Le client dominateur 3

J’entre dans l’appartement. Je flotte un peu dans les vêtements de ma tendre coloc’. Alors qu’il me met le bandeau sur les yeux, le client commente :

— Qu’est-ce que c’est que ces fringues de hippie. Heureusement que c’est moi qui choisis tes vêtements !

Je baisse la tête en signe de repentance. Je garde le silence. Il me traîne vers la chambre sans ménagement, me déshabille de la même façon. La minutie et la langueur habituelles ne sont pas de mise aujourd’hui. Je devine qu’il m’inspecte. Je suis allée spécialement chez l’esthéticienne directement en sortant de chez lui, la veille.

— Tu as fait ce que je t’avais demandé. Tu es une bonne fille.

Je n’arrive pas à réprimer un sourire de satisfaction. La cravache punit immédiatement ce faux pas.

— Je n’oublie pas ton attitude déplorable d’hier, catin !

Mon sourire s’efface. Les choses sérieuses vont commencer. Aujourd’hui, je suis servile et docile. 

— À genou !

Je m'exécute sans délai. Il me pousse en avant. Je me retrouve à quatre pattes. Sa main me caresse doucement. Sans prévenir, il me donne une cinglante fessée. Je laisse échapper un petit cri. La fessée laisse place à la caresse.

— Tu es vraiment une vilaine fille.

Celle qui suit est encore plus cinglante que la première. 

— On dirait que tu le fais exprès pour que je te punisse.

— ...

— Tu ne veux pas être une bonne fille ?

— ...

— Si tu fais ce que je te dis, je te récompense. Mais si tu me désobéis…

Une terrible claque s’abat sur ma croupe alanguie.

— Je n'ai pas d’autre choix que de te punir.

Cette fois, c’est la cravache qui se promène sur moi.

— Ne t’avise pas de me provoquer à nouveau. Sinon, la punition sera plus sévère.

Je ne sais pas si je dois la redouter ou la désirer. Mais ce n’est pas la question. Je dois lui donner ce pour quoi il a payé.

— Je pense que tu as compris la leçon. Je ne suis pas si méchant et, maintenant que j’ai puni ton incartade, je tiens à récompenser ton effort. 

Ça valait le coup de se faire arracher les poils par cette tortionnaire encore plus sadique que lui. Obéissante et reconnaissante, je m’applique à jouir en silence. Cette fois, c’est lui qui me rhabille.

— Ces vêtements sont vraiment affreux. Ils ne sont quand même pas à toi, si ?

Je demande silencieusement la permission de parler.

— Tu peux parler.

— Je…

— Tu as demandé la permission de parler, alors parle !

— Je vais être absente un bon moment. À mon retour, je serai... différente.

— Veux-tu dire que tu seras plus obéissante ?

— Moins bandante.

— Que veux-tu dire ? Sois claire.

— Je n’aurai plus de seins.

— Oh ! Je…

— Je ne veux pas de pitié… Ni de compassion.

— Tu ne connais rien aux relations de domination, toi, pas vrai.

— Non. J’apprends avec vous.

— Jeune fille… Ce ne sont pas les attributs, qui sont excitants, c’est l’attitude. Tu es plutôt jolie, certes Et ça ne gâte rien. Mais quand bien même tu serais un peu moins avenante, voire commune, ou même laide, tu pourrais convenir à mes besoins. Je veux une femme qui se prête docilement à mes jeux, qui subisse tout ce qu’il me plait de lui infliger sans broncher. Pas besoin que tu aies des nichons pour ça. Donc si notre arrangement te convient, fais-moi savoir quand tu seras de retour.

— Il me convient.

— Parfait. Est-ce qu'on peut augmenter la fréquence de nos rendez-vous d'ici ton départ ? Je te paierai un bonus, bien entendu.

— Si mon employeur accepte, ce sera avec plaisir.

— Très bien. Je l’appellerai pour régler ça.

— Il pourra vous fournir une remplaçante le temps de mon absence.

— Non, ça ira. Quand on a trouvé une bonne partenaire, c’est difficile de tout recommencer avec quelqu’un de nouveau. En revanche, préviens-moi sans délai dès que tu seras disponible.

— Bien sûr.

— Bien. Ceci était notre dernière conversation hors jeu. Tu es une excellente partenaire et ce genre de bavardage terre à terre brise parfois le charme.

En guise d’accord, je garde le silence.

— Brave fille.

Il me raccompagne à la porte.

— À dimanche.

Dans l'ascenseur, j’hésite entre colocation sensuelle et appartement solitaire. J’ai besoin de réfléchir à cette nuit. Dans ma poche, je joue négligemment avec le trousseau de clés.

Finalement, je rentre chez moi, un brin confuse. Le dominateur a le don de me mettre la tête à l’envers et la nuit dernière n’arrange rien. Sur le meuble de l'entrée, un voyant clignote. Le répondeur à quelque chose à me dire.

— C’est moi. Le client SM te veut tous les dimanches et mardis jusqu'à ton départ. Il te payera double. Si tu acceptes, je te laisse tranquille jusqu’à la fin de ton... congé maladie et je te file quelques grammes supplémentaires.

Adorable dominateur qui a exigé une faveur. Décidément, ce client fait partie de mes préférés. Je me contente d’accepter par SMS.

“Ok pour domination imprévue et dédommagement. Prime en nature bienvenue. Je passerai jeudi”

Je prends une douche rapide, je jette quelques affaires dans un grand sac et je quitte mon appartement. Après tout, si je laisse un dealer-proxo malsain me maltraiter, pourquoi je ne laisserai pas un garçon et une fille bienveillants m'entourer de tendresse, de respect et de volupté ? Le fond d’amour propre qu’il me restait fait taire ma raison, qui trouve étrange que des gens offrent si vite affection et confiance.

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Liné
Posté le 16/11/2019
Ha, je trouve ça chouette que le cancer s'immisce ainsi, aussi simplement, dans son univers de prostitution (enfin "chouette", c'est relatif, hein ^^). On sent que la maladie la rattrape petit à petit, et on commence à voir comment ces deux mondes diamétralement opposés pourraient éventuellement se rejoindre.

Contrairement à d'autres plumes, je n'ai pas senti que la dernière phrase était un indice sur la coloc, et des potentiels soucis qu'il pourrait y avoir. Pour le moment, j'interprète ça comme une petite note de pessimisme de la part du perso, un peu "c'est trop beau pour que ça se passe aussi bien".

J'imagine que j'aurai ma réponse en lisant la suite ;-)
DoublureStylo
Posté le 18/11/2019
Coucou Liné et merci pour ta fidélité !
Oui, "l'intrigue" cancer avance - progresse, oserais-je dire - la maladie va rejoindre (heurter ?) l'illusion que Machine essaie de se construire ^^
Ah ah ouvrons un débat :D Les colocs, piège ou pas piège ? Ça m'amuse de voir que j'ai tellement "traumatisé" certain⋅es d'entre vous avec mes scènes glauques que tout semble maintenant une menace pour Machine et que chaque personnage peut être un⋅e potentiel⋅le tortionnaire :p. C'est un peu l'effet Ned Stark et je cache pas que ça me ravit (parce que c'était pour moi un des points forts de la série !).
Je ne te gâche donc pas le suspense et m’attelle à vous poster la suite rapidement.
Soah
Posté le 13/11/2019
Coucou !
J'aime beaucoup la réaction de monsieur cravache quand elle lui dit qu'elle n'aura plus de poitrine. On ne connait pas bien le personnage mais, sans rentrer dans le guimauve, il faudrait peut-être que ce passage soit plus long ? Après tout si une première personne lui dit qu'elle sera toujours elle, avec ou sans seins, je pense que ça peut lui faire un peu tilt à cette brave héroïne.

Je trouve ça un poil louche les colos tout de suite ultra sympa ; je me méfie d'eux, je ne sais pas pourquoi x')

Par contre, petite remarque vis-à-vis du BDSM, je trouve que cette phrase :"Je veux une femme qui se prête docilement à mes jeux, qui subisse tout ce qu’il me plait de lui infliger sans broncher." ne va pas du tout dans la bouche d'un pratiquant de la discipline. Le BDSM c'est loin de cet esprit. Et ça me fait tiquer un peu. A moins que monsieur cravache ne soit pas quelqu'un qui veuille faire du BDSM mais juste un taré sadique. Mais dans ce cas là, je pense qu'il faut introduire ça un peu plus tôt et d'une manière plus flag.
Parce que je pense que pour plein de raisons il peut vouloir engagé quelqu'un pour être sa partenaire, ça ne le rend pas louche pour autant - si c'était l'indice ; mais là, j'avoue que je commence à me demander si c'est vraiment quelque chose de sain qu'il cherche le monsieur ^^"
DoublureStylo
Posté le 13/11/2019
Coucou Soah !
Marrant que tout le monde se méfie des colocs :D Ptet parce que jusque là, tout le monde a abusé d'elle ? :p
Bon, tu m'as grillée, je connais rien en BDSM donc si tu as des pistes pour une réplique plus crédible qui justifierait qu'il se fiche de son ablation, je suis preneuse. Le client dominateur est sain/safe. Pas de piège, ni de sadisme caché. Un penchant assumé de domination
Soah
Posté le 14/11/2019
Le BDSM c'est une pratique qui demande de la confiance et du respect. Du coup plutôt que de lui dire qu'il recherche quelqu'un qui se plie a ses fantasmes, il peut dire qu'il cherche juste quelqu'un qui les partage. Tu peux aussi inclure quelque part la notion de safe word (un signal qui permet de tout arrêté en cas de dérapage) ou juste montré que c'est quelqu'un qui n'ira jamais au delà de ce qu'elle veut bien lui offrir elle, en tant qu'individu et pas en tant que produit :)
DoublureStylo
Posté le 15/11/2019
C'est comme ça que j'avais pourtant essayé de le faire >< Il me semble avoir dit un truc du genre "tu pourras tout stopper quand tu veux" ou quelque chose du genre.
Le truc, c'est qu'elle y est en tant que prostituée, pas une "simple" partenaire. En tout cas, je te remercie de tes précisions et je les garderai en tête quand je repasserai sur ces chapitres ^^
Elga
Posté le 11/11/2019
Oh il y a un truc louche chez les colocs. Cest ce que laisse entendre ta dernière phrase non?
Pour ce chapitre, ça fait tout bizarre de la retrouver dans son "activité habituelle", apres le chapitre bulle d'air des colocs.
Et sinon, ça se lit bien, je n'ai pas de critique particulière qui pourrait te faire avancer.
Bises!
DoublureStylo
Posté le 11/11/2019
Fidèle au poste <3
Disons qu'une fois sortie de cette bulle, elle trouve ça étrange, oui. Mais elle n'est pas à une étrangeté près :p
Tant pis (ou tant mieux) pour les critiques. Merci d'être passée ^^
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