Chapitre 6 – Le sans-talent

Par Cerise

L’aéronef s’était arrêté, gîtant sur un côté. Il vacilla un peu lorsque les deux garçons se remirent debout, mais resta suspendu dans sa position précaire. Ils se relevèrent avec précaution, époussetant leurs vêtements et leurs cheveux des éclats de verre et des aiguilles de pin. Philidor respira profondément, le visage balayé par la bise froide entrant par la vitre cassée. Une forte odeur de résineux lui piquait l’arrière-gorge, et il toussa dans sa manche. La nacelle oscilla, et le vent malmenait le ballon toujours en partie gonflé, ce qui amplifia le mouvement. Ils devaient quitter l’habitacle, et vite !

Sans un regard en arrière, il saisit son sac tandis qu’Hugo ouvrait tant bien que mal la porte. La descente, de branche en branche, jusqu’au sol, les laissa essoufflés et pantelants, et ce n’est qu’une fois assis sur le tapis d’aiguilles sèches, le dos appuyé contre un tronc râpeux un peu plus loin, qu’ils purent se considérer en sécurité.

Leurs halètements se calmèrent peu à peu, et Hugo rompit le premier le silence :

– Et maintenant ?

– Maintenant, et bien, il n’y a plus qu’à marcher.

– Tu veux marcher jusqu’à Lämird ?

Philidor rit ; l’ingénuité d’Hugo ne cessait de le surprendre :

– Non, jusqu’au village qu’on a vu ! On devrait pouvoir trouver de l’aide, un moyen de transport. Car lui, dit-il en pointant son ballon, il ne revolera plus.

Fixé sur son prochain objectif, il se redressa. Non, son ballon ne revolerait plus. Cela ne l’empêcherait pas de poursuivre, d’aller jusqu’à Lämird, et de retrouver cette fille. Le temps pressait. Ils ne devaient pas traîner. Il s’apprêtait à partir, lorsqu’une hésitation d’Hugo le freina :

– Et bien, quoi, viens ! On ne peut pas rester là !

– Tu crois que c’est bien prudent d’arriver ainsi, dans un village de mineurs où on ne connaît personne ? Habillé comme ça ?

Philidor baissa les yeux sur ses vêtements. Malgré la poussière, le vert profond du velours le reliait du premier coup d’œil à ses origines nobles. Il y avait une chance infime que les sentinelles dans la tour n’aient pas assisté à leur accident. Mieux valait rester discret. En un tour de main, il retira son sac, sa veste, et la retourna sur l’envers. La doublure, d’un marron passe-partout, ferait bien l’affaire.

Ils se dirigèrent au jugé vers l’orée de la forêt que le soleil déclinant dessinait au travers des branches. Ils l’atteignirent au moment où l’astre bascula derrière la montagne, et débouchèrent dans un pré laissé à l’abandon depuis peu, sur lequel les arbres regagnaient déjà du terrain. Sur un chemin longeant le versant le plus proche, une silhouette, petite et mince, semblait venir à leur rencontre.

Quelques minutes suffirent pour la rejoindre. C’était un garçon, plus jeune qu’eux, malingre et noiraud. Sans leur laisser le temps de parler, il les accosta :

– C’est vous, qu’étiez dans le ballon ?

Sa question n’attendait pas de réponse, et Philidor prit son plus beau sourire pour lui demander :

– On cherche un endroit où passer la nuit, peut-être que tu peux nous emmener au village ? Je m’appelle Philibert, et lui c’est Hugo.

– Philibert...

Il scruta attentivement le ciel, dans la direction de l’accident, mais n’ajouta aucun commentaire. Il se tourna derrière lui, puis à nouveau vers les deux naufragés. Hugo grimaça sous l’inspection, mais Philidor s’en moquait. Il sentait que le garçon ne poserait pas de problème. Peut-être même serait-il la solution.

L’inconnu lâcha :

– Venez.


 

Il marchaient depuis quelques minutes, et Philidor redevenait joyeux. Il était d’un naturel optimiste, non de l’optimisme naïf de ceux n’ayant jamais connu les revers de fortune, mais de l’optimisme de ceux qui choisissent de l’être, envers et contre tout. Que son ballon se soit retrouvé accidenté en pleine forêt, bien trop loin de sa destination, ne lui apparaissait plus comme une embûche ralentissant son voyage, mais comme une occasion fabuleuse de voir de plus près le village survolé précédemment. Et rien, ni la mine sombre de son compagnon de voyage jetant des regards fuyants à Samson — il était parvenu à lui arracher son prénom — ni la perspective de passer la nuit sur une couche de fortune, n’aurait pu calmer ses ardeurs.

Le jeune garçon les avait conduits sans dire un mot le long du chemin, en lisière de forêt et à fleur de falaise, jusqu’au passage d’un petit col. Là, le village s’était découvert, accroché au coteau, ses maisons saillant tels des champignons sur une souche pourrie. Dominant les habitations, une tour-sentinelle, bâtie au plus haut point en un périlleux porte-à-faux, surplombait la ville et étendait son ombre au soleil couchant plus loin que n’importe quelle construction alentours.

Plus bas, au creux de la vallée, une rivière étroite abritait une autre poignée de maisons, et d’imposants docks de chargement. Quelques péniches assoupies en amont fumaient encore. Combien de personnes vivaient là, ils n’auraient su le dire. Mais probablement plus que ce qu’ils avaient cru. Vu de haut, tout semble plus petit, plus insignifiant, en particulier si l’on parle de mineurs.


 

Les villages comme celui de Samson, il y en avait plein les montagnes, cela, Philidor le savait. Mais il n’aurait pu imaginer, même de loin, la réalité de ceux qui y vivaient.

Lorsqu’on naît goûteur, les options pour exploiter son talent se comptent sur les doigts d’une main : en ville, on trouve toujours un tenancier pour vous engager comme apprenti dans les cuisines, mais en dehors, cela devient plus compliqué. Car depuis aussi longtemps que les goûteurs existent, leur vie rejoint celle de la terre.

Pourtant, faire pousser n’est pas vraiment le problème, tout pousse à foison. La difficulté vient plutôt de sélectionner ce qui doit croître, ce qui est comestible, sur ce qui ne l’est pas. Si bien que de cultivateur de carotte ils se retrouvent souvent bûcherons. Face à cette vie de misère, quelques goûteurs, plus malins, se mirent il y a plusieurs générations à goûter la pierre elle-même : là où leurs ancêtres repéraient dans la terre les nutriments adaptés à leurs cultures, eux trouvèrent dans la roche les particules infimes des minerais que d’autres savent exploiter. De fermiers, ils devinrent mineurs. Et de fait, de bûcherons, ils devinrent casseurs de pierre. Si bien que leurs vies, d’étriquées, en devint dans bien des cas misérables.


 

Mais tout ceci restait bien loin des préoccupations de Philidor. Et plus ils s’approchaient des maisons, plus leur trajectoire déviait vers la forêt. Au fur et à mesure que la déclivité se réduisait, en direction de la rivière, les arbres reprenaient leur droit. Ce fut vers l’un d’entre eux, juste à la lisière, que leur jeune guide les mena.

Ce que Philidor avait imaginé être un gigantesque épicéa s’avérait être plus que ça : dans le bois, au cœur même du tronc de l’arbre mourant était creusée la maison de Samson. Une femme, sa mère, s’y trouvait déjà. Petite femme vieillie avant l’âge aux mains recroquevillées telles des veuves noires, elle ravaudait pour ce qui paraissait être la centième fois une étoffe à la couleur passée. Elle s’appelait Leth, et n’avait pas trop posé de questions, du moins pas à haute voix, et celles au fond de ses yeux semblèrent trouver satisfaction dans les explications sommaires de son fils puisqu’elle les laissa entrer.

Un mauvais feu de bois vert éclairait chichement la petite pièce circulaire depuis l’âtre empierré, étouffant quelque peu l’atmosphère. Ils mangèrent un repas trop frugal, bien que Leth eut fouillé au fond d’une niche creusée à même le tronc pour en dégager une conserve de légumes afin d’agrémenter le ragoût d’écureuils. Le silence pesant tout autant que la rareté des mets abrégea le souper. Philidor avait vu son enthousiasme habituellement communicatif se heurter aux manières rugueuses de leurs hôtes. À son grand dam, dans la maison de Samson, on ne parlait pas pour ne rien dire.


 

Le lendemain matin à leur réveil ils trouvèrent un petit pain et quelques noix laissés par Leth. Philidor piaffait d’explorer les environs, les habitations, les mines, les gens, mais en quelques mots Samson l’en avait dissuadé :

– On est pas très bien vus. Y faut pas trop qu’on sache qu’il y a des étrangers chez nous. Surtout des… des pas goûteurs.

– Et comment tu le saurais, qu’on n’est pas des goûteurs ? Ce n’est pas écrit sur nous que je sache ?

Philidor nota du coin de l’œil Hugo qui, occupé à tisonner le feu, dressait l’oreille.

– Non, rétorqua Samson, et justement, personne ici sait lire. Mais il y a pas besoin. Toi, dit-il en pointant un regard appuyé, son premier regard franc, sur Philidor, toi, t’es un voyant. Il y a qu’à voir comment tu scrutes tout, et comment tu entends rien.

Pas le moins du monde outré, et sans vraiment se soucier de maintenir un semblant de couverture, Philidor rit, et lui demanda :

– Et toi, tu es un goûteur ?

Samson se détourna à nouveau :

– Pas sûr que tu sois un voyant en fait, si tu penses ça.

Philidor le scrutait. Il savait bien que ni le jeune garçon ni Leth n’étaient des goûteurs. Sa mère, une tactile, probablement, à voir comment elle glissait ses mains sur les tissus colorés qui pendaient sur des fils accrochés près du plafond. Mais Samson ? Il cassait les dernières noix du bol, deux par deux, au creux de sa main, et ses minces doigts habiles fourrageaient dans les demi-coques pour en extraire le fruit.

– Tu es un sans-talent, n’est-ce pas, c’est pour ça que vous êtes à l’écart, ta mère et toi ? demanda Philidor.

Fermant les yeux à demi, prunelles de chat luisant entre les fentes amincies de ses paupières, il tenta :

– Ton père était mineur, non ? C’est courant les accidents de mine, il paraît.

Pour toute réponse, Samson se frotta vigoureusement le nez avec la bordure de sa manche. Philidor s’en voulait d’un seul coup, mais cela ne dura pas. Changeant de sujet, il désigna Hugo :

– Et lui, il est quoi à ton avis ?

Le visage de Samson se fronça un peu plus. Jouant de l’index le long de son assiette jonchée de coques de noix, il lâcha du bout des lèvres :

– Un tactile ?

C’était moitié une affirmation, moitié une question. Philidor chercha Hugo du regard, mais celui-ci gardait la tête obstinément baissée vers les baises, remuant un feu mourant qui n’avait pas besoin de l’être. Il hésita, après tout, ce n’était pas à lui de dire quoi que ce soit. Sauf que s’il attendait de ces deux-là qu’ils échangent une parole, la forêt les aurait recouverts avant qu’ils ne se soient ne serai ce que regardés.

– C’est un tactile, oui. Et aussi un otique.

Samson rentra la tête dans les épaules et, lâchant ses noix, croisa les bras en un geste de défiance. Sa répartie ne se fit pas attendre :

– Un tactile et un otique ? Comment c’est possible ?

– Tactile par son père, otique par sa mère. Il a hérité des deux.

Samson ne quittait pas des yeux Hugo désormais, qui lui même feignait de ne rien entendre. Ce qui concordait plutôt mal avec ce que Philidor venait d’affirmer. Sans tourner la tête, Hugo prit enfin la parole :

– Hier soir, avant que tu nous rejoignes à l’étage, ta mère t’a parlé. Tout doucement, elle t’a demandé pourquoi tu nous avais ramenés ici. Tu lui as raconté, pour le ballon, que tu nous as vus nous échouer dans les arbres. Tu lui as dit la couleur de la toile. Et tu lui as dit qui il est, lui.

Retourné maintenant vers eux, il pointait Philidor du tisonnier qu’il n’avait pas lâché. Ils se tournèrent de concert vers Samson, qui ne nia pas, mais qui prit une attitude défensive.

– Si tu m’as entendu, alors tu l’as entendu aussi : elle veut que vous partiez, au plus vite.


 

Samson n’avait plus rien dit jusqu’en fin d’après midi où, les laissant avec comme consigne absolue de rester discrets. Il était revenu deux heures plus tard avec un jeune lièvre que Leth, réapparue entre temps, leur avait cuisiné. Dans l’intervalle, Philidor, résigné au mutisme, s’était absorbé dans ses croquis, en complétant certains, en commençant un autre. Hugo l’avait observé un long moment, sans mot dire, avant de chercher à se rendre utile tout autant qu’à s’occuper les mains. Sans grand succès. Le silence tacite qui envahissait l’espace les avait gagnés, et ce n’est qu’à la fin du souper que Samson le rompit :

– Vous pourrez partir demain. J’ai trouvé une péniche qui lève l’ancre à l’aube, et qui s’arrêtera pas avant Lämird. Vous serez pas trop les bienvenus, faudra pas vous montrer, mais avant la nuit prochaine vous y serez.

– Viens avec nous.

La phrase d’Hugo avait fusé, et Philidor le dévisageait : une détermination butée avait envahi ses traits. Lui qui semblait voilà moins d’une journée hostile à Samson lui proposait désormais de faire route avec eux. Qu’avait-il raté des pensées de l’apprenti ces dernières heures pour qu’il lui propose cela ?

Leth resta muette, et s’installa proche du feu, les virevousses de ses mains sur le tissu moins vives que la veille. Samson l’observa, petits coups d’œil rapides jetés en appât, mais elle ne mordit pas. Philidor réfléchissait à toute vitesse : Samson ne faisait pas partie de ses visions, il n’imaginait pas sa présence leur être utile. Il cherchait comment le dissuader de les accompagner, prétexter sa mère peut-être...

Samson finit par marmonner :

– Demain matin, je vous dirai pour la péniche. Je vous montrerai où. Y a la place pour deux, pas pour trois.

Philidor s’affaissa légèrement, soulagé. Sans accorder plus de considération à ses invités forcés, le garçon clôtura la discussion en allant se coucher. Philidor comme Hugo saisirent le message, et partirent rejoindre leur lit de fortune en attendant le matin.

Allongé dans le noir, le fils du Régent se répétait que c’était mieux ainsi. Il avait craint un instant que le jeune garçon, Samson, accepte l’étrange invitation de Hugo, mais non. À quoi avait-il pensé, Hugo, pour lui faire cette proposition ? Qu’ils partaient en villégiature ? Mais, pour leur plus grand bien à tous, il s’était abstenu. C’était pour le mieux.

Il se sentait tracassé cependant. Il avait perdu du temps, plus d’une journée, et il ne doutait pas que son père, bien qu’il ne tienne pas tant que cela à lui, se préoccupât de le retrouver. Non pour avoir le plaisir de sa compagnie, mais bien plutôt pour conserver les apparences. Peut-être aussi, se disait Philidor, qui ne l’admettait qu’à moitié, afin de prévenir son sans-tête de fils de tout écart de conduite. Il n’était pas spécialement un modèle de bon comportement, contrairement à sa sœur.

Onésime, plus jeune que lui de quelques minutes, figurait depuis toujours tout ce qu’il abhorrait, et tout ce que son géniteur encensait : ambitieuse, brillante, un sens de la famille égalant presque celui de son père. Il ne supportait plus ses manigances, sa froide désinvolture face à ses visions, les traitant avec moins d’égards que les rêves du premier goûteur venu. Et pourtant, il l’admettait sans peine, il l’adorait, pour les mêmes raisons qu’il la haïssait : parce que, comme lui, son esprit acéré tentait de percer les couches vaporeuses de leurs visions, et qu’un idéal la dépassant l’animait. Si seulement cet idéal pouvait coïncider avec le sien !

Là où il cherchait des doubles-talents, elle cherchait, prétendait-elle, le successeur. Le seul, le vrai, celui-là même qui devrait prendre la place de leur père et régner sur tous : voyants et goûteurs, flaireurs et otiques, tactiles et sans-talent. Le seul capable de tous les comprendre, puisque réunissant dans un seul corps les cinq talents. Le Legit, l’unique roi admissible, celui que leur père, et son père avant lui, et son père encore avant, remplaçaient, en attendant son retour incertain.

Se tournant et se retournant dans le lit de fortune taillé à même le tronc, tandis que ses pensées se tordaient dans sa tête, il ne pouvait s’empêcher d’être irrité face à la logique pour une fois bancale de sa sœur. Qu’espérait-elle qu’il advienne d’eux, si le Legit venait à reprendre sa place ? Il savait sa position des plus enviables, même s’il n’avait pas une conscience tout à fait claire d’à quel point. Il ne pouvait s’empêcher de penser que sa sœur faisait fausse route, et que lui seul prenait le bon chemin.

Tâtonnant dans la pénombre, il glissa la main dans l’ouverture de son sac posé contre sa tête. Tout au fond, soigneusement protégé par un carré de velours se trouvait son artefact de voyant.

D’un geste machinal, il superposa à son œil droit ce prolongement de lui même, et fit glisser ses doigts sur le boîtier ornant sa tempe. Cela faisait longtemps désormais qu’il l’utilisait, et le passage de l’obscurité à la lumière sur son iris ne provoquait plus aucune nausée chez lui. Il se tourna un peu plus, coinçant son œil nu contre son sac, et composa sous ses doigts une combinaison de touche. Le kaléidoscope d’image ralentit, et il distinguait désormais des visages, des lumières, mais il ne s’y attardait pas. Cherchant toujours, il se concentra, jusqu’à ce qu’enfin, il le vit. Son père.

Onésime devait se tenir face à lui, il voyait ce qu’elle voyait, à l’exception de tout autre sens, grâce à leurs deux artefacts. Elle et son père se trouvaient dans le cabinet de travail de ce dernier, petite pièce à l’écart de son bureau officiel de réception. Qu’il l’ait amené là en disait long sur la teneur de leur échange.

Il avait eu de la chance d’enfiler son artefact à temps. Abriel ne suivait pas un emploi du temps réglé comme une horloge, et bien qu’il prit souvent un moment avec sa fille, le soir, l’horaire exact variant avec chaque journée de travail.

Il regardait son père, et fut frappé de le trouver vieilli : certes, son visage acéré n’avait rien perdu de son inflexibilité, mais il ne se souvenait pas de ces ruisseaux d’argent dans ses cheveux ni dans sa barbe. Peut-être, songea-t-il, faut-il parfois s’éloigner pour mieux voir ce qu’on a sous le nez. Il nota que son père ne portait pas son artefact : depuis longtemps, il privilégiait la prudence, trop de Régents s’étaient retrouvés espionnés à leur insu, et bien qu’il soit rompu aux techniques visant à repousser les intrusions indésirables, il n’avait pas la stupidité de se croire inviolable. Cela l’embêtait néanmoins : il n’aurait aucun moyen de deviner les réponses de sa sœur.

L’entrevue le laissa épuisé et frustré. Son père harcelait Onésime de questions à son sujet, questions qu’il avait du mal à lire sur ses lèvres tant son débit était rapide. Il ne pouvait qu’en imaginer les réponses, puisqu’il était incapable de voir sa sœur, et cela plus que tout l’angoissa au lieu de l’apaiser. S’ils parvenaient à atteindre Lämird, Philidor pressentait qu’ils devraient jouer serré. Son père le recherchait, il en avait la certitude, et le peu d’avance gagné se réduisait d’heure en heure. Ils n’auraient pas beaucoup de temps. Et pourtant, il avait l’impression que sa sœur ne l’avait pas trahi, qu’elle feignait d’en savoir moins que ce qu’il lui avait révélé. La frustration sur le visage de son père en témoignait.

Car il n’avait fait aucun mystère de ses plans avec elle. Avant de partir, il avait informé Onésime de son intention de se rendre à Lämird, dans l’espoir que, peut-être, elle l’accompagnerait. Il ne désirait rien tant que la rallier à sa cause.

Se frottant la tempe, il fit tomber l’artefact, et dans un bâillement, le rangea comme il put tout au fond de son sac. Hugo soupira dans son sommeil, et peu après Philidor sombra à son tour. Demain, Samson les guiderait. Demain, ils rejoindraient Lämird, et avec un peu de chance, demain ils parleraient avec la rousse. Demain...

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Lizzie
Posté le 24/04/2020
Bonjour Cerise,
Je continue ma lecture.
Pour moi, ce chapitre est très bien en tant que tel. Qques fautes d'orthographes, je peux préciser si tu veux. Rien de grave.
Jusque là, le flash back et le récit dans le récit ne me perturbaient pas. Je trouvais ça bien qu'on fasse d'abord connaissance avec Fostine et Hugo, personnages principaux, je présume. Mais voilà, c'est Hugo qui raconte l'histoire, c'est son point de vue (oui, même à la 3e personne du singulier, oui encore cette question du point de vue ou de la focalisation) et là, on bascule sur le point de vue de Philidor, dans le récit d'Hugo. Ben...ça va pas, je crois. Du coup tous les éléments qui sont apportés par ce chapitre, et il y en a beaucoup, qu'en faire? Je ne sais pas. Peux-tu les placer par la suite?
peneplop
Posté le 17/04/2020
Un objet "magique", super ! Le kaléidoscope est un artefact qui met tout de suite en marche mon imagination. Et alors, on a une grosse révélation dans ce chapitre, leur quête se dessine : trouver l'élu, celui qui possède tous les talents ! Voilà qui explique pourquoi ils sont à la recherche de "la fille". Super chapitre. Je suis toujours très impressionnée par ta plume à la syntaxe parfaite <3 D'ailleurs, je ne l'ai pas dit, mais la description au début du chapitre d'avant était sublime. Bravo pour tout ça !
Gwenifaere
Posté le 14/02/2020
Un peu plus tranquille, mais très bien, j'ai bien aimé découvrir un peu ces mineurs. Le passage de goûteur à mineur m'a paru vraiment très intéressant, c'est une idée originale ! Et bien sûr en savoir enfin un peu plus sur Philidor, le Régent et leurs fameux pouvoirs !

Deux petits points :

- "Samson n’avait plus rien dit jusqu’en fin d’après midi où, les laissant avec comme consigne absolue de rester discrets" il doit manquer une partie de cette phrase...

- l'artefact : je trouve ça dommage qu'il n'ait pas de nom particulier, ça me paraît peu vraisemblable, surtout que tu as un monde étoffé où les choses sont bien identifiées.
Cerise
Posté le 19/02/2020
Pour le passage de mineur à goûteur, j'ai vraiment essayé de creuser le développement d'une société basée sur ces cinq talents. Et de chercher, dans une société en pleine industrialisation, comment les métiers traditionnels peuvent évoluer. Voilà d'où ça vient, contente que ça tienne la route!

Pour le passage, oui tu as raison, ce n'est pas clair. Quant au mot "artefact", tu as raison aussi, je suis en ce moment même en train de lire un autre livre où ce mot est employé pour nommer des objets magiques. Il faut croire que, là, je n'ai pas fait trop preuve d'originalité. Si tu as des idées...
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