Après avoir longtemps réfléchi à ce qui me faisait dire que l'ennui était profondément différent de la lassitude, sans réel fondement (essayant en vain de défendre mon idée), voilà que j'ai trouvé ce petit pavé que j'ai organisé, peu à peu, et à tâtons.
L'ennui... l'ennui est plus fort que la lassitude, plus puissant, c'est un abattement du cœur. C'est un sentiment qui nous rempli, et étouffe tous les autres dans son liquide, leur donnant un aspect mélancolique. Il est plus fort, plus puissant, oui, et d'autant plus coloré, pétillant de saveurs tièdes-amers, parfois aigres-douces, tantôt dévastatrices. C'est un poids qui amène parfois sa souffrance aux confins du cœur, légère, sournoise, câline. Tristesse de l'âme, envies de rien, il nous fait ressasser nos pensées, nous affale dans le canapé, le regard au plafond, ruisselants de lenteur.
Alors que la lassitude... qu'est-ce que c'est, sinon une émotion grise, fade, vide, maussade, superficielle ? Elle flotte sur nos traits, pâle, livide. La lassitude est faible, mais vorace dans son genre, c'est un voile qui se pose sur l'éclat de nos yeux et abaisse nos paupières. La lassitude est sans couleur, sans odeur, sans perception. Elle n'est pas la vie, elle est son absence.
Mais l'ennui... L'ennui est doux, un peu suave. Un peu brutal. Il nous rappelle chaque jour avec une pesante présence que nous vivons mais que nous ne savons pas quoi faire... L'ennui est une expression de l'âme dans sa douleur, le marasme des émotions du cœur.
Et la lassitude, c'est le dépérissement de l'âme, elle est uniforme, parfaite et lisse, moribonde. Sans goût.
Dans la thématique de l'ennui, mais avec un style très différent, on peut aussi parler de "Moderato Cantabile" de marguerite Duras. Le style est très différent, très épuré, très "en surface" mais c'est toujours la même thématique, l'oubli, la solitude, la place de la femme délaissée dans une société qui n'arrive pas à les laisser s'épanouir. C'est pas facile à lire, mais pour peu qu'on accroche au style et qu'on accepte de se laisser embarquer dans quelque chose d'assez énigmatique, ça vaut vraiment le détour !