Epilogue

Par Jamreo

Extrait du Hill’s week229, mercredi 22 décembre 2021, rubrique des annonces spéciales.

« Lecteurs, chers amis, nous espérons vous trouver en bonne forme depuis le numéro de la semaine dernière. Nous, les New Lights, voulions reprendre la parole aujourd’hui, en cette période difficile, pour nous adresser à vous. Le fait est qu’en l’espace de sept jours, sept petits jours, il s’est passé bien des choses, mais nous ne reviendrons pas ici sur des événements que nos confrères et consœurs du Hill’s week - nous les saluons chaleureusement – vous relateront mieux que nous.

Vous constituez un lectorat censé, éveillé, on ne peut plus raisonnable. Mieux, nous partageons tous et toutes les mêmes valeurs. Cela ne fait aucun doute.

Amis, peut-être avez-vous entendu parler d’un groupuscule se faisant appeler les Children of Light. Ces personnes, actives depuis quelques années et responsables de plusieurs actes criminels dans les rues de Boston, se réclament de notre protection.

Nous tenons à vous assurer qu’il n’en est rien.

Les méthodes de ces personnes sont barbares, ignobles et indignes. Exécutions au fin fond de ruelles, tortures sans discernement, maltraitances forcenées. La liste est longue. Dites-nous, où est la charité, où sont la pitié et la bienveillance dans tout cela ? Ce n’est pas ce que nos lois nous commandent, et nous condamnons fermement tout acte de ce genre.

Que les victimes soient issues de notre odieux ennemi, le Transhumanisme, n’y change rien. La dignité humaine, de la vie créée par Dieu, nous importe, et nous savons qu’elle vous importe aussi. Les personnes impures n’ont pas à souffrir ces violences inutiles. C’est pourquoi nous prenons un soin tout particulier à leur proposer les méthodes les plus douces.

Si vous connaissez, ou si quelqu’un de votre entourage connaît une personne que vous soupçonneriez, pour quelque raison que ce soit, d’être Transformée, accomplissez votre devoir de citoyens et appelez sans attendre le numéro renseigné à la fin de ce communiqué. »

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Extrait du Hill’s week229, mercredi 22 décembre 2021, rubrique des dernières informations.

« En fin de semaine dernière, les agents de la brigade de bioéthique ont découvert un bien étrange spectacle au cœur du quartier de Mattapan, dans l’église catholique désaffectée de St Angela. Souvenez-vous, St Angela fut il y a quelques années le théâtre d’événements tragiques, aux temps de l’interdiction du catholicisme.

La patrouille a rapidement mis au jour la sombre vérité : l’église était vraisemblablement encore utilisée par un groupe de personnes aux pratiques alarmantes. Les membres de la brigade, bouleversés, n’ont pu décrire clairement ce qu’ils y ont découvert. Nous n’irons pas jusqu’à comparer le matériel trouvé sur les lieux à une panoplie du petit sataniste, quoiqu’il eût peut-être mieux valu. Pour la sensibilité de nos lecteurs, nous n’irons pas plus loin dans la description.

Disons simplement ceci : il apparaît clair que des machinations à visée transhumaniste se tenaient sur les lieux. Depuis combien de temps ? Quelle est l’ampleur des dégâts ? Il est pour l’instant impossible de le savoir. Le matériel a bien évidemment été confisqué pour de plus amples analyses, l’église a été désinfectée de fond en comble et fermée dans l’attente d’une démolition, qui devrait avoir lieu dans une dizaine de jours.

En collaboration avec la direction de Blak-out Incorporation, le gouvernement de Boston continue les recherches dans l’espoir d’appréhender les responsables de ces hideuses expériences, et d’en saisir la nature précise. »

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Dimanche 26 décembre.

Dans son lit, Sanne terminait la lecture des dernières informations. Elle s’était attendu à ce que ces nouvelles la chamboulent, mais ce n’était pas tant le cas. Elle comprenait que les New Lights n’étaient pas près de sortir du tableau et qu’elle et ses semblables devraient sans doute craindre le danger, quel que soit l’endroit où ils se trouvaient. Mais la destruction de Memoria contrebalançait la morosité. La vengeance, même par procuration, avait un goût sucré.

Ici, en république de Californie, elle n’aurait pas cru avoir accès au Hill’s week. Mais l’aide-soignant qui l’avait prise en charge, depuis que Roy et Fitz avaient insisté pour la conduire à l’hôpital, était un garçon étonnant de ressources. Elle le soupçonnait de la favoriser. Parce qu’elle était Transformée, et rescapée de Nouvelle-Angleterre en plus de ça. Mais ce n’était pas déplaisant.

— Comment vous avez fait pour vous le procurer ?

— Ahah, avait-il répliqué. Tout le monde a ses secrets, non ?

Il avait pouffé devant l’air consterné de sa patiente. Oui, il semblait bien que tout le monde avait ses secrets.

Elle aurait voulu se mettre des œillères mais se rendait bien compte qu’il essayait d’arrondir les angles au sujet de son état et de son espérance de vie. Les soins lui feraient du bien. Seulement, la médecine n’accomplirait pas de miracles.

Ce n’était peut-être pas si grave tant que la douleur, elle, restait gérable.

Sanne reposa le journal sur la table de chevet, près du casque insonorisant qu’on lui avait prêté pour dormir. Lloyd, assis sur le rebord de la fenêtre et absorbé par sa console de jeux, releva la tête en sentant son regard. Il lui fit un sourire, auquel elle répondit.

Roy et Fitz étaient partis régler quelques affaires ; ils espéraient encore sauver leur cargaison de bières. Blaster était là, tombée endormie dans le fauteuil des visiteurs et son livre ouvert sur le ventre. Elle n’avait pas attendu longtemps avant de se ruer dans les librairies de San Francisco.

Sanne soupira. Elle voudrait bien sortir de ce lit et explorer un peu San Francisco, elle aussi. Il devait encore y avoir les décorations de Noël et elle aurait aimé voir ça. On lui avait dit que ce serait bientôt possible, parce qu’il ne servait à rien de passer sa vie à l’hôpital. Il lui faudrait simplement y faire halte de temps en temps, tant que la situation l’autorisait à rester en ville, que le danger était suffisamment loin et que Roy et Fitz ne manquaient pas d’argent.

Elle se sentait mal de piocher dans leur fortune familiale ainsi, mais ils n’avaient rien voulu entendre. En un sens, ils le faisaient aussi pour Duke. Il faudrait qu’elle songe sérieusement à les remercier.

Sanne étouffa un bâillement. Elle dormait comme une souche depuis son arrivée mais, visiblement, ce n’était pas suffisant. Ses doigts se refermèrent sur le casque qu’elle posa tout contre ses oreilles.

Les sons extérieurs disparurent.

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Fannie
Posté le 24/01/2020
C’est peut-être parce que j’ai repris la lecture après une très longue interruption, mais je reste sur ma faim. Ce n’est pas le fait que Sanne n’accède pas à son identité qui me dérange, mais un sentiment général de mystère qui persiste, une impression que l’histoire n’a pas été entièrement racontée.
Coquilles et remarques :
— Vous constituez un lectorat censé, éveillé [sensé ; qui a du bon sens, pas qui est censé faire quelque chose]
— le numéro renseigné à la fin de ce communiqué [le numéro indiqué ; renseigner une personne, c’est lui donner un ou des renseignements ; le numéro est un renseignement : il ne peut donc pas être renseigné]
— il apparaît clair que des machinations [« il paraît clair » ou il « apparaît clairement »]
— la direction de Blak-out Incorporation [« Blak-Out Incorporation » serait plus logique. Est-ce vraiment « Blak » plutôt que « Black » ?]
— Elle s’était attendu à ce que ces nouvelles [attendue]
— Elle voudrait bien sortir de ce lit [Dans un récit au passé, le conditionnel présent est l’équivalent d’un futur ; je propose « Elle aurait bien voulu » ou « Elle avait envie de ».]
Jamreo
Posté le 05/04/2020
Ah, d'accord donc l'identité de Sanne qui reste un mystère, ce n'est pas ce qui te dérange ? Désolée du coup s'il y a d'autres zones qui te paraissent sans explication... mais e tout cas, merci beaucoup pour ta lecture !
Fannie
Posté le 05/04/2020
En revoyant mon dernier commentaire, je le trouve un peu sec. (Je devais être fatiguée et particulièrement peu inspirée ce jour-là…) C’est vrai que je ne m’étais pas remise de la mort de Duke au moment où je l’ai rédigé. Il s’est sacrifié alors qu’il avait encore « toute la vie » devant lui au profit d’une personne qui n’a pas beaucoup d’avenir, ce qui accentue mon impression d’injustice et de gâchis. Mais si j’en veux à Effy, je ne t’en veux pas à toi du dénouement que tu as donné à cette histoire. Mon affection pour toi reste intacte, j’aime toujours autant ta plume, et tôt ou tard, je reviendrai te lire.
Si je suis restée sur ma faim, c’est en grande partie parce que je n’ai pas réussi à avoir une bonne vision d’ensemble de la situation, des forces en présence et des raisons de ces conflits. Peut-être que tu n’as pas voulu alourdir ton récit avec des explications, peut-être que tu as cultivé le mystère (et ma mauvaise mémoire ne m’a pas aidée) ; quoi qu’il en soit, il me semble que le récit y gagnerait si tu donnais un peu plus d’informations sur la situation générale, tout en conservant une part de mystère. Facile à dire, je sais.  :-)
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