Chapitre 4 - Instincts

Par Siocbo

Une large salle de pierre, maigrement éclairée par des fentes dans la bâtisse et la lueur du jour. Au fond de celle-ci, un siège de marbre macabrement orné de crânes et de symboles chamaniques. Sur ce siège sinistre régnait le plus sinistre de tous : le gobelin blanc.

Face à lui, une trentaine de créatures enveloppées d’armures se tenaient agenouillées, le visage serein tel des bambins sur le point de s’endormir sur les cuisses de leur mère. Un bien curieux renversement de situation alors qu’ils avançaient la boule au ventre il y a encore quelques minutes. Cette situation commençait pourtant à prendre son sens aux yeux flamboyants de la créature immaculée.

Tous possédaient ce visage face à lui, hormis le démon en première ligne. Ce dernier l’observait avec attention, aucune trace de crainte ne se dessinait pour autant dans son regard. Bien que sa musculature n’ait rien de particulier par rapport à un bon nombre de ses compagnons, il était très clairement le plus puissant d’entre eux, mais aussi semblait se prouver le plus sage.

 - Vous vouloir quoi à nous maintenant ?! 

S’exclama Bogibu, le chef de la tribu des gobelins qu’il avait rencontré alors qu’il venait de s’éveiller.

Malgré la véhémence manifeste du petit gobelin, sa question ne trouva que le silence pour réponse. Il était désormais certain que ces créatures métalliques ne parlaient pas le même langage qu’eux. Leur mutisme pouvait facilement s’expliquer par d’autres facteurs, comme l’indifférence manifeste des démons quant à l’existence même des petits êtres verts. Une étrange sensation pinça les entrailles du gobelin immaculé mais il n’y prêta pas plus d’attention, il avait d’ores et déjà une bonne idée du concept qui y était sous-jacent.

Alors que Bogibu s'apprêtait à prononcer de nouvelles paroles, encore plus vilaines que les précédentes, il souleva sa main immaculée pour lui signaler de ne pas continuer. Et dans un même mouvement fluide, il tendit sa main, paume vers le haut, vers le groupe de démons, leur signalant que c’était désormais leur tour.

Badoom Badoom

La confusion remplaça la sérénité ambiante. Elmunneth, quant à lui, prit une grande inspiration avant de se lancer.

 - 俺の名前はエルムネット。Je は大陸の悪魔軍 de 将軍です。Nous sommesあなたさまに会いにvenus.

Après un court instant de silence, le gobelin aux yeux flamboyants répéta son geste de la main, donnant à nouveau la parole au démon.

L’ombre de la confusion traversa le visage du général Elmunneth. Mais devant son incompréhension, il ne fit preuve d’aucune compassion, se contentant de l’inviter à nouveau à prendre la parole d’un geste de la main.

Badoom Badoom

Faute de mieux, le géant pourpre interpréta l’insistance du gobelin trônant comme il l’avait fait la première fois.

 - Mon 名前 est Elmunneth. Je suis le général des armées 悪魔軍. Nous sommes venus あなたさま rencontrer.

 - Elmunneth. Pourquoi attaque gobelins ?

Embarrassé par son temps de latence récent, il lui fallu utiliser toutes ses années d’expérience pour lui permettre de ne pas afficher l’étonnement qui le parcourait actuellement. Sa question référant le moment où il était sur le point de prendre la vie des cinq gobelins ayant déployé un piège plus tôt, il se préparait à devoir abandonner sa vie ici.

 - Il s’agit de la 結果 du piège que ce groupe de gobelins a déployé. J’ai jugé que la vie d’une de nos montures だった équivalente à ces cinq là.

 - D’après toi, votre intrusion sur territoire gobelin ne mériter pas de réaction ?

 - …

Que pouvait-il répondre à cet argument ? Ils ne s’encombraient guère de ce que pouvait bien penser les êtres misérables que sont les gobelins. Mais que se passerait-il si les gobelins étaient soudainement aussi redoutables que les humains ? Exactement, ils n’auraient jamais été aussi imprudents.

 - Mais passons. Bogibu vous demande ce que vous nous voulez.

Badoom Badoom Badoom

Sauvé par le changement de sujet proposé par l’entité immaculée, il était temps, il ne pouvait plus tenir. Et l’occasion était parfaite ! Durant tout ce temps, le cœur de l’ensemble des démons n’avait pas cessé de battre, pire encore, le tumulte était devenu encore plus chaotique ! Il se sentait sur le point d’exploser. Une sensation chaude l’emplissait et le contrôlait. Et alors qu’il arrivait à bout, comme une bouteille de champagne à laquelle on retire enfin le bouchon de liège après l’avoir secoué, la chaleur se dissipa. La brume qui couvrait son cœur laissa passer les rayons de soleil de l’évidence. Son corps criait si fort, alors pourquoi ne s’en était-il pas encore aperçu ?

À l’unisson, le groupe de militaire releva un genou en une profonde révérence dictée par leurs instincts.

 - Mon Roi ! Notre Souverain ! Nous sommes venus vous prêter allégeance !

L'aveux des démons fit trembler les murs, le sol et même le mana. Toute la création semblait frémir face à ce cri du cœur. 

Bien entendu, cela était loin des intentions originelles de l’expédition, et pourtant, cette scène semblait avoir été préméditée. Le plus étrange dans cette histoire, était que l’être immaculé semblait être accoutumé à la situation également.

 - Bien.

L’espace d’un instant, les pensées du nouveau roi s’échappèrent vers des horizons inexplorés. Lorsqu’il revint au présent, les gobelins avaient rejoint les militaires dans leur révérence. Tous observaient le sol avec ferveur en attendant de nouvelles paroles de leur dirigeant. Le corps chétif des gobelins apparaissait presque risible dans cette position. Pourtant, une beauté indéniable se dégageait de la scène.

Vroooom

Un vrombissement qui fit avoir des sueurs froides à Bogibu retentit dans la salle, lui rappelant une expérience quelque peu traumatisante. Nul ne bougea. Et bientôt, leur patience serait récompensée.

 - Elmunneth.

L’interpellé releva la tête. Ses pupilles cristallines se dilatèrent. Face à lui, son roi n’était plus un gobelin blanc. Face à lui, un être lui ressemblant se dressait. Un peu moins grand du haut de son mètre quatre-vingt-dix, son physique était également bien moins impressionnant. Et pourtant sa peau immaculée et ses yeux noirs dans lesquels dansent une flamme éclatante témoignaient d’une noblesse surnaturelle. Son armure blanche similaire à celle du général scintillait sous le maigre rayon de lumière qui peinait à faire son chemin dans la salle.

 - Parle moi du monde.

Le nouveau roi démon finit de formuler sa requête.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez