Chapitre 2

Après cette séance de confession hors-norme, Clara se sentit plus proche de cette âme en peine, cette femme qui avait maintenant un nom, Huguette, et qui était déchirée entre l’envie d’un repos mérité et le mal qu’elle pourrait faire en venant hanter les vivants. Contrairement aux autres fantômes qui montraient clairement à Clara où enquêter, Huguette tournait autour du pot. Telle une vieille dame qui raconte ses mémoires en digressant à chaque chapitre, le fantôme avait du mal à partager ce qui importait vraiment : la fin de sa vie.

— Écoute, je comprends que ta mort soit un sujet douloureux. Mais si tu veux que je t’aide, j’ai besoin d’en apprendre plus sur tes derniers jours et sur l’endroit où tu reposes. Je ne peux pas enquêter sur toutes les Huguette décédées dans les cinq dernières années !

Heureusement, Huguette lui épargna cette montagne de travail en la guidant, dès le lendemain, vers le cimetière d’une petite ville de campagne. Une fois devant la pierre tombale en granit brut, l’inspectrice avait enfin appris le nom complet de son fantôme de compagnie : Huguette Damiens. Et si on en croyait les dossiers de la mairie, Huguette était décédée chez elle de mort naturelle, le dimanche 12 avril 2015.

— Hé beh, t’en as mis du temps pour venir me voir, chuchota Clara face à un agent de mairie perplexe.

En toute logique, la prochaine étape était de se rendre à l’ancien domicile d’Huguette afin d’interroger sa famille. Mais là encore, rien ne se passa comme prévu. Le modeste appartement, situé au rez-de-chaussée d’un immeuble, avait été racheté l’année précédente par une famille de Parisiens en quête de grand air. La femme qui ouvrit la porte n’avait jamais entendu parler d’Huguette : elle n’avait parlé qu’à un certain Gabriel Damiens. En sortant de l’immeuble, Clara dégaina son téléphone, prête à contacter ses collègues pour retrouver Gabriel. Mais c’était sans compter sur la curiosité d’un des voisins, qui l’interpella avant qu’elle ne traverse la rue.

— Mademoiselle ! C’est vous qui cherchez Huguette ?
— Oui. Enfin non, je cherche quelqu’un de sa famille. J’ai quelques questions à poser.
— Je ne sais pas ce qui vous amène par ici, mais je vous conseille de ne pas trop fouiller. Les Damiens n’apportent que des problèmes. Si je croyais en ces choses-là, je dirais même qu’ils sont maudits. Enfin bon, ça c’est des croyances de bonnes femmes.

Clara se retint de lever les yeux au ciel, bien trop contente d’avoir déniché le voisin commère du coin.
— Qu’est-ce qui vous fait dire ça ? Vous les connaissiez bien ?
— Je peux pas dire qu’on était proches. C’est juste que les murs sont fins par ici. J’en ai entendu des disputes ! À mon avis, le père Yves, il n’arrivait pas tellement à discipliner sa femme. C’était pas faute d’y mettre du sien hein !

Il fendit l’air d’une grande claque de la main droite, avant d’éclater de rire. Clara sentit un frisson lui parcourir la colonne vertébrale. Pour une fois, ce n’était pas lié à une visite d’Huguette.

— Je vois. Donc le mari d’Huguette s’appelle Yves… Vous savez où je peux le trouver ?
— Ah, ça va être compliqué, il a été incinéré ! Il est mort en juin, l’année dernière. On aurait pu croire qu’une fois débarrassé de sa mégère, il profiterait de la vie, mais même pas. La plupart du temps, il restait chez lui, à bouder. Quand Yves est mort, le fils a refusé que son père soit enterré à côté de la vieille, alors il l’a fait cramer. À mon avis, il a jeté les cendres dans un caniveau, le p’tit ingrat.

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!Brune!
Posté le 29/07/2023
Bonjour,

Je reviens par ici après quelques semaines d'absence. J'ai retrouvé sans difficulté le fil de ton histoire que je trouve toujours aussi originale. Un petit bémol cependant : ton chapitre est plutôt court....j'aurais aimé que tu développes, que tu étoffes, que tu brodes un peu plus ; par exemple concernant les relations entre Clara et son fantôme, ou encore les ressentis, les émotions de Clara lorsqu'elle entre en contact avec Huguette.
À bientôt !
AurélieC
Posté le 21/08/2023
Hello !
Merci pour ton commentaire (et désolée d'y répondre si tard). Pas mal de gens me disent que c'est un peu court et qu'il y a matière à développer : malheureusement, j'ai écrit cette nouvelle pour un concours, et il y avait un nombre de caractères à respecter. Ceci dit, je retiens que si j'ai envie d'étoffer mon histoire, je peux commencer par celle-là :)
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