Le doudou

le Saint Graal est perdu, il faut partir en chasse
récupérer l’élu avant que les nerfs cassent.
C’est une priorité, plus rien ne compte alors
il faut se concentrer, retrouver le trésor.

“Il n’a pas disparu, il s’est juste égaré
lui seul n’aurait pas pu, s’enfuir, ni s’échapper”
Mais les mots n’aident en rien, et la seule solution
c’est de trouver enfin, ce tout petit ourson,
ce gardien de la nuit, celui qui réconforte
qui calme les esprits, qui toujours fait escorte
son cadeau de naissance, devenu son âme soeur
ce fardeau en puissance imbibé de senteurs
cette peluche infâme, au sourire sans pareil
garant de psychodrames, gérant de son sommeil
ce doudou en lambeau au pouvoir effroyable
qui prive d’un repos, pourtant indispensable.

Les parents épuisés, soumis à la panique
commencent à répéter, dans une boucle comique
“Mais où est-il passé? Sais-tu où tu l’as mis?
Il ne s’est pas barré! As-tu chercher ici? “
Ils partent en mission, armés de leur courage
Ils explorent la maison, ils refont le ménage
soulevant les coussins, tirant les canapés
cherchant dans les recoins les plus inhabités

Ils tournent les tiroirs, ils remuent ciel et terre
démontent les placards, oscultent la poussière
déplacent les rideaux, renversent le salon
détruisent le bureau, vérifient le plafond
Et le coeur dépité, ils se rendent au jardin
ils scrutent le cyprès et la cage du lapin,
ils ratissent la voiture, puis vident le grenier
mais leur progéniture, continue de pleurer.

L’absence du héros détruit leur existence.
Véritable bourreau, il répand la souffrance.
Comment donc du tissu molachu et inerte
à l’odeur de fondue, peut-il causer leur perte?!

C’est donc une pénitence, pour eux et pour le mioche
la soirée qui s’avance, le matin qui approche
sachant que quelque part, et sûrement pas très loin
repose ce bâtard, dont ils ont tant besoin.

Au milieu du fatras, ils chuchotent en secret
“Mais quel serait l’endroit, où il ne va jamais?”
Ils sentent en eux l’espoir, une idée les ravive,
et trouvent le lascar, dans le bac à lessive.