Chapitre 39 : Les Komacs

Par Ayunna
Notes de l’auteur : Bonjour les jolies Plumes
Dans ce chapitre, on découvre un nouveau peuple Orfiannais !
Bonne lecture :)

Après une bonne heure de marche sur un sable brûlant, nous atteignîmes une nouvelle oasis un peu plus importante que la précédente. Nous avions mis plus de temps que prévu en raison de l’état d’Avorian, éprouvé par toutes nos mésaventures.

Une vue paradisiaque s’offrait à nous, avec des arbres ressemblant à des palmiers et une verdure inattendue. Quelques Komacs se baignaient dans une eau limpide. Ils s’aperçurent rapidement de notre présence, posant leurs regards sur nous, déconcertés. J’en dénombrai une bonne vingtaine. Des hommes, des femmes, des enfants. Nous nous observâmes ainsi pendant plusieurs minutes, sans bouger, ni parler, intrigués par cette curieuse rencontre au beau milieu de ces terres inhospitalières.

Leurs visages harmonieux respiraient le calme, la bienveillance. Cette douce expression se mariait à merveille avec le splendide coucher de soleil qui venait nous illuminer de ses teintes ambrées. Son disque vermillon descendait au loin derrière les dunes, caressées par ses derniers rayons obliques. Le ciel teinté d’une belle couleur fuchsia se reflétait magnifiquement dans l’eau. Nous vivions là un moment suspendu, en dehors du temps.

Les Komacs portaient tous un bandeau de tissu grenat dans leurs cheveux d’ébène. Sans doute pour les préserver de la chaleur et de la transpiration. Je pris note de cette astuce, car ma longue chevelure m’avait gênée lors de nos journées de marche. Je rêvais d’un shampoing mousseux, parfumé.

Je contemplais leur peau mate, magnifiquement étincelante aux dernières lueurs du soir. Lorsque je m’extasiai à propos de cette brillance surnaturelle, Avorian m’expliqua que la présence de ces étranges paillettes dans leur épiderme servait de rempart contre les rayons du soleil. Ce n’était pas une huile ou une crème, mais la constitution même de leur anatomie.

Les habitants du désert s’habillaient de toges beiges ou pourpres. Je m’approchai lentement, et en regardant plus attentivement, je vis de fins traits noirs prolonger leurs paupières jusqu’au niveau des tempes, comme une sorte de maquillage.

Kaya alla retrouver un beau jeune homme, à quelques mètres de nous. Tout comme les autres membres de son peuple, un bandeau rouge brique maintenait ses cheveux bruns mi-longs. Après avoir échangé quelques mots avec notre sauveuse, il s’avança vers moi. Nous nous dévisageâmes un long moment. Son regard sépia, si intense, me troublait. Je me mis à rougir. Il rompit le silence pour me parler d’une voix apaisante :

– Je m’appelle Merian. C’est moi qui t’ai trouvée évanouie. Vous avez de la chance d’être vivants, les Glemsics sont redoutables.

– Merci de nous avoir sauvés. Et merci d’avoir transporté mon ami.

Avorian me rejoignit. Ses beaux yeux gris reflétaient la gratitude.

– Soyez les bienvenus chez nous, nous accueillit Merian.

Nous suivîmes nos deux guides en direction de l’oasis. Avorian m’adressa un clin d’œil doublé d’un sourire malicieux, l’air de dire : « j’ai vu combien tu semblais intimidée par ce charmant jeune homme ! ». Je lui lançai en retour un regard indigné.

Nous saluâmes respectueusement les Komacs. Ils nous répondirent par des sourires radieux, des mots réconfortants : « Nous sommes heureux d’avoir des visiteurs ! », « Vous allez pouvoir manger et vous reposer », « C’est un véritable exploit d’avoir pu échapper à une meute de Glemsics, quel courage ! », « Votre venue est une bénédiction. »

Tous parlaient l’Orfiannais, mais avec un drôle d’accent.

J’étais profondément émue par tant de bienveillance et de bonté. Je rendis grâce au ciel pour cette chance inespérée.

Kaya s’arrêta devant un gros rocher aussi haut que moi. Elle plaça une main devant elle, et comme par magie, l’énorme pierre bougea pour s’ouvrir sur un escalier qui semblait plonger dans les entrailles d’Orfianne.

– Je croyais que les Komacs ne possédaient pas de pouvoirs, chuchotai-je à l’oreille d’Avorian.

– Ils n’en ont pas, en effet. Leur magie provient d’une pierre tout à fait particulière. En revanche, comme tu as pu le constater, ces habitants du désert excellent dans l’art de soigner par des moyens naturels, en utilisant végétaux, racines et onguents.

Kaya me prit la main, Merian attrapa celle d’Avorian.

Nous descendîmes les marches taillées dans la roche, en silence. L’irrégularité de ces dernières me contraignait à bien lever les genoux, puis à amortir chaque réception avec mes pieds. Ce mouvement saccadé des jambes me fit atrocement mal au ventre. Avorian paraissait lui aussi souffrir : nous n’étions pas encore remis de notre précédente bataille. Nos hôtes, si affables, le remarquèrent tout de suite. Ils nous soutinrent en plaçant un bras autour de nous. Je m’appuyai sur Kaya pour poursuivre la descente.

Il faisait sombre. Des plantes et des champignons phosphorescents poussaient par endroit, éclairant légèrement l’allée. L’escalier se terminait là. Un chemin de pierre le remplaçait, dans une étroite galerie souterraine.

Notre sauveuse nous guidait à travers un dédale de couloirs, suivie par les autres Komacs. Nous marchâmes pendant une petite demi-heure. J’avais du mal à tenir l’allure. Kaya s’en aperçut et m’adressa un sourire maternel pour m’encourager.

Nous arrivâmes devant une porte en bois, ornementée de frises décoratives aux formes arrondies. Quelques lianes luminescentes encadraient l’entrée. Leur lueur semblait animer les enluminures. Merian dut user de ses muscles pour l’ouvrir. Nous entrâmes dans une vaste grotte d’environ soixante mètres carrés. Au plafond, une large sphère blanche irradiait dans toute la salle, à l’image d’un soleil fictif. Un procédé magique, assurément. Les Komacs présents dans cette excavation interrompirent leurs occupations pour nous accueillir. Les hommes portaient des toges beiges, tandis que celles des femmes étaient vermeilles.

– Avorian, nous ne vous espérions plus ! le salua un homme aux cheveux courts.

Il prit les mains du Guéliade dans les siennes, comme soulagé de le retrouver.

– Merian nous a rapporté qu’il vous a découverts à moitié morts ! Nous étions si inquiets ! s’alarma une jeune maman, tenant son nourrisson dans ses bras.

– Rassurez-vous, nous allons bien. Nous avons juste besoin de repos, la tranquillisa Avorian.

– Oh, nous ne devrions pas nous attrouper ainsi autour de vous, alors que vous devez être épuisés ! s’excusa une Komac coiffée d’une longue tresse. Laissons-les respirer un peu !

Une femme d’une quarantaine d’année – si l’on compte en âge Terrien, bien-sûr – accourut vers nous, les bras grands ouverts. Un sourire émerveillé illuminait son visage.

– Oh ! Avorian ! Vous nous avez tellement manqué ! s’exclama-t-elle en lui faisant une accolade.

Je plongeai mon regard dans les splendides yeux de biche d’une jolie couleur cannelle de la nouvelle arrivante.

– Shirin[1] ! Tu n’as pas changé ! affirma Avorian, les larmes aux yeux.

La dénommée Shirin avait une longue chevelure noire, épaisse, qui dégringolait en cascade sur sa robe écarlate. Sans pouvoir me l’expliquer, quelque chose en elle me paraissait familier.

– Oh, pourtant… cela fait bien au moins une douzaine de cycles, répondit-elle, les joues roses. C’est bien toi, Nêryah ?

Je me souvins des paroles d’Avorian à mon arrivée ici : les Orfiannais parlaient de « cycles » et non « d’années ».

– Oui, enchantée ! répondis-je.

– Oh… ce n’est pas possible ! Tu as tellement grandi ! s’extasia Shirin, la voix chargée d’émotion. Tu es devenue une belle jeune fille, comme je suis fière !

Je supposai qu’elle faisait partie des personnes qui m’avaient vue lors de mes précédentes venues sur Orfianne, quand j’étais enfant. D’où mon impression de la connaître.

– Merci beaucoup ! Je suis ravie de vous rencontrer. Pardonnez-moi, je ne me souviens plus très bien de mon passé ! m’excusai-je.

– C’est tout à fait normal, tu étais trop petite pour t’en rappeler ! La route a dû être éprouvante. Nous allons vous servir à boire, ajouta Shirin.

Sur ces mots, elle s’approcha d’un rocher grossièrement taillé, à gauche de l’entrée. La large cavité à l’intérieur du réceptacle indiquait qu’on l’utilisait comme fontaine. La Komac y remplit deux récipients et nous les tendit. Avorian et moi la remerciâmes en chœur. L’eau était agréablement fraîche. Je me demandais d’où elle pouvait provenir. Ce rocher faisait-il office de puits ? Il devait sans doute y avoir une source quelque part.

Exceptés quelques tables et bancs en bois, les lieux étaient vides. Pas de meubles superflus, ni d’objets décoratifs. Cet équipement sommaire attestait des conditions difficiles dans lesquelles vivaient les Komacs.

– Nos convives ont subi une attaque de Glemsics, ils ont besoin de repos et de silence, trancha Merian.

Kaya nous mena dans une petite alcôve jouxtant l’antre principal. De larges tapis et des couvertures jonchaient le sol. Quelques torches diffusaient une douce lumière dorée.

– Voici votre chambre, annonça-t-elle. J’espère que vous vous y sentirez bien.

Nous la remerciâmes.

– Vous pouvez vous laver ici, continua Kaya en désignant une ouverture masquée par un rideau pourpre. Reposez-vous bien. Je vous laisse.

– Les Komacs sont effectivement très hospitaliers, reconnus-je, une fois la jeune femme sortie.

Avorian acquiesça d’un signe de tête. Incapables de nous laver tant nous étions éreintés, nous nous allongeâmes sur les tapis moelleux. Heureusement, la baignade dans la première oasis m’avait nettoyée de mon propre sang et de celui des Glemsics. Je sombrai dans un sommeil profond sans même m’en apercevoir, abrutie par ces longues journées d’effort.

 

[1] Se prononce « Shirinne », en roulant le « r ».

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Makara
Posté le 12/02/2023
Coucou Ayunnette ! C'est un très bon chapitre ! Bien écrit et fluide ! J'aime beaucoup ce nouveau peuple !
Ahah notre chère Neryah a un petit crush :P
"« j’ai vu combien tu semblais intimidée par ce charmant jeune homme ! ». Je lui lançai en retour un regard indigné."=> lol, je déteste tellement comment certaines personnes nous capte direct XD. Pauvre Neryah :p
J'ai beaucoup aimé toutes les descriptions de ce chapitre et en particulier du peuple !
Du coup Shirinne c'est sa mère de lait ou pas du tout !
J'aime bien tes notes de bas de page, je trouve que ça donne un côté véridique au récit, comme si on devait faire nous même attention à bien prononcer les mots au cas où on rencontre le peuple.
Petite remarque :
"Je sombrai dans un sommeil profond sans même m’en apercevoir, abrutie par ces longues journées d’effort."=> terrassée plutôt qu'abrutie ? C'est un peu trop familier sinon.
A bientôt !
Ayunna
Posté le 12/02/2023
Coucou Makarette !

Ravie que tu aimes découvrir les Komacs, moi aussi j'adore ce passage dans le désert. Tout me paraît si réel, j'ai l'impression de simplement relater ce qui s'est passé :) d'où mes précisions effectivement sur les noms.

Pour "abrutie", je pensais au nom et adjectif "abruti, hébété", qui ne me semble pas familier ? Je pensais qu'on pouvait l'employer sans ce sens là, mais je peux changer :)
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