Chapitre 7

Notes de l’auteur : Voici le chapitre 7 complet, le 8 est en cours d'écriture, une fois complet, je le publierai bonne lecture :)

Chapitre 7

-Comment ça on est assiégé ?

Demanda Udiir en se secouant la tête pour dissiper la torpeur encore fraîche. Toujours assis sur son lit, il voulut prendre quelques secondes pour bien se réveiller. Mais sa sœur aînée n’ayant aucune patience, elle l’attrapa par le bras et le traîna hors de la maison. Bien que brutale, la méthode eût de l’effet. Remis debout de la sorte, le  chaman se réveilla rapidement.

Il prit alors conscience de la présence de Mathias et de Kiara, et en voyant leurs visages, il comprit que la situation était grave. Il s’assit avec eux, sur une pierre autour des cendres du feu de la veille. Arya s’assit à son tour et un court silence s’installa. Au terme de ce dernier, Udiir demanda, inquiet :

        -Que se passe-t-il exactement ?

Les trois camarades se regardèrent, et finalement ce fut Mathias qui exposa les faits au forgeron. Cela faisait maintenant presque quatre jours, que Udiir dormait comme une masse. Entretemps, la nouvelle de son apparition sur le champ de bataille s’était répandue, comme une trainée de poudre.

Bien évidemment, cette nouvelle avait provoqué un élan de peur et d’étonnement parmi le peuple et les instances du pouvoir. Si bien que la guilde avait décidé d’offrir une prime à tout aventurier apportant des informations sur l’étrange créature qu’était Udiir, voire de la capturer.

Bien entendu, tous les soldats et aventuriers présents connaissaient le lien entre la créature et le clan des Arginanes. Il n’avait donc pas fallu longtemps, avant que des cohortes de baroudeurs ne viennent au pied de la montagne. Mais à peine les premiers aventuriers avaient-ils tenté de franchir la porte de la montagne, que les Arginanes leur tombaient dessus et les expulsaient du village avant d’en fermer les portes.

Roy et Alyssia avaient cru que cette mesure suffirait à dissuader les chasseurs, mais cela n’y fit rien. En effet, en seulement trois jours, plus d’une centaine d’aventuriers avaient commencé à camper en face du village, et avaient clairement fait comprendre qu’ils ne partiraient sans celui qu’ils étaient venus chercher : Udiir.

Mathias annonça que son père avait fait venir plusieurs garnisons de ses soldats. D’abord à pied, puis par téléportation, à cause du blocus. Il y avait à présent près de deux cents soldats, rassemblés dans le village et ses environs. Le seigneur Jayce espérait ainsi dissuader les aventuriers, et désamorcer la situation.

Mais la prime offerte par la guilde, et le récit des exploits d’Udiir étaient une telle source de motivation que plusieurs compagnies avaient déjà lancé des excursions, afin de pénétrer dans le  village et  d’atteindre le sommet de la montagne. Elles avaient toutes échoué, mais les aventuriers avaient causé quelques dégâts aux palissades et au village.

Cela avait poussé les Arginanes à renforcer les fortifications, et se mettre sur le pied de guerre pour de bon. De plus, Jayce avait reçu une missive de la reine Artha, l’informant qu’elle était en route avec ses troupes pour la montagne des éléments.

        -Quand sera-t-elle là ? Demanda Udiir

Les trois plus âgés échangèrent des regards mortifiés, puis Arya répondit d’un ton bas et résigné :

        -Elle devrait arriver avec ses troupes… ce soir.

Udiir se leva, d’une manière un peu trop soudaine pour paraître calme. Le jeune forgeron, passa ses mains dans son ample chevelure, un geste qu’il avait la mauvaise habitude de faire en situation de stress. Il ressassa le récit de Mathias en boucle dans son esprit. En résumé, la situation était catastrophique !

Machinalement, Udiir alla dans sa forge et saisit Gal’Rash. Il ressortit armé, et fila droit vers son terrain d’entrainement. Il se plaça au centre du cercle des éléments, et invoqua les esprits. Aussitôt quatre silhouettes de roche, de vent, d’eau et de feu jaillirent du sol de la montagne ; c’était des élémentaux.

L’entité de pierre, avait une apparence humanoïde dont les membres, dépourvus d’articulation, semblaient graviter autour du torse. Son tronc était un bloc de pierre, sa tête sans visage était pourvue de deux yeux de cristal brillants, enfin ses bras étaient faits de terre et pourvus de mains aux doigts de pierre et de cristal.

L’entité de l’eau était grande, fine, et d’apparence féminine.

L’esprit du feu quant à lui était fait de flammes et de magma en fusion. L’élémentaire de tempête était composé de vapeurs tourbillonnantes d’où émanaient des éclairs.

Les quatre créatures élémentaires, saluèrent le chaman d’une révérence presque solennelle. Puis, d’une voix caverneuse qui semblait provenir de tous en même temps, ils prirent la parole :

        -Nous te saluons chaman. Pourquoi nous as-tu appelés ?

Udiir, joignit les mains sur le manche de son marteau comme pour prier et rendit leur salut aux esprits, avant de répondre :

-Merci d’avoir répondu à mon appel, esprits. Je viens quérir votre sagesse et votre expérience afin de perfectionner ma maîtrise du combat et des éléments.

-Ta demande est acceptée, jeune chaman, prépare-toi car ta force et ta détermination vont être testées. La terre va te briser, le feu va te brûler, l’eau va t’éroder, et la tempête va venir te frapper.

Udiir se mit en garde, le pouvoir des quatre esprits vibra sur le plateau. Udiir se lança et les esprits libérèrent leur puissance.

L’esprit de la foudre fut le premier à frapper, un torrent d’éclair fusa droit sur le chaman. Udiir bloqua la multitude d’arcs électriques, lancés par l’élémentaire des cieux, de sa main gauche. Il sentit la foudre se propager à travers ses os et ses muscles, il était calme, il savait ce qu’il avait à faire. Il se focalisa sur le flux d’énergie primordiale qui courait dans son corps, et de toute sa volonté, il prit en prit possession et par la force de ses mots la libéra en une véritable éruption de puissance brute :


RASH’ING BAL’ASH !


La foudre jaillit du corps tout entier du chaman, se divisant en tous sens en une multitude d’éclairs, tel une toile d’araignée brillante. Les arcs électriques s’élevèrent dans les airs avant de plonger droit sur l’élémentaire qui en était à l’origine. La foudre frappa le sol dans un fracas assourdissant ! La pierre noircie, et une odeur de brûlé se répandit dans l’air.


Les muscles d'Udiir étaient brûlants et ses oreilles sifflaient, mais les esprits n’en avaient pas terminé avec lui. À peine la foudre avait-elle été repoussée, que l’esprit du feu passa à l’attaque. La terre ce fissura et un geyser de magma jaillit, Udiir eut tout juste le temps d’esquiver pour ne pas être carbonisé. 
Mais la lave ne cessa de couler et se mit à le suivre comme un serpent sous la terre, jaillissant en vague incandescente et se mouvant comme s’il était vivant. 

 

Udiir se fit la réflexion que c’était justement le cas, tandis qu’il esquivait et détournait le flot de magma du mieux qu’il pouvait. Ce jeu du chat et de la souris ne dura que quelques minutes, avant que l’être de magma ne change de tactique. Le liquide rougeoyant se divisa en deux ligne qui encerclèrent Udiir en un clin d’œil. Le cercle ignescent commença à grossir, resserrant son étau sur le chaman.


Comprenant rapidement ce qui l’attendait, Udiir pensa passer en force, mais se ravisa vite et opta pour une autre tactique.

- PAN’KRASH IGNIS !


Il eut tout juste le temps d’incanter avant que le magma ne l’atteigne. Et au lieu de le brûler, la lave glissa sur ses pieds comme de l’eau, les jambes étaient parcourues de veines incandescentes jusqu’aux genoux. Cette incantation, permettait aux corps du lanceur, de sort de supporter la chaleur de la lave. Pour la première fois, Udiir était heureux de connaître ce sort. Mais il n’avait pas le temps de se réjouir, il devait riposter. Il incanta à nouveau, et de toute sa force lança :

- RASH’ANGUE IGNIS !!
En même temps, qu’il prononçait ces paroles, Udiir invoqua la puissance du feu. La lave l’entourant se mit alors à onduler, avant de se soulever brutalement puis de déferler telle une vague sur l’esprit du feu. La roche en fusion l’engloutit avant de durcir instantanément, le piégeant dans un cocon de pierre sombre.

L’esprit de l’eau et de la terre attaquèrent de concert cette fois. Le premier projeta une rafale de sphères aqueuses tandis que l’autre faisait jaillir des pics de roche du sol.

- RASH’ANGUE GAÏA !!

Udiir avait prononcé ses mots de pouvoirs à toute allure. La terre se mit à vibrer, avant qu’une violente onde de choc ne fracasse les dards rocheux. Le chaman prononça à nouveau des paroles gutturales de son étrange dialecte, au moment où les obus aqueux fondaient sur lui avec la vitesse et la puissance d’une baliste. Le temps sembla alors ralentir, Udiir se plongea dans l’énergie primordiale de la montagne. La magie afflua comme un geyser dans son corps. Il s’appropria le pouvoir et prononça les mots porteurs de force et de pouvoir :

- MAL’ANGUE AQUOS !!

L’incantation s’acheva au moment même où l’attaque de l’élémentaire l’atteignait et au lieu de le blesser, les globes d’eau éclatèrent et se dissipèrent en plusieurs flux tournant en spirale autour du chaman.

Plongé dans sa transe temporelle, Udiir contre-attaqua alors que tout autour de lui semblait être au ralenti.

- ZA’LANKO AQUOS !!
Le sort fut lancé et aussitôt les flux aqueux se muèrent en une lame d’eau qui déferla sur l’ondine avec la force d’un raz-de-marée, tranchant la roche du plateau comme du beurre, provoquant une violente détonation. L’esprit de l’eau hors-jeu, le temps reprit ses droits et Udiir réalisa qu’il avait le souffle court et transpirait à grosses gouttes. Il avait lancé plusieurs sorts très puissants sans temps mort. Habituellement, il jonglait entre les sorts et le combat physique, laissant ainsi son énergie mentale se restaurer.

Le chaman sentit alors la peau de son dos chauffer. Il savait pourquoi ses tatouages s’étaient mis à briller. Ces étranges tatouages faits d’entrelacs et de runes, représentaient l’identité même du chaman, les quatre éléments y étaient représentés. Chacun des symboles était apparu lorsqu’il avait réussi à communier avec l’élément correspondant.

Après chaque épreuve, les symboles brillaient et il accédait à une nouvelle incantation, un nouveau secret. Mais c’était la première fois que les quatre symboles s’illuminaient en même temps. Les quatre esprits mineurs disparaissent alors cédant la place à leur Seigneurs respectifs. Les quatre esprits, fixèrent le chaman de leur regard millénaire. 

Aussitôt, un flot d’images traversa l’esprit de Udiir. Il vit les quatre forces se mêler en un seul courant pour ensuite déchaîner une irrésistible déflagration d’énergie primordiale pure.

- AHR'QUAN PROK RASH

Tels étaient les mots de cette incantation, et jamais ces mots ne quitteraient le chaman.

Udiir expira longuement, laissant la tension de son corps retomber. Les esprits disparurent aussi vite qu’ils étaient apparus. Le chaman maugréa, il n’aimait pas cette manie des éléments. Il aurait voulu les questionner à nouveau sur ses origines et sur les raisons qui avaient poussé son géniteur à fuir les amazones jusqu’à cette montagne, ou encore leur demander simplement le nom de son peuple et sa race.

Mais il savait déjà que les esprits ne lui répondraient pas, selon eux ce n’était pas leur devoir de donner cette réponse à Udiir, mais au jeune chaman de la chercher lui-même. Il ne connaissait qu’une partie de la réponse : la raison pour laquelle son père biologique l’avait amené sur ce territoire.

Udiir se détourna du cercle monolithique, pour se diriger vers la paroi de la falaise opposée à sa forge. Il posa sa main calleuse sur la pierre et dit :

        - MAL’ANGUE GAÏA !!

La roche se disloqua en 2 blocks, formant une porte s’ouvrant sur un tunnel creusé dans les entrailles de la montagne. Udiir s’y engouffra. Tout le long du couloir, des braséros étaient disposés. D’une simple incantation, le chaman les alluma. La lumière des flammes illumina le corridor.

Après 5 minutes de marche, Udiir arriva dans une large pièce de forme circulaire. Là encore des braseros étaient disposés sur les murs. Il les alluma tous laissant apparaitre des murs de roche couverts de runes primordiales et de peintures rupestres Les murs de roches étaient couverts de runes primordiales et de peintures rupestres. Elles représentaient des scènes de batailles, ou encore des rencontres entre des peuples. Ce qui ne faisait pas sens pour le commun des mortels était limpide pour Udiir.

La première partie de la fresque racontait les origines du clan Arginane. Il y a plus de 700 ans, aux alentours de l’an 1450, les ancêtres des Arginanes avaient atteint la montagne. Ils y avaient établi leur campement, mais à leur grande surprise la Montagne et la vallée environnante, étaient déjà occupées par une race inconnue. Les humains nomades et le peuple inconnu s’entendirent bien. Les seconds apprirent aux premiers l’art de la forge et de l’agriculture. Le récit évoquait également un étrange pouvoir que ce peuple exerçait sur l’environnement.

Cette coexistence dura pendant près d’un siècle, après quoi les membres du peuple mystérieux avaient quitté les terres du futur Erganane. Mais avant de partir ils auraient laissé un cadeau, ou plutôt ils auraient « béni » la montagne et les mines des Arginanes.

La seconde partie, plus récente, datait du début de la grande guerre qui avait opposé l’empire d’Inguadia à la coalition des clans humains, vers 1720. Apparemment un membre de cet étrange peuple était revenu s’établir sur la montagne des éléments et avait assisté le Arginanes dans leur lutte contre les amazones esclavagistes de l’époque. Les peintures racontaient comment il déchaînait la foudre depuis le sommet du pic ou encore comment il avait fait jaillir les montagnes et le feu des entrailles de la terre sur le champ de bataille.

Il y avait une scène qui intriguait Udiir. Elle représentait l’ermite de la montagne en compagnie de deux silhouettes humaines. La première, masculine, était marquée par l’emblème du clan et la seconde, féminine, par un sceau similaire à celui que la famille royale arborait aujourd’hui. La scène en elle-même montrait ces trois personnages forgeant un trident. À côté du schéma de l’arme, on pouvait y lire ce qui sans doute était le nom de la lance : PARK’TLOS, « Qui transperce la tempête ».

Ce qui troublait Udiir était la deuxième partie de la fresque. Certes, plusieurs légendes faisaient référence à cet étrange personnage, mais les historiens du royaume avaient toujours démenti son existence. De plus aucun récit ne disait qu’il avait pris part à la création d’un trident avec le clan des guerriers-forgerons. Le seul trident que les Arginanes avaient forgé à cette époque était celui de l’ancêtre de la reine Artha et le nom public de cette arme était Triguane. Il se demandait sans cesse si la reine ne cachait pas des informations. Pourtant le plus important de l’histoire de la fresque ne résidait pas dans cette étrange scène, mais dans la nature du mystérieux peuple.

Udiir porta son regard sur la peinture censée représenter les membres de cette race. On pouvait voir un immense portrait détaillant les contours d’un faciès bestial pourvu de défenses et d’oreilles pointues. En somme, le portrait craché du jeune chaman.

Lorsqu’il avait découvert cette grotte il y a 2 ans au cours de son apprentissage, il en avait aussitôt informé sa famille et les y avait emmené. Tous en étaient restés bouche bée. Ces peintures confirmaient la véracité de beaucoup de légendes. Mais surtout celle du fameux peuple Primordiale qui aurait béni le minerai de la montagne.

Cependant, la partie concernant la guerre Amazone-Erganienne, en laissa certains dubitatifs en dépit de l’authenticité de la fresque. Après tout, personne à part la reine n’avait eu le luxe d’inspecter son trident, il était donc difficile d’en vérifier la nature.

Toute cette histoire offrait cependant une réponse à Udiir : Garam était venu ici avec son enfant afin de le cacher sur cette montagne, là où leurs ancêtres avaient vécu. Mais probablement surtout en raison des pouvoirs que son fils allait développer. En effet le pic et la vallée située de l’autre côté étaient enveloppés par une puissante énergie magique, et d’après Arya, le chamanisme de Udiir provenait de la même énergie.

L’énergie que Udiir dégageait en usant de ses pouvoirs de chaman était détectable par n’importe quel mage suffisamment entrainé, ou tout autre personne sensible  à la magie. Garam devait le savoir et par conséquent son fils devait être caché là où l’on ne pouvait pas le repérer. Il avait donc mis le cap vers la montagne des éléments pour finalement y mourir en confiant son enfant au clan Arginane.

Udiir essuya ses yeux, une fois encore ils étaient devenus humides en pensant à son père biologique. Il s’assit sur le sol froid de la caverne et resta ainsi pendant de longues minutes.

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