La plume bleue

Notes de l’auteur : Scène un peu burlesque qui peut choquer les âmes sensibles :)

— Qui sont ces troufions sanguinaires ? Comment osent-ils usurper la Poigne démoniaque de Fil le Sardonique ! Ils nous ont bafoués, craché leur glaire visqueuse au visage ! Je n'sais pas qui est le pasticheur barbare qui se cache derrière toutes ces exactions honteuses mais, parole de Fil, j'l'enverrai dans le monde souterrain d'où il prétend venir ! À coups de poings enflammés, de bottes ignescentes et de glaives surchauffés ! Tous ces Petits intentionnellement anéantis, dans une cruauté inqualifiable ! Des rêves brisés, des vies broyées... J'n'ai pas les mots mes Gamins, c'est dire que la situation est grave ! Car même lui suturer la bouche sans anesthésie ne saurait suffire pour moucher Fil l'Orateur !

Le Glaive d'Or miniature subtilisé sautait au cou de Fil à chacun de ses pas agacés. Les lattes de bois grinçaient de supplice sous ses coups de bottes appuyés.

Bulle de Savon, assis sur le rebord d'un lit, balançait ses pieds qui ne touchaient pas le sol. Dans un murmure propre à lui, il commenta :

— Pour quelqu'un qui n'a pas les mots, je te trouve très éloquent. Ta langue doit être de la plus belle espèce.

— Mais c'est qu'elle l'est Savonnette ! Ainsi que la mâchoire, la glotte et les chicots qui l'accompagnent !

Fil s’arrêta et sourit de ses plus belles dents pour démontrer ses dires. Une canine absente, une incisive de travers et la teinte légèrement jaunie de l'ensemble fit éclater de rire les deux complices.

Krone fut irrité par la joyeuse humeur de ses camarades. Les mains croisées dans le dos, il contemplait par la fenêtre, en silence, la ville de Berd et la Bise tumultueuse. Sur la rive sud du fleuve vivace, Berd grouillait comme une fourmilière. Charpentiers, menuisiers, tailleurs de pierres, compagnons de guildes multiples s'agglutinaient à la porte qui s'ouvrait sur le rivage. Au loin, de l'autre côté de la Bise, des ouvriers s'affairaient au pied des murailles imposantes de San Tin. Symétriquement, les deux cités rivales s'animaient et les fondations de deux premières tours, de part et d'autre, qui se voudraient majestueuses, émergeaient de terre. Des artisans sur les murailles déchaussaient les créneaux. D'autres, sur des échafaudages de bois, renforçaient les remparts à la base afin de supporter la future voie qui s'élèveraient au-dessus des cités. Fil avait dit vrai. Le projet ubuesque de réunir directement les deux châteaux implantés dans le cœur des villes ennemies s'avérait fondé. Selon les dires, un premier niveau s'arrêterait sur le seuil des deux portes fortifiées pendant qu'une deuxième voie survolerait les défenses pour relier les citadelles.

En face de Krone, la destruction d'une grappe de masures chassait des misérables de leur toit vétuste, de leur unique fortune. Un futur pilier imposant devait éclore de cette expropriation pour soutenir le tapis aérien. Les miséreux, eux, étaient laissés pour compte. Ils déambulaient tristement dans les venelles sordides.

Krone partagea son ressenti en continuant de fixer l'extérieur :

— Notre créature nous échappe. Nous avions espéré que des opportunistes se saisiraient des apparitions démoniaques pour faire vaciller davantage le Parakoï. Nous n'avions pas imaginé que des sans-cœur brutaux traumatiseraient des innocents. Entre Myr et ces catastrophes du pays Lectois, j'ai l'impression que nous avons été à l'origine de nombreux maux impardonnables. Ces calamités s'ébruitent à travers les auberges, les cités et les bourgs des Trois pays. Les démons que nous voulions protecteurs des Petits face à la tyrannie des Grands ne susciteront plus la sympathie. Le Parakoï restera malgré tout le seul rempart qu'ils puissent espérer contre ces bêtes maléfiques. J'ai bien peur que nous ayons renforcé la mainmise du Parakoï sur les Trois pays. Des démons justiciers servaient notre cause, ceux-là vont à l'encontre de nos intentions. Quelle sera la prochaine étape ? Le Parakoï fera marcher sur toutes les terres habitées sa terrible armée pour rétablir la Paix contre ces truands. Une Paix de sang et de larmes. Au milieu de ce choc, qui paiera le lourd tribut ? Encore et toujours les mêmes... Ne nous sommes-nous pas précipités ? Le miracle de Myr anéantira-t-il vraiment le Parakoï par le soulèvement des Petits ou ceux-là seront-ils écrasés par sa poigne de fer ? Je suis plongé dans un désarroi sans fond. Éclaircissez-moi, donnez un sens à tout ce que nous faisons.

Fil renifla pour remonter un écoulement nasal qui lui chatouillait la lèvre supérieure.

— Ce n'est pas le moment de flancher, Gamin. Chasse ces idées culpabilisantes, elles feront trembler ton bras lorsque nous aurons besoin d'assurance et de fermeté. Encore une fois, nous ne sommes pas responsables des atrocités que ces petites gens ont subies. Je ne connais pas leur bourreau , il est le seul à devoir répondre de cette barbarie. Nous le trouverons et ferons jaillir la vérité aux yeux des Trois pays. J’te rejoins, notre Poigne ne doit pas être associée à ces immondices. Nous trouverons un moyen d'y parvenir, parole de Fil.

Krone, loin d'être convaincu par son aîné, se retourna et questionna vivement :

— Qu'en est-il des réponses à venir du Parakoï, sûrement seront-elles toutes aussi brutales ?

— Nous devons relever fièrement le menton, regarder le Parakoï droit dans les yeux et le foudroyer par notre détermination. Notre Poigne démoniaque ne se débinera pas !

— En restant cachés ?

— Temporairement, Gamin !

— En attendant confortablement que tous ces innocents périssent dans d'affreuses circonstances ?

— Nous le savions déjà, Gamin. C'est notre fardeau. Nous ne pouvons faire marche arrière. La chute du Parakoï ne se fera pas sans sacrifice. L’anéantissement des tyrans ne peut s’accomplir sans verser le sang d’innocents.

— Chute que nous sommes les seuls à avoir décidé. Qui nous dit que tous ces braves gens ne préfèrent pas vivre sous le joug du Parakoï et des Grands ? Tu es épris de Justice et de liberté. Mais de quelle liberté parle-t-on ? La leur, à quoi ressemble-t-elle ? Te l'es-tu sérieusement demandé ? La paix d'un tyran n'est-elle pas plus enviable qu'une soi-disant liberté sanglante ? Renverser tous ces Grands, pour y mettre qui à la place ?

Fil voulut répondre à ces nombreuses questions mais Krone tendit le bras pour l'empêcher de prendre la parole.

— Laisse-moi finir, Fil. Pour une fois, permets-moi d'être celui qui inonde l'autre de paroles. Même si les plus saints parmi les Saints, les plus généreux parmi les généreux, les plus compatissants parmi les compatissants nous gouvernaient, rendront-ils tous les hommes et les femmes des Trois pays plus heureux ? N'aspirent-ils pas juste à se nourrir décemment et vivre en sécurité dans une chiche vie satisfaisante ? Quelle est cette Justice que nous voulons leur imposer ? Est-ce qu'une justice aux mains d'un vertueux améliorerait la vie d'un Petit perdu au fin fond d'une vallée randaise ? Crois-tu que les habitants de San-la-Clairière vivraient mieux ? Le coût en larmes et les innombrables pertes d'enfants et de proches sacrifiés n'est-il pas insoutenable ? Notre combat n'est pas le leur. Nous leur imposons des idéaux et une guerre qu'ils n'ont pas réclamée.

Krone reprit son souffle. Ce déferlement d'interrogations reflétait l'imbroglio de ses pensées. Fil abaissa le bras resté tendu de Krone.

— C'est bon, Gamin ? Tu as dégobillé tout ton sac de ruminations ? Nous n'imposons rien à quiconque. Nous insufflons seulement le vent du soulèvement. La tempête de Justice ne dépend pas de nous. Il est dans les mains des bonnes gens. Le peuple se révoltera de son propre chef. Nous n'apposons pas de lame fine sur leurs gosiers frileux. Quand la masse se soulèvera, elle paiera le prix en pleine conscience.

Krone sentit le rouge lui monter dans les joues.

— Tu as l'air bien sûr de toi. Et si personne ne bouge ?

Fil, agacé par cette opposition persistante, s'emporta :

— Et bien, personne ne bougera ! Que sous-entends-tu, Gamin ? Que nous devrions nous enliser dans une léthargie frustrante car la cause est perdue ? S'ils se font tous massacrer par le Parakoï ou des soi-disant démons horrifiques sans réagir, ils n'auront eu que ce qu'ils méritent ! Un peuple qui refuse de se battre, qui se soumet à la barbarie aveugle, n'est pas digne de survivre !

— Ta haine pour le Premier Sujet Loren te fait complètement vriller, Fil ! Tu n'as plus aucun discernement ! Les Trois pays n'ont pas à payer la passivité de San-la-Clairière durant ton mariage !

Krone, hors de lui, bouscula de l'épaule son vis-à-vis et, dans un claquement de porte furieux, sortit de la pièce.

Bulle de Savon, plein de flegme, les pieds se balançant toujours dans le vide, conclut :

— Son impuissance l'accable et le frustre. Tu n'es pas la cible de sa colère.

Fil expira profondément.

— Oui j'sais bien. Il a toujours été sensible au malheur des autres. Son empathie lui a souvent rongé les tripes. Quand il était gosse, il a pleuré une semaine durant, inconsolable, car l'un de mes camarades bûcheron s'est fait broyer la jambe lors de l'abattement d'un tronc. Le choc de l'accident et la perspective que le nouvel infirme ne pourrait plus travailler dans les bois ont complètement retourné le cœur du Gamin.

Le sel marin suspendu dans l'air frais revigorait un Krone apathique quand les effluves nauséabonds d'un poisson sorti de l'océan trois jours auparavant lui saisirent le nez. Autour d'étals improvisés, des impécunieux s'agglutinaient, comme moules au rocher, autour de cette chair presque avariée. Les acheteurs démunis préféraient les éventuelles indispositions gastriques liées à la consommation de ce produit que la faim tenaillante qui les accablait. Merlans, aiglefins et  sèches qui n'avaient pas trouvé preneur dans les beaux quartiers se déversaient piteusement dans ces ruelles affamées. Leur fraîcheur suspecte attirait premiers moucherons et dégageait une odeur qui piquait les sinus.

Du sang et les viscères des animaux marins stagnaient dans des flaques en une mixture écœurante que l'insalubrité naturelle de ces venelles accueillait volontiers. Les déjections rejetées par des seaux débordants s'écoulaient en un ruisseau mucilagineux. Le relent de ces rues sombres se mêlait au remugle des taudis environnants. Malgré le prolongement de leur séjour dans la cambuse miteuse, Krone s'accommodait difficilement à ce cocktail explosif de saveurs et d'odeurs rances.

Le trio avait fait le choix d'un quartier de malfamés, où les bouches, en plus d’être vides, restaient muettes. La présence d'étrangers ne soulevait aucune question tant que le paiement s'effectuait rubis sur l'ongle.

Krone culpabilisait déjà d'avoir jeté à la figure de celui qui l'avait toujours protégé, élevé comme son propre enfant, le traumatisme qu'il lui avait confié  quelques semaines plus tôt. Il connaissait la rancœur de Fil pour l'inaction des habitants de San-la-Clairière. Il savait la haine froide qui le brûlait de l'intérieur. Il connaissait son aversion pour Loren le Bouc. Le jeune homme eut honte d'avoir fait appel à ce passé blessant. Il passa une main dans ses cheveux gras, puis abaissa le capuchon sur son visage pour se plonger dans une discrétion bienvenue.

Krone passa devant le chantier de gravats. Une chaîne de mains ankylosées par le froid évacuait une montagne de planches pourries. Des dos courbés par l'effort pelletaient la terre pour y implanter les futures fondations du pilier écrasant. Le futur tapis aérien imposerait son ombre dans ce quartier déjà sombre.

Krone choisit de s'extirper de cette exhalaison stagnante. Il remonta la ruelle étroite vers des artères plus ensoleillées et respirables. Il joua des coudes et des épaules pour se faufiler dans la masse compacte des flâneurs. À une intersection, il s'engouffra dans une rue moins animée où il acheta à un vendeur ambulant un beignet de pois et un vol-au-vent douteux. Avant de changer de voie, il jeta une pièce d'argent à une main tendue. Le mendiant, gencives noires exposées, remercia chaleureusement l'aumône généreuse. Avec, le malheureux aurait de quoi se nourrir et se loger pendant les grands froids de l'hiver approchant.

Au loin, le ton familier d'une voix forte attira l'attention de Krone. Il précipita le pas et se laissa guider par le timbre éclatant. Il arriva sur une petite place où des curieux entouraient un crieur azurin. Quatre imposants mercenaires tenaient à distance la foule qui n'aurait, de toute manière, pas osé s'approcher davantage de l'intouchable. La longue robe aux manches bouffantes du crieur traînait au sol. La grande plume de paon bleue plantée dans le chapeau à bord rond permit d'identifier instantanément la source de la voix. Le héraut avait un nez long et courbé qui lui touchait presque le haut des lèvres.

— ...voici Sa Voix, Sa Parole. Ce message s'adresse directement aux fabulateurs qui se prétendent originaires du monde infernal...

Krone redressa les épaules, son attention parfaitement captée par l'émissaire du Parakoï.

— ...Notre Bien-aimé Protecteur réaffirme sa capacité à maintenir hors de sa zone d'influence, démons, suppôts et malins. Il compte bien prouver à tous ses sujets la nature captieuse de ces dupeurs d'honnêtes gens. Ces prestidigitateurs ne trompent personne. Le Parakoï s'apprête à abattre sa Main glorieuse sur ces charlatans. Le Sublime ne laissera pas impuni l'assassinat odieux du Second Sujet Odrian de Launys. Le Bienveillant châtiera les responsables des massacres de Myr et des villages Lectois. Le Merveilleux enfoncera les agresseurs de ses Justiciers.

Krone s'étonna, le crieur venait bien de mentionner plusieurs villages Lectois. D'autres bourgs auraient donc été passés sous les flammes des usurpateurs ? Il crispa sa mâchoire et ses poings.

Une main ferme se posa sur son épaule. Il ne se retourna pas car il la reconnut.

— Pardon, Gamin. J'n'aurais pas...

Krone recouvrit de sa main fraîche celle de son ami. Il murmura, sans se retourner :

— J’ai mal agi également. Je te dois tout ce que je suis et pourtant, j'ai piétiné le drame de ta vie. Je dois comprendre et accepter ton point de vue.

— On se rabibochera plus tard autour d'une boutanche, Gamin. Écoute le bleu, j'crois que c'est grave.

Krone avança légèrement et regarda le crieur par-dessus la rangée d'épaules qui les séparait. Le vent capricieux gonflait la tunique bleue. Le crieur devait retenir son chapeau pour qu'il ne s'envolât pas. Imperturbable, il scanda son message :

— ...le Génie qui couve notre Adoré lui a murmuré un moyen de débusquer ces truands. À travers tous les Trois pays, crieurs écarlates, azurins et ambrées clament haut et fort ces mots pour être entendus par les ennemis de la Paix. Car oui, le Parakoï leur adresse directement une Parole Sainte. Notre Bienfaiteur les adjure de sortir de leur trou. Dans le bourg de Tesquieu, en pays Randais, se trouvent incarcérés des complices avérés de ces imposteurs. La gérante de l'auberge du Goupil argenté, répondant au nom de Meg Laplume  et son employé, Guerlain, seront pendus à la prochaine lune. Vous, qui vous opposez aux sentences et à la Justice du Parakoï, venez cueillir ces nouveaux condamnés. Nous saurons vous accueillir et prouver au monde entier combien vous pouvez être anéantis. Vous, qui vous pensez...

Fil s'était rapproché du jeune homme. Au milieu de la foule, il souffla en sa direction :

— Filons d'ici et allons prévenir Savonnette. Je n’sais pas ce qu'il comptera faire, mais nous le trainerons par la pointe des moustaches s'il le faut. Nous ne laisserons pas ces arrière-faix de truie-larde s'en prendre à ces deux pauvres bougres.

Krone se retourna. Fil ne s'attendait pas à voir un sourire éclatant s'étirer sur le visage fin de son protégé. Le gros bonhomme, flairant le mauvais coup, susurra :

— Qu'est-ce qui met ton cœur à la fête ? On dirait une coureuse de remparts aguichant un jouvenceau téméraire. Tu n'vas pas laisser le vieux Fil en dehors de la confidence et simple spectateur d'une bouffonnerie. Car si j'peux aider Savonnette, j'en suis !

Krone releva le pouce et indiqua le crieur par-dessus son épaule.

— La plume bleue. Je la remettrai bien à sa place.

Dans un hochement de tête, aussi sérieux que celui d'un juge condamnant à mort, Fil acquiesça :

— J’m'occupe des quatre lourdeaux.

Krone vit son partenaire tendre son bras puis, un battement de cil après, il le baissa pour payer son Coût. Krone invoqua alors son monde de marbre.

L'un des avantages de son royaume, où le temps se suspendait, était que les odeurs, bonnes comme mauvaises, s'évaporaient. Pour la première fois depuis des jours interminables, Krone respirait un air sain. Il inspira profondément et emplit tant qu'il le put ses poumons de cet élixir de jouvence. Puis, revigoré et la volonté farouche de s'en prendre au crieur azurin agrippé à l'esprit, il se fraya un chemin jusqu'à sa cible. Pour ce faire, il passa sous les lames sorties des mercenaires vigilants.

Krone se saisit du chapeau à bord rond et le posa à terre. Puis, il empoigna la robe du héraut au niveau de ses chevilles et la lui remonta par-dessus la tête. En un nœud aussi solide que grossier, il empaqueta le malheureux. Il reposa ensuite le couvre-chef sur le nœud. À ce stade, le crieur ressemblait à une énorme myrtille chapeautée, la tête et le corps dissimulés sous le tissu bleuté. Krone comprit alors ce que Fil avait ressenti lorsqu'il avait attaqué le crieur écarlate avec la chope. Le Parakoï, inaccessible et intouchable, souffrirait dans son estime si l'on s'en prenait à ses représentants. Krone, voulant humilier au possible le héraut de l'Injustice abaissa alors ses collants jusqu'à ses souliers pointus. Enfin, comble de l'affront, il enfonça la plume bleue dans l'arrière-train de l'homme. Il possédait dorénavant une queue splendide prête à rivaliser avec celles de tous les paons du pays.

Krone s'écarta de son chef-d'œuvre facétieux et rejoignit son aîné. La coupure du Temps avait duré bien trop longtemps. Son Coût l'assommerait brutalement. Quand Fil le verrait à ses côtés, groggy, il comprendrait et s'occuperait de le ramener en sécurité.

Le monde reprit vie et Krone s'écroula sur Fil tout juste remis de sa paralysie. Il le retint et fit demi-tour sans assister à la scène finale de leur spectacle absurde.

Les habitants de Berd, estomaqués par la posture ridicule et honteuse du représentant du Parakoï, n'osèrent bouger un pouce de peur d'être embarqués par les mercenaires pour outrage envers le Parakoï. Devant ce public médusé et à l’écoute des gémissements angoissés dans leurs dos, les soldats se retournèrent pour constater l'impensable. Ils voulurent venir en aide à l'infortuné et retirer en premier lieu la plume bleue insultante. Cependant, ils chutèrent tous les quatre en une chorégraphie synchronisée. Des fils invisibles leur enserraient les jambes. Les impuissants s’agitèrent au sol comme des poissons fraîchement pêchés.

La foule choisit ce moment pour se disperser et s'éloigner de cette déchéance qui risquait de les envoyer au gibet. Des murmures accompagnèrent cette fuite réfléchie. Les oreilles des mercenaires neutralisés en percevaient le contenu :

— Les démons ont encore frappé. Le Parakoï est humilié.

Au milieu de la place vide, le crieur azurin, enfermé dans sa toge, sentit un courant d'air lui parcourir le bas du corps et agiter délicatement une plume bleue soumise au caprice du vent.

Fil traîna plus qu'il ne portât sa lourde charge. Heureusement, la nouvelle de l'humiliation ayant déferlé dans la cité, personne ne fit attention à un gaillard raccompagnant visiblement un acolyte éméché. Il parvint, non sans effort, à la cambuse qui leur servait de cachette. Monter les escaliers défoncés avec ce poids mort fut éprouvant. Fil arriva enfin, au prix de plusieurs litres de sueur, dans la chambre. Il laissa s'écrouler Krone sur le sol. En nage, il s'assit contre la porte tout juste refermée. Il se pinça le gras du ventre et, dans un sifflement de bronches, grommela :

— J’crois qu'un peu plus d'activités et moins de lancers de dés, m'ferait pas de mal.

Il releva la tête, à la recherche de Bulle de Savon. Le voyant toujours assis sur le lit, les jambes en balancier, Fil l’apostropha :

— Hey, Savonnette ! Le Gamin s’est, comme qui dirait, un peu emporté. La ville va bientôt grouiller de Justiciers hargneux. Nous devons détaler au plus vite. Tu n’peux pas coller ton sourire maléfique au Gamin, histoire de le revigorer un peu ? Car, à le traîner comme ça, autant s’enfermer nous-mêmes dans les geôles du Parakoï !

Bulle de Savon sauta à terre et fit grincer le plancher. En de petits bonds, il s'approcha du foyer qu'il étouffa avec trois poignées de sable. Il avança vers les fontes déjà fermées et apposées contre le mur. Avant d'étendre sa bulle, il expliqua :

— J'ai ressenti le monde de marbre de Krone. Incorrigibles comme vous êtes, je me suis douté que vous semiez la pagaille en ville. Nos affaires sont prêtes. Où allons-nous ? Prenons-nous la mer ? Traverserons-nous la Bise plus en amont pour rejoindre la rive nord et atteindre San Père, capitale admirable du pays Randais ?

Bulle de Savon enveloppa Krone de son Don. Un sourire glaçant se dessina sur le visage du jeune homme qui ouvrit les yeux, une vitalité nouvelle dans les pupilles.

— ‘erci 'ulle. 'il t'as 'is au courant ?

Bulle de Savon remarqua seulement le silence gêné de Fil. Il lui répondit :

— Mis au courant ? Du remue-ménage que vous provoquez partout où vous passez ? Je ne vous ai pas attendus pour le savoir.

— 'e 'arle de Meg la 'lume et Guerlain.

La bulle se résorba. Le petit bonhomme écarta les yeux, non de terreur mais d'étonnement, dépourvu d'une angoisse qu'il ne connaissait pas.

— Bon, Savonnette. La responsabilité m'incombe, en tant que Premier Justicier de la Poigne démoniaque, de t'annoncer la dépêche du jour. Ça fermera le clapet du Gamin et nous évitera de nettoyer la flaque de bave qui coule en cascade de son Auguste bouche. Déjà que la nouvelle n'est pas belle, épargnons-nous ce spectacle sordide. Soyons direct, bref et efficace. Ils détiennent ta brave Dame et le P'tit aux boutons. Tes deux amis croquent marmot dans une cellule de la Justice. Les crieurs s'égosillent aux quatre vents pour nous attirer au bourg de Tesquieu. Alors mettons flamberge au vent, frappons fort, réfléchissons plus tard, mais ne laissons pas ces deux mignons croupir comme bagnards effroyables.

Bulle de Savon, enchanté par la perspective d'une nouvelle aventure, répondit naturellement :

— Et bien, qu'attendons-nous ? Filons, filons !

Il ouvrit la porte et descendit les marches en sautillant.

Krone et Fil échangèrent un regard interloqué :

— 'u crois qu'il a com'ris ce qu'il se 'assait ?

Fil haussa les épaules :

— J'espère que ces idiots de Justiciers ne feront pas plus de mal à ces pauvres gens car notre Savonnette briseur de doigts et cloueur de mains risquerait de ressurgir. Le spectacle ne devrait pas…

Fil souleva les fontes et sortit à son tour de la chambre.

— … être beau à voir.

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Camille Octavie
Posté le 05/03/2023
Bonjour !

J'aime bien ce chapitre, ils se posent les bonnes questions, on sent que la "justice" se rapproche, il y a la tension qui monte un peu...
Je vais profiter de mon train pour enchaîner avec le chapitre suivant !
ClementNobrad
Posté le 05/03/2023
Coucou,

Oui, de nouvelles intrigues vont bientôt arriver :) jespere que ton voyage en train et dans les Pérégrinations se passent bien ^^
Syanelys
Posté le 23/01/2023
Hey !

Un petit chapitre où Krone se met en avant pour dire tout haut ce qui se pense tout bas au niveau de l'humour de Fil ? Je prends !

Allez, je prends surtout cette réplique-là : "Laisse-moi finir, Fil. Pour une fois, permets-moi d'être celui qui inonde l'autre de paroles.". J'ai beaucoup apprécié qu'il puisse en placer une sans être coupé, parole de Fil ! Hélas, tu nous dépeins rapidement le revers de la médaille : notre "chef" nous sort sa carte de morale du jour pour mettre sur le compte de l'empathie et de la jeunesse la vision du monde de notre véritable ami intemporel... C'est dommage, ça fait dans la surenchère, ça alourdit même les échanges par moment.

Je ne sais pas si tu as la volonté de faire détester Fil. En soi, cela aurait le mérite de ne pas laisser le lecteur indifférent donc jolie prouesse de ta part. Mais là, je voyais une fenêtre ouverte sur une intéraction plus marquée entre Bulle et Krone. Ce que je veux dire, c'est que tu laisses une occasion de dresser le portrait de 3 démons qui ont de la personnalité. Pas de viles marionnettes tirées par les fils dénués de bonne moeur ou de morale par l'autre, là.

Heureusement que Krone se lâche un peu. À lui de gérer un Crieur à sa façon et d'attaquer le Parakoï subtilement. Krone est déterminé, ce qui annonce de bonnes augures pour la suite des évènements avec le principal concerné : Bulle.

Bref, je vais passer outre Fil pour la qualité de l'histoire, de la narration et de tes descriptions. Certes, il fait moins de monologues mais il consolide son image de "Je m'en foutisme" pour défendre une Justice à laquelle il n'adhère pas vraiment. Concrètement, combien de morts et de douleurs a-t-il sur la conscience pour tous les effets pyro-techniques déployés dans les 3 pays ?

Au grand plaisir de lire la suite !
ClementNobrad
Posté le 24/01/2023
Hey,

Merci pour ton commentaire. Je n'avais pas vraiment envie que mon lecteur déteste un de mes héros car ça pourrait lui faire stopper la lecture. Agacer, pourquoi pas, mais de là à ce qu'il le déteste, pas vraiment. D'autant plus que je le trouve sympathique... peut-être en tant qu'écrivain et l'investissement que j'ai mis dans ses lignes, j'y suis plus attaché et donc je ne vois pas ses défauts... ou du moins je suis plus indulgent ! :)

En espérant que la suite te plaise. Mais vu ce qui vient après, pas sûr que tu te reconcilies avec Fil....
Peridotite
Posté le 06/01/2023
Coucou Clément,

Alors comme ça le pont n'était pas une légende. Il existe bel et bien. Pourquoi construisent-ils ce pont ??

Alors pour une fois, on a un réveil de Krone qui fait une sorte de bilan de la situation. Pourquoi ne se dit-il pas tout ça avant, dès le premier chapitre en fait ? Et finalement son coup de gueule n'aura servi à rien, c'est dommage. Il se rabiboche avec Fil en une ligne.

Je comprends pas ce qu'ils essaient de faire. À la limite Fil est une sorte de psychopathe et Bulle ne ressent rien (ou presque, l'épisode de cheval est très bizarre tout de même), mais Krone ? Je ne comprends pas ses motivations à rester auprès de lui ? Il a peur de lui en fait ? Qu'est-ce qu'il veut faire ? Je veux dire, c'est juste un brigand doublé d'un meurtrier, c'est quoi cette justice dont il parle ? Je ressens toujours ce truc d'être assise entre 2 chaises. Tu veux nous dépeindre des Robin des bois et en même temps des meurtriers ? Vers où penches-tu ? Je pense qu'il faudrait éclaircir ce point bien plus tôt ou on ne comprend pas.

Je ne comprends pas bien ce que l'Empire fait de si mal pour justifier leurs attentats. Ok la justice est arbitraire et les possesseurs du Don mis à l'écart, mais en faisant ce qu'ils font, comment espèrent-ils changer quoi que ce soit ? D'autant qu'ils n'ont aucune morale. Forcément ils vont être poursuivis, ils n'y avaient pas pensé ou quoi ?

Mes notes et pinaillages :

"la destruction d'une grappe de masures chassait des misérables de leur toit vétuste, de leur unique fortune."
> Phrase un peu bizarre avec pleins de "de"

"pour soutenir le tapis aérien."
> Je ne suis pas sûre de comprendre, que veux-tu dire par là ?

"Nous n'avions pas imaginé que des sans-cœur brutaux traumatiseraient des innocents."
> C'est un peu ce qu'ils font eux-mêmes non ?

"Encore une fois, nous ne sommes pas responsables des atrocités que ces petites gens ont subies"
> Ils ont quand même commis un attentat qui a tué beaucoup de gens ! Donc si ils sont clairement responsables.

"Nous leur imposons des idéaux"
> Lesquels ? Si c'est de mieux accepter les gens qui ont un Don, ils s'y prennent pas top top, c'est même l'inverse qui va se produire. Ceux avec le Don seront encore plus craints et ostracisés après tous ces meurtres.

"Un peuple qui refuse de se battre"
> Je ne comprends pas bien : se battre contre quoi au juste ? À part la garde qui a enfermé arbitrairement l'aubergiste, qu'est-ce qu'il fait de mal cet empire concrètement ?

"car l'un de mes camarades bûcheron s'est fait broyer la jambe lors de l'abattement d'un tronc."
> Ça n'a rien à voir avec notre affaire ou c'est moi ?

"des impécunieux s'agglutinaient, comme moules au rocher"
> Des moules sont collées au rocher, elles peuvent pas s'agglutiner autour d'un truc non ? Après j'ai pas non plus une super connaissance en coquillage 🙂 mais je me demandais si c'était la meilleure des comparaisons.

"Du sang et les viscères des animaux marins stagnaient"
> Du sang et des viscères d'animaux marins ?

"Krone culpabilisait déjà d'avoir jeté à la figure de celui qui l'avait toujours protégé, élevé comme son propre enfant, le traumatisme qu'il lui avait confié"
> Longue phrase un peu dure à suivre je trouve
ClementNobrad
Posté le 07/01/2023
Bonjour Péridotite,

Ce pont n'est définitivement pas une légende, toutes les rumeurs dont a parlé Fil dans le premier chapitre sont vraies. Les deux cités envisagent sérieusement de s'unir et de fusionner les deux familles. Ca sent le grabuge...

Je crois qu'on est vraiment pas d'accord sur Fil (puisqu'il est au centre des critiques). Je ne l'ai pas du tout, mais pas du tout conçu et imaginé comme tu le perçois (un psychopathe sans coeur qui en à rien faire de tout). Je comprends le cheminement qui te le fait passer pour tel, mais vraiment ce n'était pas mon but. Fil est pour moi bourru, plein de bonnes volontés, mais ô combien "maladroit et irréfléchi". Il fonce un peu dans le tas, plein de bonnes intentions, mais il fait presque toujours systématiquement foirer tout ce qu'il entreprend. Son adage (il le dit dans les chapitres suivants est : Agir et ensuite réfléchir).
Mon but est de le rendre sympathique malgré tout et qu'on soit avec lui dans son combat contre le Parakoï. Tu pourrais me dire à partir de quel moment ça passe plus dans ce sens là, car il faudrait que je rectifie du coup. Je tiens vraiment à cet aspect pour lui. Le maladroit excessif mais attachant qu'on a envie de pardonner pour toutes les bêtises qu'il fait.

"D'autant qu'ils n'ont aucune morale" > Tu résumes en une phrase notre "désaccord" et ce que je veux éviter que le lecteur ressente. Help me :D
Merci encore pour tous tes retours, je les prends tous comme bénéfiques à mon histoire :)
Au plaisir de te lire.
Peridotite
Posté le 07/01/2023
Coucou Clément,

Tu dis : "Tu pourrais me dire à partir de quel moment ça passe plus dans ce sens là, car il faudrait que je rectifie du coup. Je tiens vraiment à cet aspect pour lui. Le maladroit excessif mais attachant qu'on a envie de pardonner pour toutes les bêtises qu'il fait.
"D'autant qu'ils n'ont aucune morale" > Tu résumes en une phrase notre "désaccord" et ce que je veux éviter que le lecteur ressente. Help me :D"

Du coup, j'essaie de te répondre ci-dessous :

> Pour moi, c'est presque là des le début qu'il y a ce ressenti, puisque Fil se réjouit de faire exécuter un paysan innocent. C'est quand même pas un acte anodin, il y a mort d'homme ! Donc on sent qu'il y a anguille sous roche et que tu nous amènes vers un perso borderline, voire carrément un assassin et donc menteur par rapport à l'histoire racontée ensuite (c'est ce que je me disais perso). Tu confirmes ensuite ce sentiment avec la scène de torture et de mutilation des paysans affamés. Ils ont tués le cheval parce qu'ils avaient faim, ils ont quand même une bonne raison de le faire et donc des circonstances atténuantes. Les torturer, c'est super extrême quoi. Pourtant ni Fil ni Krone ne font rien pour stopper Bulle, au contraire. Puis Fil tue des gardes de sang froid. Il y a bien sûr son attentat contre les innocents avec je-sais-pas combien de morts. Et la fois où il tue ceux qui le poursuivaient. Là il ne le fait pas que pour leur échapper, on sent que le gars a plaisir à le faire. Peut-être le Premier Justicier est un salopard, mais le lecteur ne le sait pas.
Du coup, si ton intention n'est pas de le faire être un assassin à la limite psychopathe voire sado (je précise que moi ça ne me dérangeait pas à la base. Le hic qu'il y avait un décalage avec le fait que tu les décrives comme des justiciers et qu'il n'y a pas de conséquences à leurs actes), il faut bien revoir ces axes-là je pense. Si tu ne veux pas que ce soit des assassins, ils ne faut pas qu'ils tuent pour le plaisir. Si tu veux en faire des justiciers, ils doivent rendre la justice (à leur niveau quoi). Si tu veux les dépeindre comme de vrais justiciers (mais maladroits), il faut repenser les péripéties.

Et autre point important : il faut que tu montres dans plusieurs scènes en quoi l'Empire est horrible. Qu'est-ce que l'Empire fait concrètement qui le fait être détesté de la population ? Comme avec Robin des Bois quand le méchant augmente les impôts, Robin se bat contre ça, c'est tout de suite clair. En ce moment je regarde la série Andor. On comprend aussi pourquoi les gens se battent contre l'Empire : ce sont des colonisateurs qui pillent les ressources des pays conquis et en plus prennent de haut la population locale. Sans compter l'usage abusif de la force et les arrestations sommaires. Dans ton texte, que fait l'Empire ? Contre quoi se battent-ils ? Il faut qu'on le voie concrètement. Et pourquoi la bande s'en prend-elle aux hérauts, aux messagers, ils n'y peuvent rien ! Pire : pourquoi s'en prennent-ils à des fermiers ? Les pauvres n'y peuvent rien du tout. Ce sont des doubles victimes, de l'empire et de ces assassins. Ne devraient-ils pas plutôt les aider ?

Je trouve aussi que leur passé n'explique pas pourquoi ils luttent contre l'Empire. Leurs raisons sont vraiment égocentrées. Pourquoi ne pas voir plus large ? Par exemple, Robin des Bois se bat pour la population parce qu'ils trouvent les lois injustes, pas parce qu'il a perdu sa femme ou que ses parents étaient méchants avec lui. De même, Fil et Krone devraient avoir de vraies raisons de se battre. La population pourrait même les soutenir. C'est en faisant des actions pour aider les gens que ça pourrait foirer. Là ils ne font que des actions soit cruelles soit des farces cruelles.

Je te dis tout ça, mais c'est juste mon regard de lecteur, tu en fais ce que tu veux hein, je dis ça comme ça, je n'impose rien du tout 🙂 Si ça ne t'aide pas, n'en tiens pas compte !

Je te laisse y réfléchir et si tu as encore des questions, moi j'aime bien papoter autour de nos textes, donc hésite pas. 🙂
Flammy
Posté le 05/01/2023
Bon, je crois qu'il va falloir que je me fasse une raison x) L'histoire m'intéresse, j'aime beaucoup l'univers que tu dépeins, ta façon d'écrire, les descriptions, la plupart des personnages, mais je crois que pour Fil, c'est mort x) Plus ça va, et moins je l'apprécie ^^" Après, c'est pas dramatique d'avoir un personnage que je n'aime pas, c'est bien la preuve que les personnages ne me laissent pas indifférente, mais Fil, j'ai vraiment du mal avec lui.

En lisant la discussion du début, c'est au final toujours le même problème qui s'est posé à mes yeux. Pour moi, Krone a en grande partie raison, c'est pas juste parler sur le coup de la colère et de la rage. Personne a demandé à Fil de sauver les sauver, et même si c'est pas lui qui a mis le couteau sous la gorge des gens, c'est lui qui a déclenché les répressions, et même les attaques menées par Loren. S'il n'avait rien fait, ils ne seraient pas morts ces gens. Certes, on ne fait pas d'omelettes sans casser des oeufs, mais il pourrait au minimum admettre sans, sans lui, ces oeufs n'auraient pas été cassés, chose qu'il refuse toujours de faire. En plus, le côté "Non mais il a parlé sous le coup de la colère, il a trop d'empathie", j'ai trouvé ça un brin méprisant/paternaliste. Genre "Il est jeune, il comprendra plus tard". J'ai vraiment l'impression d'avoir en face un personnage qui est persuadé d'avoir une morale, qui s'en sert pour justifier pas mal de chose, et qui se rend pas compte qu'en fait, il est totalement amoral. Pour moi, l'exemple où ça m'a le plus marqué, c'est avec les paysans affamés. Il demande au peuple de se soulever contre le Parakoi. Ok. Quand les paysans font un début de "on se soulève" contre des gens qui certes, étaient sympathiques, mais empestaient bien l'argent, et ils cherchent juste à leur bouffer un cheval pour se nourrir, Fil trouve normal de donner dans la répression, sans voir le côté deux poids deux mesures. Même le moment face au crieur où il va pour s'excuser, j'ai trouvé ça extrêmement frustrant, parce qu'au final il n'a pas le temps de s'excuser, Krone s'excuse tout de suite et on passe à la suite. Bref, je pense que je vais m'arrêter là histoire de pas trop en faire (je crains d'avoir déjà insisté dessus ^^"), mais j'ai vraiment un souci avec Fil et son absence de moral, malgré ses velléités d'en avoir une.

Sinon, le plan pour les attirer est clairement efficace x) C'est bien de leur laisser un mois le temps d'arriver au cas où ='D Mais bon, c'était clairement le but, et il ne fallait pas que les otages meurent trop vite, sinon ils ne servaient plus à rien.

Et pour finir, il ne fait clairement pas bon être héraut du Parakoi dans ton univers, ils sont toujours maltraités ='D
ClementNobrad
Posté le 05/01/2023
Et bien, avant tout merci, car tu as enchaîné les chapitres aujourd'hui. En soi, ça me fait plaisir ! :D

Bon j'avoue avoir beaucoup ri en lisant ton commentaire (tu vois je ne suis pas rancunier sur les critiques :D)
Après, comme tu dis, si mes lecteurs n'aiment pas Fil, ça ne me dérange pas au fond. Tant que ça ne perturbe pas l'envie de connaître la suite de l'aventure, et que tu passes quand même un bon moment de lecture. Mes personnages ne sont pas tout blanc. Ils sont truffés de défauts, donc je ne m'attend pas à ce qu'ils soient aimés (Sauf Bulle de Savon qui est krô mignon quand même hein !)

Tout ce que tu as dit sur le fait qu'après tout, c'est Fil qui est à l'origine des malheurs des petits est totalement vrai. A y réfléchir, il aurait mieux fait de ne rien faire, en effet ! (C'est un peu ce que Krone lui dit) Il ne mesure pas du tout la portée de ses actes... On va dire qu'il est un peu fougueux, mais qu'il veut bien faire. Ca serait comme un gamin très débordant en classe, qui renverse tout pour traverser la classe pour essuyer le tableau et rendre service au maître...

Mais bon, j'l'aime bien mon Fil quand même (Après tout j'ai passé des soirées, des nuits et des journées entières avec lui :D)

Ma seule inquiétude, que ton expérience de lecture s'en retrouve "négative". C'est tout ce que je veux éviter.

Au plaisir de te lire.
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