Chapitre 2 – Léger comme un ptérodactyle

— Oh là là, c’est trop bizarre Solène ! Comment ça se fait que tout est marron-jaune ? Même l’herbe est devenue jaune ! Il y a eu une grosse sécheresse en deux secondes et tout a cramé ou quoi ?

En tous les cas, l’herbe a beau être jaune, je la trouve très appétissante. Tournant brusquement la tête, je me baisse et me mets à paître[1].

— Pâquerette ! Ce n’est pas l’heure du goûter !

Quelqu’un tire sur ma longe[2], assez fortement, et je suis obligé de relever la tête pour continuer mon chemin. Zut, c’est vrai que c’est souvent Sandra qui monte Pâquerette.

— Tu exagères Hélios.

— Parce que ça ne te fait pas envie, toi, toute cette belle herbe jaune ?

— Un peu. Mais Pissenlit sait se tenir, lui !

Je ne réplique pas. C’est vrai que Pissenlit est obéissant alors que Pâquerette, parfois, elle se met à brouter2 d'un seul coup et bloque tous les autres.

Ma cavalière du jour, Sandra, je la connais un peu. Elle a douze ou treize ans, est super grande pour son âge, et toujours très sérieuse.

D’ailleurs, elle est déjà en train de me bouchonner[3] d’une main sûre. Je réalise que je n’aime pas beaucoup ça.

— Mais elle va arrêter de me gratouiller avec son truc  ?

— Tu n’aimes pas être étrillé4 ? Moi, j’adore ! Je trouve ça super agréable. Pourvu que ça dure le plus longtemps possible !

À mon grand soulagement, en cinq minutes, c’est terminé, je suis brossé, scellé, et Sandra m’emmène en direction du manège[4].

— Oh non, pas à l’intérieur, il fait trop beau pour ça !

— Sandra ! Les enfants ! Vous pouvez amener vos poneys à la carrière[5] ? On va faire un peu de saut d’obstacles avant la suite.

— La suite ? Me demande Solène télépathiquement.

Je hausse les épaules. Enfin, j’essaye. En réalité, je fais un drôle de bruit en soufflant par les naseaux à la place.

— Arrête de renâcler[6] Pâquerette, me chuchote Sandra dans l’oreille, tu vas pouvoir sauter aujourd’hui, t’es contente, pas vrai ?

— Ouais, génial !

Tu m’étonnes que je suis contente ! Enfin, content, je veux dire. Sauter des obstacles dans la peau de Pâquerette, ça doit être extra, elle y arrive trop bien et super facilement !

À côté de moi, Pissenlit trotte et nous dépasse, son petit cavalier Maxime sur son dos.

— Alors ma grande, tu avances ? Tu ne veux pas sauter aujourd’hui ?

Sortant de mes pensées en entendant la voix de Sandra, je réalise qu’elle est déjà en selle… et qu’elle est toute légère ! Je la sens à peine, c’est très curieux.

Et trop génial.

Dès qu’on passe le portail et que mes sabots touchent le sable de la carrière, j’ai envie de m’élancer, et j’y vais ! Je me sens puissant, j’ai l’impression d’être aussi invincible qu’un tyrannosaure et aussi léger qu’un ptérodactyle !

— Pâquerette ! Du calme, enfin ! Qu’est-ce qu’il t’arrive aujourd’hui ? S’inquiète Sandra sur mon dos.

Il ne m’arrive rien, j’ai juste trop envie de sauter ! Je regarde le premier obstacle et je m’élance, sûr de moi.

— Pâquerette ! Attends ! Qu’est-ce que- Ah !

Oh non ! J’ai fait tomber la barrière et raté mon saut, je suis trop déçu ! Comment c’est possible alors que je suis si fort que je ne sens même pas le poids de Sandra ?

— Hélios ! Mais qu’est-ce que tu fais ? Oh là là, la pauvre ! J’espère que tu ne l’as pas blessée !

Blessée ? Oh non ! Sandra n’est plus sur mon dos !

 

*** Informations documentaires ***

Les chevaux ne voient pas certaines couleurs. Tout est marron/jaune/bleu/gris pour eux. C’est pour ça qu’Hélios voit l’herbe verte toute jaune !

 

Herbivores, les chevaux broutent régulièrement, car ils ont un petit estomac qui ne garde pas longtemps les aliments, ce qui les oblige à manger tout au long de la journée.

 

Le poids des chevaux et poneys est variable selon l’espèce et la taille. Ils pèsent généralement entre 200 et 500 kg pour les poneys, et entre 400 et 1000 kg (= une tonne !) pour les chevaux.

Les propriétaires font attention à ce que le poids du cavalier ne dépasse pas les 10 ou 15 % du poids de l’équidé pour ne pas faire mal au dos à ce dernier.

Sandra, même avec ses 30 kg, n’est vraiment pas difficile à porter pour Pâquerette et ses 500 kg.

 

 

 

[1] Paître, brouter = Manger de l’herbe (en l’arrachant au sol).

[2] Longe = Corde qui sert à mener le cheval ou à l’attacher à un mur.

[3] Bouchonner, étriller = Brosser le poney.

[4] Manège = Endroit couvert où on peut facilement faire travailler les chevaux. Très pratique, surtout lorsqu’il pleut dehors !

[5] Carrière = C’est comme le manège, mais à l’extérieur. Souvent plus grand, du coup, mais bien fermé par des barrières, c’est souvent là que se travaillent les sauts d’obstacles.

[6] Renâcler = Chez l’humain, cela signifie rechigner à faire quelque chose. Pour les poneys, c’est simplement souffler par les naseaux, et cela peut signifier aussi bien une inquiétude que de l’amusement.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez