Malika ayant pour mission de surveiller l'Europe, Temülün choisit de découvrir le christianisme, dont elle ignorait tout, se concentrant au départ sur l'Italie. Elle apprit les pensées, les prières, les Saints. Elle découvrit de nouveaux mots : monothéisme, païens, foi, messie, bible, baptême, communion, église, cathédrale, pape, curé, prêtre, nonne, couvent mais également démon, sorcière, magicien, loup-garou, Vampire. La définition de ce dernier terme piqua sa curiosité. Elle découvrit avec stupeur que des légendes, des contes, des histoires racontaient l'existence de créatures immortelles buveuses de sang.
Temülün commença de profondes recherches, fouillant partout, lisant un maximum d'ouvrages, écoutant des raconteurs, parcourant les routes de villages en villages. Dans un livre, elle recueillit toutes les informations ainsi récoltées. Certaines dataient de millénaires, transmises de générations en générations, tellement proches de la réalité qu'il ne pouvait s'agir que de rencontres réelles avec des Aar. D'autres se montraient totalement irrationnelles et irréelles, probablement tirées d'esprits imaginatifs ou drogués. Certaines encore se trouvèrent liées à des croyances aisément explicables avec des connaissances médicales inaccessibles au bas peuple.
Dans son carnet, Temülün recueillit l'intégralité des croyances, puis sur un parchemin plus grand plié en quatre, elle réalisa une carte mentale avec au centre le mot Vampire, dans le cercle le plus proche les croyances les plus répandues. Plus on s'éloignait du centre et plus les informations apparaissaient rarement. Parmi ces pensées, Temülün écrivaient en rouge celles qui correspondaient à la réalité.
Elle ne craignait pas d'oublier ces connaissances car sa mémoire parfaite lui offrait des souvenirs sans faille. Si elles les écrivaient, c'était afin de les transmettre plus rapidement si un jour le besoin s'en faisait sentir. De plus, elle pouvait passer des heures à méditer devant la carte des croyances, cherchant à lire en elle, à décrypter la solution qui lui échappait.
Sous l'identité de Caroline Tryoma, Temülün devint une experte reconnue en vampirisme. Elle se rendait sur tous les lieux où une découverte avait été faite, pour observer des corps totalement humains dans lesquels des pieux avaient été enfichés sans raison rationnelle, ou bien des humains ayant consommé des drogues souvent à leur insu et pensant sincèrement être des créatures surnaturelles avides de sang humain.
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Temülün étudiait un ouvrage ancien dans une bibliothèque du Vatican lorsqu’un homme essoufflé entra dans l'édifice et courut vers elle. Le calme en ce lieu était de rigueur alors l'information devait être de première importance pour qu'il se permette un tel comportement.
- Madame Tryoma, une missive d'Espagne ! s'exclama l'homme sans baisser la voix, se faisant ainsi attirer des "chut" d'un peu partout, auxquels il ne prêta aucune attention.
- Que se passe-t-il ? lança Temülün en chuchotant tout en montrant sa curiosité.
- Nos chasseurs de Vampires sur place se disent débordés ! Ils annoncent avoir tué une vingtaine de Vampires et des rapports du même ordre nous parviennent d'un peu partout en Espagne et au Portugal !
Temülün se leva brutalement, attrapa les documents, les parcourut rapidement avant de devoir se rendre à l'évidence : tous les rapports indiquaient la présence de nombreux Vampires dans le sud-ouest de l'Europe.
- Je m'y rends immédiatement, annonça Temülün avant de sortir rapidement de la bibliothèque.
Elle s'y rendit en vitesse surnaturelle. Certes, cela la rendait vulnérable car rompait son invisibilité mais la menace, si elle était réelle, était trop grave. Sa réaction avait été la bonne car sur place, les rues sombres et les caves pullulaient de Vampires incapables de se contrôler. Les humains s'en donnaient à cœur joie à coup de pieux dans le cœur et devenaient chaque seconde un peu meilleurs au jeu du chat et de la souris.
Temülün était anéantie. Comment cela avait-il pu se produire ? D'où venaient ces Vampires ? Elle remonta rapidement la trace en discutant avec les chasseurs de Vampires. Très respectée au sein de leur communauté, elle put en seulement un mois découvrir leur origine. Elle prit immédiatement sa décision : il fallait réagir, et vite. Elle demanda la réunion extraordinaire d'un conseil des Aar. Ça serait sa première rencontre avec eux mais elle n’avait pas peur. Elle se sentait prête. Et puis, ils seraient bien plus occupés à écouter ses informations qu’à la scruter.
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- Que faites-vous là ? s'exclama Paul en voyant débarquer chez lui les siens.
- Mal a demandé la tenue d'un conseil extraordinaire, indiqua Baptiste.
- Ça ne pouvait pas attendre ? commença Paul.
- Non, le coupa Temülün sous l'identité de Malika. C'est plus qu'urgent !
Paul grimaça sous l'insulte qu'il venait de recevoir. Il commandait. Malika, la plus jeune présente, n'avait pas à lui couper ainsi la parole. Il grogna puis lança :
- Il manque Chris.
- Nous n'avons pas le temps de l'attendre, indiqua Temülün. Le temps presse. Il n'a pas répondu à l'appel, tant pis. Le premier qui le voit lui transmettra les informations.
- Non, gronda Paul. C'est notre frère et nous devons lui offrir la possibilité d'être présent.
Temülün soupira. Elle savait que Chris ne viendrait pas, puisqu'il était auprès de Malika, au sanctuaire, mais ne pouvait pas transmettre cette information. Il fallait qu'elle parvienne à les convaincre de faire cette réunion sans lui.
- Chris est un électron libre. Il vient quand ça lui chante, intervint David. Si nous devons l'attendre, alors l'information urgente de Malika aura le temps d'être périmée. Regarde-la. Elle est dans tous ses états. Moi, je suis pour qu'on parle sans lui.
Temülün se sentit observée. Tous les regards étaient tournés vers elle. Pour la première fois, les Aar la scrutaient vraiment. Le moment fatidique dura de longues secondes puis Paul soupira. Temülün avait réussi le test. Ils la prenaient tous pour Malika. C'était gagné.
- D'accord, dis-nous ton information, maugréa l'aîné des quatre frères.
- Des milliers de Vampires ont envahi le sud de l'Europe. J'ai fait mon enquête et…
- Vampires ? répéta Paul. Qu'est-ce que c'est ?
Temülün soupira. Elle avait oublié qu'elle-même ne connaissait ce terme que depuis peu.
- C'est ainsi que les humains nous nomment, les Aar. Ils disent "Vampire".
- Des Vampires dévorent l'Europe ? s'écria Paul. Comment as-tu pu être aussi négligente ? Tu as transformé sans autorisation et sans suivi ?
- Bien sûr que non ! s'exclama Temülün, indignée qu'on puisse croire cela d'elle.
Elle n'était pas au contrôle depuis longtemps, certes, mais elle se maîtrisait parfaitement. Elle avait la plus rapide de toutes et en était très fière. Qu’il puisse la soupçonner la mettait hors d’elle.
- Alors d'où viennent-ils ? hurla Paul qui ne se contenait plus.
- J'ai fait mon enquête et il s'avère qu'ils sont arrivés par bateau depuis le nouveau monde.
- Le nouveau monde ? répéta Caly.
Temülün se demanda un instant si sa manière de parler, très étrangère aux Aar, ne risquait pas de la trahir puis elle se souvint qu'elle n'avait appris ces mots que peu de temps auparavant et qu'il en aurait été de même pour Malika. Elle se détendit et décida de continuer.
- Un explorateur a voulu rallier l'Inde depuis le Portugal en traversant l'océan. Il a atteint une terre encore inexplorée que les humains ont baptisé le nouveau monde. Il y a des humains là-bas…
- Et des Vampires, comprit Baptiste alors que Paul marchait en tous sens tout en râlant.
- Comment l'existence d'un continent entier a-t-elle pu nous échapper ? lança David.
- D'où viennent ces Vampires ? Qui les a créés? murmura Caly.
- Il faut agir rapidement, dit Temülün, inquiète.
Tous se tournèrent vers Paul, l'aîné, qui ruminait toujours, lançant des insultes et courant en tous sens sans raison.
- Où est Chris ? hurla Paul. Jamais là quand on a besoin de lui, murmura-t-il davantage pour lui-même. Il faut… Il faut… Allez surveiller la situation en Europe. Je reviendrai vers vous dès que j'aurai trouvé. J'ai besoin d'être seul pour réfléchir.
Tous se regardèrent puis disparurent, suivant Temülün jusqu'au sud de la France.
- Ils avancent doucement, découvrant les territoires avec prudence mais assurance, leur expliqua Temülün.
- Quand ils constateront que nul n'oppose de résistance, cela s'accélérera, prédit Oumou.
- Il faut les contrer maintenant, indiqua Kol le guerrier. Si on attend trop, ils seront partout et alors nous ne pourrons plus rien faire.
- Ils sont déjà partout, fit remarquer Caly. Deux pays entiers sont envahis, sans compter ce continent là-bas, de l'autre côté de l'océan. C'est terrifiant !
- Il faut attaquer immédiatement, répéta Kol.
- Tu ne feras rien sans la permission de Paul, gronda Baptiste. C'est notre aîné et nous devons lui obéir.
- Paul est incapable de décider, cracha Kol. Il rumine dans son coin et attend Chris qui, visiblement, ne vient pas. Il faut…
Temülün s'éloigna, laissant les Aar se disputer. Elle venait de comprendre et sa peine était immense. Elle s'en voulait terriblement. Après s'être assurée qu'aucun des Aar ne la suivait, elle se rendit à vitesse surhumaine à un point précis de la muraille de Chine et y déposa un pot en argile, avant de revenir dans son dernier logement en Espagne. Elle venait à peine d'arriver qu'elle entendit :
- Tu as demandé une entrevue ?
Elle sursauta de frayeur. L'intrus n'avait pas été repéré par ses pouvoirs. Lorsqu'elle reconnut l'importun, elle sourit. Contre lui, elle n'avait aucune chance.
- Chris ? Je pensais que la mère éternelle viendrait. Je pensais devoir argumenter pour pouvoir te voir. C'est… Je suis très heureuse de ta présence.
- Tu voulais me voir ? répéta Chris, apparemment surpris.
- Bien sûr, tu commandes, répondit Temülün en insistant sur le "tu".
Chris cilla puis reprit une attitude neutre.
- Tu l'imites très bien, admit-il.
- Je te remercie. Tes frères s'y sont laissés prendre.
- Tu les as vus ?
Temülün soupira et baissa le regard.
- Je m'en veux tellement. J'aurais dû venir vers toi immédiatement. J'étais prise dans mon rôle. Je me suis tournée vers eux alors que j'aurais dû…
- Que se passe-t-il ? demanda-t-il.
- Regarde dehors, indiqua-t-elle en désignant une fenêtre.
Depuis l'étage, on voyait la rue. Pour n'importe qui, cela aurait signifié le néant car à cette heure avancée d'une nuit sans lune et nuageuse, on ne voyait rien mais pour Chris, il faisait plein jour. Son visage changea du tout au tout. Il resta cependant calme et stoïque, tout le contraire de la boule de nerfs et de fureur de Paul.
- Depuis quand ?
- À ma connaissance, deux ans, indiqua Temülün.
- Où est la source ?
- Sur le nouveau monde, un continent à l'ouest découvert lors d'une expédition visant à rallier les Indes depuis le Portugal.
- Comment réagissent les Aar ?
- Paul hurle, crie, remue du vent et t’appelle.
- Moi ? s'exclama Chris, abasourdi.
Temülün hocha la tête.
- Que dois-je faire ?
- Paul ne devrait pas tarder à revenir. Il demandera des volontaires pour se rendre sur ce nouveau monde et enquêter. Tu te proposeras.
- Comme tu veux, répondit Temülün que ce voyage n'enchantait pas le moins du monde.
Visiter des terres inconnues peuplées de Vampires nombreux et menaçants ne l'attirait pas du tout.
- Tu n'as pas l'air d'apprécier, fit remarquer Chris.
- Non, mais tu commandes. J'obéis.
- Je n'ai pas l'habitude, maugréa Chris.
- J'en suis désolée pour toi, répondit sincèrement Temülün.
- Tu fais tes rapports à Paul. Tu lui obéis. Je viendrai récupérer tes informations quand bon me semblera.
- Tout en enquêtant de ton côté.
- Cela va sans dire, confirma Chris en souriant. Qu'est-ce que c'est ?
Temülün suivit son regard pour tomber sur sa carte mentale des croyances. Elle expliqua tout au premier Aar. Une fois sa conférence terminée, Chris annonça :
- C'est très intéressant. Je prends ce document et je t'interdis d'en écrire un autre ou de transmettre l'intégralité de ces informations aux Aar. Le centre suffit bien largement. En attendant que Paul prenne sa décision, ce qui prendra plusieurs années, je t'ordonne ici, en Europe, de conforter les chasseurs de Vampires dans leurs croyances centrales erronées.
- Je ne comprends pas, avoua Temülün.
- Je veux par exemple qu'ils voient de l'eau bénite brûler la peau d'un Vampire. Je veux qu'un témoin affirme qu'un Vampire a été bloqué à l'entrée de sa demeure où il n'avait pas été invité à entrer, ou toute autre idiotie du même genre. Tu fais le spectacle et tu incites les autres Aar à faire de même. Cela diminuera les forces de nos ennemis humains en les embrouillant.
Temülün hocha la tête. Elle trouvait cela brillant. Chris disparut brutalement, la carte des croyances avec lui et les Aar apparurent à sa place. Avec subtilité, elle parvint à leur faire jouer le jeu et bientôt, on put voir des Vampires fuir devant des croix chrétiennes ou de l'ail.
Lorsque Paul se décida enfin à rejoindre les autres membres du cercle, il fut d'abord mécontent puis heureux des actions de ses confrères, même si le fait que l'idée vienne de Temülün sous l’apparence de Malika lui fit grincer les dents.
- Il faut enquêter à la source, finit-il par annoncer et Temülün ne put s'empêcher de sourire.
Chris connaissait tellement bien son frère. Une prédiction de dix ans, jour pour jour.
- Cela ne sert à rien de tuer les Vampires en Europe s'ils pullulent en Amérique et continuent d'affluer par la mer, continua-t-il. Qui accepte d'aller enquêter sur place ?
- De l'action, j'en suis ! s'exclama Kol.
- Je veux bien y aller aussi, annonça Temülün.
Paul ne cacha pas sa surprise.
- C'est vrai que vous êtes jeunes, tous les deux, intervint Baptiste. L'aventure vous tente encore. Allez vous amuser et bonnes recherches !
- Je veux un compte rendu tous les dix ans ! s'écria Paul d'une voix autoritaire.
- Sans faute, promit Temülün tandis que Kol acquiesçait de la tête.
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La fragrance indiqua à Temülün que Chris souhaitait lui parler.
- Pas ici, chuchota-t-elle avant de se placer en haut d'une mesa fine et haute perdue au milieu d'un désert aride.
- Tu crains d'être entendue ? dit Chris en la rejoignant.
Temülün hocha la tête.
- Tu as l'air totalement terrorisée. Que se passe-t-il ?
- J'ai peur. Je ne sais que dire aux Aar. Je crains leur réaction. Paul me déteste.
- Il déteste Malika, ce n'est pas pareil. Et puis, il ne la déteste pas, il la craint. Franchement, il n'a pas totalement tort. Ce n'est pas comme si elle était en train de le poignarder en créant une armée adverse sans le prévenir. Ce n'est pas comme si un sosie avait pris sa place afin de le leurrer.
Temülün sourit. Avec ce point de vue, elle ne pouvait décemment pas en vouloir à Paul.
- Cela ne me dit pas de quoi tu as peur, continua Chris.
- Les Vampires sur ce continent ont forcément une source et elle me paraît totalement évidente.
Chris ne cacha pas son impatience d'entendre la proposition de Temülün.
- Seth a disparu il a y bientôt un demi-millénaire, après qu'Oumou ait lancé le défi de traverser un océan, défi qu'elle a remporté en ralliant l'Australie non sans se plaindre d'avoir été la seule à participer. Je pense que Seth a essayé et qu'il a réussi. Je suppose que la traversée a été longue, difficile et peuplée d'imprévus, qu'à son arrivée, il était épuisé, affamé et qu'il a perdu le contrôle. Deux possibilités alors : ou bien il a tenté de tuer ses petits mais ils étaient déjà trop nombreux et il a échoué. Ou bien il s'est trouvé très à l'aise, seul, sur un territoire inconnu des Aar et qu'il y a trouvé un terrain de jeu fantastique.
- Tu parierais sur quelle option ? demanda Chris.
- La deuxième car si on m'offre une terre vierge avec des humains en dehors de toute juridiction de Paul et de ses interdits, je fonce direct.
Chris sourit.
- En revanche, Seth est mort il y a longtemps, continua Temülün.
- Qu’est-ce qui te fait dire cela ? demanda Chris.
- Tout d’abord, si j’avais dû avoir une telle option, je n’aurais pas laissé des Vampires pulluler de la sorte. Cela attire trop l’attention. Les humains d’ici sont sacrément entraînés et donc dangereux. Ensuite, certains Vampires contrôlent leur procréation, rentabilisent leurs actions, maîtrisent leur sens et utilisent pleinement leur mémoire parfaite. Sauf qu’ils ignorent qu’ils peuvent contrôler leur apparence. Seth n’aurait pas caché cette information. Ces Vampires au contrôle se nomment entre eux les avertis et semblent se différencier eux-mêmes des Vampires pullulant. Ils forment une société à part, probablement créée par Seth. C’est cette organisation que je crains. J'ai peur d'être entendue. J'ignore comment me positionner et tu ne réagis pas spécialement à cette information. Tu étais déjà au courant, comprit Temülün
- Paul a mis dix ans à t'envoyer ici, rappela Chris. Tes sœurs ont eu largement le temps de s'en rendre compte avant toi.
- Tu as trouvé la source, comprit Temülün. C'est bien Seth ?
- Non, répondit Chris, mais j'aime beaucoup ta version. Elle est plausible, elle tient debout, elle est logique et rationnelle. C'est donc celle que tu transmettras à Paul lors de ton premier compte rendu. Les Vampires au contrôle se cachent et se mêlent aux humains. Jusque-là, Kol ne s'est pas rendu compte de leur existence et je pense qu'il n'y parviendra pas. Seuls tes yeux t'ont permis de le voir, précisa Chris. Les autres membres du cercle n'ont pas cette capacité. Tu ne leur indiqueras donc pas l'existence de ces Vampires puissants. Seth a traversé, a perdu le contrôle, a créé des petits qui se sont retournés contre lui et il est mort, laissant derrière lui des Vampires sans loi. Voilà la version que Paul obtiendra. Tu as compris ?
Temülün hocha la tête. C'était brillant. Ainsi, Paul ne chercherait pas une source qu'il pensait ne pas exister, laissant libre champ à Chris et ses prêtresses du mal d'agir en toute impunité.
- Mes sœurs sont libres d'aller et venir, comprit Temülün. La multitude de Vampires leur permet de se déplacer sans crainte.
- En effet, dit Chris, elles sont ravies.
- Comment dois-je me comporter ici ? Si je montre que je suis un Vampire au contrôle, je…
- Non, surtout pas, ils se connaissent entre eux et forment une société aussi fermée que le sanctuaire ou le cercle, même s'ils sont bien plus nombreux. Ils sauraient que tu es étrangère. Profite de ta vie en Amérique pour agir comme un Vampire ignorant. Mordre à tout va est amusant. Éclate-toi !
Temülün sourit. Cet ordre-là lui convenait.
- Sans oublier tes comptes rendus à Paul, évidemment, finit Chris avant de disparaître, un sourire aux lèvres.
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Temülün en avait assez. Pour la cinquième fois, le Vampire osant se nourrir sur ses terres sans sa permission venait de sortir de son territoire pour pénétrer dans celui de son voisin. Il avait vraiment le don de l'énerver. Il n'était pas au contrôle ce qui faisait enrager la prêtresse du mal. Comment pouvait-elle échouer ? L'autre avait compris sa réticence à passer la frontière et en profitait pour s'enfuir dès qu'elle le repérait. Temülün se renfrogna. La colère monta en elle. Elle ne voulait pas de conflit mais pour protéger son quartier, elle allait devoir pénétrer sur les terres voisines.
Certes, Temülün, totalement au contrôle, ne risquait pas grand-chose face aux petits Vampires. Cependant, certains avaient acquis de belles capacités pour survivre et la méfiance était de mise. Temülün ne connaissait pas ses voisins. Elle ne s'y intéressait tout simplement pas. La protection de son propre territoire lui prenait déjà tout son temps. Les incursions de petits Vampires ne cessaient jamais. Il n'était tout simplement plus possible aujourd'hui de vivre une journée sans devoir repousser des intrus.
Le Vampire qui se jouait d'elle était un nomade. Sans territoire, il allait et venait, se nourrissant sur les terres des autres. Il se moquait de se cacher et attirait les tueurs de Vampires que Temülün préférait autant ne pas avoir sur le dos en sus des petits Vampires à combattre quotidiennement. Elle devait agir. Il était temps que cela cesse. Elle soupira puis, espérant que la chance serait de son côté, pénétra dans le territoire ennemi.
Elle n'eut aucun mal à le suivre. Ses traces étaient bien présentes. Il ne cherchait pas du tout à se cacher. Temülün supposa qu'il se croyait à l'abri et ne faisait donc aucun effort pour masquer sa présence. Il ne semblait pas davantage craindre le propriétaire de ces terres qu'elle-même. Les nomades agissaient souvent de cette façon. Ils croquaient la vie à pleine dent sans réellement se préoccuper de quoi que ce soit.
Il se savait en position de force : il n'avait pas à se cacher, contrairement aux Vampires sédentaires. La seule chance de survie face aux chasseurs de Vampires était l'anonymat. Les Vampires restaient donc cachés et ne sortaient que la nuit, tuant dans les ruelles sombres. Toute la journée, ils patientaient, espérant la lune et ses ombres bienveillantes. Les Vampires ne vivaient pas longtemps. Entre luttes territoriales et chasseurs de Vampires, la durée de vie dépassait rarement dix ans.
Celui-là avait dû dépasser le siècle. En courant sans cesse, il échappait aux humains. Sautant de territoire en territoire, il glissait entre les doigts de ses compatriotes peu enclins à s'allier avec leurs voisins. Temülün dut reconnaître que c'était une bonne solution. Cela nécessitait de ne jamais rester en place mais était-ce si désagréable ?
Temülün le trouva aisément. Il s'était arrêté. Une chance pour elle qui put prendre le temps de se mettre face au vent et de s'approcher tranquillement. Elle entendit des bruits de voix. Parlait-il seul ? Sa solitude l'avait-il rendu fou ? Elle s'approcha, désireuse de comprendre.
- Déjà fatiguée ? dit-il. Quel dommage ! Si près du but !
- Que vas-tu faire ? Qu'est-ce que ma mort t’apportera ? répondit quelqu'un.
Temülün sursauta. Il n'était pas seul ! Une femme était à ses côtés. Temülün s'approcha suffisamment pour être en mesure de voir la scène. L'homme qui, elle le savait, se nommait Mickael, se tenait debout devant une jeune femme d'une vingtaine d'années, allongée sur le sol, essoufflée.
- Oh ! répondit Mickael. Rassure-toi, je ne veux que m'amuser. Vous autres sédentaires êtes si peu imaginatifs ! Non, je ne vais pas te tuer. Je vais juste te donner très soif, dit-il en sortant un couteau, puis t'amener en pleine ville. Je vais te regarder faire un massacre et me délecter du spectacle. Tu seras obligée de partir et tu connaîtras la joie de devoir te battre pour un bout de terre. Moi, je vais observer et profiter. J'ai si peu d'amusement…
- Tu es mort, promit la jeune femme.
Temülün dut reconnaître le courage de la Vampire. Elle se trouvait au sol, vaincue, et elle continuait de lutter. Mickaël sourit. La menace venant d'un adversaire à l'agonie ne le touchait pas. L'agresseur leva son couteau, prêt à frapper.
Temülün pouvait le laisser faire ou sauver la jeune femme. Elle réfléchit. Elle avait pénétré dans le territoire de ce qui semblait être une petite fille incapable de prendre soin d'elle. Ça ne collait pas avec une capacité à s'occuper d'une terre. Jamais aucun Vampire ne venait de ce territoire jusqu’au sien. Donc, celui-ci était bien protégé et sécurisé.
La fillette à l'agonie piqua la curiosité de Temülün. Elle ne pouvait pas avoir vaincu le propriétaire précédent ni être l’actuel. Elle était bien trop faible pour cela. Temülün, dont la vie était plutôt monotone ces derniers temps, eut soudainement envie de savoir, de comprendre, de résoudre cette énigme. Elle prit sa décision en un dixième de secondes.
Mickael, trop occupé à son plaisir, ne s'était toujours pas rendu compte de la présence de Temülün à quelques mètres de lui. Il arma sa main qui disparut en poussière, bientôt rejointe par le reste du corps.
La jeune Vampire au sol observa Temülün, se demandant visiblement quoi attendre de son sauveur. Toujours faible, elle restait une cible facile. Temülün lui tendit gentiment la main afin de l’aider à se lever. La jeune Vampire accepta et se dressa, davantage en confiance.
- Je reviens, précisa Temülün.
À vitesse surnaturelle, elle partit chasser, attrapa une proie, s’en nourrit un peu afin de reprendre des forces puis la ramena à la jeune Vampire.
- Je m’en suis déjà nourrie mais il reste largement de quoi te requinquer.
La jeune Vampire draina l’humain de son sang, son corps tombant au sol sans un bruit.
- Merci beaucoup de ton intervention. Comment se nomme mon sauveur ?
- Anna Winterback, répondit Temülün dont c'était l'identité actuelle.
La jeune femme eut soudain les yeux dans le vague. Temülün reconnut là l'usage de la mémoire parfaite des Vampires. Lorsqu'elle revint au présent, la jeune femme fronçait les sourcils. Elle semblait circonspecte et perdue, voulant agir d'une façon puis à son opposée.
- Tu es ici parce que ? demanda la jeune femme.
- Je possède le territoire voisin du tien et ce Vampire nomade ne cessait de venir et de tuer de manière ostensible. Ça fait un moment que je le pourchasse mais il m'a échappé jusque-là. Désolée pour l'intrusion dans ton territoire mais cela durait depuis trop longtemps.
La jeune femme plissa des yeux, détailla Temülün de la tête au pied avant de répéter :
- Tu possèdes le territoire voisin.
Le jeune femme s'ébroua, sourit pleinement puis ajouta :
- Je m'appelle Lyne Williams. Ravie de te rencontrer. Viens chez moi. Ma famille sera ravie de te rencontrer.
Famille ? répéta Temülün dans sa tête. Ainsi, la jeune Vampire ne vivait pas seule mais en clan. Cela expliquait pourquoi ce territoire était aussi bien protégé malgré l'incompétence de son interlocutrice. Temülün accepta l'invitation avec une joie non dissimulée. À vitesse surnaturelle, ils arrivèrent presque instantanément à leur objectif.
Temülün découvrit une demeure en bois avec un étage, de nombreuses fenêtres, des balcons et des colonnades, une maison classique mais indiquant un haut niveau de revenus. Elles venaient à peine d'apparaître que trois hommes et deux femmes sortirent de la maison. Ils affichaient clairement leur hostilité vis-à-vis de Temülün. La femme la plus âgée s'avança vers Lyne, faisant abstraction de Temülün.
- Lyne ! Je vois que tu nous amènes une invitée surprise.
- Elle m'a sauvé la vie, expliqua Lyne et la femme sursauta. Un Vampire nomade m'a attaquée et sans elle, il aurait atteint son but.
- Un Vampire a failli te tuer ? dit l'homme le plus âgé. Comment t'y es-tu prise ?
- Je n'ai pas bu depuis un moment. Il m'a prise par surprise et il était gorgé de sang, se justifia Lyne. Je me suis défendue mais il était vraiment très fort. Il devait être vieux.
- Et celle-là t'a sauvée la vie ? s'étrangla l'homme âgé. Elle a réussi là où tu as échoué ? Tu te fiches de moi ?
Temülün n’écoutait qu’à peine l’échange. Un détail venait de la frapper : la jeune Vampire s’était nourrie de l’humain et pourtant, celui-ci ne s’était pas transformé en Vampire, dénotant un contrôle de la procréation.
Elle sentit un frisson glacé parcourir son échine. Ses sens lui montrèrent ce qu'elle n'avait pas su voir jusque-là. Les six Vampires autour d'elle ne consommaient quasiment pas d'énergie et sortaient en plein jour. Ils vivaient dans une demeure au milieu des humains, qu'ils ne craignaient donc pas.
Elle comprit trop tard. Ceux-là étaient au contrôle. Elle ne l'avait pas vu plus tôt car la petite, au bord de la mort, ne pouvait gâcher son énergie à paraître humaine. Cependant, maintenant que le calme était revenu, tout revenait à la normale et Temülün fut forcée d'admettre que la situation était on ne peut plus atroce.
D'abord, elle était en grand danger car contre six Vampires formés, elle ne faisait pas le poids. Ensuite, Chris lui avait formellement interdit de se montrer comme une Vampire au contrôle. Elle avait essayé mais s'était vite rendu compte que cela tenait de l'impossible. Le contrôle de l'énergie, du venin, de sa vitesse, de ses sens, tout cela était devenu des réflexes pour Temülün qui ne parvenait pas à s'en départir. Elle vivait comme un petit Vampire mais gagnait tous les combats grâce à son contrôle. Cela n'avait pas échappé à Lyne.
Temülün se rappela soudain que Lyne lui avait demandé son nom avant de tenter de se le rappeler. Chris lui avait dit qu'ils se connaissaient tous. Lyne savait donc qu'elle ne faisait pas partie de sa société et l'avait attirée auprès des siens. Temülün se sentit plus mal que jamais.
- Elle se contrôle parfaitement, lança Lyne et Temülün lutta pour garder son calme.
Les six Vampires la dévisagèrent. Il était trop tard pour changer d'attitude et faire croire. Temülün ne changea donc rien, priant pour que la situation se débloque à son avantage, sans trop savoir comment un tel miracle serait possible.
- Origine ? demanda l'homme âgé.
Temülün reconnut là une demande de mot de passe. Il était évident qu'une seule réponse était acceptée et indiquerait son appartenance à leur société secrète. Temülün n'avait pas la moindre idée de la réponse.
- Elle ne connaît pas la réponse, murmura Lyne. Elle n'a pas été formée. Elle a tout acquis seule. C'est extraordinaire ! Je savais que les parvenus existaient mais c'est la première fois que j'en croise un !
Temülün soupira d'aise intérieurement. Ils la croyaient autodidacte. C'était fantastique. Il lui suffisait d'aller dans ce sens.
- Oui, c'est fantastique, intervint la femme la plus âgée, mais je n'ai pas la moindre idée de la marche à suivre.
- Pour quoi exactement ? demanda l'homme âgé.
- Lui proposer de nous rejoindre, s'exclama Lyne, comme s'il s'agissait d'une évidence.
- Rien ne prouve qu'elle en soit capable, gronda l'homme.
- Il suffit de la tester ! répliqua Lyne en piaffant d'excitation.
- Nous n'en avons pas la compétence, souffla la femme âgée. Ce n'est pas à nous de le faire et nous sommes trop à découvert pour discuter de cela. Entrons à l'intérieur, s'il vous plaît.
Temülün acquiesça et suivit volontiers les six Vampires au contrôle jusqu'à leur demeure. Elle crevait d'envie d'infiltrer leur société, de découvrir leur secret, de jouer l'espionne.
- Laisse-moi faire les présentations, proposa la femme âgée une fois tout le monde à l'intérieur. Voici Patrick, Kevin, Hélène et Lyne, nos petits. Nous les avons mordus et formés. Qui a mordu qui est sans importance pour nous. Nous sommes une famille. Je m'appelle Scylla et mon époux grincheux se nomme Armand. Avant qu'il ne m'interrompe, je tiens à te remercier d'avoir sauvé la vie de ma fille. Tu n'avais aucune raison de le faire et tu as ainsi montré un grand sens de la générosité et du partage. Merci beaucoup.
- De rien, répondit Temülün.
- Anna Winterback est ton identité humaine actuelle, je suppose, intervint Lyne.
Temülün hocha la tête.
- J'ai la sensation que nous allons rester en contact longtemps, peut-être des siècles. Pourrais-tu nous donner ton vrai nom ? Je veux dire… Nous avons tous une façon de nous appeler, un nom par lequel nous pourrions répondre sans cesse. Si tu n'y as jamais pensé, cela peut te prendre du temps pour le trouver mais pourrais-tu y réfléchir ?
- Malika, répondit Temülün. Je m'appelle Malika.
- Malika, répéta Lyne. Très bien, merci.
La famille se détendait autour d'elle. Les autres "enfants" vaquèrent à leurs occupations mais Temülün n'en doutait pas : leur attention restait malgré tout focalisée sur elle. Temülün profita du délassement environnant pour se promener dans la grande pièce à vivre. Elle caressa le tissu de l'immense canapé sur pieds, avisa les deux fauteuils séparés par une table basse en bois massif sculpté, le tout faisant face à une très belle cheminée actuellement éteinte, mais devant laquelle il devait faire bon se détendre les longues soirées d'hiver.
Temülün avisa un panier de fruits. Une paire de cerises lui faisait de l'œil. Elle les avala, sans oublier de recracher les noyaux, sous les regards ahuris des trois Vampires.
- Elle mange ! s'écria Lyne toute joyeuse. Elle mange des fruits ! Elle est capable de nous rejoindre !
- Je ne crois pas avoir envie de rejoindre votre famille, précisa immédiatement Temülün.
- Ce n'est pas de notre famille à laquelle Lyne, qui décidément parle trop, fait référence, intervint Armand. J'aimerais contacter nos supérieurs.
Temülün suivit la famille jusqu'à un boudoir, où trônait un téléphone. Temülün ne cacha pas sa surprise car même si l'objet n'était pas rare, il n'était pas familier non plus. Armand se saisit du combiné et tourna la manivelle.
- Rivière, quelle est ta demande ? dit une voix féminine à l'autre bout du fil.
- Je veux parler au chef formateur, répondit Armand.
Temülün tiqua. Ce n'était pas habituel comme façon de demander un correspondant. Normalement, il fallait indiquer le numéro de l'abonné et le central dont il dépendait, pas juste une personne. Temülün en déduisit que Rivière faisait partie de la société secrète. Il y eut un long moment d'attente puis la voix de l'opératrice se fit de nouveau entendre :
- Ça ne répond pas. Rappelle plus tard.
Armand se fit raccrocher au nez. Il grogna, gronda, jura puis raccrocha brutalement le téléphone, en se maîtrisant toutefois puisque l'objet resta intact.
- Nous ne sommes pas qualifiés pour te tester et n'avons certainement pas l'autorisation de te dévoiler quoi que ce soit, indiqua Armand un peu calmé. Je suis conscient que de ton point de vue, nous sommes ennuyeux car tu n'as pas la moindre idée de ce dont nous parlons. Retourne sur tes terres, vis votre vie et nous reviendrons vers toi lorsque la situation se débloquera.
- Papa ! s'exclama Lyne et le terme fit frémir Temülün tant il lui semblait inapproprié. Ta colère ne justifie pas d'être aussi malpoli. Moi, j'ai envie d'apprendre à connaître Malika et de partager du temps avec elle.
- As-tu pensé que ça n'est peut-être pas réciproque ? dit doucement Scylla.
- J'aimerais beaucoup apprendre à vous connaître, précisa Temülün.
Lyne sourit pleinement, heureuse de son petit effet.
- Dans ce cas… Tu te joins à nous pour dîner ?
- Très volontiers ! s'exclama Temülün.
- Qu'est-ce que tu bois ? interrogea Armand.
- Un Sea Sunrise, s'il te plaît, annonça Temülün.
- Whisky, bon choix. J'en ai un excellent.
Temülün sourit. Toute la famille se retrouva installée dans le canapé du salon, un verre à la main.
- Tu as quel âge ? Tu as vécu où ? Tu connais ton créateur ? Tu as tué combien de Vampires dans ta vie ? Oh ! J'ai envie de tout savoir ! s'écria Lyne.
- Je pense que c'est trop en une seule fois, mon ange, la rabroua gentiment Scylla.
- Et si nous faisions une question chacun notre tour ? proposa Temülün.
Tout le monde hocha la tête. La solution semblait convenir.
- Quel âge tu as ? commença Lyne sans laisser la possibilité à quiconque d'autre de commencer.
Temülün réfléchit un instant. Elle était née en 1163 mais avait été transformée en Vampire par Malika en 1221. Ceci dit, elle n'avait aucune idée de quand dataient les premiers Vampires sur ce continent. Choisir cette date serait trop risqué. Elle avait posé le pied en Amérique en 1505. Cette solution était la plus adaptée.
- Quatre cents ans, indiqua Temülün qui en avait en réalité presque sept cents.
- Ouah ! Sans aide, sans guide, sans personne ! C'est fantastique !
- À ton tour, proposa Scylla aimablement.
- Vous consommez du sang humain ?
- Afin de passer inaperçus, nous devons être les plus humains possible, répondit Armand. Nous mangeons, dormons, buvons. C'est le prix à payer pour être invisibles. Cependant, si l'occasion se présente, nous ne refusons pas une bonne dose de sang.
- Tu connais ton créateur ? interrogea Scylla.
- Non, je me suis réveillée comme ça, seule. J'ai dû comprendre par moi-même. J'ai lutté, combattu, observé, appris. Il semblerait que j'ai plutôt bien réussi.
Temülün contrôlait parfaitement son corps. En effet, il était plutôt aisé pour n'importe quel Vampire de savoir si son interlocuteur mentait : rythme cardiaque, dilatation des pupilles, respiration, transpiration, mouvements oculaires… Souvent, les Vampires gardaient ces réflexes bien que totalement inutiles dans ce corps sans vie. Temülün en avait fait les frais lors de son apprentissage. Elle ne laissait donc en aucun cas son corps la contrôler. Ses interlocuteurs ne verraient que des vérités énoncées avec sincérité, honnêteté et rapidité. Temülün savait où placer son regard, comment bouger les mains, de quelle manière agir pour paraître honnête. Les membres de la famille ne douteraient pas d'elle.
Eux, en revanche, n'avaient aucune chance face à ses yeux et jusque-là, ils avaient été totalement sincères envers elle. Leur aura d'un noir d'encre s'éclaircissait à chaque mot prononcé.
- Je suis sincèrement désolé que tu aies dû vivre ainsi. Ta vie a dû être terrible, peuplée de sang, de peur, d'insécurité. Il ne doit pas être agréable d'exister dans un tel monde, dit Armand.
- Je te remercie, répondit Temülün honnêtement.
Le reste de la soirée fut ponctué d'échanges plus libres et moins lourds. Ils discutèrent changement climatique, politique ou innovations technologiques.
- Et si tu venais ce week-end ? proposa Lyne au moment où Temülün prenait congé, la nuit déjà bien avancée. J'ai prévu d'aller faire du shopping en ville. À moins que devoir côtoyer les humains ne te dérange.
- Cela me plairait beaucoup, assura Temülün.
Lyne sourit. Les deux femmes s'embrassèrent et Temülün rejoignit son territoire à vitesse humaine jusqu'à l'orée du bois puis avec une célérité surnaturelle.
Tu nous emmènes dans une autre direction avec ce chapitre. Temulun prend la place de Malika et découvre l'existence de vampires. Elle réussit à tromper tout le monde et est envoyé sur le nouveau continent où elle enquête sur ces derniers nés, une population de vampires bien organisés. Elle se joint à une famille pour en apprendre plus sur eux.
Ce chapitre est sympa. C'est assez étonnant d'avoir soudainement tous ces vampires à gérer. Je me demande quelle décision vont prendre les Aars à leur propos. Bain de sang ou collaboration ?
Des pinaillages pour ce chapitre :
"tant pis"
> Tanpis ?
"Qu’il puisse la soupçonnait la mettait hors d’elle"
> la soupçonner
"Temülün se demanda un instant si sa manière de parler, très étrangère aux Aar, ne risquait pas de la dénoncer"
> Je me demande si "dénoncer" est le verbe le plus approprié ici.
"Elle expliqua au premier Aar."
> Elle expliqua tout au premier Aar ?
"Ces Vampires au contrôle"
> Que veux-tu dire par là ? J'ai l'impression qu'il manque un bout de phrase ? Ou est-ce une façon spécifique de les désigner ?
"Les Vampires ne vivaient pas longtemps. Entre luttes territoriales et chasseurs de Vampires, la durée de vie dépassait rarement dix ans"
> C'est intéressant cette info. Ils sont bêtes ces vampires 🙂
"mon époux grincheux se nomme Armand"
> C'est un clin d'oeil à Armand d'Anne Rice ? 🙂
"et as ainsi montré un grand sens de la générosité"
> Je rajouterais un "tu"
"mais devant laquelle il devait faire bon se détendre"
> "de se détendre" ?
Tu ne réponds pas vraiment à mes questions sur le rapport Chris/Malika ici, mais ce n'est pas grave, je pense que ça va s'imbriquer par la suite avec ce nouvel axe.
Du coup, je vais lire la suite 🙂
Merci pour tous tes pinaillages que je prendrai en compte et corrigerai dès que j'aurai une minute.
Toute cette saga fonctionne ainsi. Les réponses sont fournies de manière détournée, plus tard (parfois beaucoup plus tard). Un paragraphe a priori banal peut déboucher sur des chapitres entiers d'histoire.
On ne sera plus jamais dans la tête de Chris ou de Malika. Tout se fera à travers des personnages extérieurs qui les croiseront et discuteront avec eux, ce qui me permet, entre autre, de laisser le doute au lecteur (car après tout, Chris et Malika ont le droit de mentir comme des arracheurs de dents).
J'ai choisi dans ce roman un point de vue très intro-centré. On sait ce que voit, entend et ressent le personnage que l'on suit mais pas les autres (le narrateur n'est pas omniscient). C'est très difficile d'écrire comme ça, honnêtement, mais ça permet de bousculer le lecteur en lui donnant des informations qu'il prend pour vraies alors que non. Cela l'oblige sans cesse à douter, à se poser des questions, à espérer un indice quelconque lui offrant ses réponses. Le truc, c'est que je ne veux pas non plus complètement perdre le lecteur. C'est difficile de rester sur la corde sans sombrer. J'espère ne pas trop mal m'en sortir.
Il faut vraiment se laisser porter, accepter qu’on ne comprend pas bien un truc mais être confiant dans le fait que ça va venir. Je ne sais pas si l’équilibre est bon et encore une fois, je ne suis même pas certaine que lire les tomes dans cet ordre-là soit la meilleure chose à faire.
Je doute beaucoup sur cette saga alors encore merci à toi, Peridotite, de tes commentaires qui m’aident beaucoup.
C’est une façon spécifique de les désigner
"Les Vampires ne vivaient pas longtemps. Entre luttes territoriales et chasseurs de Vampires, la durée de vie dépassait rarement dix ans"
Ils sont bêtes ces vampires : des prédateurs trop nombreux sur un territoire trop petit. C’est la loi de la nature !
"mon époux grincheux se nomme Armand"
C'est un clin d’œil à Armand d'Anne Rice ?
Honnêtement, non mais tant mieux s’il y a un Armand dans Anne Rice. J’essaye de faire des clins d’œil (il y en aura plein d’autres dans les autres tomes) à d’autres livres de Vampires.