Chapitre 5 – La belle et le bête

— Les moustiques sont de bien plus grands tueurs que les requins. Même les escargots tuent plus de gens que les requins ! Alors franchement Solène, ta peur là…

— Tu as bien peur des araignées.

— Mais heu !

Brrr… pourquoi elle me parle d’araignées d’un coup comme ça Solène ? C’est pas du jeu !

Alors que j’essaye de chasser de mes pensées les diverses images de ses petites bêtes à huit pattes que je ne nommerais pas, je sens que quelque chose vient d’entrer dans mon... je ne sais pas comment l’appeler. Champ de détection ? C’est marrant, mais ça me fait comme avec le phoque, et je sais qu’il y a quelque chose pas loin alors même que je ne vois encore rien. J’adore mes ampoules de Lorenzini[1], elles sont vraiment au top !

— Dis-moi Hélios, si tu as vu un phoque, c’est que tu n’étais pas trop loin d’une côte ?

— Oui, je longeais la côte pendant que je dormais… enfin que mon requin dormait.

— Je me demande si ce n’est pas toi que je vois au loin là.

— Hein ? Sérieux ? Mais ce serait dingue de se retrouver au même endroit alors qu’il y a des milliers de kilomètres d’océan !

— Même des millions, si tu parles en kilomètres carrés, rectifie Solène.

Je l’écoute à peine, car mon esprit explose sous les possibilités : est-ce que c’est une particularité du casque magique de nous envoyer pas loin l’un de l’autre ? Est-ce que tonton avait prévu que ça se passe comme ça ? Est-ce que c’est parce que nous sommes jumeaux ?

En tous les cas, dans la réalité, mon requin est clairement en train de s’éloigner de ce qu’il vient de détecter. Ah non alors ! Si c’est vraiment Solène, je veux la voir !

Sans y réfléchir plus longtemps, j’essaye de faire reculer mon requin, mais sans y parvenir. Je l’oblige alors à se retourner pour qu’il se dirige vers la grosse forme que j’aperçois désormais au loin. Oh oui, ça m’a tout l’air d’être un animal plus gros que moi ça ! Alors, ce serait vraiment le requin-baleine de Solène ?

— Hélios ? C’est toi qui t’approches comme ça ? Arrête ! Tu me fiches la trouille !

Ah, c’est vrai que je ne suis pas censé m’approcher d’elle ! Dans mon excitation, j’ai totalement oublié ce petit détail. Mais bon, ça va, je maîtrise. Je vais juste la voir un peu et après je pars !

— T’inquiètes Solène, c’est moi qui contrôle mon requin là, je ne vais pas te manger !

— T’en sais rien ! Tu avais bien envie de me manger quand tu étais un chat !

— Mais je maîtrise mieux maintenant, t’inquiètes !

— Oui je m’inquiète ! me hurle alors Solène, m’étourdissant légèrement au passage.

Comment elle arrive à m’étourdir par simple télépathie ? Elle est vraiment trop forte ma sœur. En attendant, je ralentis ma progression, d’autant plus que mon requin semble bien mécontent du fait qu’il ne contrôle plus ses mouvements. Il est de plus en plus agité.

Je suis cependant assez proche pour pouvoir admirer le splendide requin-baleine qui se trouve devant moi. Il est tout tacheté et absolument magnifique !

— T’es trop belle Solène !

— Et toi t’es trop bête !

La réponse de Solène est un peu tremblante et c’est seulement à cet instant que je réalise qu’elle a vraiment, mais alors vraiment très peur.

— Mais… Solène ? Tu as si peur que ça des grands requins blancs ?

— Oui ! Espèce d’andouille !

— Ben fallait le dire ! Pourquoi tu ne me l’as pas dit pendant qu’on faisait nos recherches ? Je ne m’approche pas plus, t’inquiète pas.

— Arrête de me dire ça, tu m’énerves ! L’inquiétude, c’est comme la peur, ça ne se contrôle pas !

Je me sens un peu idiot tout d’un coup.

— Ok ok ! Te fâche pas comme ça ! Je laisse mon requin partir.

À peine je relâche mon emprise sur les mouvements de mon requin qu’il fait à nouveau demi-tour et s’éloigne sans demander son reste. Je me sens très nerveux, sans savoir si ce sont les sentiments de mon requin ou les miens. Sans doute un peu des deux. Je regrette de l’avoir forcé à s’approcher de Solène.

Certes, c’était génial de voir un requin-baleine comme ça, mais ça ne valait tout de même pas la peine de faire peur à tout le monde.

 

*** Informations documentaires ***

Hélios n’a pas tort, même si cela peut paraître incroyable. L’animal le plus dangereux pour l’homme est le moustique (qui peut transmettre des maladies mortelles, ce qui est terrible dans beaucoup de pays où les moustiques sont porteurs de telles maladies), avec environ 725 000 victimes par an. Et l’escargot quant à lui, fait 110 000 victimes par an.

Pas trop d’inquiétude cependant, les escargots les plus mortels sont un certain type d’escargot de mer. Malgré tout, ceux de nos jardins peuvent te transmettre des maladies, ce qui n’est tout de même pas top. Alors si tu en touches un, n’oublie pas de te laver les mains, comme après avoir touché n’importe quel animal !

Par rapport au requin, qui ne fait que 10 morts par an, l’escargot est donc 11 000 fois plus dangereux, et le moustique 72 500 fois plus dangereux. Quant à l’homme, qui est lui aussi un animal, il fait 475 000 victimes directes par an. Et il est évident que si l’on comptait les victimes indirectes ou les victimes animales, il n’y a pas photo, c’est bien l’être humain le pire prédateur sur Terre !

 

Le grand requin blanc ne peut effectivement pas reculer, mais il peut changer de direction très rapidement et est très mobile.

 

Beaucoup de personnes ont vraiment peur des requins. La mauvaise réputation des grands requins blancs vient malheureusement des films et notamment du célèbre « les dents de la mer ».

L’auteur du livre dont a été tiré le film ne s’était absolument pas renseigné sur les requins avant de l’écrire et il l’a beaucoup regretté par la suite.

 

[1] Ampoules de Lorenzini : Organes qui permettent aux requins de détecter les champs électromagnétiques.

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