Chapitre 7

Chapitre 7




 

- Aaaaah !

Phileas se baissa juste avant que le livre ne le frappe au visage. 

- Mais vous êtes malades !

Chloé et Edana s'arrêtèrent, essoufflées. 

- On s'entraîne au combat. 

Phileas secoua la tête. 

- Vous, ça se voit que vous n'avez jamais fait de quête… Suivez-moi. 

Il quitta la salle principale de l'étage d’Hestia. Les deux amies le suivirent jusqu'à l'ascenseur. Le matin même, après la réunion avec les sous-chefs, elles s'étaient dit qu'il fallait qu'elles s'entraînent pour la quête. C'était ce qu'elles avaient fait pendant trois bonnes heures après avoir déjeuné. Maintenant, il était à peu près 16 heures et le trio de demi-dieux parcourait la Grande Plaine jusqu'à un bâtiment. Il était moins imposant que celui principal ; celui où dormaient les enfants des dieux importants. Phileas fit un geste circulaire avec son bras. 

- Bienvenue au Centre d'Entraînement. 

C'était un bloc gris rectangulaire. Il donnait l'impression d'être incassable avec sa couche d'acier. Il n'y avait aucune fenêtre. Chloé écarquilla les yeux. 

- Pourquoi j'ai l'impression d'être dans un livre dystopique ?

Phileas sourit. 

- Bien pensé. Tu es presque aussi forte que moi en blague. 

Edana lui donna un léger coup de coude dans le ventre. 

- Tu nous fais entrer ?

Son ami acquiesça et sortit une carte de sa poche. 

- Seuls les sous-chefs peuvent entrer dans le Centre d'Entraînement. Tu vas bientôt en avoir une, Edana. 

Il glissa sa carte dans une petite fente et une lumière verte s'alluma au-dessus de la porte en acier. Phileas leur indiqua la porte. 

- Les femmes d'abord. 

Edana entra à la suite de Chloé puis ce fut au tour de Phileas. Ils étaient au premier étage. Des grilles les séparaient de l'étage du dessous. Edana s'avança jusqu'à la balustrade pour regarder la pièce d'en bas. Elle était immense et éclairée par des torches accrochées aux murs. Il y avait des centaines de machines à tuer. Edana repéra un lance-flammes, un mur d'escalade au-dessus d'une coulée de lave, un chemin de pierres glissantes dans une rivière remplie de crocodiles, etc. Partout, des demi-dieux armés criaient de rage, de douleur ou de peur. Un brouhaha envahissait les deux étages. Son regard s'arrêta sur une grande fille rousse qui essayait de rester stable sur les pierres glissantes. Elle tomba dans l'eau et Edana ferma les yeux. Phileas la rassura. 

- Regarde, ce sont des hologrammes. 

En effet, quand elle rouvrit les yeux, Edana découvrit avec soulagement la rousse remonter sur la berge. 

- Même si on ne meurt pas aux entraînements, on ressent une vive douleur. Là, par exemple, ce garçon ressent la sensation de la lave. 

Il pointa du doigt un garçon qui ne devait pas être plus vieux que Kafe, se débattant dans la lave en dessous du mur d'escalade. Edana et Chloé frissonnaient. 

- C'est compris. 

Phileas tenta de détendre l'atmosphère. 

- Alors ? Vous choisissez quelle épreuve ? Moi, je vais aux arts martiaux. 

Il mima un coup d'épée et tendit une main. 

- Amusez-vous bien, surtout ! Tope là !

Après qu'il soit parti, Chloé soupira. 

- Je crois que je vais aller là-bas…

Elle lui montra un espace avec des tirs à l'arc et des cibles. 

- Je suis assez bonne en tir à l'arc. J'en faisais avec mon père dans notre jardin…

Edana descendit avec elle les escaliers. 

- Bonne chance. 

- À toi aussi. 

Quand son amie fut partie, Edana s'accroupit et enfouit son visage dans ses mains. Qu'allait-elle devenir ? La quête allait la tuer. Elle n'avait pas l'étoffe d'une héroïne et encore moins d'une guerrière… Elle entendit des pas et releva la tête. 

- Tu vas rester là à t'apitoyer sur ton sort ?

Húdôr lui tendit la main. 

- Lève-toi, choisis une activité et garde la tête haute, quoi qu'il arrive. 

Edana sourit et prit la main que lui offrait Húdôr. 

- Merci. 

La fille de Poséidon leva les yeux au plafond et partit en faisant voler ses cheveux de jais. Edana lui en fut reconnaissante de l'avoir relevée. Elle se remplit les poumons avec l'air chaud de la salle et redressa la tête. Elle allait au lance-flammes.



 

À chaque nouvelle boule de feu, Edana se baissait, sautait,... Elle aimait bien l'exercice car elle était agile et rapide. Au bout d'un moment, quand elle en eut assez, elle monta au premier étage, essoufflée. Edana attrapa une serviette sur une pile et s'épongea le visage. Elle s'assit sur un banc en attendant que les autres la rejoignent. 

- Salut. 

Elle sursauta-elle en avait assez de ça !-et se redressa. Phaos se tenait fièrement devant elle, bombant le torse et souriant. 

- Bonsoir Phaos. 

Le visage du jeune homme s'illumina. 

- Tu te rappelles de mon prénom !

- Eh oui !

Soudain, Phaos se sentit gêné. 

- Euh…le problème c'est que…je ne sais plus ton prénom…

Edana sourit gentiment. 

- Ce n’est pas grave, je suis nouvelle ici. Je m'appelle Edana. 

Elle tendit la main et il la serra. 

- Enchanté Edana. 

- Enchantée Phaos. 

Ils rirent, gênés. Edana allait lui demander ce qu'il avait choisi comme exercice quand Chloé et Phileas les rejoignirent. Phaos gratifia la fille de Déméter d'un sourire charmeur. Phileas regarda Phaos avec colère. 

- Vous parliez de quoi ?

Phaos lui sourit. 

- Je lui ai demandé son prénom. 

Phileas ria. 

- Tu ne le savais même pas ?!

Edana le fusilla du regard. 

- Moi non plus je ne connaissais pas son prénom !

Phaos la regarda sans comprendre. 

- Ce n'est pas…

- Allons-y, le coupa Edana, on doit préparer nos affaires.

Chloé l'attrapa sous le bras et les deux amies quittèrent le Centre d'Entraînement, suivies par Phileas. Une fois assez loin du bâtiment, Edana se retourna. 

- Arrête de bouder et sois gentil avec les autres, pour une fois.

Le jeune homme soupira. 

- Oui, cheffe. 




 

- Une épée ? Un poignard ? Une matraque avec des pics ?

Chloé lui montra les différentes armes dans l'armoire. Elle avait choisi un arc et aidait Edana à trouver son arme pour se défendre. Celle-ci n'avait aucune envie de faire du mal à quiconque avec ces armes. 

- Je suis vraiment obligée d'en choisir une ?

Chloé acquiesça. 

- Tu imagines si tu es attaquée par surprise ! Tu vas faire quoi ? T'agenouiller et leur demander gentiment la paix ? Non. 

Edana soupira et passa en revue toute l'armoire. Un bout de tissu dépassait d’une boîte terne . 

- Qu'est-ce que c'est ? demanda-t-elle à Chloé en désignant le tissu noir. 

- Ah, ça…

La jeune fille haussa les épaules en le sortant de son coffret. C’était un gant. 

- Personne ne les a enfilés depuis très longtemps.  

Elle sortit le deuxième gant et lui tendit la paire. Edana les enfila. Elle remua les doigts et ressentit des picotements familiers. Chloé écarquilla les yeux. 

- Ça ne te brûle pas ?

Edana baissa la tête. 

- Si je te dis pourquoi, tu ne m'en voudras pas de ne pas te l'avoir dit plus tôt ?

Chloé secoua la tête. 

- Qu'est-ce qu'il y a ?

- Je ne l'ai dit à personne depuis mon arrivée…

Son amie l'encouragea. 

- Continue. Je ne dirai rien. 

- Je peux toucher le feu et le traverser sans rien ressentir. 

Chloé plaqua les mains contre sa bouche. 

- Quoi ?!

- J'ai ce don depuis aussi longtemps que je m'en souvienne… 

- Tu as conscience qu'il faudra que tu le dises à Phileas ?

- Pourquoi ?

Chloé leva les bras.

- Parce qu'on va partir à trois et que ça va peut-être nous être utile !

 Edana s'assit sur une chaise, le visage dans les mains. Chloé posa une main sur son épaule. 

- Qu'est-ce qui ne va pas ? C'est génial que tu aies un pouvoir ! Je paierai cher pour l'avoir. 

Les larmes lui montèrent aux yeux. 

- Merci Chloé mais ce n'est pas ça le problème. 

- Alors qu'est-ce qu'il y a ?

- Je ne suis pas sûre d'être la personne qu'il faut pour cette quête. 

Elle leva les yeux. Chloé secouait la tête. 

- Il ne faut jamais remettre en question la décision de Keraunós. 

- Et puis il y a Kafe, elle me manque tellement ! J'aimerai avoir de ses nouvelles pour être sûre qu'elle va bien. 

- Tu n'as qu'à demander à Keraunós de faire une escale à Manhattan pour voir Kafe. 

- Tu as raison. Merci. 

Elles se firent un câlin. 




 

- Ça servirait à quoi ?

Keraunós regardait Edana, sceptique. 

- À me rassurer. 

Il grogna. 

- Mais ça ne vous aidera pas pour la quête.

Edana le regarda fixement.

- Non mais je ne partirai pas tant que vous n’aurez pas accepté. 

Keraunós haussa un sourcil puis sourit. 

- C’est pour ça que je t’ai choisi ; pour ta détermination.

Edana rougit.

- Alors ? Je pourrai aller voir Kafe, oui ou non ? 

Le vieillard se leva.

- Oui, tu pourras aller la voir, ta petite sœur. Allez, du balai ! J’ai du travail à faire, moi !

Il la poussa en dehors de son bureau.

- Et retourne donc au rangement d’armes à l’étage d’Athéna. 

Edana le regarda avant de se retourner : il souriait. Visiblement, Keraunós commençait à l’apprécier… 




 

Après avoir dit à Chloé que Keraunós acceptait sa requête, les filles retournèrent au dixième étage. Les gants étaient retournés dans leur boîte grise avant que Chloé et Edana ne quittent la pièce. Edana les ressortit et les enfila. 

- À quoi servent-ils ?

Chloé désigna deux petites bosses.

- Tu vois ces deux boutons ?

Edana acquiesça.

- Celui d’en haut fait apparaître des flammes normales tandis que le bouton d’en bas, lui, fait apparaître des flammes qui ne brûlent pas les êtres humains. Ça va, tu as compris ?

La jeune fille écarquilla les yeux et hocha lentement la tête.

- Je peux essayer ?

Chloé lui donna une tape sur l’épaule.

- Bien sûr que tu peux ! Ces gants n’étaient pas utilisés parce qu’ils brûlaient la peau de ceux qui les enfilaient.

Edana appuya sur le bouton d’en haut, inquiète. Des flammes aux reflets orangés et rouges dansaient dans ses mains. Elles s’élevaient et se baissaient grâce à la façon dont Edana pliait les bouts des doigts. Elle approcha sa main gauche des flammes de sa main droite et Chloé sursauta.

- Tu es sûre que ça ne va pas te brûler ? 

- Il n’y a qu’un moyen de le savoir.

Sa main gantée traversa les flammes orangées sans la brûler. Chloé rigola de soulagement. Edana appuya sur le deuxième bouton, celui d’en bas. Cette fois-ci, ce fut des flammes violettes et bleues qui montèrent au creux de sa paume. Ce beau mélange la fit sourire. Si elle avait eu cette paire de gants pendant ses spectacles… Un rire lui échappa. Elle était fascinée par la légère chaleur qu’elle ressentait. Chloé, elle, n’était pas rassurée du tout.

- Tu…tu gardes ça loin de…de moi, d’accord ?

Pour rigoler, Edana approcha sa main de son amie. Celle-ci cria et courut jusqu’à l’autre bout de la pièce. Après avoir repris son souffle, elle explosa de rire, soulagée. 

- J'ai failli avoir une crise cardiaque !

Edana accourut pour la soutenir.

- Désolée ! Ça va ?!

- Mais oui, c’était pour rire.

- Ouf…

Chloé se retint de rire. 

- La tête que tu faisais !

Edana rougit. Soudain, la porte s’ouvrit et Pyro entra en souriant.

- Salut les filles !

- Bonjour Pyro.

Cette dernière s’arrêta.

- Vous ne remarquez rien ?

Les deux filles cherchaient, en vain.

- Rien. Pourquoi ?

Pyro leva les yeux au plafond et soupira.

- Vous êtes sûres ?

Chloé et Edana acquiescèrent. La petite fille leur désigna une carte qui sortait d’une poche de sa salopette.

- Voici ma carte pour accéder au Centre d’Entraînement.

- Tu n’en avais pas déjà une ?

Pyro secoua la tête.

- Keraunós ne voulait pas, il disait que j’étais trop jeune... Maintenant que j’ai neuf ans, il a arrêté son cinéma et m’a donné ma propre carte !

Edana applaudit.

- Félicitations !


 

 

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