La peinture

Il vient d'ajouter la dernière lueur à l'iris quand il remarque que la peinture s'est craquelée au coin des yeux. Il recule pour observer. Ça ressemble aux ridules d'un regard qui sourit.

Surpris, il fait encore un pas en arrière. La commissure des lèvres se retrousse lentement, un peu figée sur la toile. Le menton se détend. Mais oui, il en est sûr. Peu à peu, les traits s'assouplissent, les pommettes rougissent, les joues rebondissent. Il n'a pourtant pas peint un visage souriant.

Tout à coup, le tableau lui tend la main. Il n'hésite pas une seconde. Il la prend. Elle le tire, elle l'attire, elle l'absorbe. Il se laisse faire.

Il s'abstrait.

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MelaisHidden
Posté le 19/04/2021
Wow, ce texte est magnifique !

Je pense que pour l'instant, il est ex-aequo avec le thème de l'arbre. Tu as une plume vraiment magnifique, en toute simplicité, qui donne juste envie d'en lire plus.

Il n'y a pas de prétention dans tes écrits alors que... Franchement, tu pourrais en avoir avec de si jolis textes !
Liné
Posté le 26/03/2020
Hello,

Décidément ça me plait bien, quelques-unes de tes phrases par-ci par-là dans mes journées (rassure-moi, tu comptes garder un rythme de publication assez régulier ?).

Cette nouvelle-ci est tellement concise que j'ai du la lire deux fois pour que rien ne m'échappe : chaque bout de phrase, chaque mot, presque, pèse radicalement dans la balance.

J'en profite pour te demander : quel est ton "mode opératoire" ? Les textes très courts demandent une inspiration et des méthodes bien à part, en tout cas c'est ce que je ressens.

A bientôt !
Espelette
Posté le 26/03/2020
Merci beaucoup :) Publier régulièrement est un de mes objectifs à atteindre. Je vais tenter de m'y atteler.

Quant au mode opératoire, il vient d'un livre trouvé dans une bibliothèque : "Ecrire une histoire en 5 minutes" de Roberta Allen. Elle propose comme méthode de se mettre un chrono pendant 5 minutes, de choisir (au hasard) un thème et de noircir la page sans réfléchir pendant ces 5 minutes. Et de répéter l'opération plusieurs fois de suite (avec de nouveaux thèmes ou le même). Ensuite, si on le souhaite, on peut retravailler les nouvelles qui nous plaisent. C'est ce que j'ai fait ici.

Selon elle, écrire de manière automatique, sans réfléchir à ce qu'on note, insuffle une énergie au texte. Et j'avoue que j'ai pris beaucoup de plaisir à écrire ces histoires alors que, d'habitude, l'écriture et la création sont des actes assez douloureux pour moi.

Le format très court est à la fois facile parce qu'il ne demande pas un grand investissement de départ, et difficile parce que le texte doit vraiment aller à l'essentiel. Mais je trouve que c'est un bon exercice car j'ai toujours peur de verser dans le "pathos" et que ce format-ci oblige à libérer le texte de toute futilité.
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