Forever and Always - Bullet For My Valentine

Par Pouiny
Notes de l’auteur : https://youtu.be/MeHJH624VRg

J’avais toujours 17 ans, et toujours ce même 8 mai. J’avais passé une journée incroyable et extatique dans la première convention de ma vie, aux côtés des premiers amis que je m’étais faits. Mais tous les jours, même les meilleurs, ont une fin : et celle-ci s’arrêtait alors que mon ami et moi rentrions dans le train qui devait me ramener dans notre ville de Nîmes.

 

Après toutes les émotions, positives comme négatives, qu’avait attisé cette journée de folie, je m’effondrais sur le siège du train, tandis que mon ami riait de ma tête exténuée. Pourtant, il n’en menait pas large non plus. Après tout le bruit, toute l’agitation, nos peluches achetées sur des stands en main, nous profitions du roulis tranquille du train qui quittait doucement la gare pour retourner chez nous. C’était comme si nous revenions après un séjour sur la Terre du Milieu.

 

N’étant pas du côté de la fenêtre, alors que je me rendais compte que nous étions trop fatigués pour trouver quoi que ce soit à se dire, je me laissais tomber sur son épaule. Loin de s’en formaliser, il passa son bras sur mon dos. Je mis discrètement mes écouteurs, faisant tourner une chanson en boucle sans la choisir. Et ce curieux hasard d’un soir de lassitude donna ma seconde Musique Capsule de ce jour : Forever and Always de Bullet for my Valentine.

 

Les riffs à la guitare électrique étaient forts, mais emplis d’une douceur étrange. Le tempo marqué par la batterie paraissait correspondre aux mouvements du wagon. Je fermai les yeux, profitant de l’étreinte légère de mon ami qui me soutenait depuis presque un an dans mes angoisses et mes déboires, et acceptant la tranquillité d’un retour chez soi. Avec la fatigue, le temps semblait comme s’arrêter avec sérénité. Le train aurait pu nous emmener n’importe où, je ne m’en souciai plus : n’importait désormais que cet instant, cette volupté dans un silence volé par mes écouteurs.

 

« Forget about the shit that we’ve been through ! I wanna stay here forever and always ». Plus la musique s’avançait, plus il ne me restait que cette phrase dans mon esprit. Sans la dire, je continuais de tomber sur l’épaule de mon ami, ma tête s’alourdissant de plus en plus. Je m’endormais lentement, oubliant la gare, le terminus, l’arrivée et le retour de la vie au milieu des autres passagers. Je m’effondrais dans ce genre de sommeil paisible, où l’on n’a pas le temps de réaliser que l’on perd conscience. Ce sommeil où l’on bascule sans se retenir vers l’inconnu. Ce sommeil où l’on n’a pas peur de s’enfuir. Et alors que la voix se taisait et que la mélodie des guitares tournait en s’évanouissant comme une berceuse, tout disparaissait pour ne laisser que la batterie marquer un tempo dans le vide. Ainsi, me perdant dans le fin fond d’une boucle musicale, accrochant instinctivement ma main sur le bras de mon ami qui me servait désormais de coussin, je m’endormis profondément.

Amusé, il fit le gardien de ma nuit pour la durée du trajet. Il prit une photo de moi dans cet état, malicieux, mais il ne m’importuna pas. J’émergeai de moi-même quand le train commença à entrer dans la ville de Nîmes. J’étais habitué aux transports, et j’avais obtenu ce super-pouvoir de sentir le moment où il fallait reprendre conscience. Mais avant même d’ouvrir les yeux et de ressentir le train ralentir sur ses rails dans les vibrations de mon corps, j’entendis dans mes oreilles la musique, identique, qui avait continué de jouer dans mon absence. « Forever and always… »

 

Sonné, je quittai mon ami sans trop le réaliser et partis pour chez moi avec mon gros sac et ma peluche. Tout le long du trajet, je laissai Matt Tuck poursuivre son chant. Je restai sur mon petit nuage, rompu, mais heureux. Moi qui avais tant cru, auparavant, qu’il valait mieux abandonner quand la vie se faisait rude, je fus infiniment reconnaissant d’être encore présent, entre ciel et terre. Pour toujours, et à jamais. Et de ce constat, épuisé, mais comblé, j’en ai récupéré une musique qui sonne comme les rails d’un train, murmurant de l’espoir sans remous le long du chemin d’un retour en ville connue.

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Ewen
Posté le 17/05/2021
C'est étonnant, je m'attendais à ce qu'il t'arrive une bricole ou jsp quoi durant ce trajet mais rien du tout. En fait, comme ce que t'évoque cette chanson, ton texte est une sorte de repos au milieu de toutes tes autres capsules. Il s'en dégage une aura vachement apaisante !

Et du coup j'étais en train ("en train", tiens, c'est de circonstance) de me demander si j'avais moi aussi des chansons qui m'évoquaient des moments précis, et j'en suis arrivé à la conclusion que la plupart du temps la première fois que j'entends une musique, les images que j'y appose sont celles du moment durant lequel j'ai pu écouter cette musique pour la première fois. Exemples : pour l'album Modern Sounds… de Ray Charles, je me revois chaque fois dans un train à regarder des champs et prairies défiler, et j'y peux rien. Ou alors Frustrations de Femi Kuti jme revois chaque fois en train d'essuyer la vaisselle (j'ai pas dit que ce serait palpitant xD)
Pouiny
Posté le 17/05/2021
Et oui, parfois il ne se passe rien dans la vie ! x) et finalement, c'est pas si courant, à tel point qu'on s'en souvient, parfois ^^

Et je vois ce que tu veux dire ! ça me le fait parfois, aussi. C'est souvent c'est la première écoute qui fait cet effet "capsule". Néanmoins pour le coup, curieusement sur celle-là c'est pas le cas ! Forever and Always je l'avais entendu plein de fois avant ça, mais je suis incapable de m'en souvenir ^^

Merci beaucoup en tout cas, je suis content que le texte transmettre ce que je voulais ^^
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