Chapitre 24 : Liana

Par Ayunna
Notes de l’auteur : Hello les petites Plumes !

Voici une réécriture de ce chapitre, en cette nouvelle année, avec une jolie scène d'action :)
Bonne lecture et un flot d'inspiration pour vos écrits !

Ayunna

Le lendemain, nous commençâmes notre journée par la répétition des exercices de préparation pour notre magie : mouvements, respiration, méditation. Je m’entraînais à ressentir l’énergie d’Orfianne, à la faire naître dans mes paumes en boules de lumières, rayons et boucliers protecteurs.

Après m’être appliquée consciencieusement, nous fîmes un brin de toilette, puis reprîmes la route. Vaste et profonde, la forêt s’étirait à perte de vue, offrant à nos regards admiratifs mille teintes luxuriantes. Les doux rayons du soleil illuminaient un paysage changeant : les arbres prenaient de la hauteur ; leur majestueuse ramure créait de larges zones d’ombres. J’observais un grand nombre de fougères arborescentes, donnant une teinte tropicale à cette nature enchanteresse. De petites fleurs violettes tapissaient le chemin ; à chaque pas j’humais leur délicat parfum. J’écoutais le chant des oiseaux ; leurs mélodies cristallines m’aidaient à progresser de longues heures sans me reposer.

Orfianne ressemblait vraiment à notre planète, tant par sa faune que par sa flore, mais en plus prospère. « Une version 2.0 de la Terre », aurait dit mon amie Chloé. Imaginer cette remarque me laissa un goût amer dans la bouche. Je ne pouvais plus revenir dans mon monde. Ni revoir mes proches, qui ne se souvenaient même plus de mon existence. Je levai le menton avec rancœur, ravalant mes larmes.

Chemin faisant, je remarquai une très belle fleur rouge. Son effluve enivrait mes narines. Soudain, ses pétales remuèrent. Intriguée, je me dirigeai vers elle.

– Oh ! m’exclamai-je en regardant le mage. Il y a une fée dans cette fleur !

– Les fées adorent s’y prélasser, répondit-il en s’approchant de moi. Elles se nourrissent principalement de bourgeons, mais aussi de pollen.

Un peu comme les abeilles, sur Terre, réalisai-je.

D’ailleurs, je n’avais pas encore vu de mouches depuis mon arrivée sur Orfianne. Je pariais que dans ce monde paradisiaque, les moustiques n’existaient pas, et supposais que les fées, les papillons, remplaçaient le rôle des abeilles en répandant du pollen lors de leur envol. Peut-être fabriquaient-ils également du miel ? J’aimais tellement ce divin nectar !

– Pouvez-vous me parler du cycle de vos saisons ?

– La démarcation des saisons est moins flagrante que sur Terre. Cette région équatoriale offre un printemps continuel, tandis que l’hiver règne éternellement dans les royaumes du nord. Les déserts, quant à eux, ne connaissent presque pas la saveur de la pluie.

La fée bondit promptement de la fleur, me considérant avec des yeux ronds. Son apparence se confondait avec l’environnement : sa peau vert-pâle rappelait la couleur de la tige, et sa robe rouge, les pétales. Avec ce camouflage, on pouvait s’y méprendre et cueillir l’enchanteresse au lieu de la fleur.

– Qui es-tu ? me demanda-t-elle d’une petite voix stridente.

– Nêryah.

– Nêryah de la Terre ? Tu es enfin de retour ! Je m’appelle Liana. Sois la bienvenue sur Orfianne !

J’allais répondre « merci », lorsqu’Avorian m’interrompit :

–  Nous devons poursuivre notre route, Arianna nous attend !

– Je vous y rejoindrai plus tard ! lança la fée.

Après une petite demi-heure de marche, nous arrivâmes au bord d’une étendue d’eau. Je remarquai au loin, en face de nous, des animaux ressemblant en tout point à des biches, avec pour seule différence, leur pelage un peu plus clair et luisant. J’en fis part à Avorian. Le troupeau dut nous apercevoir : tous braquèrent le museau en notre direction. Quelques minutes plus tard, chacun vaquait de nouveau à ses occupations – c’est-à-dire boire et paître –, pas le moins du monde apeuré.

Pendant que mon compagnon de route cherchait des fruits pour regarnir nos sacs de provisions, j’allai me baigner tout en les étudiant, prenant soin de ralentir mes gestes pour ne pas les effrayer. L’eau fraîche apaisa la fatigue de mes muscles endoloris. Je nageais lentement, profitant de cet instant de répit, émerveillée par la grâce des biches. Je laissais une belle distance entre elles et moi pour respecter leur espace vital. Elles n’approchaient pas.

Soudain, elles détalèrent, manifestement apeurées par quelque chose. J’aperçus au loin ce qui les menaçait : des masses sombres, très nombreuses ! Elles ne possédaient pas de forme précise, à l’image de la tourmente humaine. Leur corps éthéré, coloré d’un voile noir, se déplaçait à la manière d’un fantôme, flottant au-dessus du sol.

Je n’eus le temps de prévenir Avorian, au risque de nous faire entendre. Piégée au milieu du lac, je pris une profonde inspiration et plongeai immédiatement la tête sous l’eau, priant pouvoir tenir le plus longtemps possible en apnée. Je ne pouvais pas nager, ni rejoindre notre campement, les êtres des ombres me repéreraient. La panique me gagna : j’étais nue, immergée sous l’eau, le souffle bloqué. Totalement vulnérable. Sans mon ami pour me protéger. Je ne tenais plus. Il fallait que je respire ! Mon cœur battait à tout rompre. Les êtres des ombres se trouvaient-ils à présent proches de moi ? Pouvaient-ils flotter au-dessus du lac ?

Je sortis la tête de l’eau, à court d’air.

Je guettais partout autour de moi, l’angoisse au ventre. Je ne vis aucune masse ténébreuse. Pas d’animaux non plus. J’atteignis enfin la rive en quelques mouvements de brasse, harassée. À peine arrivée sur la terre ferme, je sursautai à la vue d’Avorian qui revenait de sa cueillette à pas feutrés, sans un bruit, les bras chargés de fruits. Je trouvai la scène particulièrement saugrenue. Quel contraste saisissant avec ce que je venais de vivre ! Il déposa nos provisions à côté de mon sac.

– Ils sont partis, me souffla-t-il en me tendant ma serviette.

Trop anxieuse pour me rendre compte de ma nudité, je le rejoignis, soulagée de le voir. Je m’enroulai dans le tissu soyeux, tremblant de tout mon corps, les cheveux dégoulinants. Avorian tendit ses bras vers moi, et me serra fort contre lui, autant pour me réchauffer que pour me réconforter. J’enfouis ma tête dans les pans de son kimono, respirant fort pour expulser ma peur et inspirer sa puissance.

– Tu as eu le bon réflexe, Nêryah, je suis fier de toi.

– Je… je croyais que les êtres des ombres ne pouvaient pas pénétrer le domaine des fées !

– Je le pensais également…

Le mage détourna les yeux, le visage grave. Confuse, je quittai son étreinte et m’empressai de me rhabiller.

Nous déjeunâmes en silence, à l’affût du moindre bruit, puis reprîmes la marche à pas furtifs.

En milieu d’après-midi, Avorian s’arrêta un instant pour m’annoncer :

– Nous approchons du village des fées.

– Enfin ! m’exclamai-je.

Mais à peine avais-je exprimé mon soulagement que nous entendîmes un cri. Une petite voix féminine, qui semblait appeler à l’aide. Nous nous lançâmes un bref regard, puis Avorian me prit la main pour m’entraîner dans une course effrénée, au milieu des bois. J’entendis le son de déflagrations, comme une sorte de feu d’artifice. Je serrai les dents, de plus en plus effrayée. J’aperçus à quelques mètres de nous des éclairs colorés, mêlés à des bruits de combats.

Mon dieu !

Je voyais à présent la petite fée verte, de tout à l’heure, aux prises avec une vingtaine de ces créatures sombres qui m’étaient apparues au bord du lac. Des jets d’un noir abyssal fusaient de partout, cherchant à atteindre la pauvre Liana, seule contre tous. Nous stoppâmes d’un coup notre sprint. Avorian matérialisa un bouclier autour de lui en un clin d’œil. Je me concentrai pour en faire de même. Cette fois-ci, ma volonté de porter secours à la jolie déesse me donna des ailes.

Ma sphère protectrice se forma autour de moi, tandis que le mage usait de son faisceau lumineux pour repousser nos assaillants. Je propulsai mes globes bleutés, qui traversèrent les êtres des ombres sans pour autant leur causer le moindre dommage. Peine perdue ! Mon pouvoir se révélait futile face à ces véritables fantômes. Avorian, quant à lui, faisait bien plus de ravages que moi avec le sien : cinq esprits venaient de succomber à son rayon lumineux.

Les autres ripostèrent en se transformant en une véritable marée de nuages obscurs. Un épais brouillard s’étirait devant nous, jusqu’à nous envelopper. Je n’y voyais plus rien. Mon bouclier semblait parfaitement me protéger, mais je me sentis soudainement abattue, accablée. Je ressentais toute la noirceur des pensées négatives des humains, leur désolation, leur culpabilité ; toutes leurs émotions refoulées.

Cette douleur oppressante me saisit à la gorge, au point de m’étrangler. Je suffoquais, prise de spasmes, étouffée par le poids de la noirceur humaine. Mes yeux ne s’habituaient pas à cette brume. Mes forces m’abandonnaient. Je réalisai pleinement l’ampleur du pouvoir des êtres des ombres ; créatures nées d’une détresse sans fin.

Soudain, notre alliée se mit à entonner un chant cristallin. Son aura verte se déploya autour d’elle sur une large zone, dispersant cette nuée, tout en englobant nos ennemis. Leurs corps éthérés se dissipèrent peu à peu, jusqu’à se fondre dans la lumière. Grâce à notre diversion, la fée avait gagné ! Mon ami s’occupa des derniers survivants en élargissant son ruban scintillant, fouettant ces fantômes des ténèbres. Je fus impressionnée par la rapidité et l’efficacité de leur intervention à tous les deux.

Une fois le danger écarté, nous fîmes disparaître nos boucliers respectifs.

– Je vous dois la vie. Je serai votre guide et votre alliée, prononça Liana sans autre discours.

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Feydra
Posté le 05/02/2023
L'évocation du royaume des fées (chapitres 23 et 24) est vraiment très réussi. Le calme des descriptions forme un contraste avec la scène de l'attaque des ombres. Je me demande d'ailleurs si ces deux chapitres ne devrais pas en former un seul.

J'aime bien ta description des ombres, comme étant les manifestations des rancœurs et de la détresse des humains. D'ailleurs le portrait des humains est extrêmement négatif dans ton roman. :)

Je pense que tu peux améliorer la scène où elle se trouve sous l'eau : j'ai eu l'impression qu'il manquait quelques détails pour rendre l'enchainement des actions plus fluide.

Le combat m'a aussi paru un peu rapide, surtout quand tu dis que les ombres sont très nombreuses. Et pourquoi Lianna n'utilise pas son pouvoir si puissant pour se débarrasser des ombres dès le départ ?
Ayunna
Posté le 06/02/2023
Coucou Feydra !

Ravie que tu sois de retour sur Orfianne, tu m'as manquée :)
Merci pour tes suggestions, toujours aussi précieuses et justes

Je vais essayer de rendre ça plus clair :)

A très vite
Ayunna
Posté le 06/02/2023
Voilà, j'ai modifié la scène et précisé que c'est la diversion opérée par Nêryah et Avorian qui ont pu permettre à la fée d'utiliser son pouvoir (elle était assailli de toute part) par contre effectivement le pouvoir de Nêryah, ses sphères sont inefficaces contre les ombres : elles les traversent comme des fantômes mais ne leur fait rien.
En espérant que ce soit plus clair ainsi :)
Makara
Posté le 18/12/2022
Recoucou !
Le royaume des fées a l'air bien mystérieux ! Et ces ombres qui ne devraient pas être là encore plus ! De très belles descriptions dans ce chapitre, je m'y voyais !

J'ai relu mon com de la page précédente et après quelques semaines de recul, je pense comprendre ce qui me turlupine dans ton histoire. Je pense que ce qu'il te manque c'est un enjeu personnel pour ton héroïne. Il y a un enjeu "sauver le monde d'orfianne et la Terre" mais pas d'enjeu personnel. Je pense que l'on suivrait avec plus d'attentions le parcours de ton héroïne si elle avait un enjeu personnel (retrouver ses parents biologiques, un objet qui lui permettrait de rentrer, une personne qu'elle voudrait sauver) bref, quelque chose d'important qui rende sa quête initiatique avant tout une quête personnelle. Si tu trouves cet élément, je pense que tu donnerais un vrai dynamisme à cette première partie de roman et on se sentirait plus proche d'elle.
Imagine, Avorian lui dit dès le début, que ses parents sont en vie quelque part mais il ne sait pas où, alors elle se sentirait obligée de rester avec lui dans l'espoir de les retrouver. Le lecteur comprendrait pourquoi elle reste avec lui (parce qu'à ce stade, si je me mets à sa place, je ne suis pas convaincue de rester même si le monde est magnifique, mon ancienne vie me manquerait trop). Tu vois ce que je veux dire ?
Bref, sinon, en ce qui concerne ce chapitre, il est très bien. J'ai hâte d'en apprendre plus sur les fées.

Pleins de bisous volants
Ayunna
Posté le 18/12/2022
Coucou !

Merci pour ta lecture et pour ton ressenti, j'y réfléchis. Dès le départ Avorian explique à Nêryah que ses parents biologiques sont morts, sur ce point je ne peux pas utiliser l'éventuelle recherche de ses parents du coup. Mais comme elle vient d'Orfianne, pour moi ça me semble pas aussi bizarre qu'elle souhaite découvrir son monde et s'y sente chez elle au bout d'un moment. J'ai mis l'accent sur sa sensibilité et sa volonté d'aider les Orfiannais. Et sur le fait qu'elle ne puisse pas retourner sur Terre, à cause du transgéneur. Mais je vais voir si une idée me vient pour cet élément qui lui donnerait cet enjeu personnel dont tu parles.
Merci !

Une pluie de flocons argentés pour t'inspirer ;)
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