Chapitre XII - Où les poulets volent enfin (2/2)

Notes de l’auteur : [Version mise à jour le 10/11/23 après les derniers commentaires. Merci pour vos lectures et nous vous souhaitons, à vous qui arrivez, bon chemin du repentir ~]

Et ses consœurs, stimulées par leur amie, ont fait barrage entre l’aïeul et moi. Elles l’ont embarqué, je n’ai même pas eu le temps de les remercier. Il faut dire aussi que j’étais encore trop en colère pour réagir au mieux. En présence de certains bien-portants, c’est un peu comme s’il n’y avait pas vraiment de frontière entre mon corps et l’espace de tout un chacun. Pas d’intimité. Comme s’il était disponible, le corps hors-norme, et que les gens pouvaient y couler leur voyeurisme, leur charité maladroite, tous leurs fantasmes, enfin… je ne t’apprends rien, je suppose.

Bref, j’ai fini tout de même par soupirer, soulagé, en retournant à mes papiers pour me donner une contenance – ce n’étaient que des feuilles vierges. Je ne pus que les regarder vaguement, incapable de me reconcentrer immédiatement.

— V’là que ça commence ! tempêta soudain un des coqs de plus tôt – je compris qu’il était resté à espionner. Si on apprend quoi qu’ce soit de louche, j’te démolis.

— Et qu’est-ce qui commence ? j’ai sifflé.

— Tu vas pas m’dire que t’as rien fait pour qu’elles volent toutes à toi !

Pauvre bûche ! Il ne pouvait donc pas se figurer que ces femmes avaient juste apporté une aide salutaire, simplement humaine face aux remous d’un malotru ? Il y en a qui doivent être sacrément préoccupés de ce qui leur pend entre les jambes pour mettre de l’aguiche sur tout ce que font ces dames ! Et déjà, le gorille revenait vers moi, poing serré, prêt à me donner un avant-goût de sa menace. Je rangeais mon matériel pour limiter les dégâts, n’ayant pas le temps de me défiler. Heureusement pour moi, Florentino vint à mon secours et croisa les bras, la mine renfrognée, pour toiser l’hurluberlu de toute sa hauteur de bûcheron.

— Un souci, l’ami ?

L’intervention eut son petit effet : en face, l’autre se racla la gorge et, sur une piteuse secousse de tête, se retira sans demander son reste. Même si l’incident était clos, en tout cas en apparence, nous avons préféré ne pas nous attarder à La Barthe et nous reprîmes la route.

Un jour, la plaine que nous traversions était déserte. À l’intérieur de la cahute, Guillem demeurait proche de moi, inquiet, et je ne me plaignais pas non plus d’être en sa compagnie. Une brume macabre planait sur l’endroit. Nous n’avons pas tardé à en découvrir la cause : au milieu d’un champ gisait un troupeau de bœufs morts. Les mouches tournaient autour, seul bourdonnement dans le silence. Je sortis de la cahute et m’avançai à la limite du champ ; assez loin pour être en sécurité, assez proche pour sentir une odeur épouvantable. Les bêtes avaient crevé il y a peu.

Guillem tint à longer le champ, en trottinant, tandis que les autres observaient avec moi le sinistre tableau. Un bruit de chute et un cri nous tirèrent de notre sidération et ça nous a effrayés de voir notre benjamin au pied d’un cheval monté par un noble à rubans. Son regard a passé de Guillem à nous, avant de se détourner. Florentino rappela son frère d’un bras impérieux et il ne s’est pas fait prier pour nous rejoindre. En silence, la route a repris jusqu’au hameau le plus proche.

En dépit du mal qui avait ravagé le bétail du seigneur – un certain marquis de la Fontenelle, comme nous l’apprîmes au village –, l’auberge demeurait vivante. Nous nous y rendîmes pour nous changer les idées et nous attablâmes dans un coin. En plus d’un bon repas chaud, nous nous commandâmes chacun une belle rasade d’Aygue Ardente. Quant à Guillem, il n’eut droit qu’à une gnôle pas trop forte, ordre du grand frère, même s’il avait désormais seize ans.

Une serveuse, jeune, jolie et curieuse, nous interrogea sur la raison de notre venue en ces lieux. Nous restâmes évasifs mais évoquâmes mes activités d’écrivain public et celles de journalier de Florentino. Elle promit d’en parler autour d’elle et nous laissa, après un clin d’œil souriant à mon attention, que je ne sus pas déchiffrer. Florentino se pencha à mon oreille, amusé.

— Tu lui as tapé dans l’œil, mon vieux !

Oh peut-être interprétait-il trop loin un simple geste de bonhomie à mon endroit, vu combien ma silhouette ne passe pas inaperçue. Et puis, j’espérais que l’idée de mon camarade était fausse : je ne voulais pas faire de peine à cette hôtesse en ne lui rendant pas d’éventuels sentiments. Sans compter que Rosalie – c’était son nom – avait un fiancé, Edmond, peu connu pour sa patience.

Une fois qu’ils se promenaient bras dessus bras dessous, les longs cheveux blond fauve de la jeune fille volant derrière elle, ils me repérèrent, assis sur les marches de notre cahute – on nous avait permis par l’intermédiaire de Rosalie de rester accolés à l’auberge. Ainsi donc, je plumais en vue du dîner un poulet noir acheté au marché le matin même. Je relevai la tête pour les saluer, avec toutefois ce qu’il fallait de réserve, ayant parfaitement compris les inquiétudes que je provoquais bien involontairement chez certains gars. Alors que Rosalie allait passer son chemin avec lui, Edmond s’arrêta et désigna du menton le poulet, sans aucune amabilité dans le regard.

— C’était quoi, ce sourire à ma fiancée ?

Je dois bien avouer que j’avais peu dormi cette nuit-là. Donc, pas bien patient de nature, j’avais encore moins envie de faire des efforts. J’interrompis alors mon œuvre et haussai un sourcil.

— Je suis poli, moi.

Rosalie essaya de retenir son compagnon mais sans grand résultat alors qu’il s’approchait davantage de moi, de manière à me dominer de toute sa hauteur.

— Qu’est ce t’insinues, la moitié de corps ?

— Si tu te sens visé, tu dois bien le savoir.

— J’lis pas dans les pensées, moi.

— Moi non plus.

— On raconte pourtant que t’es un sorcier.

On se trompe.

Il secoua la tête, un sourire mauvais au visage.

— Tu sais aussi c’qu’on dit ? Que c’est toi qu’as rendu malades les bêtes du marquis.

Je fronçai les sourcils sans répondre alors que l’autre s’éloignait, avec un geste satisfait.

— Qui sait, p’t’êt que l’seigneur viendra vous saluer un jour, toi et tes petits camarades !

Qu’on me traite de tous les noms, passe encore, mais qu’on menace mes amis, c’était hors de question. Ça me fit sortir de mes gonds et, sans réfléchir, je me saisis de la tête du poulet noir, à portée de main, et la jetai sur l’importun en jurant à mi-voix. Si tu veux tout savoir, je l’ai traité de cap de suro, une insulte de chez moi pour un idiot. Ça signifie « tête de liège ». Edmond n’a pas été sensible à l’intérêt langagier et s’est aussitôt mis à brailler comme un porcelet des « Sorcier ! Il m’a maudit ! » et autres bêtises.

Il a rameuté toute une flopée de spectateurs avec ses hurlements et s’il y en avait un que je maudissais en cet instant, c’était moi-même. De toute manière, cette journée avait mal commencé par un réveil en sursaut avant l’aube et par la réserve de sauge que nous avions vidée sans nous en apercevoir, puis s’était mal continuée par une matinée vide de lettres à écrire. Et désormais, il était à peine midi que j’avais la confirmation que c’était définitivement une mauvaise journée en voyant les gros bras du village, qui jusque là se bornaient à m’éviter, se rassembler. Les protestations de Rosalie n’y firent rien. Alors qu’Edmond savourait son triomphe et s’apprêtait à fondre sur moi, qui tenais mon couteau prêt à l’usage, il ne vit pas l’ombre d’un géant roux se glisser derrière lui, le retourner et le saisir au col. Dans toute sa patience, Florentino le souleva légèrement du sol pour coller son front au sien sans avoir à se baisser.

— Tu arrêtes tes puteries et tu te carapates dans les jupes de ta mère, vu ?

— Et… et toi… tu es son golem… c… c’est ça ?

Florentino roula des yeux.

— Et toi, tu es le dernier des idiots.

Edmond profita de sa brève distraction pour lui enfoncer un coup dans le ventre, suivi par les autres, contre qui Florentino n’eut d’autre choix que de se défendre avec ses poings. Je regardai cette mêlée, impuissant. Certains bagarreurs se retrouvèrent vite au sol, inconscients, avec au visage la rougeur des paumes de Florentino ou d’autres venus le soutenir ou le contrer. Les gars s’acharnaient dans un franc vacarme quand bien même la pauvre Rosalie tentait de calmer le jeu. Dégât collatéral, je ramassai moi aussi une rossée qui me laissa recroquevillé à terre, les côtes en feu. C’était décidément une mauvaise journée, quel que soit le sens dans lequel je la prenais.

Comme je ne pouvais pas trop me battre, je demeurai dans une attitude de protection, prostré au sol jusqu’à ce que Guillem et Eugenio viennent me sortir de là. Je me sens inutile dans ces moments. J’étais dépité de ne pas avoir le physique pour soutenir Florentino. Pendant que, lui, retenait seul ses adversaires, nos deux autres camarades me firent quitter la place et il a lui-même réussi à s’éclipser peu après afin de nous rejoindre. Nous ne pouvions toutefois pas traîner dans les parages, c’était évident, alors nous avons décidé de partir du hameau. Malheureusement, notre fuite fut rapidement compromise quand nous vîmes que tous les chemins étaient gardés. J’ignore ce que nous aurions fait si un couple de fermiers dans la quarantaine ne nous avait pas offert l’asile.

Nous nous étions déjà rencontrés au village et avions discuté dans la bonne humeur. Ils savaient que j’étais guérisseur mais n’avaient pas peur de moi pour autant, ce qui nous permit de rester chez eux. En échange du gîte et du couvert, nous les aidions aux travaux des champs ou de la maison. Je faisais office de jardinier. J’apprenais également à lire et à écrire à leurs enfants, ce qui donnait lieu un jour sur deux à une joyeuse petite classe.

La plus âgée de ces jeunots, Lucie, était particulièrement motivée à se perfectionner dans ce domaine : elle voulait rejoindre une troupe de comédiens locaux. Ses parents ne pouvaient retenir moues et grimaces à ce propos quand ils la voyaient s’entraîner au jeu, pas très favorables à l’idée qu’elle fréquente des gens de si mauvaise réputation – guérisseur, il n’y avait aucun problème mais acteur, apparemment, si. C’est justement ce qui nous a rapprochés tous les deux ; solidarité des professions réprouvées par la bonne morale, et j’avoue l’avoir encouragée dans ses projets, au grand dam des parents… Je me demande ce qu’elle est devenue.

Malheureusement, ce petit temps de répit ne devait pas durer plus de huit semaines – même si c’est déjà honorable, je te l’accorde. J’ignore exactement ce qu’il s’est passé à vrai dire. Sans doute quelqu’un nous a-t-il vus et s’en est allé tout rapporter au seigneur local, toujours est-il que ses hommes sont venus nous chercher et nous n’avons pas pu nous échapper. Traînés sur la place du village, nous n’avions plus aucune chance alors perdu pour perdu, nous avons joué notre dernière carte : nos hôtes ont crié à l’envoûtement, ainsi que je le leur avais fait promettre afin de préserver leur famille. Comme convenu, mes amis ont prétendu eux aussi que je les avais ensorcelés – surtout Eugenio et Florentino car Guillem n’a pas pu s’y résoudre, même sans y croire.

Je me souviens mal de ce qui a suivi. Tout était confus entre les quolibets de la foule et les gens d’arme qui me tiraient cahin-caha. Une rixe a de nouveau éclaté. Dans la pagaille, j’ai juste eu le temps de supplier mes amis de fuir, de se mettre à l’abri, avant que la mêlée ne nous sépare.

Les soldats encore entiers finirent par maîtriser ce chaos. Je me redressai difficilement, les idées embrouillées. Elles s’éclaircirent dès l’instant où je compris que ces choses brillantes autour de moi étaient les lances des gardes du marquis. Celles-ci s’écartèrent pour laisser place à un homme aux bas immaculés, aux chausses décorées avec des nœuds et au justaucorps de couleurs vives brodées d’argent. Son profil était excessivement pincé sous une imposante perruque sombre, toute poudrée. Je reconnus de près celui que nous avions vu au loin sur un cheval et je me tendis. Le fameux marquis Diodore de la Fontenelle, qui se pencha vers moi, le vice au visage.

— Te voilà.

Ses yeux se plissèrent sur ses prunelles, brillantes d’une intelligence mauvaise.

— J’ai beaucoup entendu parler de toi, ces derniers mois. Infirme et guérisseur dans mon dos, on raconte que tu es un démon et que ton arrivée serait la cause de la mort de mes troupeaux, puis de tout ce qui est venu depuis troubler notre quiétude.

— Vous savez que c’est faux.

— Peut-être… ou peut-être pas. Mais là où nous sommes tous d’accord, c’est que ton arrivée a effectivement perturbé la vie paisible de cet endroit. Tu dois faire la fierté du Malin.

Il affecta un air désolé.

— Quel genre de seigneur serais-je si je ne protégeais pas les miens d’un vil démon ?

Sur un dernier sourire aussi faux qu’éphémère, il se redressa et capta le regard d’un garde avant de me désigner d’un menton dédaigneux.

— Arrêtez-le.

Ils m’ont ramené à La Barthe, la ville la plus proche. C’est enchaîné et dans une cage que j’y ai fait ma deuxième entrée. Voilà qui a dû en réjouir certains… Pendant que je croupissais en prison, des témoins sont venus. Après, je suis passé en première audience. Puis à l’interrogatoire – celui-ci, sans instruments de torture. Puis à une deuxième audience. Ça a duré des semaines.

Un après-midi, le verrou de ma geôle a claqué. La lourde porte du cachot s’ouvrit sur une silhouette digne d’une statue. J’ai découvert un homme en longue robe blanche, avec sa chape noire à capuce et un rosaire pendu à sa ceinture de cuir : un moine dominicain. Son regard ferme mais tranquille, sous sa tonsure d’un blond déjà poivré par un âge mûr, descendit vers moi, assis à terre dans la paille. Un peu plus tôt, sans rien m’expliquer, deux geôliers étaient venus resserrer mes entraves et m’attacher les poignets au mur, au-dessus de ma tête. J’en compris seulement à ce moment la raison : il ne s’agirait pas que l’horrible sorcier que j’étais tente un rituel sur ce visiteur.

Je le laissai approcher sans réagir autrement qu’en le suivant du regard. J’étais déjà assez condamné ainsi, autant ne pas aggraver mon cas. De toute manière, mes bras suspendus et mon corps entier étaient trop douloureux pour m’offrir le luxe de m’essayer à quoi que ce soit. Le moine installa en face de moi le petit tabouret qu’il avait amené avec lui. Une fois assis, mains croisées sur ses genoux, il engagea d’une voix qui n’avait rien de méprisant :

— Je suis le frère Antoine, de l’ordre de Saint Dominique. Les magistrats souhaitent que je vous entende en matière de foi et puisse ainsi les conseiller dans leur jugement.

Je trouvai la force de hausser les épaules, aussi bien que me le permettaient les fers, las de toutes ces procédures qui n’avaient pour but que de m’enfoncer.

— Faites…

Avais-je de toute façon le choix ? Je me gardai de poser la question, dont j’avais la réponse. Ma lassitude dut transparaître, car l’homme eut un sourire sans malice – même rassurant.

— Je sais ce que beaucoup trop de monde doit déjà penser de vous. Je ne veux pas vous croire coupable a priori du fait de votre constitution.

Je ne cachai pas ma franche surprise et commençai à envisager que je me sois trompé sur son compte dans ma première impression.

— Vraiment ? Vous seriez bien le premier.

— Je n’aurai pas cette prétention. Jésus avant moi, quand ses disciples l’interrogeaient au sujet d’un infirme – « Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ? » – a dit : « Ni lui, ni ses parents n’ont péché. Mais c’était pour que les œuvres de Dieu se manifestent en lui. » Je regrette que bien des croyants et même des juges aient l’air d’avoir oublié ces versets.

J’esquissai un sourire sincère, le premier depuis tant de jours.

— Je vois. Dans ce cas, que puis-je faire pour vous ? Je vous écoute.

Frère Antoine tira de sa chape un feuillet et une mine en plomb. Papier bien étendu sur sa cuisse, prêt à prendre en notes mes réponses, il m’engagea à réciter mon catéchisme et à préciser l’état de mes croyances. Je pesai le pour et le contre quelques instants avant d’être honnête et de lui restituer les grandes lignes de ce que je savais – plus grand-chose, à vrai dire, mais je les récitai avec respect. Vinrent les questions sur ma conception du Malin puis celle – plus surprenant – que j’avais de mon infirmité. Sans doute voulait-il vérifier que je ne me prenne pas outrancièrement pour un de ces « prodiges » annonciateurs de bonne ou mauvaise Fortune. Là encore, je fus franc : mon infirmité n’est pour moi qu’un hasard de la nature, comme la forme de mes yeux ou la couleur de mes cheveux. Puis je ne coupai pas à l’interrogation épineuse : ma version des faits propre à expliquer que, partout, on me disait sorcier et impie. Qu’en pensais-je ? Que c’était des affabulations causées par la haine, l’ignorance ou la crainte pour la plupart, notamment celles parlant de mes soi-disant pouvoirs de soin. Rumeurs ou pas, je ne pouvais du reste nier le très peu de cas que je faisais des messes dominicales. Il était de notoriété publique qu’on ne me croisait jamais à l’église, aussi n’échappais-je pas à l’imparable question du frère Antoine :

— Ne trouvez-vous donc aucun intérêt aux Saints-Offices ?

— Les gens ne veulent pas m’y voir et je risquerais sans doute de souiller un lieu sacré, ou quelque chose de cet ordre. Ça m’attirerait plus de problèmes qu’autre chose alors je préfère éviter, indépendamment de l’intérêt que je pourrais avoir pour la cérémonie en elle-même.

— Je trouve votre manque de pratique regrettable malgré tout. La foi est peu de choses si elle n’est vécue en communion, et régulièrement nourrie par la Parole. Entre nous, les églises seraient désertes si seuls les innocents, et vierges de tout commérage à leur endroit, y entraient ! Rassurez-vous quant au regard que Notre Père porte sur vous. J’ai envie de croire que chacun est par Lui accueilli tel qu’il est. Et puis… ne craignez-vous pas de vous isoler vous-même encore davantage ? De conforter les gens dans l’idée que vous avez en effet des choses à vous reprocher ?

— Sans doute. Mais en parallèle, le temps que je ne passe pas à l’Église, je le passe au chevet des malades pour les guérir. Je ne pense pas pouvoir faire l’un et l’autre efficacement.

— Oh, dans ce cas-là, sans vouloir m’avancer à parler au nom de Notre Seigneur, je crois qu’Il peut vous pardonner un certain nombre de désertions. Pour moi en tout cas, et si bien sûr vous me dites la vérité, soigner son prochain vaut bien plusieurs dizaines d’eucharisties, argua Antoine, toujours paisible et sûr de ses mots.

Je ne sus pas quoi répondre dans l’instant, tant la conclusion m’étonnait. Hormis Luz et mes trois amis, nul ne m’aurait jamais affirmé cela, je pense. J’inclinai la tête, un sourire soulagé aux lèvres.

— Merci.

Au terme d’un entretien qui nous occupa une bonne heure durant, et dans lequel – pour une fois – je n’ai senti ni mépris ni questions plus tordues que mes jambes, destinées à me piéger, mon interrogateur enroula les feuillets qu’il avait noircis de ses notes.

— Je vous suis reconnaissant pour votre franchise, dit-il.

— Par curiosité, cette franchise va-t-elle me mener sur le bûcher ?

Antoine poussa un léger soupir de dépit. Il n’avait pas l’air étonné le moins du monde et devait savoir combien les feux de joie étaient à la mode dans les campagnes.

— Le verdict ne reposera malheureusement pas que sur moi. Mais je ferai tout pour l’infléchir dans le bon sens : de mon point de vue, vous ne méritez… – il marqua une petite hésitation prudente ici – ni le recours à la Question pour vous faire parler, ni la mort.

Sa réponse me surprit agréablement et je ne contins pas un sourire plus amusé.

— Merci à vous. Je vous souhaite bien du courage pour convaincre tous les excités qui assistent à mon procès. Et surtout la joyeuse bande de juges portés sur l’art de la rôtisserie qui se sont emparés de mon cas, et apparemment avec grand plaisir !

Le dominicain déguisa son propre rire dans un bref toussotement, mais ses yeux en disaient assez. Après une inspiration, il répliqua :

— Si vous voulez tout savoir, il semble qu’heureusement, les choses évoluent peu à peu, au moins du côté des doctes. Tenez, par exemple, Monsieur de Montaigne était de votre avis quant à l’aisance de ces gens à engager des grillades sur leurs seules – mais très assurées – convictions. Comment écrit-il déjà ? Ah ! « Après tout, c’est mettre ses conjectures à bien haut prix que d’en faire cuire un homme tout vif. »

Il jeta un bref regard faussement effrayé en direction de la porte puis, s’avançant vers moi, ajouta à voix basse :

— Mais je devrais baisser d’un ton, ou pour un peu ce serait aussi nous autres cléricaux, les impies, si nous ne lisons pas exclusivement les Pères de L’Église et les manuels d’inquisiteurs – certains si douteux pourtant que le pape lui-même les a désavoués. Je vous dis, il est assurément plus salutaire de s’instruire chez les auteurs sceptiques que dans le Malleus Maleficarum.

Dans un rire, je me penchai également malgré la douleur.

— Ne vous inquiétez pas, je garderai votre secret !

Il faut croire que, pour ce qui est de mes aveux extorqués par l’usage de la Question, le frère Antoine n’a rien pu faire : j’y ai été soumis. En revanche, si je suis encore en vie aujourd’hui, je le lui dois probablement. Quant aux juges, une fois certains de ma prétendue sorcellerie reconnue sous la torture, ils ont heureusement gobé mon histoire d’envoûtement sur Guillem, Eugenio, Florentino. Ils les ont laissés tranquilles, eux et cette famille dévouée qui m’a protégé dans sa ferme. Là encore mon monacal interrogateur – et quelque peu complice – a limité les dégâts en appuyant cette menterie qui avait l’avantage d’arrêter à ma seule condamnation les appétits du tribunal. J’espère qu’aucun d’eux n’a eu de nouveaux ennuis depuis mon enfermement.

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blairelle
Posté le 17/03/2024
Le passé d'Hyriel !! C'est marrant de constater que ce qui est inscrit dans son dossier n'est finalement pas si éloigné de la réalité que ça :
"Il semble donc que tu aies abusé de l’hospitalité d’un respectable seigneur dévoué aux nécessiteux" => ah les méchants handicapés qui veulent pas qu'on les aide d'une manière qui ne leur convient pas...
"avant d’empoisonner un troupeau à peine arrivé dans le fief d’un autre seigneur" => bon pour le coup triste coïncidence
"On mentionne en outre tes qualités d’envoûteur sur la gent féminine" => mais oui bien sûr "tu aurais noué l’aiguillette de quelques messieurs" => toujours trouver un coupable sur qui rejeter la faute si on est nul au lit
"tes prédispositions de fauteur de trouble où que tu passes" => ah bah ça c'est notre Hyriel, mais pas que, c'est aussi les autres imbéciles qui viennent lui chercher noise
"entre deux sabbats arrosés dans les forêts alentour, dans lesquelles tu te serais fait prophète de ta propre divinité" => ça par contre je vois pas
"tu as déloyalement concurrencé les médecins tout en te livrant au vagabonage entre les différents bourgs où tu sévissais" => cépafo
Mais l'envoûtement de ses compagnons + des fermiers n'est pas comprise dans le jugement ? En tout cas c'est incroyable qu'il ait pris le risque de se faire brûler pour sauver la peau de ses amis.

Tout lui conter, sans masque => c'est assez comique sachant qu'Estienne, lui, est masqué
du courage il ne m’en faut pas tant dans ma maladie, que pour ne rien rétorquer de trop salé à ce genre de commisérations mal placées => LOL tellement

Frère Antoine >>> l'aumônier de l'hôpital
Et les poulets qui volent, j'ai pas compris tout de suite que c'était la tête du poulet noir, au début je pensais que ce serait une histoire de policiers qui "volent" pour l'arrêter
JeannieC.
Posté le 26/03/2024
Hello ! :D
Avec un peu de retard, merci pour ta lecture <3 Tu as tout dit : les meilleurs mensonges sont construits sur un fond de vérité - et presque tout le contenu de la sentence d'Hyriel est une version fantasmée (et tournée à son désavantage) de mésaventures qu'il a vraiment eues. xD
Et en effet, il n'y a que "prophète de sa divinité" qui soit faux, mais les gens ne se privaient pas de rajouter des dingueries à la liste déjà effective des méfaits qu'on prêtait aux sorciers. Ceux qui disaient qu'ils les voyaient voler, se faire adorer par des démons etc.
Oops, on a zappé l'envoûtement des fermiers dans cette liste pourtant déjà fort nourrie ahah ! C'est noté !

Thanks again - à plus tard
Aramis
Posté le 27/10/2023
Eeeeet me revoilà ! Ce petit retour plus en détail sur le passé d’Hyriel était agréable à lire, j’ai apprécié la partie sur le collectionneur d’infirmes, vraiment, zéro étonnée mais toujours déçue, une bonne perversion bien hideuse :’) Le fait que les trois personnages se positionnent très différemment dans ce passage est vraiment intéressant !

Le petit truc qui m’a fait tiquer : le traitement des deux personnages féminin qu’évoque Hyriel durant son récit. Les deux n’ont aucun autre trait déterminé que celui d’être spontanément aguicheuses avec Hyriel, et causent l’apparition de trops, dont personnellement je ne suis pas fan, c’est à dire celui des hommes jaloux qui viennent éventuellement intimider et cogner le personnage masculin principal innocent de toute tentative de séduction. Je suis peut-être trop sensible à ce genre de choses, mais dans le doute je préférais l’indiquer (après quoi vous faites vos choix évidemment ! ) mais ça a donné une représentation où les deux femmes, attirées par le personnage principal qui n’a rien demandé, causent le trouble et amène la grosse virilité des hommes à se battre pour elles. Je sais que c’est commun, par ailleurs un état d’esprit qui existe of course, mais étant donné qu’il n’y a pas tant de femmes que ça présentes dans votre récit je crois que j’aurais aimé qu’elles bénéficient d’un peu plus de responsabilité partagées, à la limite, en tout cas de traits de caractères un peu différents. Voili voilou !
JeannieC.
Posté le 27/10/2023
Coucou ! =D

C'est très juste, ce que tu notes par rapport aux épisodes avec les deux femmes (la tavernière, puis celle qui caresse les cheveux d'Hyriel). Une autre BL nous l'avait signalé : déjà c'est redondant, et puis ce n'est pas ouf le côté "femmes aguicheuses qui fichent le dawa" x) Merci d'avoir pointé ça <3

En fait, je m'aperçois que le texte passe complètement à côté de ce qu'on voulait transmettre, avec le coup de la fille qui vient caresser les cheveux d'Hyriel. On voulait que ce soit bien moins un geste aguicheur (même si les mecs, eux, le pensent) qu'un geste validiste : me faire gratouiller / caresser / pincer la joue dans les transports en commun, c'est un truc qui m'arrive des fois x) Le côté pitié et animal de compagnie / doudou quoi.
Breeeef ! En relisant je me rends compte que ça ne se sent pas du tout, et que ce qui ressort c'est plutôt de la drague lourde. On va reprendre ce moment, vraiment expliciter que c'est un geste validiste - quitte à même mettre une réplique genre "oh mon pauvre...." Et peut-être aussi le faire faire par un mec, genre un petit vieux. xD En revanche, on garderait le groupe des autres femmes qui sont outrées et essaient d'arrêter l'importune.
Je sais pas si je suis claire ? Tu vois l'idée ?

Et pour la serveuse très chaleureuse à la taverne, en vrai pourquoi pas rester un peu plus floues - genre elle ne séduisait pas vraiment Hyriel, elle était juste très chaleureuse, mais les mecs du coin més-interprètent tout de suite ça en aguichage ~

'Fin voilà, ouep ! On va reprendre ce moment.

Sinon, super que tu aies apprécié l'épisode chez le vieux noble collectionneur ! <3 C'est tellement horrible c'est clair, mais c'était bel et bien la mode à l'époque - y a qu'à voir tous les tableaux de Vélasquez, Ribera etc, qui représentent les "curiosités humaines" et les "monstres de compagnie" des Cours d'Espagne. Et merci beaucoup, pour tes impressions sur le panel des réactions des concernés face à cette situation.
Aramis
Posté le 27/10/2023
Haaaaa si c’est très clair ! Je pense que la deuxième interaction est lue : d’une au travers de l’interprétation de la première, et de deux, de manière validiste, paradoxalement :’) je pense que comme en tant que femme c’est le truc qui me frappe en premier, je n’ai pas pensé à l’aspect validiste que pouvait transmettre le geste, et je comprends beaucoup mieux votre attention, effectivement, les deux mis en parallèle donneront de la diversité dans les interactions des personnes à son égard !

Et oui je vois tout à fais, ça m’a fais pensé au film Freaks, d’ailleurs, et globalement l’aspect malsain des expositions de personnes :’) Un plaisir, vraiment.
JeannieC.
Posté le 29/10/2023
"Freaks", ce film est une dinguerie <3 Il y a le très beau "The Elephant man" aussi sur ce sujet -
Louison-
Posté le 13/09/2023
Coucou !

Ca m'a fait plaisir de replonger dans votre histoire, et surtout dans cette narration à part que j'avais déjà beaucoup appréciée dans la partie précédente de votre chapitre XII :) Le fait que tout parte plus ou moins d'une histoire de poulet fait assez froid dans le dos, bien sûr il n'y a pas que ça qui entre en jeu mais c'est le prétexte qu'on prend et qui lance la rumeur d'Hyriel-sorcier, vous montrez bien qu'il en faut peu pour accuser qqn de sorcellerie.
J'espère que les persos qu'Hyriel a protégés en disant les avoir envoûtés s'en sont effectivement sortis, avec un peu de chance on en réentendra parler dans la suite ! :)

Sinooon, bravo aussi pour la conversation avec le moine, le fait qu'il ne soit pas du tout diabolisé enlève tout manichéisme (qui n'a jamais été vraiment présent haha), et évite d'avoir deux camps bourreaux-victimes avec les méchants d'un côté et les gentils de l'autre. Le moine semble avoir une forme de lucidité qui rend le perso et la situation d'autant plus crédible, en plus de rendre la conversation intéressante à suivre !

Comme d'habitude, un excellent chapitre ^^

Bisou, à bientôt ! <3
JeannieC.
Posté le 22/09/2023
Hey hey !

Oui c'est ça, le poulet est la "cerise" sur la gâteau, la dernière goutte, mais après un cumul de rumeurs et de rivalités qu'Hyriel traîne avec lui dès le début de ses errances. x)

Merci beaucoup pour ta lecture <3 Et tout à fait, pour le manichéisme, on essaie vraiment d'être subtiles dans la représentation des opprimés / oppresseurs, ou encore dans la scission église / tribunal séculier. En vrai, à cette époque-là les procès de sorcellerie et les pogroms étaient bien plus le fait des tribunaux laïcs que des membres du clergé. Et puis on voulait un petit clin d'œil à la figure du moine érudit d'Umberto Eco, Guillaume de Baskerville du "Nom de la Rose".

Bisous et à une prochaine !
ClementNobrad
Posté le 03/03/2023
Coucou,

Je crois que ce chapitre (à mettre avec le précédent) est mon préféré de votre histoire pour le moment. Certainement dû à la construction de votre récit. Etre enfermé depuis le début dans un monde si dur, en ressortir subitement, c'est comme prendre une bonne inspiration d'un air frais.
Toutes ces mésaventures restent touchantes, et malheureusement, historiquement crédible car vraies. Les croyances populaires ont la peau dure, et Hyriel semble s'attirer toutes les foudres.

C'était très bien écrit, à la fois "leger" mais qui nous force à réfléchir sur la nature de l'Homme.

Fontenelle ! Petit regret, je m'attendais à avoir plus longtemps affaire à lui :p

Au plaisir !
JeannieC.
Posté le 04/03/2023
Re !
Ah oui, on comprend complètement cette sensation. Même si ce chapitre ne raconte pas des choses extrêmement joyeuses, c'est une petite porte de sortie au milieu de ce long roman en huis-clos.
Huhu, désolées pour Fontenelle x) Il reste en effet un personnage tertiaire, tout à fait épisodique, mais contentes que son peu de présence ait été suffisante à te marquer <3
ZeGoldKat
Posté le 22/11/2022
Il s'en passe des choses en si peu de paragraphes ! C'est dense et mené avec une telle maestria qu'on a pas le temps de s'ennuyer. On est pris dans un feuilleton historique, je suis fan ! Le lecteur sait déjà comment ça se termine pour Hyriel mais le chapitre accomplit la prouesse d'arriver quand même à être captivant. La classe.
Niveau historique, voilà encore un chapitre intéressant. Je n'ai pas votre niveau, mais du peu que je sais sur la sorcellerie, c'est tout à fait ce que vous représentez. C'étaient des arrestations en masse pour des histoires aussi tristement banales que des animaux qui tombaient malades, des voisins qui se dénonçaient les uns les autres pour des histoires de fesses, ou de jalousie bête et méchante, des suspicions de jets de sortilège etc. Ajoutez à ça qu'Hyriel est un "gens du voyage" et un handicapé...
J'ai été à fond au moment avec la tête de poulet noir. xD Hahaha ça ne pouvait pas bien se passer, Hyriel a de quoi regretter son geste. Mais d'un autre côté, la motarde a tellement dû lui monter au nez et il doit être gavé de vivre sans cesse ce style d'incidents. On ne se figure tellement pas, quand on est pas concerné... ça me fait penser aux gens qui vivent des situations de harcèlement de nos jours. Ah lala ce qu'on est crétin et grégaire, en groupe...
La scène avec le moine, woah ! Là aussi le niveau de documentation qu'on sent derrière quoi ! Hyriel est vraiment tombé sur quelqu'un de bien. Ok ça reste un moine et il prêche pour sa paroisse, mais c'est un type intelligent et cultivé, ça fait plaisir que vous évitiez le manichéisme sur la religion. Enfin, moins sur la religion que sur les croyants pris individuellement comme personnes.
Et du coup ça y est, je comprends comment Hyriel a échappé au bûcher ! Et puis qui sait, est-ce que ses trois amis de voyage vont réapparaître ? Pouvoir faire quelque chose pour lui ?
Sans oublier la petite famille où Hyriel a fait la classe aux enfants, c'est trop pipou ce moment. Dommage qu'ils n'aient pas pu l'aider. (et j'espère que la petite a réussi à devenir actrice o/ )
JeannieC.
Posté le 23/11/2022
Re !
Merci beaucoup <3 Helasabeth et moi lisons toujours avec autant de plaisir tes commentaires enthousiastes - et très intéressants dans la mesure où ils nous livrent tes hypothèses, nous pointent les petits détails de l'intrigue qui retiennent ton attention pour d'éventuelles conséquences par la suite.

C'était en effet une gageure que de faire un chapitre sur la passé d'Hyriel alors que le lecteur sait déjà le dénouement. Nous sommes d'autant plus contentes, alors, qu'il arrive à être aussi prenant <3
Ce que tu dis sur la sorcellerie est très juste. C'était en très grande majorité dans les campagnes, ça concernait surtout les milieux populaires, et il suffisait d'une querelle de bornage, d'une affaire de voisinage, d'une déception amoureuse pour crier au "nouage de l'aiguillette" et autres envoûtements. Les empoisonnements de champs et d'animaux, c'était un grand classique.

Ravies que la tête de poulet noir et les jurons d'Hyriel aient produit leur petit effet xD Un grand merci aussi pour tes compliments sur le passage avec le frère dominicain. Nous voulions un personnage un peu à la Guillaume de Barkerville du "Nom de la Rose" - parce qu'il n'y avait heureusement pas que des crétins dans l'Eglise.
Comme tu le dis, c'est l'institution qui a commis beaucoup de mal, mais les croyants pris individuellement, dans le lot il y avait sans aucun doute des gens bien.
M. de Mont-Tombe
Posté le 22/10/2022
Salut ! J'aime beaucoup ce chapitre, ainsi que tous les chapitres qui mettent en lumière le passé d'Hyriel. Je suis un peu frustrée sur ce qui s'est passé chez de Froisensac : j'aurais voulu en savoir plus sur cet homme. J'ai hâte de lire le prochain chapitre et de voir ce qu'Estienne pense de tout ça ! Je me demande aussi si Guilhem, Eugenio et Florentino vont tenter de contacter Hyriel... Bref, que de questions ^^. À bientôt !
JeannieC.
Posté le 23/10/2022
Hey coucou !
Merci beaucoup pour ta lecture, ravies que tu apprécies ces retours dans le passé d'Hyriel :3
Héhé, on comprend pour Nicodème de Froisensac, c'est un personnage plutôt marrant et qu'Helasabeth s'est bien amusée à écrire même si on le voit assez peu au final. Enfin "marrant", il est un peu cinglé mais tu vois l'idée xD P'têt sera-ce l'occasion d'écrire des nouvelles additionnelles avec ce personnage.
En tout cas oui, Eugenio, Florentino et Guilhem auront l'occasion de réapparaître.
Encore merci et à bientôt ! :D
GueuleDeLoup
Posté le 21/10/2022
Coucou les plumes ! Alors j’ai terminé les derniers chapitres de votre histoire il y a quelques jours déjà, mais j’ai eu pas mal de boulot et je ne commente que maintenant.

Alors personnellement, je regarde l’arrivée du chirurgien avec énormément de méfiance. Je vois bien comment ce personnage peut avoir beaucoup d’effet bénéfique, mais est-ce que ça ne serait pas trop beau ? J’ai l’impression que c’est un personnage qui est peut-être moins étroit d’esprit que d’autres, mais qui ne sert que ses propres interêt.

Ensuite, j’ai quelques questions concernant la romance. J’ai l’impression que vous avez fait le choix de créer une romance qui se met en place extrêmement naturellement et qui coule de sources pour les deux protagonistes.
Il y a une part de moi qui trouve ça très cool et une autre qui est un peu frustrée. Déjà je crois que j’ai eu du mal à saisir exactement à quel moment il était clair pour Estienne et Hyriel qu’ils étaient ensemble. Avec le recul, je dirai après la scène devant la cheminée, cependant, en lisant cette scène, je voyait leur rapprochement et l’ambiguïté entre eux, mais tout ne me paraissait pas joué.
De plus, je trouve que l’acceptation de leur homosexualité se fait extrêmement vite. Je vois bien comme Hyriel peut se dire « Bworf on fera avec », mais pour Estienne, je trouve que c’est un peu en dehors du personnage.
Et je trouve qu’il y a tout un pan que je trouve personnellement intéressant qui n’est pas vraiment évoqué : il y a tout l’aspect un peu problématique du fait que l’un des deux n’a quand même que la moitié de son visage et que pour beaucoup de gens et bien on tombe souvent amoureux d’un visage, que la bouche est symboliquement la place du baiser, etc… Le fait qu’aucun des deux personnages ne l’évoque me parait un peu étrange.
De plus, je ne sais pas pour vous deux, mais pour moi, une gueule cassée a quelque chose d’effrayant. Bien sûr ce n’est pas juste, mais je comprendrais que des personnes puissent être gênés par la présence d’Estienne à cause de ce qui lui est arrivé.
Je pense que ce serait intéressant de le mettre plus en relief dans le texte.

J’ai l’impression d’avoir été un peu plus critique dans ce dernier commentaire, mais j’attends la suite avec impatience :).

Des bisous et à bientôt
JeannieC.
Posté le 21/10/2022
Coucou ! =D
D'abord, merci beaucoup d'avoir suivi notre roman déjà jusqu'ici, nous sommes ravies qu'il t'ait accrochée <3 Et merci pour tes remarques très pertinentes, j'ai transmis à Hela et nous allons nous pencher sur la question !

Concernant le Major, tu as tout à fait raison de te méfier de lui héhé. Ce n'est clairement pas la solution miracle et il réfléchit surtout à se servir d'Hyriel. Tu l'as plutôt bien cerné : il est effectivement plus ouvert et réfléchi que la plupart de ses confrères, mais il reste focus sur sa fonction et ses intérêts.

Pour ce que tu soulèves ensuite au sujet de la romance, effectivement elle se construit lentement mais sûrement, un peu en mode "c'est comme ça faisons avec" comme tu le dis ^^ Je ne sais pas s'il y a un moment précis où ils sont "officiellement" ensemble, ils sont plus en mode "c'est là, ça évolue" sans jamais mettre clairement un point de départ ou même le nom dessus. Ils s'apprécient de plus en plus, puis ils se taquinent, ils cherchent le contact l'un de l'autres, puis les caresses etc.
Cela dit, s'il fallait définir un moment clair où ils sont "ensemble", eh bien on verrait plutôt ce moment au milieu du chapitre 11 où ils ont leurs premiers contacts vraiment intimes, avec caresses etc. Est-ce que tu penses qu'il faut le verbaliser ouvertement, que là "ça y est" ? On était plutôt dans le "les choses se font c'est tout" mais je sais pas ?

Tu as complètement cerné l'état d'esprit d'Hyriel ! =D Il est déjà tellement en yolo sur plein de choses que bah, les choses se font ainsi et on verra xD
Quant à Estienne, je pensais avoir bien détaillé au chapitre 11 - pendant les câlins - qu'il est moins sûr de lui, qu'il a l'impression que Dieu le juge, qu'il passe son temps à se demander s'il est vraiment en train de faire un truc bien là... Ce n'est pas assez marqué selon toi ?
Cela dit, c'est loin d'être encore gagné ahah. Je ne te spoile pas, mais au chapitre 14 quelque chose de grave va se passer et là oui, leur relation va vaciller et va traverser d'énormes doutes ^_^

Quant au visage d'Estienne, je suis tout à fait d'accord avec toi, ce n'est pas anodin. J'ai eu lu des histoires de personnes gravement défigurées qui ont quand même vécu l'amour... mais tu as totalement raison, ça ne va pas de soi. Alors nous allons un peu plus développer, d'une part qu'Estienne n'a encore jamais ôté son masque devant Hyriel (ça arrivera plus tard héhé), et d'autre part que ça ne se fait pas non plus aussi vite et facilement pour Hyriel.
Ceci dit, on a sans doute pas assez souligné qu'Hyriel est surtout séduit par le regard d'Estienne et par son corps, ses gestes, ses embrassades, tout son langage gestuel. Y a aussi le fait qu'il "en a vu d'autres" en termes de graves mutilations en tant que soigneur itinérant en temps de guerre. Les bisous, tu verras plus tard mais il les fait sur le nez d'Estienne :3
Bref, merci d'avoir relevé ce point important, qui mérite en effet au moins un paragraphe de développement dans la scène intime du chapitre 11 =D

On espère en tout cas que la suite te plaira !
Bises
JeannieC.
Posté le 21/10/2022
Edit. On en a discuté et on a effectivement rajouté deux paragraphes, dans la scène centrale du chapitre XI, pour aller dans le sens du manque que tu pointais. Thanks again ;)
Hortense
Posté le 10/10/2022
Bonjour JeannieC
Hyriel raconte avec émotion et un détachement ironique, la succession de mésaventures qui l’on conduit jusqu’à la prison. J’ai eu des frissons lorsque j’ai vu pointer le frère dominicain, certains étaient de zélés serviteurs de l’inquisition. Mais, Hyriel a eu de la chance dans son malheur, l’homme d’église était intelligent et a probablement joué un rôle déterminant dans son procès, ainsi qu’il le soupçonne. Bien sûr, cet enchaînement dramatique est atterrant, mais il me semble, bien caractéristique de l’époque. Cela dit, l’intolérance d’aujourd’hui et les tribunaux des réseaux sociaux sont-ils si éloignés de cette réalité ?
Un très bon chapitre qui se lit d’une traite. Bravo.
A très bientôt
JeannieC.
Posté le 13/10/2022
Merci beaucoup Hortense ! =)
Oui, on voulait une figure de moine un peu à la Guillaume de Barkerville du "Nom de la Rose". Et bien d'accord avec toi, il y a de nos jours des tribunaux numériques et tellement d'autres avatars de l'intolérance ~
Très contentes en tout cas que tu aies apprécié ce récit d'Hyriel et son ton quelque peu épicé héhé
A bientôt !
Hortense
Posté le 13/10/2022
Belle figure que celle de Guillaume de Barkerville !
JeannieC.
Posté le 11/02/2023
(j'avais oublié de répondre mais ouiiii, complètement ! Hyper inspirant, ce personnage. Il apporte beaucoup de subtilité dans la représentation des religieux, pas tous des fanatiques incultes)
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