Chapitre 75 : Elena

Par Zoju
Notes de l’auteur : J'espère que ce chapitre vous plaira ! J'aimerais beaucoup avoir votre avis dessus. Bonne lecture ! :-)

Mes muscles ont beau se plaindre, je continue à courir. C’est devenu mécanique. Je crains que si je m’arrête, je ne puisse plus me relever. Hans semble aussi avoir des difficultés. Sa respiration saccadée me prouve qu’il risque bientôt d’atteindre ses limites. Nous n’allons pas pouvoir tenir encore longtemps à ce rythme infernal. Je n’ose pas regarder en arrière de peur d’apercevoir Tellin et son groupe. J’ignore depuis combien de temps nous avons quitté la base. Je m’apprête à interpeller Hans quand celui-ci tombe en avant. Je freine brusquement et me dépêche de l’aider à se relever. Il a la main crispée sur son épaule. C’est à ce moment-là que je remarque le sang qui imbibe son uniforme. Le visage de mon compagnon est d’une pâleur à faire peur. Nous devons arrêter l’hémorragie au risque qu’il tourne de l’œil. Je survole l’endroit où nous sommes pour dénicher une cachette. Hans semble avoir deviné mes pensées.

- Je sais où nous pouvons trouver un abri, articule-t-il avec difficulté. Il est un peu plus loin.

- Tellin le connait peut-être, fis-je remarquer.

- Je ne crois pas.

Sans rien rajouter, mon partenaire se relève péniblement et se remet en route. Au moment où il m’affirme que nous sommes presque arrivés, un craquement se fait entendre derrière nous. J’empoigne mon poignard et me retourne. Je tombe nez à nez avec un homme qui a un fusil braqué sur nous. Je remarque tout de suite que ce n’est pas un membre de la base. Vêtu d’une veste couleur claire et d’un pantalon tirant sur le brun, il doit être un rebelle.

- Si j’étais toi, je lâcherais l’arme que tu tiens en main bien gentiment. Je n’hésiterais pas à faire feu, m’avertit-il avec calme.

Avant d’avoir pu réfléchir à un moyen de sortir de cette situation, trois autres personnes apparaissent dans mon champ de vision. Je peux également sentir la présence d’un plus grand nombre. Résignée, je jette ma lame au sol et lève les bras en signe de capitulation. C’est bien notre veine de tomber sur eux. J’ignore s’il compte nous laisser en vie. L’homme armé baisse légèrement le canon de son fusil.

- Avancez, nous ordonne-t-il.

Hans, toujours silencieux, obéit. Je lui emboite le pas. Nous arrivons dans une petite clairière où un feu a été allumé. Les personnes qui s’y trouvent portent notre attention sur nous.

- Tu nous ramènes des amis, Franz ? ironise l’un d’eux.

Pour toute réponse, le dénommé Franz fait claquer sa langue, puis s’éloigne sans plus de cérémonie. Je pose mon regard sur l’homme qui vient de parler. Je déglutis péniblement en remarquant les malformations qui défigurent son visage, probablement un ancien cobaye. Nonchalant, il se lève du rocher où il était assis pour se rapprocher de nous et se plante devant moi. Ses yeux me scrutent comme s’il essayait de se souvenir de quelque chose. Soudain, une expression de joie se dessine sur ses traits.

- Eh bien ! Si je m’attendais à ça, lâche-t-il puis s’exclame plus fort. Les gars, ce coincé de Franz vient de nous rapporter la faucheuse. Sacrée prise.

Il m’empoigne le menton. C’est à ce moment-là qu’Hans semble sortir de sa torpeur et le bouscule violemment. Le rebelle s’écrase au sol.

- Ne la touche pas, crache mon partenaire.

L’homme le fixe incrédule avant que ces traits se durcissent.

- Ne t’interpose pas entre nous, soldat. Cette salope a causé la mort de nombreux de mes camarades. Je compte bien les venger, hurle-t-il presque.

Il se relève d’un bond, mais avant d’avoir pu réagir, une autre voix s’élève :

- C’est toi qui vas te calmer, espèce d’abruti !

Une femme de taille moyenne vient se placer devant lui. Elle a beau être plus petite que son collègue, on devine tout de suite que c’est elle qui dirige. Elle poursuit :

- On a la preuve avec ces deux-là que l’ennemi n’est pas loin et toi tu ne trouves rien de mieux que de crier comme un putois.

- C’est sûr que toi en beuglant comme une truie, c’est mieux.

À peine qu’il eût fini sa phrase qu’il se prend une baffe. La femme l’empoigne par le col.

- Écoute-moi bien, ici c’est moi qui décide, donc quand je te dis de la fermer tu l’as ferme.

Je l’entends poursuivre plus bas :

- La mission est un échec, je n’ai aucune envie de voir débarquer le gros de la troupe. Va faire le guet et laisse-moi m’occuper d’eux.

Sur ce, elle lâche son subordonné qui s’éloigne en maugréant de plus belle. Je jette un coup d’œil à Hans qui dévisage la nouvelle arrivée les yeux écarquillés.

- Anna, murmure-t-il.

La femme se retourne. La surprise traverse ses traits. Elle le scrute en silence avant de déclarer :

- Ça fait un bail, petit frère.

La bouche d’Hans s’ouvre plusieurs fois d’affilées sans qu’un mot ne sorte. C’est à ce moment-là qu’Anna remarque la tache de sang qui s’étend de plus en plus sur la veste de son frère. Elle se tourne vers l’un de ses alliés pour lui ordonner :

- Louis, tu t’occupes de le soigner.

- Un soldat, jamais de la vie, réplique-t-il aussitôt.

Anna lève les yeux au ciel.

- Toi aussi tu vas contester tout ce que je dis. Va chercher la boite de premiers secours avant qu’il ne se vide de son sang.

Lorsque son homme de main finit par obéir, elle reporte son attention sur nous. D’un pas chancelant, Hans se rapproche de sa sœur, une expression de joie intense sur le visage. À bout de force, il tombe pratiquement dans les bras de la rebelle. Celle-ci le rattrape de justesse sans dissimuler son sourire. Les doigts de Hans palpent avec crainte les joues de sa sœur. Moi ainsi que les autres personnes présentes observons la scène sans oser l’interrompre.

- C’est vraiment toi, Anna.

- Qui veux-tu que ce soit d’autres, gros nigaud ?

Mon compagnon étouffe un sanglot.

- J’ai du mal à croire que tu es là devant moi. Je t’ai tant cherché, grande sœur.

Anna ressert son étreinte sur les épaules de son frère.

- C’est bien moi, Hans, murmure-t-elle, puis rajoute en remarquant Louis qui revient. Il serait temps que l’on te soigne. Tu pisses le sang.

Avec délicatesse, elle le dépose au sol et déboutonne sa veste pour dégager la plaie. Je me rapproche du blessé. La blessure n’est pas belle à voir. Je suis soulagée d’apprendre qu’elle n’est pas bien grave. Pendant que le rebelle panse la plaie, j’éponge le front couvert de sueur de mon partenaire. Il continue à fixer sa sœur avec un sourire béat sur le visage. Je devrais être heureuse pour eux, mais depuis leurs retrouvailles, mon cœur est serré douloureusement. Je pense à Luna et au fait que nous ne nous retrouverons jamais de la sorte. Lorsque Louis a terminé de soigner Hans, Anna place une petite fiole dans la main de celui-ci.

- Bois, lui ordonne-t-elle.

Après une hésitation, mon compagnon finit par obéir. Le contenu avalé, une grimace de dégoût déforme ses traits et il se met à tousser. J’entends quelques ricanements dans mon dos. À l’évidence, ils doivent connaitre cette mixture.  

- Qu’est-ce que c’est que cette horreur ? articule Hans rouge de chaleur.

- Un bon remontant capable de remettre d’aplomb un cheval, répond sa sœur, un sourire en coin.   

- Mais je ne suis pas un cheval, couine son frère entre deux hoquets.

- Non, mais avec la discussion qui va suivre, j’ai besoin que tu sois au maximum de tes capacités.

Anna croise ses bras avant de demander de but en blanc :

- Pourquoi êtes-vous là ?

Le visage de notre interlocutrice est redevenu sérieux. Elle a réendossé son rôle. Hans et moi échangeons un regard. Au point où l’on en est, cela ne sert à rien de mentir.

- Nous nous sommes enfuies de la base, déclaré-je, puis rajoute. Le major général Tellin est à nos trousses.

À l’évidence, la rebelle ne s’attendait pas à ça.

- Tellin, répète-t-elle une expression indéchiffrable sur le visage.

Ses doigts se mettent à frapper le sol pendant qu’elle réfléchit.

- Franz, appelle-t-elle.

En deux enjambées, l’homme est à ses côtés.

- Prends ton équipe et va vérifier les environs. Si cet homme est dans les parages, nous avons intérêt à être particulièrement vigilants. Pour le reste.

Elle nous jette un regard en coin avant de conclure :

- Tu connais la procédure. Maintenant, va.

Sans demander son reste, l’homme s’éloigne. Anna reporte son attention sur nous.

- Qu’est-ce qui s’est passé ?

Je m’apprête à parler, mais Hans prend les devants :

- Il y a quelques jours, Tellin m’a injecté le projet 66. Si on était resté, il m’aurait envoyé dans la section médicale.

Le sang semble avoir quitté le visage de notre interlocutrice, pourtant je peux sentir la colère qui commence à émerger en elle. C’est d’une voix maitrisée qu’elle déclare :

- On reparlera du projet plus tard. Juste une question, Hans. Pourquoi est-ce que la fille du maréchal t’accompagne ?

Mon compagnon attrape ma main avant de répondre :

- Elena m’a sauvé la vie. Sans elle, je n’aurais pas pu m’échapper.

En quelques mots, il relate rapidement les derniers évènements. Lorsqu’il se tait, Anna reste silencieuse un long moment avant de reprendre :

- Où comptiez-vous aller après votre fuite ?

- Honnêtement, on n’y a pas encore réfléchi, avoue Hans.

Je me relève. Instinctivement, les rebelles près de moi empoignent leur arme. Je ne m’en inquiète pas et porte mon attention sur la sœur d’Hans.

- Anna, je souhaiterais te parler en privé, est-ce que c’est possible ?

Mon compagnon s’apprête à répliquer, mais Anna pose une main sur l’épaule de son frère pour l’empêcher d’intervenir. Elle se redresse à son tour.

- Je t’accorde dix minutes, m’annonce-t-elle.

Sans un mot, je la suis. Lorsque nous sommes seules, mon interlocutrice se tourne vers moi.

- Alors qu’as-tu à me dire ?

J’inspire avant de lâcher :

- J’ignore si c’est possible, mais j’aurais une faveur à te demander.

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annececile
Posté le 22/06/2020
Alors voila qui Hans a vu auparavant parmi les rebelles : sa soeur Anna. Le chapitre est bien mene et l'arrivee de Anna est une vraie surprise. Ce qui surprend, c'est qu'elle ne mentionne pas avoir rencontre Hans dans les bois quelques temps auparavant (a moins que ce ne soit Luna?).
La reaction de tristesse de Elena, qui se souvient de sa propre soeur, est tres bien vue a mon avis.

Visiblement, l'ambiance n'est pas tres bonne dans les rangs des rebelles, ils s'insultent copieusement au moindre pretexte, leur chef doit les giffler pour se faire obeir... c'est etonnant qu'ils arrivent a mener la moindre action collective !

Je freine brusquement > c'est peut-etre juste moi, mais freiner evoque vraiment un vehicule, pas un humain.

Moi ainsi que les autres personnes présentes observons la scène > c'est un peu bizarre formule comme ca. Peut-etre plutot "tout le monde, moi comprise, observons la scene" ?

Nous nous sommes enfuies > pas de E

À peine qu’il eût fini sa phrase qu’il se prend une baffe. > a peine finit-il. sa phrase...

Bon courage pour la suite! Je me demande bien ce que Elena va demander.
:-)
Zoju
Posté le 22/06/2020
Merci pour ton commentaire ! Je suis contente que l'on est surpris de tomber sur Anna. En ce qui concerne les rebelles, je voulais montrer le caractère explosif de la troupe. Ils seront détaillés par la suite. Lorsque Hans et Elena les rencontre, il y a deux éléments qui n'aident pas beaucoup les rebelles à garder leur sang-froid. D'abord, ils ont raté leur mission et ensuite ils ont mis la main sur Elena qui ne semble pas être très apprécié. Toutefois, je voulais montrer l'opposition entre les membres de la base et les rebelles. Je vais corriger les fautes. J'espère que la suite te plaira ! :-)
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