

Antony réinvestit sa Land Rover, démarra le moteur, puis s’évanouit progressivement dans la nuit, comme le visage de sa femme ...dans l’oubli !

****

 

Le lendemain dans la matinée, Antony se trouvait attablé à la terrasse d’un café parisien, dégustant un expresso. Il semblait contrarié. Paradoxalement, l’infidélité de son ex-femme, lui avait fait malgré tout germer une idée. Le regard froid et le visage fermé il prit son smartphone posé sur la table. Il composa ensuite un numéro et lança l’appel. Après deux sonneries, quelqu’un décrocha au bout du fil : c’était son ami Kevin.

Ce dernier se trouvait dans son lit, nu sous les draps, en compagnie d’une jolie créature dans le plus simple appareil également.

− Eh Antony, comment ça va mon pote ?

− Ça va. T’es occupé la ?

A cette question, Kevin regarda furtivement son énième conquête qui lui souriait tendrement.

-Euh...on va dire que oui. T’appelle pourquoi ? Je te sens un peu contrarié dans la voix. Il ne s’est rien passé de grave j’espère ?

− Non, ne t’inquiète pas, répondit-il en se mordillant les lèvres. Dis-moi, peut-on se voir tout à l’heure à 14h, au même lieu que la dernière fois ?

− Oui, pas d’soucis. Pourquoi ?

− J’ai enfin trouvé...mon idée, pour mon site web de streaming payant.

− Ah génial ! Tu me diras ça quand on se verra (Kevin regarda la jeune femme). Okay mon pote ?

− Okay. A toute à l’heure !

Antony raccrocha. Son visage était toujours aussi fermé qu’auparavant. Il n’avait à présent qu’une chose en tête : la réalisation de son futur site web de streaming.

 

****

 

Août 2014. 12h37. Paris.

 

A la mairie du 6e arrondissement, une cérémonie de mariage fut célébrée, animée par son digne représentant : Le maire en personne. Ce dernier, un caucasien cinquantenaire, cheveux grisonnants et visage imberbe, était affublé comme le veut la tradition, d’une écharpe tricolore qu’il portait en bandoulière sur son épaule. Un parterre d’invités soigneusement endimanchés pour l’occasion (parents, cousins et amis confondus) s’étaient réunis pour venir honorer comme il se doit le jeune couple noir. La jeune femme coiffée de locks était des îles et le jeune homme couronné d’un afro soigneusement coupé en dégradé, fut de la terre-mère. Ils étaient tous deux trentenaires et l’amour transpirait de leurs regards énamourés respectifs. L’ambiance était intrinsèquement solennel, noyée sous une vague déferlante d’émotion.

− Sophie Rivel, consentez-vous à prendre pour époux Monsieur Christian Dieng ici présent ?

− Oui je le veux, répondit la jeune mariée martiniquaise toute émue.

− Christian Dieng, consentez-vous à prendre pour épouse Mademoiselle Sophie Rivel ici présente ? Demanda le maire au jeune homme.

− Oui je le veux, fit le jeune sénégalais en regardant tendrement sa future épouse.

− Très bien. Au nom de la loi je déclare Sophie Rivel et Christian Dieng, unis par les liens du mariage. Toutes mes félicitations ! Et n’oubliez jamais...Les grandes eaux ne peuvent éteindre l’Amour.

Désormais unis par le destin, les nouveaux mariés s’échangèrent un regard puis un tendre baiser, sous une salve d’applaudissements enthousiastes. Dans la salle, des larmes vagabondes commencèrent à perler sporadiquement le long des visages. Et un doux parfum d’éternité s’exhalait des cœurs azurés des deux tourtereaux.

 

Une heure et demie plus tard, la cérémonie religieuse catholique toucha à sa fin. Le jeune couple fraîchement marié sortit d’une église parisienne, (auréolé de la bénédiction du prêtre), sous une pluie de confettis et la ferveur des youyous retentissants. Ils venaient de s’unir devant dieu et de se promettre mutuellement une vie de bonheur, à l’image de leur mariage.

 

****

 

− Aaaaaah....

Sophie venait de se réveiller brusquement dans la nuit, en déchirant le voile du silence. Son visage luisait de sueurs. Elle venait de faire un cauchemar.

− Qu’est-ce...Qu’est-ce qu’il y a...ch...Chéri ? Demanda Christian tout alangui en sortant de son sommeil. Pour...pourquoi tu...Tu cries ?

− J’ai...J’ai fait...un...mauvais rêve ! Rétorqua son épouse.

− Ça arrive chérie, ça arrive ! Malheureusement...C’est rien. Rendors-toi !

-Je...Je t’ai vu...en train de… De me tuer !

Christian se tourna vers elle et se mit à rire.

− Quoi !? Mais t’es sérieuse ? Tu crois vraiment que je vais tuer celle que j’ai eu le bonheur d’épouser y’a 7 ans déjà ? Voyons Sophie...Un peu de sérieux ! Je t’aime et tu le sais.

− Ça avait l’air si...Si réel ! Fit Sophie la voix chevrotante. Ex...Excuse-moi !

− C’est pas Grave, répondit Christian en lui caressant tendrement le visage. Ce n’est qu’un cauchemar chérie. Rendors-toi ! Je n’ai aucune raison de te tuer, assura Christian en rigolant. Enfin...pas maintenant.

Sophie se mit à rire à son tour.

− Allez, rendors-toi maintenant.

Il embrassa le front de son épouse, se retourna de l’autre côté du lit et s’enlaça de nouveau dans les bras de Morphée. Après avoir pu retrouver ses esprits, Sophie de son côté fit de même.

 

****

 

Le lendemain en matinée le jeune couple se trouvait dans la salle à manger, dans leur petit appartement parisien.

− faudra encore une fois se serrer la ceinture ce mois-ci chérie, soupira Christian en faisant ses comptes devant son ordinateur portable posé sur la table de la salle à manger.

Sophie était à proximité, faisant ses étirements coutumiers.

− Pas grave bébé. Le principal c’est qu’on reste soudé afin de surmonter cette épreuve, rétorqua cette dernière. Comme le dit la Bible, « les grandes eaux ne peuvent éteindre l’amour. » (Cantique des Cantiques 8.7).

− Désolé pour la vie médiocre que je te fais vivre. Je ne mérite même pas ton amour.

Touchée par ces mots, Sophie l’air compatissant, se rapprocha de Christian pour l’enlacer par derrière, autour de son cou.

− Si tu le mérites. Je ne t’aime pas pour ce que tu as, mais pour ce que tu es. Nous surmonterons cette épreuve, comme il se doit. N’oublies pas que je t’ai épousé pour le meilleur et pour le pire. Et le vrai amour c’est l’intégrité.

Emu, Christian toucha le bras droit de Sophie et le caressa tendrement.

− Tu es si mature...C’est vrai tu as raison. Je suis fier de t’appartenir chérie. Vraiment...

− Moi aussi Christian.

− Je t’aime.

A ces mots Sophie vint s’asseoir sur ses genoux, devant lui.

− Moi aussi je t’aime, fit cette dernière le regard profondément énamouré.

 

****

Le jour suivant, comme à l’accoutumée, Christian s’activait dans un restaurant parisien en tant que serveur. Comme de bien entendu il portait pour l’occasion sa tenue de circonstance : un pantalon en toile, une chemise en soie, une cravate et des chaussures de villes, tout de noir vêtu.

Un tablier couleur bordeaux lui enserrait la taille, par-dessus. Il allait de table en table, de commandes en commandes ; comme butinent les abeilles de fleurs en fleurs, pour rassasier les faims et étancher les soifs. Par chance, ses pourboires étaient rarement à l’emporte-pièce.

 

Quelques heures plus tard après le service, Christian se trouva dans la cour du fond afin de se reposer et de souffler quelque peu. Il était debout adossé au mur. Il alluma une cigarette à l’aide d’un briquet, qui fut logé dans la poche extérieure de son tablier.  Une kyrielle de questions se taraudaient dans son esprit anxieux, concernant sa situation financière.

Quelques minutes plus tard, il fut rejoint par un de ses collègues de travail du nom de Jérôme. C’était un français de souche qui travaillait à la plonge depuis des années. En voyant Christian, il sût tout de suite que quelque chose n’allait pas.

− Visiblement, toi t’as des soucis en ce moment, fit ce dernier.

− Qui ça, moi ? Pourquoi tu me dis ça Jérôme ?

− Parce que tu as repris la cigarette, mec. Ça faisait presque un an que je ne t’avais pas vu fumer. Et je sais que lorsque tu fumes, c’est pour oublier tes soucis ou que tu traverses une mauvaise passe.

− Visiblement, on ne peut rien te cacher.

− Qu’est-ce qui ne va pas Christian ?

− J’ai du mal à joindre les deux bouts. A chaque fin de mois, on est presque à découvert, ma femme et moi.

− Et elle travaille également, pour pouvoir t’aider ?

− Oui. Elle est infirmière. Elle bosse dans un hôpital. Elle est en congés payés en ce moment. Mais hélas ça ne suffit pas pour que l’on s’en sorte.

Jérôme ressentit viscéralement de la compassion envers son collègue de travail.

− T’inquiète Christian, ça va s’arranger. Ne désespère pas, lui rassura ce dernier en lui tapotant l’épaule. Je suis sûr que très bientôt les choses s’arrangeront.

− Je l’espère aussi.

Christian baissa la tête et soupira.

 

****

 

Dans la soirée, Christian se trouva dans le salon, assis devant son ordi. Il ouvrit une fenêtre Google et tapa dans la barre de recherche « comment gagner de l’argent » en espérant trouver un moyen de s’en sortir.

Il trouva une kyrielle d’opportunités plus ou moins fiables et en décortiqua quelques-unes.

Entre-temps Sophie sortit de la salle de bain en peignoir court rose, la tête enturbannée d’une serviette de même couleur. Elle rejoignit son mari.

− Tu fais quoi chéri ? Demanda-t-elle en se positionnant debout derrière lui.

− J’essaye de trouver sur Google des moyens pour gagner de l’argent. Mais y’a tellement de choses, que j’ai du mal à distinguer les vrais opportunités des fausses.

− Ne t’inquiète pas. Je chercherai un autre boulot à côté s’il le faut.

− Nan, c’est moi qui le ferai dans ce cas. Ce n’est pas à toi de te tuer la santé pour ramener de l’argent. C’est le rôle et la responsabilité de l’homme ça.

Sophie soupira quelques secondes, puis se dirigea vers l’enceinte Bluetooth oblongue installée sur une commode. Elle l’alluma et fit jouer un bon vieux son de Marvin Gaye, intitulé « Let’s get it on ».

Sophie commença à se déhancher lascivement devant son mari.

− Allez viens danser chéri, dit-elle d’un air espiègle.

− Ah Sophie, tu ne vois pas que je suis occupé là ?  Chercher un moyen de s’en sortir est je pense bien plus important que de danser. Même si c’est du Marvin Gaye.

− Allez, ne fais pas ton timide, plaisanta Sophie.

− Ce n’est pas le moment chéri.

La belle jeune femme fit une légère moue boudeuse, toujours en dansant lascivement, puis esquissa un sourire en se dirigeant vers son mari. Elle prit la main de Christian, pour le forcer à se lever. Celui-ci s’efforça de refuser.

− Nan Sophie...Pas maintenant ! Désolé bébé.

Mais cette dernière, du haut de toute sa féminité, insista en déployant des trésors de sensualité ; qui incitèrent finalement son mari à se mettre debout et à répondre à l’invitation, sous le visage ravi de sa femme.

− Okay…Okay. T’as gagné.

Sophie se mit à rire.

− Dansons à la vie bébé ; et la vie dansera avec nous.

Ils improvisèrent tous les deux une danse sous les airs du célèbre titre de Marvin Gaye.

Christian la fit tournoyer un moment sous sa main puis la fit basculer à la renverse, soutenue par son bras, telle une gestuelle de tango. Sophie était joyeuse, pleine d’insouciance. Jouant langoureusement le jeu, elle se mit à rire de cette danse improvisée et réussit à faire sourire son mari. Cette tranche de vie était une façon à eux de s’évader quelques instants, de leurs soucis quotidiens.

 

****

 

Deux jours plus tard, en matinée.

 

Les joggeurs du  « Jardin du Luxembourg » (Célèbre parc parisien) vêtus de survêtements pour les uns et de shorts pour les autres ; faisaient inlassablement leurs foulées coutumières. Il y en avait pour tous les âges. Nonobstant leurs objectifs nobles, certains néanmoins transpiraient plus la motivation que d’autres, à l’image de Sophie qui en était à son sixième tour ; là où d’autres s’étaient déjà arrêtés à leur cinquième. En plus de son brassard pour smartphone fixé à son bras et de son bracelet-éponge enroulé autour de son poignetcette dernière portait la parfaite panoplie du joggeur averti : à savoir tee-shirt, short et des baskets, tout de noir vêtue. A mesure de ses foulées régulières, elle vit progressivement le parc s’animer et se remplir sporadiquement de badauds et de touristes. Certaines femmes en mâle de compagnie venaient s’assoir seules sur des bancs, attendant sagement qu’on vienne leur conter fleurette au gré des phéromones ; pour embrasser de nouveaux horizons. Minauderies et regards énamourés en perspective. D’autres venaient en familles ou en groupe d’amis pour simplement se lézarder, s’oxygéner l’esprit et s’affranchir du temps jusqu’à ce que les heures s’épuisent. Au milieu de toute cette faune épicurienne, Sophie, ayant encore quelques efforts en réserve, continuait de faire courageusement sa séance de cardio matinal.

Allez, encore un peu et j’arrête ! Songea-t-elle le visage luisant de sueurs.

Au bout de quelques minutes (le temps d’un dernier tour de parc) Sophie entama ses dernières foulées. Puis vint ensuite la séance douloureusement indispensable des étirements. Une fois ce moment de supplices intrinsèque terminé, elle essuya la sueur de son visage à l’aide de son bracelet-éponge, sortit du parc et se dirigea aussitôt au Macdo situé juste en face. Ses tours de chauffe l’avait bien évidemment assoiffé de surcroît ; et Sophie voulut se désaltérer avant de pouvoir rentrer chez elle, dans son appartement situé à quelques à quelques stations de métros ou d’arrêt de bus, du parc. Une fois à l’intérieur du fast-food, elle se dirigea aussitôt vers une des bornes de commandes interactive, présentant l’ensemble des produits Macdo. Que ce soit des Burgers, des boissons ou des desserts.

Bon vas-y, reste tranquille. Ne va pas gâcher à présent ta séance de footing en te goinfrant, songea-t-elle en regardant les divers produits et menus affichés sur la borne.

Après quelques hésitations, Sophie se résolut à prendre une salade et un jus d’orange.

− Voilà, c’est raisonnable comme ça, murmura-t-elle en validant sa commande.

Elle prit sa carte bancaire logée dans une poche de son brassard et paya son repas avec l’option « sans contact ». Un ticket sortit aussitôt de la borne, indiquant le numéro de sa commande qui fut le 92. Une minute plus tard un équipier vint se présenter comme à l’accoutumée au niveau des caisses pour délivrer deux repas respectifs. Celui de Sophie y était présent.

− Commande 92 s’il vous plaît !

− Oui c’est moi, rétorqua Sophie tout sourire en se révélant.

Elle montra sa commande à l’équipier pour lui confirmer qu’elle était bien la bonne cliente. Puis elle prit le plateau et alla se placer machinalement dans un coin du fast-food. A peine s’était-elle assise que son smartphone logé dans son brassard, se mit sonner. Elle s’empressa de le retirer et prit l’appel. C’était sa copine Camille, une ravissante brune aux yeux bleus qui appelait de son appartement, allongée sur un canapé.

− Coucou Sophie ! Comment va ?

− Bien et toi ?

− J’te dérange pas j’espère ?

− J’étais sur le point de grignoter un truc au Macdo, mais vas-y tranquille. J’t’écoute. Tu vas bien ?

− Oui ça va merci. Au fait, y’a une bête de soirée très bientôt, dans deux semaines dans un château. Y’aura du bon son funky à l’ancienne et plein de beaux gosses qui vont avec. Comme ça fait longtemps qu’on ne s’est pas vu, j’me suis dit que ça serait bien qu’on y aille toi et moi, comme au bon vieux temps. Qu’est-ce t’en penses ?

− Tu sais que je suis mariée maintenant Camille ?

− Oui et alors ? T’es quand même pas rentrée au couvent quand même ! Ton mec peut...

− C’est pas « mon mec » Camille, l’interrompit Sophie. C’est mon mari.

− Bon...Bon...Très bien pas d’soucis ! Ton...mari peut très bien te laisser sortir de temps en temps non ? Y’a pas de mal à sortir de temps en temps miss. Et puis n’oublies pas, on a fait les 400 coups toi et moi, petite coquine.

Camille esquissa un sourire malicieux.

− Oui mais ça c’était avant. Je suis mariée maintenant.

− Wow, tu l’aimes à ce point où on t’a lavé le cerveau ?

Sophie secoua légèrement sa tête en esquissant un sourire.

− Tu ne peux pas comprendre. Et je suis très satisfaite de ma situation actuelle. Sans vouloir te décevoir, je veux aspirer à présent à des choses simples de la vie et non à des choses superficielles.

− Euh...C’est bien toi qui me parle la ? Toi qui enchaînais avec moi chaque semaine, les soirées...et les mecs ?

A ces mots, Sophie parut légèrement agacée.

− Oui c’est moi. Et on a tous droit à une seconde chance dans la vie. Bon...j’peux manger ma salade là Camille ?

− Euh...oui désolé. Pardon...Bon Ben si les soirées (et « les mecs ») te branchent plus, je vais donc te laisser cousine. Et si par hasard tu souhaites changer d’avis, tiens-moi au jus.

− Pas d’soucis. À plus tard Camille.

− Ça marche. A+...Mère Teresa ! Fit cette dernière narquoisement en raccrochant aussitôt.

Sophie secoua sa tête en souriant.

− S’pèce de folle va !

Après qu’elle eut raccroché, elle résolut enfin d’entamer sa salade « classic Caesar ».

Deux minutes plus tard, alors qu’elle prit une énième bouchée de son repas, un inconnu muni de son plateau vint à sa rencontre. C’était un homme de type asiatique, quarantenaire. Il avait les cheveux noirs coupés courts et portait le bouc. Tiré sur quatre épingles, il portait un costume et des chaussures noires agrémenté d’une cravate en soie bleue marine, par-dessus une chemise blanche.

− Hum...Excusez-moi ! Fit ce dernier

− Oui ?

− Bonjour ! Pardonnez-moi de vous déranger mais cette place est-elle disponible ? Demanda l’individu au ton calme.

− Oui. Tout à fait.

− Ah très bien. Ça ne vous dérange pas que je m’assois ici ?

− Ce fast-food est un lieu public et il ne m’appartient pas Monsieur. Vous pouvez vous assoir ou vous voulez !

− Ah très bien, merci ! Fit l’individu en déposant aussitôt son plateau sur l’autre table.

Tant que tu n’es pas là pour me saouler, c’est cool, songea la jeune femme.

− Ne vous inquiétez pas, je ne compte pas vous déranger. Je ne suis pas là pour ça, assura l’homme asiatique quarantenaire en retirant sa veste pour la mettre sur sa chaise ; et en desserrant sa cravate pour enfin déboutonner le col de sa chemise.

A ces mots Sophie écarquilla furtivement ses yeux d’étonnement, comme si l’individu venait de lire dans ses pensées, tel un télépathe. Mais au final, ce n’était juste qu’une coïncidence.

− Euh... Merci c’est gentil.

L’individu se mit à lui sourire tout en entamant son premier nuggets, baigné au préalable dans une sauce curry.

− De rien. C’est la moindre des choses mademoiselle.

− C’est Madame. Merci !

− Oh désolé...Madame ! Pardonnez-moi. Vous...Vous êtes donc mariée ! Vous en avez d’la chance.

− Oui je le pense aussi oui.

− Permettez-moi de vous dire alors que votre mari a aussi beaucoup de chance de vous avoir. Car je vous trouve très...ravissante !

− Je sais mon mari me le dit souvent, rétorqua Sophie sur la défensive.

− Oui j’imagine...J’aurai dit la même chose aussi, lâcha t’il en esquissant un léger sourire malicieux. Et depuis combien de temps êtes-vous ensemble, sans indiscrétion ?

− Ça va faire 7 ans dans 1 semaine.

− Félicitations !

− Merci !

− Et vous l’aimez ?

− Quelle question ! Bien sûr que oui. Sinon ça n’aurait pas duré autant.

− Oh vous savez l’amour est parfois fragile, voire même un simulacre insoupçonné.

A ces mots, Sophie sembla perplexe

− Que voulez-vous dire par là ?

− L’amour, ce ne sont pas des mots mais des actes significatifs. Il n’y a pas d’amour vrai sans preuves ni épreuves.

− Oh les preuves, je lui en ai donné je pense et moi j’en ai aussi reçu.

− Ah c’est une bonne chose. Si vous le dites...

− l’amour n’a pas de prix.

− Oh permettez-moi d’en douter. Je crois que tout a un prix justement.

− Non je ne crois pas. Sauf  l’amour...

− Oh je n’en suis pas aussi sûr...Enfin ! Ceci dit, j’aurai peut-être de quoi résoudre vos problèmes financiers ou vous offrir tout ce que vous désirez.

Sophie avait davantage l’air perplexe et fronça instinctivement les sourcils.

− Que voulez-vous dire par là ? Comment savez-vous que j’ai des problèmes d’argent ?

− Je ne sais pas. Juste une intuition. Et puis, tout le monde en a, non ?

− C’est vrai, approuva Sophie en soupirant.

− J’aurai de quoi changer votre vie à jamais.

− Vous êtes sérieux là ? C’est encore une arnaque ça.

− Oh que non...Croyez-moi ! Je suis très sérieux.

− A supposé que ce soit vrai, que faudrait-il que je fasse ?

− Oh trois fois rien, lâcha-t-il dans un sourire. Juste venir un jour avec votre mari dans un lieu à Paris, passer un simple test, une simple épreuve, pour simplement jauger votre amour (réel ou pas) envers votre mari, et inversement. Si vous réussissez le test, vous toucherez...6 millions d’euros.

A ces mots, Sophie manqua de s’étouffer en buvant sa boisson

− Pardonnez-moi fit cette dernière en s’essuyant la bouche, munie d’une serviette. Com...Combien avez-vous dit ?

L’individu se mit à sourire.

− 6 millions d’euros. C’est la somme que vous toucherez le jour même, si vous réussissez à passer le test.

− Moi et mon mari ?

− Vous ou votre mari, peu importe. J’éprouverai votre amour, pour voir si vous vous aimez réellement. Si ma théorie est vraie vous gagnerez 6 millions d’euros. Si elle s’avère fausse, vous n’empocherez rien.

− Vous êtes vraiment sérieux ? Vous proposez 6 millions d’euros, juste pour voir si moi et mon mari nous nous aimons réellement, c’est ça ? Demanda Sophie l’air étonné.

L’individu acquiesça de la tête.

− Alors autant nous donner cette somme de suite, car nous nous aimons véritablement. Et les épreuves, nous en traversons déjà. Donc une de moins ou une de plus, cela ne changera rien pour nous.

− Mon épreuve sera un petit peu…particulier !

− Ah, et de quelle épreuve s’agira-t-il donc ?

− Vous la connaîtrez le jour même. Je ne peux rien vous dire pour le moment. Je ne veux pas vous gâcher la surprise.

− Ah, vous me racontez des histoires, fit Sophie en faisant un geste de la main tout en secouant sa tête.

Au même moment, un sdf ayant réussi à rentrer et à échapper à la vigilance du personnel du fast-food, se présenta devant eux.

A l’image de son visage et de sa barbe hirsute, ses vêtements étaient sales, délabrés et dégageaient une odeur pestilentielle. Il était chaussé de vieilles baskets noires trouées aux extrémités, qui laissaient entrevoir le bout de ses orteils.

− S’il vous plaît, vous n’auriez pas un peu de monnaie par hasard ? C’est pour que je puisse manger, Demanda ce dernier.

La détresse se lisait sur son visage, portant le fardeau de sa misère quotidienne. Sophie était quelque peu embarrassée.

− Désolé, je...Je n’ai rien à vous donner, fit cette dernière. Je viens de dépen...

− Ce n’est pas grave, l’interrompit l’individu asiatique, qui fouilla à l’intérieur de sa veste. Tenez pour vous !! Prenez ça ! Je pense que vous aurez de quoi vous nourrir pendant plusieurs jours avec ça.

Contre toute attente, il venait de lui donner un billet de 200€, sous les yeux médusés de Sophie.

Le nécessiteux, les yeux écarquillés de stupeur, n’en revenait pas.

− Oh c’est trop monsieur, s’étonna ce dernier. Vous...Vous êtes sérieux ? C’est...C’est vraiment pour...pour moi ?

L’individu se mit à lui sourire.

− Oui, prenez le il est pour vous.

Le sans-abri s’exécuta timidement, l’air penaud, en saisissant avec nonchalance le billet de 200€ de la main du généreux donateur.

− Oh, merci infiniment Monsieur, fit-il en s’inclinant devant lui avant de s’éloigner au niveau des bornes de commandes interactives, pour choisir son repas.

− Wow, vous êtes de nature généreuse à c’que je vois, s’enthousiasma Sophie.

− Je le serai bien plus avec vous, si vous comptez venir bientôt faire ce test d’amour avec votre mari, rétorqua l’individu en lui faisant un clin d’œil.

− Hum...Je...Pourquoi pas. Je devrai lui en parler avant.

− Oui je comprends. C’est une décision qui doit se prendre à deux, vu que ça concerne des couples.

− Eh oui...Je...Et...Hum...Comment vous vous appelez ?

− Oh, pardonnez-moi ! Je ne me suis même pas présenté. Je suis vraiment incorrigible, soupira faussement l’individu en secouant sa tête.

Ce dernier mit la main dans sa poche et sortit aussitôt sa carte de visite.

− Tenez, je m’appelle Mr Zhang. Voici ma carte. Mon numéro ainsi que mon email sont inscrits dessus.

Sophie prit la carte et la regarda attentivement.

− Moi c’est Sophie. « Testeur d’amour » ? Original comme statut, s’amusa cette dernière.

− C’est c’que je suis pourtant. C’est mon passe-temps favori. Éprouver l’amour sincère d’un couple, avec une grosse somme à la clef.

− Vu sous cet angle cela semble à priori intéressant, mais...je... (Elle souffla)...vais voir ce qu’en pensera mon mari.

− Très bien. Je vais devoir vous laisser, en espérant vous voir très bientôt pour ce...test d’amour, fit Mr Zhang en se levant avec son plateau en main.

− Tout c’que je peux vous dire pour le moment, c’est que je verrai ça avec mon mari, assura Sophie en rangeant la carte de visite, dans la pochette intérieur de son brassard pour smartphone.

− Pas d’soucis. Peut-être à bientôt. Bonne journée à vous Sophie.

− Bonne journée à vous Mr Zhang.

Ce dernier se dirigea vers une poubelle à proximité, afin de vider son plateau, puis sortit du célèbre fast-food, sous le regard légèrement dubitatif de la jeune épouse.

− what the fuck !!!

 

****

 

Quelques heures plus tard, dans la soirée, Sophie était chez elle dans le salon allongée sur le canapé, la tête posée sur les genoux de Christian. Ils se trouvaient tous les deux devant la télé, en train de regarder en dvd, le film à succès « Black Panther ».

− Chéri ?

− Hum...

− Aujourd’hui j’ai rencontré quelqu’un au Macdo, après mon footing aux « Jardins du Luxembourg ». Un homme assez élégant de type asiatique.

A ces mots Christian fut instinctivement saisit de jalousie et afficha aussitôt une légère mine renfrognée.

− Pardon !? Et tu me dis ça comme ça !? Normal !! Comme si de rien n’était.

− Mais Nan ce n’est pas ça, s’agaça Sophie. Faut toujours que tu vois le mal partout toi.

L’air penaud Christian se ressaisit.

− Désolé chérie. Si j’ai réagis comme ça, c’est tout simplement parce que je tiens à toi c’est tout, reconnaissait ce dernier en lui caressant le visage. C’est vrai que je suis un peu parti vite en besogne. Excuse-moi.

− Pas d’soucis. Moi aussi Christian je tiens à toi, répondit elle en lui souriant.

Après un court regard mutuel enamouré, Ils se firent un baiser de réconciliation.

− Bref je t’écoute chérie. Qu’avais-tu à me dire ?

− En fait voilà. Comme je t’ai dit, j’ai rencontré aujourd’hui un monsieur assez énigmatique, alors que je mangeais au macdo après mon sport.

− Okay.

Christian prit la télécommande de la télé afin de baisser le volume. Il se mit cette fois-ci à écouter religieusement les paroles de sa femme.

− Apparemment c’est un monsieur très riche, qui a de l’argent.

Christian fronça instinctivement les sourcils.

− Et qu’est-ce qu’il t’a dit ? Demanda ce dernier.

− Il s’est présenté comme quelqu’un voulant me proposer 6 millions d’euros.

− Quoi ? Mais qu’est-ce que tu racontes ?

− Je t’assure chéri. Il s’est proposé de me les offrir sous condition.

− Ah oui laquelle s’il te plaît ? J’voudrai bien savoir. T’es sûre que ce n’est pas une arnaque ce truc ?

− Je ne sais pas, mais toujours est-il que la condition est d’éprouver notre amour. Il veut juste voir si l’on s’aime vraiment avant de nous donner cette somme. C’est fou non ?

Christian se mit à rire.

− Attends, t’es sérieuse Sophie ? Demanda ce dernier l’air amusé. Et tu penses qu’avec tout ce que tu viens de me dire là, ce n’est pas une arnaque ? Soyons sérieux...

− Je sais que ça a l’air une arnaque mais je l’ai vu donner 200€ comme ça, sans problème, à un sdf. Il les avait sorti de sa poche.

− Ah bon ?! Il a donné 200€ cash comme ça à un étranger, sans rien attendre en retour ?!

Sophie acquiesça de la tête.

− C’est ce qui m’a incité à vouloir prendre sa carte de visite, car sa générosité apparente m’a bluffé. Et je me suis dit que peut-être il disait vrai.

− Ah bon, tu as sa carte ?

− Oui la voici.

Sophie mis sa main dans la poche de son bermuda beige, en sortit le petit bout de papier et le présentât à Christian. Ce dernier le regarda attentivement.

− Hum...Mr Zhang (les yeux de Christian s’écarquillèrent de manière soudaine). Qu...Quoi !!? « Testeur d’amour »? C’est quoi ça ?

Sophie se mit à sourire.

− Ben ce que je t’ai dit tout à l’heure. Lui ce qu’il veut c’est éprouver l’amour des couples. C’est son kif.

− C’est chelou quand même, fit Christian en mettant le doigt sur sa bouche, l’air perplexe.

− T’imagine si on les avait ces 6 millions d’euros ? T’imagine ce que l’on pourrait faire avec ? Régler toutes nos dettes, partir en vacances, s’acheter une belle voiture ou une belle maison, créer un bizness, etc.

− Oui mais...Je...Je ne sais pas. Ça ne me dit rien qui vaille. Mon intuition me fait dire que ce n’est pas une bonne idée, car cela paraît trop facile.

− Moi mon intuition me dit le contraire. Si la seule condition sine qua none c’est de pouvoir prouver notre amour, alors le jeu en vaut la chandelle chéri. Il n’y aura rien de plus facile que ça.

Christian l’air septique regarda de nouveau la carte de visite de Mr Zhang, en la faisant machinalement tournoyer à l’aide de ses doigts. Il était plongé dans ses pensées, essayant de jauger la crédibilité de cette opportunité. Après un temps de réflexion assez court, le couperet venait visiblement de tomber dans son esprit.

− Ah, laisse tomber ça Sophie. Tout ça c’est des conneries, trancha-t-il en déchirant en plusieurs morceaux le petit bout de papier. Il les déposa ensuite sur la commode, située juste à côté du canapé.

Voyant cette opportunité éventuelle lui filer entre les doigts, due au scepticisme de son mari, Sophie soupira en secouant sa tête.

− Mais pourquoi as-tu fait ça chéri ? Si cette opportunité s’avérait vraie, elle aurait pu définitivement nous sortir de la galère. Tu as tout gâché.

− Désolé mais je ne la sentais pas cette opportunité justement. Ça ne me disait rien qui vaille. Si j’ai déchiré la carte en plusieurs morceaux, c’était pour ainsi dire nous protéger de ce qui pouvait nous attendre Sophie. On ne sait clairement pas où l’on aurait mist les pieds.

− Ah oui ? Et pour nous protéger de quoi s’il te plaît ?

− Oh, Dieu seul le sait Sophie. Dieu seul le sait...Si on ne saura jamais ce que l’on perd, on saura néanmoins ce que l’on a gagné, conclut Christian en reprenant la télécommande de la télé, afin d’augmenter de nouveau le volume.

Plongée dans un mutisme soudain, Sophie avait la mine renfrognée. Un ange déchu venait de passer.

 

****

 

Deux semaines plus tard. Un samedi. Dans la matinée. Comme à l’accoutumée, Sophie faisait son footing au « Jardin du Luxembourg ». Détermination oblige, elle ne tenait nullement à déroger à cette règle. Après avoir longuement fait le tour d’elle même, elle ponctua son activité sportive par quelques étirements intrinsèques ; qui lui fit davantage gagner en souplesse et en récupération. Une fois les exercices de torture terminés, elle se dirigea vers la sortie du parc. Une fois à l’extérieur, au niveau de l’entrée, Sophie sentit la vibration d’une notification sms sur son brassard. Elle sortit le smartphone de l’étui, afin d’y lire le contenu. C’était un message laconique de son mari.

« Faut qu’on parle... », écrivit ce dernier.

Sophie fronça instinctivement les sourcils et soupira. Elle savait en filigrane ce qui transpirait à travers ce message. Au moment où elle s’apprêta à pianoter sur son portable pour lui répondre, un jeune individu trentenaire, casque aux oreilles, passa près d’elle sans faire attention, emportant le smartphone et le projetant sur le sol à quelques centimètres d’elle. Fort heureusement il fut protégé par une coque.

− Bon sang !! Peuvent pas faire attention ces jeunes avec leur musique à fond dans leurs casques de merde, maugréa la jeune femme. C’est pas vrai ça...

La mine renfrognée, Sophie se dirigea vers son smartphone esseulé sur l’asphalte, afin de le ramasser, lorsque contre toute attente, une main charitable se dévoua pour le faire à sa place. Stupeur. Ce fut celle de Mr Zhang.

− Mr Zhang ?! S’étonna Sophie.

 −Oui c’est bien moi...Hum...Votre visage me semble familier. On s’est rencontré je crois y’a quelques semaines de cela il me semble, fit ce dernier en lui redonnant son smartphone. Tenez.

− Merci. Oui c’était au McDo juste là, rétorqua Sophie en lui indiquant de la main le fast-food.

− Ah oui, ça y est j’m’en souviens. Ben alors, qu’est-ce qui s’est passé ? Vous étiez porté disparu ? Questionna le dandy asiatique quarantenaire, de manière narquoise.

Sophie se mit à sourire jaune.

− Non du tout Monsieur. C’est qu’en fait...euh...mon mari et moi étions ...

− J’ai cru que mon offre ne vous intéressait plus, l’interrompit Mr Zhang.

Ce dernier esquissa un sourire malicieux, voire presque subrepticement sardonique.

− Bien sûr que si, mais... nous avions eu quelques...impondérables.

− Je vois. Ça ne peut être que des problèmes d’argent j’imagine.

− Euh...Non...enfin...euh...ce n’est pas que ça. Cela serait trop long à vous...à vous expliquer.

− Pas d’soucis. Je comprends. Avez-vous toujours ma carte ?

A cette question, Sophie détourna brièvement son visage, en plissant ses lèvres.

− Ben c’est bizarre que vous me demandiez ça, car le jour où l’on s’est rencontré au macdo, y’a un mois de cela, j’avais fait une lessive chez moi et j’y avais mis mon short dans la machine. Votre carte était dans l’une des poches et j’ai malencontreusement oublié de la retirer. Au final...

− J’ai compris, l’interrompit de nouveau Mr Zhang. Vous voulez que je vous en redonne une autre, c’est ça ?

− Si cela ne vous dérange pas.

A ces mots, le dandy asiatique mit sa main à l’intérieur de sa veste et en retira une nouvelle carte de visite.

− Tenez ! Ne la perdez ni ne l’oubliez pas dans votre short cette fois-ci. En espérant que vous en fassiez bon usage, fit Mr Zhang en lui esquissant un sourire toujours aussi subtilement sardonique.

− Ne vous inquiétez pas, on vous appellera très bientôt, rétorqua Sophie tout sourire, en lui prenant la carte dans ses mains.

− J’y compte bien (il lui fit un clin d’œil). Bonne journée à vous !

− Bonne journée Mr Zhang.

Ce dernier prit congé de la jeune femme et interpella un taxi. Il l’investit et s’éloigna sur l’asphalte parisien. A son tour, Sophie mit la carte dans la poche de son short, descendit dans la station de métro et prit son RER, pour regagner son appartement ; le cœur revigoré de lueurs.

 

****

 

Quelques minutes plus tard, Sophie fut rentrée chez elle. Elle se trouva assise sur le canapé, toujours en tenue de sport, en compagnie de son mari Christian. Ce dernier voulut expressément lui parler dès lors qu’elle aurait été de retour. Étrangement, il afficha un air rembrunit. L’ambiance fut comme solennelle, pesante.

− Chérie, j’ai...j’ai de mauvaises nouvelles, fit ce dernier.

− Et moi j’en ai peut-être de bonnes.

− De quoi tu parles ? Demanda son mari l’air intrigué.

− J’te dirai ça tout à l’heure t’inquiète. Pour l’instant je t’écoute.

Perplexe, Christian la dévisagea pendant quelques secondes, avant de secouer sa tête.

− Bref...

− Vas-y chéri, je t’écoute...

− Je crois qu’on n’est pas encore à l’abri de futurs  problèmes Sophie, soupira Christian en Lui montrant un papier. Je l’ai reçu ce matin en lettre recommandée, pendant que tu faisais ton footing au « Jardin du Luxembourg ».

− C’est quoi ? Demanda sa femme l’air perplexe, en prenant le document afin de le lire.

− C’est une lettre du bailleur qui nous somme de régler nos trois loyers de retards d’ici une semaine, sous peine d’expulsion. Peut-être qu’on devrait aller vivre en banlieue, plutôt que de vivre...que dis-je...survivre à Paris, tu ne penses pas ? Les loyers sont moins chers là -bas.

Sophie se mit à sourire, contre toute attente.

− Ou peut-être devrions-nous rester sur paris aussi, dit-elle en sortant de la poche de son short, une nouvelle carte de visite de Mr Zhang.

Christian prit la carte, la regarda en soupirant.

− C’est quoi ça ? Tu te moques de moi ?

− Pourquoi chéri ?

− Tu l’as rencontré de nouveau ?

− Oui juste à l’entrée du parc.

− C’est lui qui t’a proposé de nouveau sa carte ou c’est toi qui le lui as demandé ?

L’air Penaude, Sophie ne répondit pas.

− C’est peut-être un piège chérie !

− Ou bien une réelle opportunité. Tu n’en sais rien, fit la jeune femme.

− Et toi ? Qu’est-ce que tu en sais ? Tu penses vraiment qu’il va nous donner 6 millions, juste pour voir si l’on s’aime vraiment ? Ça doit cacher quelque chose toute cette affaire. Réfléchis un peu chérie !

− C’est tout réfléchi Christian. Nous allons avoir un bébé, révéla Sophie contre toute attente la voix sanglotante, en laissant couler une larme. C’est...C’est peut-être une...une chance pour que notre bébé...ait un bel avenir !

A ces mots, Christian surpris, écarquilla ses yeux.

− Tu...Tu en es sure ? Questionna ce dernier tout ému.

Sans lui répondre Sophie se leva et se dirigea vers une commode qui se trouva dans le salon. Elle ouvrit le premier tiroir du haut, passa sa main en dessous d’une pile de vêtements et en sortit une enveloppe. Elle retourna ensuite s’assoir sur le canapé, près de son mari.

− Tiens regarde ! Fit la jeune femme en lui montrant l’enveloppe.

Christian l’air surpris la saisit puis l’ouvrit lentement. Il en sortit un test de grossesse qui affichait positif

− Je l’ai acheté y’a deux jours Christian.

− Mais pour...Pourquoi tu ne me l’a pas...pas dis ?

− Parce que je voulais t’en faire la surprise.

− Ben c’est clair que c’est réussi. Je suis surpris.

A ces mots, Sophie étouffa un rire.

− Et c’est un garçon, une fille ? Demanda Christian.

−  Je ne sais pas encore. Toujours est-il que notre bébé a une chance de pouvoir naître sous de meilleurs auspices, sous un autre jour, un autre horizon. Et en tant que future mère, je n’ai vraiment pas envie de rater cette opportunité de vie. Si tu ne veux pas le faire pour moi chéri, fais-le au moins pour lui.

− Nan ce n’est pas ça...C’est que...

− C’est que quoi ? L’interrompit Sophie. Si j’accepte de faire ce test ce n’est pas pour moi ni même pour toi (suite à cette remarque Christian la regarda), mais plutôt pour le bébé. Parfois il faut savoir saisir et surtout reconnaître, les opportunités que la vie peut nous offrir. Surtout si elles se manifestent...une seconde fois, comme une...seconde chance !

Christian fut plongé dans un mutisme soudain. Il baissa la tête et réfléchit. Des questions se taraudaient et se bousculaient dans sa tête. Entre-temps Sophie se détourna de trois quart, les bras croisés, comme si elle s’était mise à lui bouder. Ce qui incita son mari au final à réagir.

− C’est bon chérie on ira faire ce...ce test ! Excuse-moi. Si ça peut offrir un meilleur avenir à notre bébé, alors je n’hésiterai pas une seule seconde.

− Pourtant cela fait plus d’une seconde que je t’ai parlé Christian.

Ce dernier se mit à rire jaune.

− Oui c’est...C’est vrai Sophie... Hum...Excuse-moi bébé, excuse-moi ! Dit-il en mettant son bras par-dessus son épaule.

− Octroyons nous encore deux/trois derniers jours de réflexion et promis on l’appellera ensuite chérie. Okay ?

Sophie acquiesça de la tête, en lui esquissant un sourire attendrissant.

 

****

 

Dans la nuit, vers 23h, le jeune couple d’ébène se trouvait dans son lit, sous la couverture. Ils étaient tous les deux plongés dans la lecture chronophage de leurs livres respectifs. Christian avait chaussé ses lunettes noires pour l’occasion. Soudain, une pensée lui traversa l’esprit.

− J’espère seulement que cette opportunité qui semble trop beau pour être vrai ne soit au final ni une arnaque ni un traquenard, fit ce dernier en arrêtant sa lecture pour pouvoir s’adresser à sa femme.

Cette dernière fit de même en déposant son livre devant elle, avant de lui répondre.

− Tss...Arrête de faire ton parano chéri. Tu n’arrêtes pas de te répéter. C’est bon, change de disque....Il ne va pas nous tuer non plus (Elle rigola). Je l’ai vu à deux reprises : aujourd’hui et il y a un mois. C’est quelqu’un de très élégant et de très courtois. Et par-dessus tout de très généreux, malgré son petit côté mystérieux.

A ce dernier mot Christian tiqua.

− Mystérieux ? S’étonna ce dernier l’air faussement intrigué.

Sophie se mit à rire.

− Oh ça va, rétorqua cette dernière l’air amusé. Quand je dis « mystérieux » c’est juste l’impression qu’il m’a donné au début, voilà tout.

− Et l’impression qu’il te donne la maintenant c’est quoi ? Demanda son mari de manière narquoise.

Amusée par cette  remarque Sophie, souriante, le dévisagea sans rien dire.

− Toi, si je n’étais pas ta femme, tu n’aurais jamais eu l’opportunité de pouvoir gagner tout cet argent, songea cette dernière.

− Au fait, quel nom choisira-t-on pour notre enfant ? Demanda-t-elle toute fière en changeant délibérément de sujet ?

Christian comprit la tactique de sa femme et se mit à rire, comme pour le lui faire comprendre ; avant de lui répondre comme si de rien n’était.

− Y’a l’embarras du choix je pense...Si c’est un garçon, on pourrait par exemple l’appeler Thomas comme Sankara. Ou alors l’appeler Patrice comme Lumumba. Ou alors Laurent comme Gbagbo. Ou alors l’appeler Jean-Jacques comme Dessalines ou Toussaint comme Louverture.

− Que des étoiles noires ! C’est vrai que les prénoms d’activistes panafricains, ce n’est pas ce qui manque. Par contre, si c’est une fille on pourrait l’appeler Harriet comme Tubman. Ou alors l’appeler Rokhaya comme Diallo. Ou alors Rosa comme Parks. Ou alors l’appeler Angela comme Davis. Ou bien Anne comme Zhingha. Ou alors Aïssa comme Maïga.

− Ou alors si c’est toujours un garçon, l’appeler Kemi comme celui qui se bat. Ou alors Marcus comme Garvey.

− Ou alors l’appeler Éric comme...Zemmour !

− Pa...Pardon?!! C’en est trop ! Je demande le divorce, plaisanta Christian en secouant sa tête.

Sophie ne put s’empêcher de rire.

 

****

 

Après l’octroi de deux jour de réflexion en plus, comme en il était convenu, le jeune couple résolu d’appeler l’énigmatique homme asiatique. Ils se trouvaient attablés dans leur salon, dans l’après-midi, se tenant mutuellement la main ; comme pour témoigner l’un à l’autre de leur solidarité, et de leur envie de rester soudés malgré tout. Sophie se mit à composer sur son smartphone, le numéro qui fut mentionné sur la carte de visite posée sur la table.

− T’es prêt ? Lança cette dernière à son mari en mettant son portable sur haut-parleur.

Christian acquiesça de la tête en soupirant légèrement. Son épouse se mit à lancer l’appel. Au bout de deux sonneries, le mystérieux homme décrocha au bout du fil. Il était dans un somptueux appartement près des Champs-Elysées, en train de lire son journal, allongé sur son canapé dans le salon.

− Allo, Mr Zhang ?

− Oui c’est lui-même. Qui est à l’appareil ?

− C’est Sophie. On s’est rencontré y’a quelques jours, à l’entrée du « Jardin du Luxembourg ». Vous m’aviez redonné votre carte de visite. Vous vous en souvenez ?

− Ah oui, je me rappelle très bien de vous. Vous êtes la femme que j’avais déjà rencontré un mois auparavant au macdo du Luxembourg, c’est ça ?

− Oui tout à fait. Après mûres réflexions, nous avons décidé mon mari et moi, d’accepter votre euh...

− ...proposition ! L’interrompit le richissime asiatique. Et vous avez bien fait Sophie, croyez-moi. C’est le genre d’opportunité qui n’arrive qu’une seule fois dans une vie. Cela aurait été vraiment dommage de ne pas vouloir en profiter. 6 millions d’euros ce n’est tout de même pas négligeable.

− Oui, c’est ce que nous avons pensé mon mari et moi. Et en quoi consistera cette épreuve ou ce test Mr Zhang ?

A ces mots, ce dernier esquissa un léger sourire sardonique.

− Vous le saurez le jour J, mais pas avant. Je ne peux tout vous dévoiler maintenant. Vous saurez de quoi il en retourne, connaitrez tous les tenants et aboutissants, que lorsque vous serez sur place avec votre mari.

− Ah okay très bien. C’est plein de mystères tout ça, mais bon, le jeu en vaut la chandelle je pense.

− Exactement Sophie. Oui…

− Je suppose que vous avez déjà fait ce genre de test à d’autres couples.

− Oui tout à fait Sophie.

− Et comment cela s’est-il passé Mr Zhang ? Ont-ils pu gagner cette somme faramineuse que vous me proposer ?

− Pour la plupart d’entre eux oui.

− Ah vous voyiez bien que le vrai amour existe entre deux personnes.

− Ah c’est...hum...plus compliqué que ce qu’il n’y parait.

− C’est à dire ?

− Je vous l’expliquerai quand on se verra.

− Bon…très bien. Et qu’est-il arrivé aux couples qui n’ont pas pu gagner cette somme Mr Zhang ?

− Ben ils n’avaient plus que leurs yeux pour pleurer. C’était mort pour eux.

− Ah oui j’imagine. Voir autant d’argent passer sous leur nez, cela a du être frustrant.

− Tant pis pour eux. En espérant que cela ne vous arrive pas également Sophie.

− Oh je ne pense pas non. Et à quel endroit cela se passera-t-il ? Peut-être que cela aussi doit être tenu secret, fit Sophie.

− Oui tout à fait, rétorqua le dandy asiatique en rigolant. Tout ce que je peux vous dire, c’est que cela se passera un week-end. Un samedi plus précisément. Mais je vous enverrai par sms d’ici 30 minutes, toutes les indications et directives pour venir sur les lieux.

− Okay c’est noté. J’attends donc votre sms.

− Pas de souci. Il vous sera bien envoyé.

− Bonne journée à vous Mr Zhang. A très bientôt.

− Bonne journée à vous Sophie. A bientôt. Bye !

Aussitôt qu’il raccrocha, l’expression du visage et l’humeur du mystérieux nanti asiatique changèrent radicalement ; comme si son masque venait de tomber. Il était soudainement devenu froid et menaçant. Il consulta le répertoire de son smartphone puis sélectionna un contact. Il se mit à lancer l’appel. Au bout de deux sonneries, quelqu’un décrocha au bout du fil, sans parler. C’était un colosse noir au visage patibulaire.

− Nous avons de nouveaux partenaires de jeu, un nouveau couple. Préparez l’endroit pour ce week-end.

− Reçu patron, rétorqua de manière laconique l’homme à la voix grave.

A ces mots, Mr Zhang raccrocha sans ne rien dire davantage. De son côté, Sophie semblait enthousiaste de pouvoir enfin avoir l’opportunité de participer à cette épreuve mystérieuse ; qui allait peut-être à terme changer sa vie à jamais. Elle attendait ce sms avec impatience. Christian quant à lui était plus mesuré en faisant fi de tout triomphalisme inapproprié. Bien qu’une grosse somme d’argent fût à la clef, il préféra néanmoins rester prudent, être dans l’expectative ; et voir comment les choses allaient se décanter.

 

Trente-cinq minutes plus tard, la notification d’un sms retentit sur le smartphone de Sophie, posé sur la table du salon. Cette dernière qui fut assise sur le canapé avec Christian, regardant un programme télé, se leva aussitôt afin de consulter le message.

− C’est Mr Zhang ! Révéla-t-elle en rejoignant son mari sur le canapé.

− Vas-y, chérie lis moi le contenu s’il te plaît.

Cette dernière ouvrit le message et le lu intégralement à voix-haute.

 

« Cher Christian et chère Sophie,

 

C’est Mr Zhang. Tout d’abord merci encore d’avoir accepté ma proposition et résolu de participer à cette épreuve un peu spécial, cette épreuve d’amour dont je vous ai précédemment parlé. Si vous arrivez à la réussir, six millions d’euros cash vous seront remis, déposés dans une mallette qu’on vous remettra le jour même. Je dis « vous » bien sûr car je vous écris à tous les deux présentement (A ces mots Sophie eut l’air perplexe, sans pour autant y accorder trop d’importance). Je comprends que des questions légitimes vous auront très certainement taraudé l’esprit, quant au sérieux de mon offre, à savoir si c’est une entourloupe ou pas, mais sachez que je suis un homme de parole. Je suis quelqu’un de très connu et respecté dans le milieu des affaires ; et je n’ai pas pour habitude de flouer les gens. L’argent ne pourrit que les gens pourris. Ceci dit, une fois sur les lieux du site, je vous informerai des tenants et aboutissants du test en question. Sachez néanmoins qu’il n’y aura aucune option de rétractation une fois l’épreuve commencée. Si vous avez décidé d’accepter cette épreuve, en votre âme et conscience ; il faudra dès lors accepter les règles et aller jusqu’au bout. Donc je vous donne rendez-vous ce samedi à 18h devant l’entrée extérieur de la Gare du Nord, celle qui est en face du Burger King.

Un de mes gars viendra vous chercher sur place, afin de vous emmener sur les lieux. Si, dès la lecture de ce message, vous êtes toujours intéressés pour participer à cette épreuve d’une valeur de 6 millions d’euros, alors veuillez simplement me le confirmer par un  OK. ».

 

Confiante, Sophie répondit sans hésitation.

Okay

 

****

 

Samedi, 17h10

 

Christian et Sophie étaient encore dans leur salon. Ils étaient debout, apprêtés, sur le point de partir à ce fameux rdv qui allaient peut-être changer leur vie.

− Prêt pour le grand saut chéri ? Demanda Sophie légèrement enthousiaste. Cela risque d’être une grande journée aujourd’hui, à marquer d’une pierre blanche.

− ...Ou pas ! On ne sait toujours pas réellement où est-ce qu’on va mettre les pieds chérie, soupira Christian en se dirigeant vers la commode du salon.

-Ne sois pas si pessimiste chéri. Pense seulement à notre futur bébé. Mais...Qu’est-ce que tu prends dans la commode ? S’étonna la jeune femme, l’air perplexe.

− ...Ce qui pourra nous être utile en cas d’accroc, rétorqua le jeune trentenaire en sortant du premier tiroir d’en haut, un tazer qu’il coinça dans son jean derrière son dos, sous son tee-shirt noir.

Voyant cela, Sophie soupira et secoua sa tête.

− T’es vraiment pas croyable chéri. Un vrai parano...

− Ouais...Tu me remercieras peut-être plus tard, fit ce dernier en passant devant sa femme pour ouvrir la porte d’entrée.

− ...Ou pas ! Rétorqua cette dernière en repassant devant son mari, afin de sortir de l’appartement.

Ce dernier secoua sa tête, puis sorti à son tour et ferma la porte à double-tour.

− J’espère de tout cœur pouvoir me tromper. Maintenant, allons-y, ordonna-t-il à sa femme en prenant l’escalier.

 

****

 

Comme convenu, le jeune couple trentenaire se trouvait quelques minutes plus tard, à l’heure prévue, sur le parvis de la Gare du Nord ; tout près de l’œuvre artistique monumentale signée Richard Texier : L’Angel Bear. Un ours ailé géant parsemé de trous comme du gruyère, laqué de rouge vermillon. Sophie et Christian étaient déjà arrivés 10 mn en avance. Soudain un 4x4 noir rutilant se gara devant eux. D’instinct, Christian déglutit et Sophie quant à elle, paradoxalement, esquissa un sourire.

− Je pense que c’est eux, murmura cette dernière à son mari.

− Je le pense aussi. Au moins ce sont des gens ponctuels (ses propos firent sourire sa femme).

A peine Christian eut-il terminé sa phrase que la vitre côté conducteur du véhicule se baissa automatiquement, laissant apparaître la silhouette imposante d’un homme. C’était un colosse serbe taillé dans la pierre, façon Schwarzenegger à l’accent prononcé, en costume cravate tout de noir vêtu. Il avait le visage impassible, voire subrepticement psychorigide.

− Monsieur et Madame Christian et Sophie Dieng ? Demanda ce dernier au jeune couple d’ébène.

− Oui, c’est bien nous, répondit Sophie. Vous venez bien de la part de Mr Zhang ?

Le colosse acquiesça de la tête.

− Montez ! Je vous y emmène. Il vous attend.

− Le jeune couple trentenaire s’exécuta en investissant le siège arrière du véhicule.

− Ou allons-nous Monsieur ? Demanda Christian après avoir laissé monter sa femme et fermer ensuite la porte derrière elle.

Ce dernier n’obtint pas de réponse, de la part du colosse serbe conducteur. Ce qui eut pour effet immédiat d’exacerber la paranoïa du jeune trentenaire ; qui commença à afficher une légère mine renfrognée.

− C’est pas grave chéri, lui murmura Sophie en mettant sa main sur sa cuisse. Ce n’est pas un bavard comme Mr Zhang, voilà tout.

− En tout cas, ça ne me dit rien qui vaille tout ça.

Sophie haussa ses épaules et secoua sa tête.

 

****

 

Quelques minutes plus tard, ils arrivèrent dans le quartier de la Villette, dans le 19e arrondissement. L’endroit fut un hangar désaffecté de 500 mètres carrés qui fut un des anciens garages de trains de la petite ceinture de Paris. Il était composé de briques rouges, lui conférant un style industriel voire underground.

Le conducteur et colosse serbe se gara dans un parking extérieur qui fut à proximité de l’entrepôt.

− Ah, enfin nous voilà arrivé, fit Sophie en souriant à son mari.

− Il était temps, rétorqua ce dernier.

Au même moment, deux hommes habillés de la même manière que le colosse serbe taciturne, sortirent du hangar. C’était un noir et un russe, tous deux bodybuildés. Ils se dirigèrent vers le couple d’ébène trentenaire.

− Sortez du véhicule et suivez ces deux messieurs qui viennent à votre rencontre.

Christian fronça les sourcils et afficha une légère mine renfrognée.

− Et les « s’il vous plaît...merci... », vous ne connaissez pas ? Maugréa ce dernier en sortant du véhicule en premier.

Le colosse serbe tourna à peine son visage impassible vers Christian sans pour autant vouloir lui répondre, encore une fois.

− Ah c’est bon chéri. Laisse tomber, fit Sophie en sortant à son tour du véhicule.

Christian résolut de se calmer en toisant une dernière fois le conducteur, qui resta dans le véhicule.

− Pourquoi ne sort-il pas lui aussi ? Demanda-t-il.

− Je ne sais...

− Mr et Mme Dieng ? L’interrompit l’un de deux hommes qui se tenaient en leur présence.

− Oui c’est bien nous. Bonsoir messieurs !

− Bonsoir ! Veuillez nous suivre s’il vous plaît ! Mr Zhang vous attend à l’intérieur, ordonna l’individu en indiquant de la main le hangar désaffecté.

Le jeune couple s’exécuta et les suivirent.

− Au moins eux ils sont polis et ont de l’éducation, murmura Christian en chemin, à sa femme.

Cette dernière se mit discrètement à rire.

 

****

 

Dès lors qu’ils furent à l’intérieur, Sophie et Christian virent au loin, à environ une quarantaine de mètres, Mr Zhang assis près d’une table lisant avec attention un quotidien. C’était à peine si ce dernier avait remarqué la présence du jeune couple. Il y avait également deux chaises disposées l’une en face de l’autre. Une femme vint à leur rencontre et se présenta à eux. C’était une belle femme indienne aux cheveux longs bouclés, tombant sur ses épaules. Elle portait des talons et une longue jupe noire, par-dessus une chemise blanche.

− Bonsoir, je m’appelle Olivia. Pour des mesures de sécurité, nous devons procéder à une palpation. Vu l’enjeu de cette soirée, j’ose espérer que vous comprenez cela.

A ces mots, Sophie regarda Christian l’air gênée. Elle pensa aussitôt au tazer que son mari cachait sur lui. Ce dernier, taciturne, mordilla nerveusement ses lèvres.

− Oui, oui bien sûr, rétorqua Sophie un tantinet nerveuse. Nous comprenons, au vu de la grosse somme d’argent qui est en jeu, que cela est tout à fait légitime.

− Très bien.

L’un des deux hommes, le colosse russe, ferma la porte d’entrée du hangar. La belle indienne de son côté commença à procéder à une palpation rigoureuse sur Sophie. L’autre homme fit de même sur Christian. Au bout de quelques secondes, ce dernier sentit un objet dans le bas de son dos. Le colosse noir soupira en montrant le tazer à ses collègues, avant de le mettre dans la poche de sa veste. Voyant cela, le russe, semblant contenir sa colère, se mit à regarder Christian d’un œil torve. Sophie quant à elle était toute penaude.

− Je peux comprendre votre anxiété Mr Dieng, mais vous n’en aurez pas besoin ici. On ne vous a pas forcé à venir, non plus. Vous êtes venu de votre plein gré, alors pas de... d’incivilités…si je puis dire...Je vous prie, fit Olivia qui venait de finir de palper Sophie sans rien trouver de répréhensible sur elle.

− Oui...pardonnez-moi...je...

− Ce n’est pas grave, l’interrompit Olivia. Allons maintenant rejoindre Mr Zhang ! Il vous attend.

La belle indienne ainsi que ses deux collègues masculins psychorigides, se mirent à escorter le jeune couple jusqu’au richissime milliardaire asiatique. Ce dernier sentant enfin leur présence se rapprocher de lui, à quelques mètres, ferma aussitôt son journal afin de les accueillir comme il se doit. Il se leva de sa chaise et afficha son plus beau sourire.

− Mr et Mme Dieng, ravi de vous rencontrer enfin tous les deux, fit-il en leur serrant respectivement la main.

− Bonsoir Mr Zhang ! Firent le jeune couple.

− Allez-y, asseyez-vous je vous en prie. Les chaises sont disposées l’une en face de l’autre, mais c’est pour le bon déroulement du test. Soyez sans crainte.

− Pas d’soucis répondit Sophie en s’asseyant en même temps que son mari.

Mr Zhang s’asseya à son tour sur sa chaise. Quant à Ses deux sbires bodybuildés ainsi qu’Olivia, ils se positionnèrent juste derrière lui, debout, arborant une certaine prestance.

− Tout d’abord, je souhaiterai dire que je suis heureux de vous rencontrer Mr Dieng. J’ai eu l’occasion de rencontrer Sophie à deux reprises, sans jamais vous voir. Je suis donc honoré de rencontrer son âme-sœur.

A ces mots, cette dernière lança un regard attendrissant à son mari, en minaudant quelque peu. Ce dernier avait le visage fermé.

− Je suis également honoré de vous rencontrer Mr Zhang, rétorqua Christian, impassible.

− Merci c’est gentil Mr Dieng.

Le richissime asiatique fit mine de réfléchir deux secondes, en mettant son doigt devant sa bouche.

− Bon...Vous savez déjà que je vous ai réuni pour simplement éprouver votre amour, avec à la clef la coquette somme de 6 millions d’euros...mais savez-vous réellement ce qu’est l’amour ?

− Oui. C’est quand deux êtres éprouvent et ressentent des sentiments, l’un envers l’autre, répondit Sophie.

− Pas tout à fait mais presque.

− Comment ça presque ? Demanda Christian l’air perplexe.

− Oui car il faut que les sentiments réciproques soient au diapason, au même niveau. Sinon c’est bancal et ça n’est pas de l’amour. Et il est très rare de le trouver de nos jours, dans cette société consumériste et hyper sexuée. Tout n’est qu’intérêt et égoïsme dans ce bas monde.

− Vous pensez réellement que peu de couples sur terre arrivent à s’aimer vraiment Mr Zhang ? Demanda Sophie.

− J’en suis convaincu. Et je suis là pour le démontrer.

− Dans ce cas je pense que nous devons être le seul couple qui doit faire exception à la règle, fit Christian.

A ces mots, Mr Zhang esquissa un léger sourire.

− Si vous le dites...Si vous le dites (Christian et Sophie s’échangèrent un regard furtif). Vous savez, le vrai Amour n’est pas calculateur, il est divin. Celui des hommes sera toujours intéressé, partiel, relatif ou par convenance. Aimer quelqu’un juste pour ce qu’il est et non pour ce qu’il a ou représente, sans condition et de manière désintéressée, est pour moi le propre de Dieu...et même de certains animaux ! Eh oui...car parfois voire même très souvent, il n’y a pas plus humain qu’un animal. Donc, les gens s’aimeront-ils toujours face à la pauvreté, voire même face à la richesse ? C’est ce que je veux m’évertuer à démontrer aujourd’hui même ! Car je suis convaincu que non seulement l’argent ne garantit pas l’amour ; mais il peut aussi à bien des égards le relativiser.

− Mais...Sauf votre respect Mr Zhang, vous semblez avoir vécu de mauvaises expériences en amour, pour pouvoir parler et raisonner comme ça. Est-ce que j’me trompe ?

− Oui vous vous trompez, répondit sèchement l’homme d’affaire asiatique ; comme si il venait soudainement d’être piqué au vif.

Face à cette vive réaction ambiguë, Christian et Sophie s’échangèrent de nouveau un regard, beaucoup plus appuyé qu’auparavant.

− Hum...Sans vouloir vous brusquer Mr Zhang et vous manquer de respect, venons-en au fait si cela ne vous dérange pas, fit Christian. Nous sommes venus vous prouver que nous nous aimons réellement. Mettez nous à l’épreuve et vous verrez bien.

− Oh, vous allez l’être ne vous inquiétez pas, vous allez l’être. Et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle vous êtes là, n’est-ce pas ?

Sophie acquiesça de la tête.

− Très bien. Vous n’êtes pas sans savoir que de nos jours, bon nombre paieraient (et même payent) pour pouvoir trouver l’amour sur « Meetic » et autres applications de rencontre notoires. Comme je vous l’ai dit, moi je paye pour pouvoir l’éprouver ! Et très bien même...J’aime jauger l’amour des couples et leur prouver qu’ils sont majoritairement ensemble que par convenance, égoïsme ou intérêt, et non pour de l’amour pur et vrai.

− Et comment comptez-vous éprouver notre amour sincère Mr Zhang ? Demanda Sophie.

− C’est assez simple, rétorqua le riche asiatique en levant furtivement ses deux mains en l’air ; tout en esquissant un sourire.

Étrangement, Sophie perdit au fur et à mesure son enthousiasme du départ, pour laisser place davantage à un visage plus perplexe. Elle sentait que quelque chose n’allait pas.

− Et ces six millions d’euros où sont-ils Mr Zhang ? Demanda cette dernière. Je ne les ai pas encore vu...

A ces mots, l’homme d’affaires asiatique prit une mallette noire déposée par terre à sa droite et la posa sur la table (Christian fronça légèrement les sourcils et Sophie esquissa de nouveau un sourire). Il l’ouvrit et révéla au jeune couple tout une liasse de billets qui comptabilisait bien 6 millions d’euros.

− Les gens sont ce qu’ils font Mr et Mme Dieng ; et une promesse est une dette, assura Mr Zhang.

− Très bien. Maintenant que nous avons vu, Sophie et moi, que vous êtes un homme de parole, que faut-il faire pour pouvoir gagner tout cet argent ? Quel est donc ce fameux test que vous avez élaboré, pour pouvoir jauger de l’amour sincère que nous éprouvons l’un à l’autre ?

A ces mots, sa femme lui lança un regard attendrissant.

− Ah très bien. Bonne question. Nous allons à présent connaître le point d’orgue de notre soirée, rétorqua le richissime dandy asiatique en prenant une autre mallette, déposée par terre à sa gauche. Il la posa sur la table, l’ouvrit et révéla contre toute attente, deux pistolets soigneusement encastrés dans un intérieur mousse noir prédécoupé.

A la vue de ces armes, Sophie et Christian écarquillèrent leurs yeux de stupeur.

− Qu’est-ce...Qu’est-ce que c’est que ça...Monsieur...Zhang ? Demanda Sophie de manière fébrile.

− Ce sont des...Des armes...Comme vous pouvez le voir. Des pistolets Beretta 85 de calibre 9 millimètres, plus exactement.

Christian se mit à déglutir.

− Mais pourquoi vous nous les montrez Mr Zhang ? Qu’est-ce que cela à avoir avec le test ?

− Cela à avoir que ces 6 millions d’euros seront uniquement pour l’un de vous deux.

− Comment ça pour « l’un de nous deux » ? Demanda Sophie l’air perplexe. Ces 6 millions d’euros sont bien pour moi et mon mari, si l’on réussit le test n’est-ce pas ? Je pensais que vous n’aviez qu’une parole Mr Zhang.

− C’est le cas Madame Dieng, c’est le cas. Mais je ne vous avais pas tout dit. Donc voici le test. Celui de vous deux qui empochera l’argent et repartira avec, sera celui...qui tuera l’autre ! L’un de vous devra mourir par la main de son conjoint, pour empocher ces 6 millions d’euros. C’est soit l’amour, soit la mort. Ce qui revient un peu à la même chose, d’une certaine manière, fit le milliardaire en esquissant un léger sourire sardonique.

Le jeune couple était choqué de ce qu’il venait d’entendre.

− Tu vois Sophie ? Qu’est-ce que je t’avais dit ? Toi qui étais si confiante, si enthousiaste. Voilà maintenant dans quoi nous sommes tombés : Un traquenard ! Maugréa Christian. C’est bon Sophie, viens on se casse maintenant !

A peine le couple s’était-il levé que les hommes de main de Mr Zhang (ainsi que la belle femme indienne) qui se tenaient debout derrière lui, dégainèrent rapidement leurs armes pour les pointer sur eux.

L’homme d’affaires asiatique esquissa encore un sourire sardonique.

− Je ne crois pas que ce soit une bonne idée. Ça serait je pense dommage qu’aucun de vous ne puisse profiter de tout cet argent. Rasseyez-vous, ordonna ce dernier d’un ton soudainement ferme.

Sophie et Christian s’exécutèrent aussitôt malgré eux.

− Et puis quelle ingratitude de votre part, pour quelqu’un qui est prêt à vous offrir 6 millions d’euros. Ma sensibilité vient d’en prendre un coup, reprit le milliardaire asiatique d’un ton narquois.

A ces mots, les deux colosses s’échangèrent furtivement un regard et se mirent brièvement à rire.

L’ambiance pesante était palpable. Sophie et Christian commencèrent à se regarder d’un air rembrunit.

− Je vais avoir un bébé Mr Zhang, lança Sophie la voix chevrotante. Vous n’êtes qu’un monstre.

A ces mots, l’homme d’affaires réfléchissa quelques secondes, avant de hausser les épaules.

− Après tout, ce n’est pas moi qui vous ai dit d’en faire un. Fallait simplement refuser ma proposition voilà tout. Tant pis pour le bébé. Et puis de toute façon, il n’est même pas encore né à ce que je sache ; et je doute fort qu’il aura le temps de l’être à présent.

Face à ces propos délirants, Sophie éclata en sanglots.

− Espèce d’enculé ! Tempêta Christian, le visage courroucé.

− Qui moi ? Oh non...j’aime trop les femmes désolé, rétorqua Mr Zhang narquoisement.

Les deux colosses ainsi que l’indienne derrière lui (toujours leurs armes respectives braquées sur le couple) se mirent à rire.

− Bon, bon, bon...Trêve de plaisanterie. Ces 6 millions d’euros que je vous propose, sont comme le fruit défendu dans la genèse. L’un de vous s’y laissera-t-il tenté ? Ou bien votre supposé amour sera-t-il plus fort que l’opportunité de changer de vie...pour l’un de vous deux ? Qu’allez-vous choisir Sophie et Christian, entre le bien de votre conscience ou le mal de votre ego ?

Se sentant acculés, ces derniers se regardèrent l’un à l’autre, l’air désespéré. Le nanti asiatique sortit enfin les deux Beretta de la mallette et les posa à chaque extrémité de la table ; à portée de main des deux amants. Il sortit ensuite de sa poche un sablier et le posa entre les deux pistolets.

Grâce à des mini caméras minutieusement disséminées et installées un peu partout dans le hangar, cette terrible épreuve était retransmise en direct sur le darkweb ; Sans même que Christian et Sophie en soient conscients. Des internautes mentalement dérangés, assoiffés de sang, de ténèbres et de crépitement de flammes, avaient au préalable payés pour pouvoir de chez eux, assister à ce « snuff movie amoureux », ce suicide conjugal en direct.

− Vous avez 30 secondes pour vous décider, et changez vos vies, avertissa Mr Zhang d’un ton péremptoire. Apres quoi, vous perdrez tout cet argent…et votre vie également !

Christian regarda son épouse de manière furtive, à son insu, d’un air étrangement impassible.

− Sois c’est l’un de vous qui part les pieds devant ou sois c’est tous les deux, menaça le milliardaire asiatique. Et que ce soit l’un ou l’autre, croyez-moi, je n’aurai qu’une seule parole. Comme vous le savez...Donc mieux vaut qu’il y en ait un qui survive ; à moins que vous décidiez par amour de mourir tous les deux. Ce qui mettrait à mal ma théorie.

Mr Zhang mit le doigt devant sa bouche, comme s’il réfléchissait.

− Mais bon, je sais qu’il peut y avoir parfois quelques exceptions, bien qu’elles soient très rares, reprit ce dernier en esquissant un sourire sardonique.

L’homme d’affaires synchronisa le temps d’écoulement du sablier, avec le compte à rebours de sa montre.

− Vous avez donc 30 secondes. Top c’est parti ! dit-il en retournant le sablier, tout en activant le décompte sur sa montre.

La tension était à son comble. Christian déglutit et Sophie avait  les yeux mouillés.

− Tu sais que je t’aime Christian et que je ne ferai rien qui puisse te nuire. Nous...nous avons un...bébé ! Fit Sophie le visage désespéré.

Elle éclata soudainement en sanglots.

− Je sais Sophie, je sais. Moi aussi Je t’aime. On s’est marié pour le meilleur...et pour le pire ! Tu te souviens ?

Le richissime asiatique fronça légèrement les sourcils.

− Plus que vingt secondes, soupira ce dernier en regardant sa montre et le sablier ; tout en pianotant sur la table d’impatience.

Christian déglutit de nouveau et semblait dépassé par les événements. Il ne savait plus quoi penser en réalité, dans son esprit.

− Quinze secondes...

Des pensées se bousculaient à présent dans la tête du jeune époux et commençaient à le tourmenter. Il se mit à regarder furtivement, la mallette remplie de billets d’euros. Sophie quant à elle, fut désespérée. Elle se noyait dans ses larmes.

− Dix secondes...

Quelque chose d’inhabituelle commença à tourmenter le marié trentenaire. Du fond de ses yeux commença à émerger une ombre.

− Six secondes...

Ses deux pupilles s’emplirent progressivement de ténèbres et firent psychosomatiser contre toute attente, une goutte de sueurs qui perla le long de sa joue. Ce fut celle de la forfaiture.

− Trois secondes...

Une seconde goutte de sueurs vint perler sur l’autre joue de Christian, trahissant définitivement son état-d ‘esprit. Ce fut celui de la trahison.

− Deux secondes...

Voyant cela, Sophie, d’instinct, écarquilla ses yeux mouillés...Elle avait compris.

− C’est pas vrai, songea-t-elle l’air effrayé.

− Une seconde...

Le visage froid, presque rongé de haine, Christian s’empressa de prendre l’arme qui fut de son côté, et le pointa sur sa femme.

− Désolé chérie, fit ce dernier de manière laconique, en appuyant sans hésitation sur la gâchette.

Mais…Stupeur…Christian écarquilla ses yeux à son tour.

Click...Click...click...Click, click, Click...

Aucun coup ne fut parti, malgré plusieurs tentatives successives. Ce qui fit sourire Mr Zhang qui savait qu’aucune balle n’avait été chargée dans le barillet du pistolet destiné au jeune trentenaire. Ce dernier fut confus et perplexe, l’air désemparé.

Au même moment, une rage incommensurable s’empara de Sophie qui se leva en prenant le Beretta de son côté, pour le pointer sur son mari. Le milliardaire ainsi que les internautes du darkweb se délectaient de la tournure dramaturgique des événements.

− Espèce de...De chien ! Tu as voulu...me...me tuer...moi ainsi que notre...BÉ-BÉ ?! Fulmina la jeune femme le visage rongé par la haine.

Christian haletait et dégoulina de sueurs.

− Non chérie...je t’en supplie ne fais pas ça. Je...Je vais t’ex...t’expliquer ! rétorqua ce dernier, la voix chevrotante.

− Sale fils de chien ! Il n’y a plus rien à expliquer, conclut Sophie avant de lui tirer une balle en pleine tête.

Le coup de feu fit voler en éclat la boite crânienne de son ex-mari, qui lâcha conjointement l’arme déchargée, qu’il tenait dans la, main. Suite à cette réaction légitime d’instinct maternel, des résidus de cervelle et de chair jonchaient sur le sol, fraîchement maculé de sang.

Mr Zhang se tourna brièvement vers ses agents et leur fit geste de baisser et de ranger leurs armes.

− C’est bon...

Les deux colosses ainsi que la belle indienne s’exécutèrent. L’homme d’affaires se tourna de nouveau vers la belle noire trentenaire, encore sous le choc.

− Eh oui chère Sophie, je sais que c’est dur d’être mis devant le fait accompli comme ça. Quand la réalité frappe de plein fouet, on tombe toujours des nues. Vous voyez bien que le supposé amour, ne tient qu’à un fil parfois. Et force est de constater que celui de votre mari, ou plutôt devrai je dire maintenant « ex-mari », n’était en réalité qu’illusoire ou par convenance ou par intérêt. Mais en aucun cas ce fut un amour réel, pur, désintéressé, comme d’ailleurs pour la plupart des couples sur terre. Même l’amour d’une mère pour son enfant peut se dégrader au fil du temps. Et je n’ose même pas parler de celles qui jettent leurs bébés, dans des bennes à ordures. Les liens du sang ne sont pas toujours ceux de l’esprit. A ces mots, la jeune femme noire baissa sa tête, rongée par la tristesse et l’amertume. Les mains encore tremblantes d’adrénaline, elle accusa encore le coup de cette forfaiture.

Elle revoyait dans sa tête, par flash, tous ces moments qu’elle avait partagé avec celui qu’elle venait de tuer. Tous ces moments qui ne lui paraissaient à présent être factices et calculés. Comme une histoire d’amour qui ne l’avait jamais été réellement ; ou de manière illusoire. Tout n’avait plus d’importance maintenant, excepté son futur bébé, ses 6 millions d’euros ; et une question qui lui taraudait l’esprit.

Sophie releva sa tête et se rapprocha légèrement de la table, d’où se trouvait Mr Zhang ainsi que la mallette remplie de liasses de billets d’euros, toujours ouverte.

− Pourquoi n’y avait-il pas de balle dans son barillet ? Demanda-t-elle au milliardaire.

− Pourquoi, vous auriez aimé qu’il y en ait eu une ? rétorqua ce dernier.

Sophie reflechissa quelques secondes en se mordillant les lèvres.

− J’aurai sûrement perdu mon bébé, reconnut cette dernière.

− Et moi je vous aurai perdu également...lâcha le dandy  asiatique dans un sourire presque attendrissant.

A ces mots, Sophie eut l’air perplexe.

− Comment ça ? Demanda cette dernière.

− Disons que je ne tenais pas à perdre une aussi jolie femme que vous. Vous pensiez vraiment que j’étais un tel monstre qui allait faire mourir une mère et son futur bébé ? C’était mal me connaître. Je ne suis pas comme ça (Il lui mentait…Sauf concernant son cas). Pour éviter un tel dénouement aussi dramatique, tant pour vous... que pour moi (Mr Zhang lui sourit à nouveau tendrement), j’ai donc décidé de ne loger aucune balle dans le barillet du pistolet, qui fut destiné à votre mari.

Sophie, confuse, se tenait la tête.

− Je...désolé mais je...Je ne sais plus quoi penser, je...ne sais plus quoi...dire !

− Oui je comprends. C’est normal cette réaction. Vous voyez ! L’amour est relatif. Votre mari était prêt à vous tuer, vous et votre futur bébé, pour 6 millions d’euros ; alors que moi je vous ai sauvé la vie, disons par... Hum...gentillesse ! Reprit l’homme d’affaires quelque peu gêné.

− Après m’avoir indirectement forcé à tuer mon mari, maintenant vous me conter fleurette ?

Le milliardaire asiatique mordilla ses lèvres.

− Non...Disons que...

− Vous n’êtes qu’un salopard, l’interrompit la jeune femme encore échaudée par le drame qui venait de se réaliser. Comment osez-vous ?

A ces mots, Mr Zhang resta silencieux en soupirant légèrement. Il se leva de sa chaise, referma la mallette remplie de liasse de billets et la remit à Sophie.

− Tenez votre argent. C’est pour vous à présent, comme promis. Vous pourrez mettre définitivement votre enfant à l’abri du besoin avec ça.

La jeune trentenaire à la mine renfrognée, posa sur la table l’arme qu’elle tenait dans ses mains ; et prit rageusement des mains de l’homme d’affaires, la mallette à six millions d’euros sans même le remercier.

Ce dernier baissa sa tête devant elle une poignée de secondes, puis se tourna vers ses sbires.

− Raccompagnez là jusqu’au véhicule, afin de la ramener chez elle.

Ses agents acquiescèrent de la tête. Le milliardaire asiatique se tourna de nouveau vers Sophie.

− Vous pouvez y aller, dit-il à cette dernière. Mes agents vont vous raccompagner jusqu’au véhicule à l’extérieur. Ensuite le conducteur vous déposera à votre domi...

Sophie coupa court aux paroles de Mr Zhang en lui faussant compagnie de manière prématurée. Elle commença à se diriger vers la sortie du hangar, d’elle-même.

− Raccompagnez la et restez courtois avec elle s’il vous plaît, ordonna le richissime asiatique, à ses trois agents. C’est une future maman...

Ces derniers acquiescèrent de nouveau de la tête, avant de s’exécuter et de rejoindre la nouvelle millionnaire.

Dès lors que Mr Zhang se retrouva seul dans le hangar, il se dirigea vers une des mini caméras qui fut discrètement installée, à proximité de la table. Elle était dotée d’un micro. Le dandy milliardaire se rapprocha au plus près de l’appareil.

− Très chers amis internautes, seigneuries du darkweb, bien que cette soirée ait été je pense un petit peu particulier pour moi (il se met à regarder brièvement dans le vide), j’espère néanmoins que ce divertissement vous aura plu comme tous les précédents. Je vous dis donc à très bientôt...Pour de nouveaux shows en direct. Prenez soin de vous. Bye !

Au même moment, tous les écrans des internautes du darkweb affichèrent simultanément un écran noir, comme pour signaler la fin du direct.

 

****

 

Quelques mois venaient de s’écouler. Comme à l’accoutumée, Sophie fit son jogging matinale... dans son luxueux appartement de Paris ! Il était à deux pas des Tuileries et de la Place Vendôme et avait une surface de 178 m2, 7 pièces et ainsi que 4 chambres. La jeune trentenaire ne faisait plus ses foulées depuis quelques temps aux « Jardins du Luxembourg », mais bel et bien chez elle, dans le salon de son nouveau logis, sur un tapis de course dernier cri. Elle était habillée pour l’occasion d’un tee-shirt et d’un short noir et courait pieds nus, le visage luisant de sueurs, depuis 38 minutes déjà. Bien que le décor ait changé, l’effort physique resta le même. Sophie en avait bien conscience. Elle savait pertinemment que le sport c’était comme la spiritualité : un dépassement de soi.

Encore deux minutes et fini, songea cette dernière en soufflant.

Cent-vingt secondes plus tard, l’appareil émit un léger son, qui marqua la fin du supplice en ralentissant le tapis jusqu’à son arrêt. La belle femme noire descendit de son instrument de torture et termina sa séance de sport par quelques étirements intrinsèques.

Sans que Sophie la remarque, une jeune femme indienne ayant la vingtaine, s’introduisa dans le salon.

− Sophie vous allez être en retard à votre rendez-vous, fit cette dernière.

A ces mots, la jeune femme noire arrêta provisoirement ses exercices, se retourna et vit sa nounou. Elle l’avait embauché pour son fils qui fut né il y a déjà 3 semaines.

− Oui je sais Amélie. Je me dépêche. Je termine mes étirements et ensuite je me préparerai pour partir.

− Vous savez très bien que mon frère Anthony n’aime pas qu’on le fasse trop attendre.

− C’est vrai, vous avez raison. Sinon, comment va mon fils Thomas ?

− Oh, il dort comme un loir dans sa chambre. Il est trop mignon à regarder, rétorqua Amélie en souriant tendrement.

− Occupez-vous bien de lui quand je serai parti Amélie.

− C’est pour ça que vous m’avez embauché il me semble, non ?

− Oui c’est vrai, reconnut Sophie en souriant jaune. Excusez-moi.

− Je sais que c’est votre premier bébé et que vous y tenez comme la prunelle de vos yeux, mais rassurez-vous Madame, je prendrai bien soin de lui, comme je l’ai toujours fait. Comme si c’était le mien.

− Oui je le sais Amélie. Vous avez déjà fait vos preuves quant à cela, c’est vrai. Et j’en suis très satisfaite. Vous faites du bon boulot.

− Merci Madame, rétorqua la nounou avant de se retirer pour aller dans la cuisine, se préparer un plat.

Sophie quant à elle, toujours déterminée, continua encore quelques minutes ses étirements.

 

****

 

Quelques minutes plus tard, cette dernière prit sa douche, afin de se préparer pour aller rencontrer Anthony.

Bon sang, qu’est-ce ça fait du bien, songea-t-elle en sentant le jet d’eau glisser le long de sa peau d’ébène.

 

Une fois sortie de salle de bain et s’être apprêtée, Sophie décida d’aller voir une dernière fois son fils Thomas, afin de s’assurer que tout allait bien avant de partir. Instinct maternel oblige.

Elle entra dans la chambre du petit bout et le vit endormi dans son berceau, couché sur le ventre, la tête sur les côtés.

− Mon bébé...songea-t-elle en le regardant tendrement.

Après l’avoir affectueusement caressé du regard durant quelques secondes, Sophie sortit de la chambre le plus discrètement possible, tout en fermant la porte. Puis elle se dirigea vers la porte d’entrée de son appartement.

− Amélie, j’y vais. Fermez la porte derrière moi, je vous prie.

− Très bien madame, rétorqua cette dernière en s’empressant de sortir de la cuisine. A toute à l’heure.

− A tout à l’heure. Bye !

Sophie referma la porte sur elle et s’empressa de sortir de l’immeuble. Elle investit ensuite l’habitacle de son 4x4 noir rutilant qui fut garé devant chez elle et prit la direction des Champs-Elysées.

 

Une fois arrivé sur place, elle gara sa voiture dans un parking payant, avant de rejoindre le prestigieux restaurant « Maxim’s ». Quelques minutes plus tard, elle franchit la porte du luxueux restaurant parisien, d’où l’attendait un homme d’affaires quarantenaire qui lui était familier, assis à une table : Mr Zhang. Antony ne fut rien d’autre que son prénom. Beaucoup d’eau avait coulé sous les ponts, depuis cette fameuse nuit dramatique où l’ex-mari de Sophie lui révéla sa forfaiture, qui lui coûta sa mort. Contre toute attente, les deux s’étaient rabibochés au point de se mettre ensemble.

− Salut ! Fit la belle femme noire en lui faisant un baiser, avant de s’attabler en face de lui.

− Salut beauté ! rétorqua Anthony Zhang en lui souriant.

− Alors comment va mon petit-fils Thomas ?

− Il va bien. Il dormait dans sa chambre quand je suis parti.

− Et comment va Amélie, ma bien aimée sœur adoptive ?

− Ta sœur tout court tu veux dire !

− Oui c’est vrai...Tu as raison. C’est juste que parfois je me sens obligé de le préciser, quand on voit mon... (Il montre son visage), fit Anthony en souriant malicieusement.

Sophie se mit à rire.

− Tu es bête, rétorqua cette dernière l’air amusé. Tu sais Anthony, comme tu me l’as dit jadis, les liens du sang ne sont pas toujours ceux de l’esprit. La vraie famille, ce n’est ni la chair, ni le sang, mais l’esprit.

− Tout à fait. C’est comme pour le vrai amour, rétorqua le milliardaire de manière allusive.

Sophie comprit qu’il parlait de son défunt mari Christian qu’elle tua de colère. Elle baissa furtivement la tête, l’air penaud.

− Mon père qui était et qui est toujours un humaniste et philanthrope a bien eu raison de l’adopter quand elle était petite, reprit Anthony. C’est une brave fille qui aime les gens ; et surtout les bébés, révéla le milliardaire asiatique en lui faisant un clin d’œil.

− Pour le plus grand plaisir de Thomas.

− Tu vois que tu pouvais me faire confiance, lorsque je te l’ai conseillé. Je savais qu’elle allait prendre soin de ton bébé, comme il se doit. Je connais ma...sœur !

− C’est vrai. Et je te remercie pour ça.

 

40 minutes plus tard, Anthony interpella un serveur qui passa près de sa table.

− Garçon s’il vous plaît ! L’addition. Merci.

− Tout de suite Monsieur.

 

 

****

 

Après avoir copieusement mangé à satiété, les deux amants improbables, repus de repas, sortirent du prestigieux restaurant déjà centenaire.

− Allons-nous dégourdir un peu les jambes Sophie, proposa Anthony. Cela nous fera du bien après le repas. Le fait de marcher nous permettra de digérer un peu.

− Bonne idée, approuva Sophie en souriant.

Alors qu’ils remontaient l’avenue, en direction de l’arc de triomphe, Un jeune couple venait dans leur direction, sans que Sophie et Anthony s’en aperçoivent. Ils avaient tous les deux 19 ans et avançaient bras dessus bras dessous, tout en s’embrassant. Ils ne regardaient pas devant eux et ne pouvaient voir en l’occurrence ce qui leur arrivait en face. L’impact semblait donc inévitable. L’épaule de l’adolescent se mit à heurter celle d’Anthony, de manière assez brusque.

− Eh, vous ne pouviez pas faire attention ? S’agaça ce dernier.

− Excusez-nous d’être amoureux Monsieur, répondit le jeune homme narquoisement.

− Ah bon ? Vous pensez l’être réellement ? S’étonna faussement Anthony.

− Ça ne se voit pas Monsieur ? On n’a pas l’air de s’aimer ?

− Non du tout. Ce n’est pas ça le vrai amour.

A ces mots, le jeune couple parut perplexe.

Voyant leurs visages, Anthony se mit brièvement à rigoler.

− Eh oui, les tourtereaux. Désolé de vous ramener à la dure réalité. Faire des bisous bien baveux et avoir des relations sexuelles, ce n’est pas ça l’amour. Le vrai amour va au-delà des scories de la raison, de la logique et de l’ego.

A ces mots, Sophie acquiesça de la tête.

− Le sexe peut-être un des apanages de l’amour, mais cela n’est certainement pas l’amour en tant que tel, rajouta cette dernière. L’amour relève plus du spirituel que du charnel. Et quand les deux sont au diapason alors le terme « faire l’amour » prend tout son sens.

Anthony acquiesça de la tête à son tour.

− En effet, « faire l’amour » est bien différent que de baiser. On fait l’amour quand les cœurs brûlent plus que les corps ; et on ne baise que lorsque les corps brûlent plus que les cœurs.

Sophie acquiesça de nouveau de la tête.

− Mais où est-ce que vous voulez en venir chef ? Demanda le jeune homme légèrement agacé.

− La ou je veux en venir jeune homme, c’est que si vous me le permettez, je pourrai aisément vous prouver que votre supposé amour n’en est pas un réellement. Ce ne sont que des simulacres voire des convenances ou des intérêts.

− Ah oui ? Et comment comptez-vous prouver monsieur que notre amour est faux, comme vous dites ? Demanda la jeune fille en fronçant légèrement les sourcils.

− Par le biais d’une simple épreuve.

− Pff…Allez viens Franck ! Fit la jeune demoiselle en tirant son copain par le bras. C’est un psychopathe ce gars ! Mieux vaut laisser tomber.

Anthony se mit à sourire. Le jeune homme, soupirant, écouta sa copine et fit avec elle les premiers pas afin de s’éloigner du milliardaire et de Sophie, tout en secouant sa tête.

Dès lors que le jeune couple fut à environ un mètre de ces derniers, Anthony les interpella de nouveau.

− Et il y aura 6 millions d’euros à la clef.

A ces mots, le jeune homme et sa compagne s’arrêtèrent aussitôt, se regardèrent brièvement l’un à l’autre, pour enfin revenir sur leurs pas.

− Par…Pardon ? Qu’a... Qu’avez-vous dit là Monsieur ?

− J’ai dit qu’il y aura 6 millions à la clef, si vous réussissez à passer cette épreuve, qui consistera à prouver que vous vous aimez réellement.

− 6 millions d’euros ? S’étonna la jeune adolescente en regardant furtivement son compagnon.

− Tout à fait, rétorqua Anthony.

− C’est des conneries ça, pas vrai Monsieur ? Fit le jeune homme en tentant de tempérer son excitation.

− Nan c’est la vérité, répondit Sophie d’un air légèrement blasé.

− Et quelle sera la nature de cette épreuve Monsieur ? Demanda la jeune fille, curieuse.

− Ça vous le saurez le jour même, pas avant, répondit Sophie en mettant la main dans son sac.

Tenez, prenez ma carte ! Dès lors que vous serez prêts, appelez-nous et l’on vous fixera un rendez-vous pour ce test.

− Vous en saurez plus le jour même. Ce n’est vraiment pas utile que vous le sachiez maintenant, fit Anthony en esquissant un sourire.

L’adolescent prit la carte de visite des mains de la belle trentenaire noire et l’examina attentivement des deux côtés. Le bout de papier révéla l’émail, le numéro de portable ainsi que le nom de jeune fille de cette dernière : Sophie Rivel. Elle avait légitimement récupéré son nom de naissance, suite aux derniers évènements tragiques avec son défunt ex-mari.

− Okay. Promis on vous appellera, fit le jeune homme en rangeant la carte dans sa poche. Si on a l’opportunité de pouvoir gagner un jour 6 millions d’euros, en prouvant simplement notre amour, pourquoi s’en priver ? Cela serait une pure folie...

− Et vous avez parfaitement raison, fit Anthony. D’autant que cela changera votre vie. Ou pas !

− Très bien. Alors à très bientôt...Monsieur ?

− Monsieur Zhang !

− Et moi Mademoiselle Rivel.

− Très bien. Moi c’est Franck et elle, Isabelle.

− Enchanté. Ravi de vous avoir rencontré, en espérant vous revoir très bientôt...Pour vos 6 millions d’euros ! Fit Anthony en leur faisant un clin d’œil.

− C’est comme si c’était déjà fait, rétorqua le jeune homme enthousiaste. A très bientôt Monsieur… et Madame !

− A très bientôt, répondirent ces derniers simultanément.

Le jeune couple prit enfin congé en s’éloignant progressivement d’Anthony et de Sophie.

− Je crois qu’il y aura encore de belles soirées en perspective sur le darkweb, fit Mr Zhang à sa belle compagne noire.

− Oui. Je le crois aussi.

− Cela faisait au moins 3 semaines qu’on n’avait plus rien à se mettre sous la dent.

A ces mots, ces derniers s’échangèrent un regard complice, doublé d’un sourire qui fut presque à s’y méprendre... sardonique !

 

****

 

Une semaine plus tard à la nuit tombée, dans un autre lieu désaffecté de la région parisienne, maculé sporadiquement de graffitis de toute sorte ; le jeune couple d’adolescent Franck et Isabelle était assis l’un en face de l’autre. A mesure que les secondes s’égrenaient tel un couperet, le jeune couple était inexorablement acculé, au pied du mur. Chacun d’eux regardait dans le miroir de sa conscience, sous le regard malicieux d’Antony et de Sophie qui furent assis près de la table, à proximité. Comme à l’accoutumée, trois de leurs agents armés se tenaient derrière eux, et assistaient également au spectacle tragique, chargé d’adrénaline, qui se déroulait devant leurs yeux. La tension était palpable et l’atmosphère pesante, pour les adolescents, jusqu’à ce que l’un d’entre eux cède, contre toute attente, aux sirènes de la forfaiture. L’air déterminé, Isabelle se leva promptement et s’empressa de saisir l’arme posée à ses cotés sur la table, pour le pointer sur Franck

Ce dernier, toujours assis n’en croyait pas ses yeux.

9 secondes…

− I...Isabelle ! T’es...T’es sérieuse là ?? Demanda le jeune homme la voix soudainement chevrotante, en regardant furtivement du coin de l’œil l’autre arme posé sur la table.

6 secondes...

− Comme Je l’ai toujours été avec toi bébé, rétorqua la jeune femme de manière narquoise.

A ces mots, Antony Zhang secoua légèrement sa tête en esquissant un léger sourire.

3 secondes...

Franck regarda encore furtivement du coin de l’œil, l’arme posée sur la table.

− Bébé, dé...dépose cette arme s’il te plaît, fit ce dernier. Tu...Tu sais que je t’aimerai...toujours...à en mourir...!!

A peine avait-il fait le moindre mouvement, pour tenter de saisir son arme, qu’une balle lui explosa le crâne. Le masque fut tombé, comme les résidus de cervelle sur le sol. Isabelle venait de tuer son petit ami.

− Moi aussi...bébé...Je t’aime !

 

 

 

 

FIN

 

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Edouard PArle
Posté le 06/10/2021
Coucou !
Je penses que tu devrais diviser ton histoire en plusieurs chapitres ! Sur plume d'argent c'est un peu dur de lire autant d'un coup et on ne peut pas mettre de marque page ^^
En tous cas, bon courage dans tes projets d'écriture.
A bientôt !
Jomerrick
Posté le 07/10/2021
Merci Edouard ...
Ella Palace
Posté le 04/10/2021
Bonjour,


j'ai hésité à laisser un commentaire mais vu que nous sommes ici pour nous améliorer...
Je me permets de te faire quelques remarques et suggestions dans ce but:

- Déjà, il faut impérativement diviser ton histoire en plusieurs chapitres. C'est beaucoup trop long et trop lourd.
- Il y a un réel souci au niveau de la conjugaison utilisée, il faut revoir les temps.
- Quelques fautes d'orthographe sont à corriger.
- Il y a beaucoup trop de redondance dans les mots utilisés.
- On devine trop vite où tu veux en venir, il faut créer du suspense, surprendre.
- Parfois, dans les dialogues, il y a des incohérences: langage quasi d'ados à langage quasi philosophique.
- Pour ma part, tu utilises trop de clichés, aussi. C'est du vu et revu. Dans ces cas là, il faut écrire ce genre d'histoires sous un angle nouveau et créer de la surprise.

J'espère que ces remarques permettront de t'offrir un petit éclairage.
Je me permets également deux conseils: lis, lis, lis, lis de bons livres et quand tu écris, relis toi à voix haute.

Au plaisir et courage :-)

Ella Palace
Jomerrick
Posté le 04/10/2021
merci...
Vous lisez