Hybris

Par Liné
Notes de l’auteur : Pour remporter un concours, un homme, posté au milieu des rails, veut prendre la photographie d'un train en marche.

Hybris

   Ça y est : la terre gronde et le viseur tremble. Le train grandit, grandit, s’impose et, bientôt, remplit tout le cadre. Il n’y en a plus que pour lui : ses rouages de métal, ses côtes d’acier et la fumée qui s’en échappe. Il s’approche, énorme et monstrueux. Menaçant. Si Vidal ne bouge pas, dans sa pose de photographe avec ses deux pieds écartés entre les rails, c’est la collision. La mort. Les membres déchiquetés, les boyaux à l’air, le sang giclant.

   Plus que quelques secondes.

   Alors qu’il s’apprête à cliquer, un poids lourd percute Vidal en plein flanc. Le cadre bascule, le photographe tombe. Son regard est contraint d’abandonner le viseur pour épouser la poussière du sol. Le train passe en sifflant. Derrière, dans l’évanouissement de la machine, Vidal peste :

- Bordel, Sanchez ! J’y étais presque ! Je l’avais, ma saloperie de photo !

   Serré contre lui, son ami le dévisage d’un air contrit.

- Une foutue seconde, une ! continue Vidal. Mais faut que tu gâches tout !

   Sanchez. Quelle plaie, cette tête de lune aussi ronde et rouge qu’une pastèque, avec ses grands yeux d’ahuri sous ces lunettes qui ne tiennent jamais en place. Et maintenant qu’ils se retrouvent tous les deux le museau au sol, ce n’est pas sur Sanchez qu’il faut compter si l’on veut faire avancer les choses : il va rester à terre, le bougre, tout déboussolé qu’il est, à regarder Vidal et à espérer son indulgence. Un empâté, voilà à quoi l’animal se résume.

   Vidal n’y tient plus et repousse son ami d’un geste sec. Il se relève, époussette son vêtement, vérifie que son appareil photo n’est pas endommagé. Sanchez l’imite en quelques mouvements empreints d’une nonchalance prudente.

   Heureusement, parfois, Sanchez s’avère utile. À son propre détriment, mais utile tout de même. Après tout c’est grâce à lui si Vidal a décroché son diplôme d’ingénieur : sans Sanchez et ses antisèches, Vidal aurait chèrement payé ses mois d’école buissonnière, ses soirées arrosées et ses flirts toujours écourtés. Tous deux se sont rencontrés sur les bancs de l’université du coin. Et sur sa vie, Vidal serait bien incapable de se rappeler comment et pourquoi une telle amitié s’est forgée.

   D’autant qu’une fois le diplôme en poche, rien ne les prédestinait à poursuivre leur route côte à côte. Vidal a obtenu un poste d’ingénieur en télécommunications et supervisait la modernisation des villages voisins. Ce n’était pas rien ! La plupart de ces habitations évoluaient encore dans l’ancien monde, loin des pylônes et du goudron. Grâce à Vidal, elles connaissent désormais la civilisation.

   Sanchez, quant à lui, a fait preuve de maladresse pendant l’examen final : ses antisèches sont devenues trop nombreuses, et l’une d’elles a fini par s’éclipser hors de la trousse pour aller danser jusqu’aux pieds du surveillant. C’en était fini de Sanchez : découvert, grondé, recalé, expulsé. Le doyen lui a tiré les oreilles devant un campus hilare. Faute d’opportunités, Sanchez s’est vu contraint d’accepter l’offre de son grand-oncle et, depuis, s’attelle docilement à la gestion du champ familial. Aujourd’hui encore, se dit Vidal, on peut sentir sur Sanchez les effluves des humiliations passées : une odeur un peu effacée mais rance, écœurante, celle que les prédateurs reniflent sur la peau de leurs proies. Et ce n’est quand même pas de sa faute à lui, Vidal, si son empoté d’ami n’a pas réussi dans la vie.

- Pardon, Vidal, mais comprends-moi… J’allais pas te laisser te tuer ! Tout ça pour une bête photographie !

   Il est bonne pâte, ce Sanchez. Quand il a raison mais n’ose pas s’affirmer, il hausse les épaules ; ses bras s’enfoncent dans son cou graisseux, ses mains s’agitent comme pour peser un pour et un contre. Mine de rien, Vidal l’aime bien. Sanchez le rassure.

- C’est vrai, t’as raison… finit par admettre le photographe. T’es un pote, toi, un vrai !

   Du bout d’un sourire sincère, il lui flanque une claque bien virile sur l’omoplate. Excusé, Sanchez se détourne et donne un coup de pied dans le gravier. Les cailloux sortent de leur torpeur, jaillissent hors du sol et volent tous azimuts en une pluie grésillante. Vidal remarque ce geste et y lirait presque une pointe d’agacement. Depuis une semaine ou deux, il l’a bien remarqué, quelque chose irrite Sanchez. Seulement il ne faut rien dire : si son ami voulait lui parler, il le ferait. Entre eux, il n’y a pas de mièvreries qui tiennent. Les conversations sur le petit bonheur des uns et des autres, c’est pour les bonnes femmes.

- Tu vas retenter ? demande soudain Sanchez en désignant l’appareil photo d’un coup de menton hâtif.

- Un peu, que je vais retenter ! C’est une idée en or, je lâcherai pas l’affaire !

   Il s’assoit sur les rails. Avec cette chaleur, sentir le métal vibrer sous ses fesses est le meilleur moyen d’appréhender l’arrivée d’un train : au loin, l’horizon se brouille et les virages sont trompeurs.    

- Rappelle-moi pourquoi cette photo et pas une autre ? Je veux dire, rien ne t’oblige à y risquer ta vie…

   Sanchez s’est assis face à Vidal. Ses cuisses sont méchamment boudinées dans son pantalon beige et son arrière-train engloutit jusqu’au patin des rails. Il devrait se mettre au sport, juge Vidal en lui jetant un regard peu amène.

- Je t’ai déjà expliqué ça mille fois… ! rétorque-t-il.

   Mais qu’à cela ne tienne, il va rendre ce service-là à son ami tout gras : dérouler pour lui, une nouvelle fois, l’histoire de sa passion pour la photographie. Comment il a appris ce métier sur le tas en achetant son premier appareil et en mitraillant sa femme, cette ingrate qui lui tourne toujours le dos quand il modifie ses réglages ; mais aussi les paysans du coin qui ne savent pas, les bougres, la chance qu’ils ont d’être ainsi immortalisés pour les générations futures, eux qui n’existeront bientôt plus. Comment Vidal s’est amélioré, a maîtrisé en un temps record les secrets du flash, de la monochromie et du tirage en chambre noire. Comment il sent, au plus profond de lui-même, qu’il a quelque chose à offrir au monde par le biais de son viseur ; qu’il lui suffirait d’appuyer sur le déclencheur pour accomplir les miracles les plus juteux. Ce n’est qu’une question de temps et d’un peu d’efforts.

   Alors, ce concours tombe à pic. « Notre vie n’est que mouvement »[1]. Une phrase un brin creuse et prétentieuse, estime Vidal, et d’ailleurs il n’a jamais entendu parler de cet obscur « Michel de Montaigne ». Mais un thème qui l’inspire jusqu’à la démesure : il la prendra, cette photo du mouvement, ce cliché improbable de l’homme contre la machine, avec ce train qui court vers une perte, la sienne ou celle du photographe ; ce train qui combat l’inéluctable en hurlant du haut de ses fumées étouffantes, qui roule et roule sans autre perspective que celle de suivre, toute tracée, la ligne que les rails dessinent contre son gré ! C’est du génie. Personne n’a osé faire cela auparavant.

- Donc non, poursuit Vidal tandis que ses joues s’empourprent de fierté, je ne vais pas laisser tomber au bout de quelques ratés ! La Terre ne s’est pas faite en un jour, et ce sera pareil pour cette photo : ça prendra le temps que ça prendra !

   Son discours s’achève sur un silence pesant. Sanchez braque sur lui un regard presque ennuyé. Mais qu’a-t-il donc aujourd’hui, celui-là ? Ce n’est pourtant pas les sujets de conversation qui manquent, autour de la photographie et du concours. Pas le temps de tergiverser : sous ses fesses, Vidal sent soudain la vibration des rails. Un train est à l’approche.

   Mû par une excitation sereine, le photographe se redresse. Dans son champ de vision, l’image de Sanchez se relevant avec peine est chassée par celle du train qui, au loin, serpente déjà vers son adversaire. Alors, avec la majesté des cow-boys approchant un combat, Vidal foule la traverse des rails et, alerte, s’y poste jambes écartées, appareil photo en joue. Il est prêt à tirer.

- C’est de la folie… marmonne Sanchez pour lui-même.

- Tais-toi ! Me déconcentre pas, cette fois…

   Le grondement du train croît. Vidal coupe tout contact avec le monde extérieur ; seul compte son objectif. À travers son viseur, dont les lignes de cadrage pointent vers le train avec la justesse d’un fusil, il observe la machine approcher. La tête de fourmi géante s’agrandit à petit feu, ses fumées ploient sous la vitesse. Alors qu’elle occupe déjà les trois quarts du cadre, un sifflement aigu s’échappe du fin fond de ses entrailles : elle somme le photographe de s’écarter.

   Vidal n’en a que faire. Il ressent jusque dans sa moelle épinière le tac-tac rythmé et oppressant de ses rouages. Son corps vibre avec le métal des rails, ses oreilles bourdonnent et sa tête lutte contre le hurlement du train. Le gravier tremble entre les traverses. Pourtant, le photographe ne bouge pas d’un millimètre. Son chef-d’œuvre est proche. Le danger le grise ; il doit patienter encore quelques courts instants.

- Y en a marre !

   Le cri de Sanchez recouvre celui du train. Poussé par une force instinctive, le jeune homme se rue sur Vidal et, une nouvelle fois, le projette hors des rails. Tous deux roulent dans le fossé tandis que le train poursuit sa course mortelle, pestant et crachant du haut de ses mécanismes têtus.

   Vidal se redresse aussitôt.

- Bordel à cul, tu pouvais pas t’en empêcher, hein ! Un lâche, un vrai lâche ! Mais qui m’a collé une lavette pareille ? Tu vaux pas mieux que la dernière bouse de tes vaches !

   Ses insultes s’entremêlent au brouhaha que le train laisse dans son sillon. Sanchez prend le temps de se relever et époussette sa chemise comme pour la laver des mots de son ami. Ce dernier continue sur sa lancée :

- Tu veux que je te dise, tu t’es montré une fois utile dans ta vie, une seule fois ! Et encore, sans mon aide, t’y aurais pas pensé à ces satanées antisèches, hein ? À la fac ! Et même là, t’étais pas foutu de rester discret ! Il a fallu que tu te fasses choper et renvoyer ! Pauvre imbécile…

   Le train se tait, enfin. Et alors que le regard de Sanchez s’illumine derrière ses lunettes sales, un bourdonnement, comme l’écho des sifflements désormais morts, résonne aux oreilles. Dans ce silence incandescent, Sanchez articule :

- … Mais de quelles antisèches tu parles ?

   À l’expression grave de son ami, Vidal comprend que quelque chose cloche.

- Tu sais bien, lui répond-il, les antisèches dont on s’est servis pour l’examen final. Celui du diplôme.

   La voix de Sanchez énonce avec raideur :

- Tu veux dire les antisèches qu’on a cachées dans ma trousse, sans que je sache, et à cause desquelles je me suis fait expulser ? Celles qui ont ruiné des années d’acharnement, qui m’ont cloué dans le champ de mon grand-oncle… ?

   Vidal regrette soudain le sifflement du train. Il ne trouve rien d’autre que ses propres mots pour couvrir son désarroi.

- Mais enfin, tu te moques de moi ? essaie-t-il sans grande conviction. On s’y est pris à deux, pour ces antisèches.

   Le regard de Sanchez est sans appel. Il se tait. Sur son visage, par-dessus la noirceur de la rancœur, par-dessus le léger tremblement des lèvres qui trahit tout son dégoût, passe l’ombre d’une hésitation macabre.

   Vidal ne sait que faire. Comment diable pourrait-il retourner ce malentendu à son avantage ? Heureusement, le métal vient à son secours : sous ses pieds, les rails entament une nouvelle transe et le gravier recommence à tressauter. Ni une ni deux, Vidal échappe au regard assassin de son ami et se positionne une nouvelle fois face au train à l’approche.

   La machine arrive, semblable aux autres : la même fumée, les mêmes cliquetis, les mêmes râles. Désormais, Vidal connaît la manœuvre : il sait que l’engin ne reculera ni ne déviera de sa route ; il connaît son rythme, sa voix, son énervement, et est prêt à appuyer sur le déclencheur au meilleur moment.

- Regarde-la moi, cette machine ! s’esclaffe-t-il. Elle le sait pas encore mais j’en viendrai à bout, moi !

   Tout concentré qu’il est, il ne remarque pas la lueur tranchante qui éclaire soudain les lunettes de Sanchez. Les verres blanchissent, un frisson d’audace s’y dessine et le regard qu’ils dissimulent demeure illisible. Face aux deux hommes, la machine fonce à vive allure. Ses cris résonnent jusque dans leurs os, et ne trouvent d’échos que le raclement lourd des roues forçant le métal. Le choc est imminent.

   Debout, figé, le corps de Sanchez paraît traversé d’une tension glaçante. Ses épaules se contractent, son poing tremble. Vidal n’y prête pas garde. Impatient et fébrile, son doigt tressaute sur le déclencheur. Le train poursuit sa course. Tout à coup, les sifflements se font plus stridents encore.

   Et puis brusquement, noyés dans les hurlements de la machine, les bruits écœurants d’un corps déchiqueté. Un cri d’homme, cette fois, et la déchirure irréversible d’un squelette broyé.

   Sous un tonnerre de rugissements, le train opère un arrêt forcé et brutal. Il soupire : d’énormes tissus de vapeur s’échappent de ses oreilles. Contre son flanc se distingue la silhouette de Sanchez, immobile : il n’a pas bougé d’un pouce. Il s’écarte prudemment de la fumée et s’approche de l’avant du train.

   Dans la flaque de sang que quelques membres épongent, il reconnaît Vidal. Coincé entre un silence de mort et les pulsations retentissantes de ses tempes, Sanchez cherche sa respiration. Son estomac se tord.    

   Au milieu du désastre, un petit détail détonne : l’appareil photo attend encore, miraculeusement épargné, reposant en dehors des rails. Alors, tandis que le conducteur et une poignée de passagers s’attroupent autour de ce qu’il reste du corps, le jeune homme ramasse l’appareil, recule de quelques pas, colle son œil dans le viseur et prend une seule et unique photographie.

   Il gardera longtemps en mémoire cette image terrible, immortalisée dans ce noir et blanc qui ne laisse aucune place au sang. Le cadre est serré, très serré autour du train et des rails. Et, comme pour montrer comment l’arrogance s’est laissée emprisonner dans sa propre toile, toutes les lignes convergent vers un même point : le cadavre.   

   Deux mois plus tard, Sanchez remporte le concours. 

 

[1] Michel de Montaigne, Essais, 1580.

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Paul Genêt
Posté le 21/01/2024
Je lis enfin ces nouvelles ! Excellente idée cette photographie en fait ! Si Vidal n'était pas un odieux personnage, il aurait un côté héros hustonnien. Un détail m'a frappé : dans "Le puits l'emportera", tu décrivais les grains de sable comme mus par une volonté propre. Et ici, quand Sanchez donne un coup de pied dans le gravier, tu dis que les cailloux "sortent de leur torpeur". C'était beaucoup plus présent dans la première nouvelle mais le fait de donner une volonté à la terre, au sable ou aux pierres, ça crée un effet très troublant, très dérangeant. Ça met mal à l'aise, un peu comme l'écriture de Burroughs dans Le Festin nu. Je me demande si c'est encore présent dans la suite. Un autre détail, qui m'a beaucoup plu : "ses fumées ploient sous la vitesse". Le choix du pluriel fait une grande différence de style, c'est beaucoup plus fort, je ne saurais pas vraiment expliquer pourquoi. De manière générale, c'est du travail ciselé, ça se sent et j'aime beaucoup. Bravo !
Liné
Posté le 09/02/2024
Merci pour ton passage à travers les Synesthésies, Prof82 !

J'ai tendance à personnifier les éléments naturels (tu cites Huston, que je connais mais mal ; j'ai surtout Giono en tête). Il peut y avoir quelque chose de grandiose dans ce genre de procédés, l'impression que l'humain ne maîtrise pas tout (ce qui est bien vrai).
Paul Genêt
Posté le 09/02/2024
Je pense à John Huston, le réalisateur. Ses héros ont souvent de grands projets témoignant de leur hubris et, bien sûr, la fatalité s'en mêlant, leur condition humaine les rattrape. C'est le cas dans Le trésor de la Sierra Madre ou L'Homme qui voulut être roi, par exemple.
Nanouchka
Posté le 19/11/2023
Coucou ♥

Je réfléchis beaucoup à la structure des histoires en ce moment et je trouve ça passionnant de lire cette nouvelle à travers ce prisme. C’est un conflit entre deux personnages, avec une unité d’action lieu temps, où tout doit monter jusqu’au paroxysme de la chute, qui propose un renversement. C’est à la fois un exercice de style et l’unité de mesure de l’écriture romanesque : un roman est ponctué de scènes où un conflit se joue entre plusieurs personnages dans un lieu. Dans celle-ci, c’est très millimétré et chronométré, je pouvais sentir la structure du dehors, le besoin d’amener Sanchez au meurtre de Vidal, à travers une augmentation des conflits entre eux jusqu’à ce que ce soit intenable. C’est presque une fable, dans la façon où ça présente un renversement de la dynamique de pouvoir et un avertissement contre l’arrogance.

Ce qui me bloque émotionnellement, dans les formats courts, c’est que souvent il n’y a pas la place d’apporter les 1001 nuances qui font la psychologie humaine, j’ai l’impression. Ici, Vidal est le méchant puni injuste condescendant vain, et Sanchez la victime loyale attentionnée taiseuse, qui devient comme la main de la « justice » — ce qui du coup est très tranché et archétypal. Il n’y a pas de place pour des bontés de Vidal et des dégâts de Sanchez. Ça me fait bizarre parce que je sens que j’écris et lis surtout pour les fignoleries de l’âme humaine (comme celles de Virginie et Victoire (ooooh deux prénoms en V, la suivante sera-t-elle Valérie ?)).

Je n’ai pas vraiment de conclusion à tout cela, je voulais juste te partager mes réflexions. Bonne journéééée ♥
Rimeko
Posté le 26/05/2023
Oof, je me rappelle avoir eu ma curiosité piquée par cette histoire la première fois que tu en avais parlé sur ton JdB y a... deux ans... de cela... phew, que le temps passe vite - enfin, me voilà ! ^^
Je m'attendais à ce que ça finisse mal (?), donc pas de surprise de ce côté-là, MAIS tu arrives quand même à rajouter des couches de lecture au-delà d'une mort attendue, ça me fait presque penser à Avant les cendres tiens... Et l'idée de l'ami qui prend la photo ET remporte le concours, c'est vraiment le point final qui lie le tout ensemble. J'aurais peut-être seulement à reprocher qu'il m'a fallu un moment avant de comprendre ce qui s'était passé avec cette histoire d'antisèche, ce qui fait perdre peut-être un peu de sa force au (non-)geste de Sanchez si on s'interroge sur ses motivations...
Merci de partager tous ces textes, j'ai passé un bon moment en la compagnie renouvelée de ta plume ^^
Liné
Posté le 23/06/2023
Merci Rim' ! Contente de te revoir par ici ! Et il me semble que la case du bingo que tu as remplie avec mes nouvelles tourne autour de la "joie de vivre", ça me fait plaisir hahaa !

Il faudrait que je relise cette nouvelle si je souhaite la corriger. Avec le recul, j'en suis assez satisfaite mais justement, j'ai évolué depuis et il y a sans doute des rafistolages possibles à droite et à gauche. Large sujet que le point final jamais final !
Fannie
Posté le 13/03/2021
Que dire ? Ce serait arrivé tôt ou tard. Sanchez ne pouvait pas être derrière lui tout le temps. Vidal y serait retourné à un autre moment ou un autre jour. Toutefois, j’ai trouvé cette nouvelle très dérangeante, même si l’idée est géniale. Comme d’habitude, c’est très bien écrit, avec de magnifiques images. Et Vidal est détestable à souhait.
Rachael a buté sur la phrase « ses bras s’enfoncent dans son cou graisseux » ; moi j’imagine qu’il a les épaules tombantes, ce qui peut donner l’impression que c’est le prolongement des bras qui les relie au cou. Il n’est vraiment pas gâté par la nature, ce pauvre Sanchez !
Comme MldlG, j’ai buté sur la phrase « il regrette de ne pas avoir agi ». À mon sens, il manque quelque chose. Sanchez pourrait être abasourdi et agir un peu comme s’il était dirigé par une force extérieure quand il prend la photo ou en vouloir tellement à Vidal qu’il la prend sous l’effet de la colère – dans le genre « Tu voulais une phtoto ? Eh bien en voilà une ! » –, quitte à avoir des remords plus tard. Telle quelle, cette fin me donne quand même un sentiment d’inhumanité soudaine, qui ne colle pas avec le personnage de Sanchez. Il a dû être choqué par la révélation que Vidal vient de lui faire : ce malentendu a quand même fichu en l’air toute sa vie. Quand il hésite à pousser Vidal et qu’il ne le fait pas, il ne fonctionne déjà plus normalement. Puis un autre choc s’ajoute, celui de l’accident. Il est sidéré, il n’a pas encore vraiment pris conscience de la situation. Ça pourrait expliquer qu’il agisse ensuite en n’étant plus vraiment lui-même, comme si son cerveau s’était arrêté et qu’il était guidé par une force extérieure. N’as-tu jamais vécu une de ces situations où on n’est plus capable de penser, mais où on continue d’agir ? Et quand on y repense après coup, on se demande comment on a fait.
Coquilles et remarques :
— Ca y est : la Terre gronde et le viseur tremble [Dans ce cas, « terre » ne prend pas de majuscule. / Ça ; grammairiens et typographes sont d’accord là-dessus : il faut mettre les accents et la cédille aux majuscules et capitales. Voici quelques liens : https://www.dictionnaire-academie.fr/article/QDL005
https://blgraphiste.fr/accentuer-les-capitales/
http://www.academie-francaise.fr/claude-c-france
https://www.projet-voltaire.fr/culture-generale/accent-majuscules-capitales/]
— Mais ‘faut que tu gâches tout ! [Mais faut ; c’est du langage parlé avec omission du « il » et il n’y a aucun signe à ajouter, puisqu’il n’y a pas d’élision.]
— Il se relève, époussète son vêtement [la graphie traditionnelle est « époussette » ; « époussète » correspond au lexique des rectifications orthographiques de 1990]
— quelques mouvements emprunts d’une nonchalance prudente [empreints ; c’est le participe passé du verbe « empreindre », de la famille d’« empreinte »]
— D’autant qu’une fois le diplôme en poche, rien ne les prédestinait à poursuivre leur route [Cette formulation veut dire qu’ils ont les deux le diplôme.]
— et gérait la modernisation des villages voisins [là, on est à la limite entre le sens figuré et l’extension de sens abusive ; il administre, il dirige, il est responsable de, ou il s’occupe de, il est chargé de, il organise…]
— ses antisèches sont devenues trop nombreuses et l’une d’elles a fini par se faire la malle hors de la trousse et a dansé, gracieusement, jusqu’aux pieds du surveillant [Cette phrase est un peu hétéroclite du point de vue du style : « se faire la malle » détonne à côté de « a dansé, gracieusement, jusqu’aux pieds du surveillant »]
— Faute d’opportunités, Sanchez s’est vu contraint d’accepter [de perspectives professionnelles ; dans cette acception, « opportunité » est un anglicisme et une impropriété. Voir ici : http://www.academie-francaise.fr/opportunite]
— et volent tous azimuts en une pluie grésillante. [Rachael a contesté cet adjectif, mais il figure dans le dictionnaire de l’Académie française et dans le Robert.]
— lui rétorque-t-il [Je mettrais simplement « rétorque-t-il ». Voir ici : https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9R2244]
— qui roule et roule sans autre opportunité de vie [Voir plus haut ; perspective, possibilité, choix, option, destin, « sans aucune latitude de choix », peut-être ?]
— Mu par une excitation sereine [Mû]
— A travers son viseur [À]
— Son chef d’œuvre est imminent [chef-d’œuvre / d’autre part, c’est dommage d’employer deux fois l'adjectif « imminent »]
— t’y aurais pas pensé à ces satanées antisèches, hein ? A la fac ! [À]
— Dans ce silence incandescent, Sanchez articule : [Il faut une espace insécable]
— Mais enfin, tu te moques de moi ? essaie-t-il sans grande conviction [« Essayer » n’est ni un verbe de parole ni un verbe auquel se superpose naturellement l’idée de parole. Je propose « hasarde-t-il ».]
Typographie : Pour les dialogues, il faudrait employer des tirets cadratins ou demi-cadratins ; pas des tirets courts, qui sont des traits d’union.
Quant aux retraits, il faudrait les inclure dans la mise en page, mais pas ajouter manuellement des espaces (ni des tabulations). Il faudrait aussi enlever tous les espaces à la fin des paragraphes. Ça ferait meilleure impression quand tu envoies tes textes à des ME.
Liné
Posté le 07/04/2021
Ah, j'aime l'aspect dérangeant que la plupart des plumes relèvent. J'ai l'impression que, ce qui ressort de cette histoire, c'est le côté détestable de Vidal (au point où on lui souhaite de mauvaises choses), puis la satisfaction de savoir qu'il est puni tout en culpabilisant d'avoir eu de telles pensées. Quelque part ces réactions me rassurent : on n'est pas censés apprécier ce personnage, mais la violence ou la vengeance ne devraient pas devenir des fins en elles-mêmes : qualifier cette lecture de dérangeante revient à dire, selon moi, "j'ai souhaité sa fin mais je n'aurais pas du", ce que je trouve très humain, et même positif.
Dans les derniers paragraphes, la réaction de Sanchez ne me convenait pas : je n'arrivais pas à mettre le doigt sur ce qu'il était "censé" ressentir. Je viens de supprimer deux ou trois phrases (dont le "il regrette de ne pas avoir agi", trop simpliste à mon goût), afin de laisser une marge d'interprétation. Je laisse décanter, et à la prochaine lecture je verrai si cet angle fonctionne mieux ;-)
DoublureStylo
Posté le 07/04/2020
C'est toujours très bien écrit !
J'ai été un peu moins embarquée par cette histoire (manque d'identification et d'attachement aux personnages, je pense), mais la forme reste parfaitement exécutée.
On se retrouve à la nouvelle suivante ^^
Liné
Posté le 09/04/2020
Merci DoublureStylo !
Quelque part, heureusement que tu ne t'es pas identifiée aux personnages (surtout à Vidal)... même si cela a un peu nui à ta lecture !
A très vite ;-)
DoublureStylo
Posté le 15/04/2020
Ah ah oui, j'aime autant pas leur ressembler :D
Je dirais pas que ça a nui à ma lecture, j'ai juste pris un peu moins de plaisir ^^
Elodie
Posté le 07/01/2020
Cette nouvelle est incroyable! Encore bravo!! La narration réussit à nous plonger dans un univers très visuel en quelques phrases et la psychologie des personnages est transcrite avec tellement de fluidité qu'on a l'impression de déjà les connaître.... J'ai adoré, merci!
Liné
Posté le 10/01/2020
Merci again !
Oui, je me suis focalisée sur les points de vue des personnages, leur psychologie respective, et leur champs de vision. Côté écriture, je trouve ça très jouissif de me plonger dans la tête de personnages antipathiques ! (même si je varie aussi)
Rachael
Posté le 20/08/2019
C’est super ce nouveau PA ! grâce à lui, j’ai vu que j’avais raté cette nouvelle. Mieux vaut tard que jamais. Et c’était dommage, parce qu’elle est percutante (ah, ah !). Non, sans rire, je trouve vraiment chouette ce dialogue entre sanchez et vidal, le mépris injustifié du second pour le premier, qui éclate et mène à la résolution (finale) de leur relation. Franchement, l’idée est très intéressante, et la réalisation très réussie. Quand voit-on la photo ? ^^
détails
ses bras s’enfoncent dans son cou graisseux : je ne vois pas trop l’image.
Pluie grésillante : il n’y a pas d’adjectif pour grésiller. Crépitante ?
Avec cette chaleur, sentir le métal vibrer sous ses fesses et le meilleur moyen d’appréhender l’arrivée d’un train : est le meilleur moyen ?
sans autre opportunité de vie : perspective ?
Liné
Posté le 20/08/2019
Hello Rach', ravie de te retrouver par ici !
Hahaa, je fais un peu de photo, mais je n'ai encore jamais rencontré d'abrutis tels que Vidal ;-)
Et je fais n'importe quoi avec l'organisation des nouvelles de Synesthésies sur PA : j'arrête pas de les intervertir pour placer celles qui me paraissent plus abouties en premier... c'est ma faute si tu t'y perds !
A très vite,
Liné
AxelleC
Posté le 03/02/2019
Cette nouvelle est puissante et impressionnante, j'en suis restée baba ! 
Vidal est détestable. 
Bravo ! 
Liné
Posté le 03/02/2019
Merci beaucoup AxelleC !
:-D 
MLdlG
Posté le 09/01/2019
oh flûte j'ai fait une fausse manip et mon commentaire est parti... :'(
 Je rejoue !
Du coup, sur cette nouvelle, je n'ai pas grand chose à dire. Je trouve ton écriture très joli, très belle, très parlante et très agréables à se mettre sous les yeux. :)
Je m'attendais un peu à la fin. 
j'ai uniquement une remarque de passage sur le final, disons que je réfléchis à voix haute. je me demande pourquoi tu marques textuellement  "il regrette de ne pas avoir agi." ? Je peux tout à fait concevoir qu'il soit en état de choc et donc que son corps réagit (vomissement, tremblement, ...) mais je suis surprise qu'il ressente des regrets... Pour moi la notion de regrets est postérieure à une action (genre Xtemps après). Sur le coup, outre le choc émotionnel, il pourrait peut-être culpabiliser ou avoir des remords, de la honte, ... mais regretter, à mon humble avis, c'est quand on ne digère pas bien un truc et que ça remonte se cogner dans les dents bien plus tard. voilà, c'est tout ;)
Liné
Posté le 09/01/2019
Ha ça m'arrive tellement souvent, les fausses manip de commentaires sur FPA :-/ Merci d'avoir persévéré, tes remarques me sont très utiles !
J'ai écrit deux ou trois versions différentes de la fin, car j'avais du mal à cerner exactement le personnage de Sanchez. Dans une première version, l'accident ne lui faisait ni chaud ni froid et je trouvais que cela "cassait" un peu le rapport que le lecteur pouvait avoir construit avec lui. Tu as raison de souligner l'importance des regrets, c'est peut-être un peu fort... Je retravaillerai cette fin !
Laure
Posté le 08/12/2018
Mais elle est géniale, cette nouvelle ! Pour le coup, même en cherchant, je ne trouve rien à améliorer. J’ai adoré !
Les deux personnages sont bien construits, le décor est bien posé (le travail autour des sens qu'il y a quand le train arrive, c'est fou), il y a de l’humour, des émotions, la chute est super bien trouvée.
Je sais pas quoi dire d’autre. Bravo !
Juste un détail :
« Mais qui m’as collé une lavette pareille ? » : m’a
Liné
Posté le 08/12/2018
Haaa, merci beaucoup !!
J'ai envoyé ce texte à un AT, j'espère que le comité appréciera autant que toi... <3
D'ailleurs, dans la version que j'ai envoyée, il y a deux toutes petites phrases en plus que sur celle postée sur PA : à la toute fin, avant la dernière phrase, je décris rapidement la photo que Sanchez a prise (j'ai fait lire à mon copain et il a expliqué qu'il aurait souhaité que je décrive un minimum la photo). C'est peut-être la petite note d'amélioration ?
Merci encore !!
Liné
itchane
Posté le 04/11/2018
Ho bah mince alors, incroyable, une nouvelle fois !
Ils sont tellement vivants tous les deux, je peux les voir, les sentir, les comprendre presque (presque : P ), la scène est si bien trouvée, cette photo à prendre, l'arrivée du train, bref... parfait parfait ^^
Encore bravo ! 
PS : Incroyable aussi que tu parles dans ta réponse de commentaire de la série de courts "Ta mère en short(s)" que je n'ai pas vu mais qui s'appelle en fait "Ta Mort en short(s)"... ce lapsus semble d'autant plus porteur et magnifique quand on a lu Le Puits l'emportera : D
Liné
Posté le 04/11/2018
Nan mais ce lapsus !! Et moi qui travaille justement dans le cinéma xD
Contente que cette nouvelle fonctionne pour toi ! J'ai beaucoup travaillé sur les trois points de vue (Vidal, Sanchez et le train) en tentant de rendre les actions les plus visuelles possibles. J'espère que les nouvelles suivantes te plairont tout autant !
Makara
Posté le 04/11/2018
Encore une super nouvelle :) la fin est percutante :p
Liné
Posté le 04/11/2018
Haha percutant est le mot ;-)
Merci beaucoup pour ces compliments ! Je me dis que si tu as réussi à lire ces trois nouvelles à la suite, c'est qu'elles parlent un minimum ! 
A très vite :-) 
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