Chapitre 23 : Taupes

Par Taranee

La voiture toussote, avance par à-coups et finalement s'arrête définitivement. Je lâche un juron. L'essence. On aurait dû y penser ! Je jette un regard aux alentours. Nous sommes... Au beau milieu d'une forêt. Sans véhicule, sans réseau pour appeler quelqu'un, sans provisions. Nous avons roulé sans nous arrêté jusqu'à l'aube, nous avons réussi à quitter la ville et sommes entrés dans cette forêt. Mais c'est ici que s'arrête notre aventure avec ce véhicule. J'ouvre la portière et je sors, pleine de courbature. Chaque parcelle de mon corps me tire, je grimace et je manque de perdre l'équilibre lorsque j'essaie de marcher. J'ai mal au fesses à force d'être assise sur la banquette inconfortable. Derrière moi, j'entends Yann soupirer de découragement. Nous ne pouvons pas nous permettre de faire demi-tours. Nous allons donc devoir avancer à pieds le long de la route. En espérant que la forêt n'est pas trop grande, que nous n'allons pas être attaqués ni rattrapés par le gang, qu'on ne mourra pas de faim ou de froid. A cette pensée, le désespoir m'envahit. Erica me donne une tape conciliante sur l'épaule :

- Allez ! s'exclame-t-elle avec optimisme : Au moins, nous ne sommes pas perdus ! Avec un peu de chance, on va sortir de cette forêt et on pourra rentrer à l'école !

- Il va nous falloir plus qu'une peu de chance pour rentrer à l'école. réplique Yann.

- De toute façon, il était temps de faire une pause. On va s'arrêter une heure ou deux, le temps d'examiner le dossier de Mr. Leroy et de discuter de la suite. intervient Illiam.

Le dossier ! J'avais oublié avec tout ça ! Je cours le chercher dans la voiture. Quand je reviens, mes camarades se sont assis pas très loin de la route cahoteuse, sur deux vieilles souches d'arbres, vestiges d'une tempête sûrement... Je les rejoint et m'assois à côté d'Erica avant d'ouvir le dossier. A ce moment, le vent se met à souffler, les feuilles manquent de s'envoler.

- Bon... On va retourner dans la voiture pour l'instant... Histoire d'examiner le dossier... Ce sera plus prudent que de rester à la merci du vent. décide Illiam.

J'acquièsce et je vais m'installer à l'avant du véhicule avec Erica tandis que les garçons se penchent par dessus les sièges conducteur et passager pour lire avec nous.

    Le dossier contient des informations sur Mr. Leroy, un rapport de filature, un ordre de mission et une lettre. Je me saisis de la lettre et commence à la lire dans ma tête, sachant que les autres font de même.

 

Pawel,

Les représentants de la guilde unifiée des assassins commencent à avoir des doutes quant à ma présence parmis eux. Charles Leroy en particulier semble avoir deviné que mes intentions envers le conseil n'était pas des plus nobles. Hier encore, il m'a tenu un discours bien étrange sur l'importance de la confiance et de la loyauté au sein d'une guilde. J'ai essayé de l'interroger pour voir s'il savait quelque chose sans succès. L'étau se resserre, je devrai bientôt faire tomber mon masque si Leroy persiste à me soupçonner. D'autant plus que la guilde nest pas la seule à être à nos trousses. Il semblerait que les perce-ombres, eux aussi, aient conclu que s'emparer du conseil leur permettrait d'atteindre leur objectif. Mais comme vous le savez, les perce-ombres ne sont pas enclins à partager leur pouvoir. Dois-je démissioner de mon poste ?

 

J'ai beau chercher un indice du regard, quelque chose qui pourrait me permettre de savoir qui a envoyé cette lettre, il n'y a rien. Je retourne la feuille et j'y découvre une deuxième lettre. Une phrase écrite à la hâte plutôt.

 

Ne démissionez pas, Jors, éliminez les éléments problématiques.

 

- Ben merde alors ! s'exclame Yann quand nous avons terminé de lire : On dirait qu'il y a une taupe au conseil !

- Et pas qu'une ! Visiblement, les perce-ombres ont aussi des infiltrés ! réplique Erica.

Illiam semble pensif. Le regard dans le vague, il se caresse les dents avec sa langue tout en jouant avec le fil de sa lame. Soudain, il revient à la réalité :

- Jors ! Je sais où j'ai entendu ce nom !

- C'est le prénom d'un des conseillers sûrement. dit Yann.

- Exactement : Jors Crow. Le bras droit du représentant principal.

- Magnifique ! Il fallait que la taupe soit proche du représentant principal ! C'est sûr que ça va nous faciliter la tâche ! dis-je avec sarcasme.

- La tâche ? Quelle tâche ? demande Yann.

- A ton avis ?! Il faut empêcher ce meurtre ! Vu ce qu'on vient de lire, Mr. Leroy risque de mourir prochainement. Tu vas pas me dire que tu veux qu'on fasse semblant de rien ! Il faut au moins le prévenir ! Et si on peut, découvrir la taupe des perce-ombres !

- Ce serait plus sûr de remettre cette affaire aux mains de la brogade des assassins enquêteurs Gwenaëlle.

- Juste pour que tu te rappelles : Nous avons été kidnappés par un membre de la brigade. Cette organisation semble avoir des taupes partout. On ne peut compter que sur nous-mêmes...

- Et c'est quoi ton plan ? intervient Illiam.

- Je ne sais pas. Sortir de cette forêt déjà. Trouver du réseau et aller chercher de l'aide.

Illiam soupire comme s'il trouvait mon idée stupide mais je lui fais comprendre par un regard qu'on a pas grand chose de mieux à faire.

- Bien. dit-il : Alors en route maintenant.

    Nous sortons de la voiture. Le soleil est complètement levé maintenant, il innonde la forêt d'une lumière châleureuse. Les arbres qui semblaient menaçants deviennent rassurants. Les oiseaux chantent. La route s'étend devant nous. Nous nous mettons en route. Et bientôt, nous nous trouvons à l'orée du bois. J'examine un à un mes compagnons. Tous en sueur, les vêtements âbimés, quelques blessures et des cernes aussi grandes que l'Océan Pacifique, nous avons des allures de cadavres ambulants. Il manquerait plus qu'on déclare notre mort pour qu'on devienne des zombies. Cette pensée me fait sourire. On va paraître plutô suspects en ville. Après tout, quatre adolescents qui débarquent comme s'ils revenaient d'une île déserte avec des armes sur eux et un complot sur les bras, ça ne court pas les rues. Je renverse la tête en arrière pour profiter d'un rayon de soleil. Nous nous remettons à marcher. La ville n'est plus très loin, un kilomètre tout au plus. Je vois là un espoir de remplir enfin mon ventre vide.

    Quand nous arrivons enfin en ville, les gens s'écartent sur notre passage, nous adressant des regards mi-surpris mi-dégoûtés. Nous finissons par trouver un billet par terre (un miracle ? La chance nous sourit-elle enfin ?) qui nous permet de nous acheter quatre sandwichs. Rassasiés, nous décidons d'aller nous réfugier à l'ombre d'une impasse afin de ne pas trop attirer l'attention. Erica allume son téléphonne pour nous géolocaliser. Soudain, une voix retentit derrière nous.

- Illiam ? C'est toi ?

Nous nous retournons brusquement pour faire face à la personne qui a interpellé mon ami.

    C'est un homme d'une quarantaine d'années. Il doit faire un bon mètre quatre-vingt. Sa peau est métissée, ses yeux gris clairs ressortent en dessous de ses longues mèches brunes nouées en un chignon truffé d'épis. L'homme porte des vêtements simples, passe-partout. Une chemise noireun pantalon en jean et un manteau beige qui s'arrête au niveau des genoux. Il semble épuisé, comme s'il s'était inquiété. Il porte des lunettes rectangulaires qui le font ressembler à un "premier de la classe". Et pourtant, il y a cette lueur dans son regard, ce sourire au coin des lèvres... Je le reconnais avant même qu'Illiam ne confirme son identité :

- Papa ?

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Fanny
Posté le 02/05/2021
Ouf un peu de repos, enfin pas tant que ça en fait, ils sont increuvables ma parole. L' adrénaline ça maintient éveillé mais quand ils ont fini de se battre, ils ne sont pas épuisés ? Une petite pause bienvenue pour lire la lettre, pas d'infos dans les autres documents ? Dommage. C'est intéressant mais je suis épuisée rien qu'à lire leurs aventures ^^
Taranee
Posté le 02/05/2021
Oui, je comprends, Voltage, ci-dessous, m'avait fait remarquer qu'il se passait trop de choses trop vite... Alors j'ai ralenti un peu... A ce rythme là, c'est vrai qu'à leur place je serais morte de fatigue !!!
Voltage
Posté le 25/04/2021
"Avec des cernes aussi grandes que l'Océan Pacifique" Tu m'a tuée haha

Je ne vais pas refaire de commentaire concernant la vitesse avec laquelle les évènements s'enchaînent, mais parfois, tu oublies la situation actuelle des personnages pour enchaîner directement sur une autre intrigue. Par exemple : Ils sont épuisés perdus, blessés, fatigués...Gwenaëlle se rappelle qu'elle possède une lettre importante...et...une autre intrigue s'enchaîne, la situation se rétablit tout de suite, ce qui est assez bizarre.
C'est un chapitre qui fait plutôt transition avec ce qui va suivre dont je n'ai pas grand chose à dire.
Néanmoins, le père d'Illiam est super bien décrit et j'ai hâte d'avoir plus de scènes avec lui ^^
Taranee
Posté le 25/04/2021
Oui, je me souviens de ton dernier commentaire sur l'enchaînement des intrigues... J'ai essayé d'en tenir compte... Dans mon tout dernier chapitre, tu verras que les héros ont un peu de repos... Bien que les aventures reprennent presque immédiatement... On dirait que ma nature impatiente ressort dans mon écriture ! ^^'
Merci de faire des critiques car c'est aussi ça qui me permet d'améliorer mon histoire !
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