Chapitre 2

-"Trop invisible pour être comme mes aînées ou trop fade pour être comme mes cadettes."-

 

Lorsque les festivités prirent fin, les deux sœurs, devenues Mrs Bingley et Mrs Darcy, accompagnées de leurs époux, se retirèrent dans leurs somptueuses calèches vers de nouveaux horizons. Comme de coutumes, Mrs Bennet pleura leur départ sans la moindre retenue et surtout sans grâce. Kitty retenue ses larmes comme elle pouvait et s'autorisa à agiter soigneusement sa main. Quant à Mr Bennet, il réalisait avec une infinie tristesse le départ de sa chère Lizzie. Relayée au deuxième rang, derrière un Mr Collins de bonne humeur, Mary ne pensait qu'aux dernières paroles de Charlotte et appréhendait le retour à la maison. 

Dans le cabriolé, l'atmosphère de la fête s'était étouffée par la réalité des choses, la demeure qui les attendait leur soufflerait constamment l'absence des trois plus joviales soeurs. Mrs Bennet laissa une énième fois plainte en raison du cruel manque que ses filles lui infligeaient. 

— Voyons ma chère, réjouissez-vous plutôt d'avoir casé vos meilleurs filles. Je crains que la tache soit plus dure pour les restantes, dit Mr Bennet avec son flegme légendaire 

— Mes pauvres petites filles, elles me manquent déjà et ma petite Lydia qui n'a pu venir, geignait-elle en se mouchant

Après de longues et lentes lamentations, les chevaux s'arrêtèrent enfin et le cochet ouvrit la porte, laissant les deux dernières filles Benent respirer à grandes goulées. Kitty s'imposa, descendit la première et avança d'un pas rapide à l'intérieur de la maison suivie de près par Mary les joues rouges. Elles montèrent les marches quatre à quatre et se séparèrent pour gagner chacune leur chambre. Finalement trois minutes plus tard, Kitty rejoignit sa soeur les lèvres pincées. 

— Avez-vous entendu les énormes bêtises lancées sans la moindre retenue à notre encontre Mary ? Avez-vous perçu la bassesse de leurs pensées ? Comme si nous ne valions rien, comme si les seules soeurs Bennet avaient réussi à se marier. C'est une honte de penser de telle sornette. N'êtes vous pas du même accord ? S'arrêta Kitty 

— Peut être n'ont ils pas tord ? Répondit Mary légèrement 

— Je vous demande pardon, comment pouvez vous être d'accord ? Avez-vous compris qu'ils vous rabaissaient, qu'ils vous traitent comme une illuminée, incapable de trouver un bon parti. En d'autres termes que vous finirez vieille fille à vous occuper d'eux jusque'a à la fin de leur jours. Est-ce vos navrantes aspirations ?

— Oui Kitty mon orgueil a été mis à mal mais cela n'est le fruit que d'une situation complexe. La légèreté de leur parole ne conquiert pas l'amour sincère et pure qu'ils nous portent. 

— Oh Mary, cessez donc votre exposition de bonne pensée. Vous essayez de vous cacher derrière des mots savants mais à quoi servirait une intelligence extraordinaire si notre seule utilité est d'égayer la vie de nos parents esseulés et vieillissants. 

— La vérité Kitty ? Si vous la voulez aussi férocement que vous le prétendiez c'est que notre famille Bennet est connu pour leurs êtres aussi différents que distrayants, composé d'une mère excessive et sans la moindre gêne, un père fuyard n'ayant que pour unique joyau Lizzie, les deux ainées aussi belles qu'agréables, une troisième effacée et les cadettes frivoles, intenables et étourdissantes. Alors oui, les deux seules qui restent n'ont que peu de chances de trouver d'aussi bons partis que les autres. Certes Lydia est parti avec un simple officier mais qui a eu une aide par le célèbre Mr Darcy. Quoi que ne fassions, nous ne pourrons jamais rivaliser avec de telles prouesses. 

— Alors vous vous avouez vaincue avant même d'avoir essayé ? Vous accepter votre sort sans le moindre pincement ? Comment faites-vous pour être aussi froide ? Chancela Kitty

— La vie m'a appris a être gratifiante de la plus petite réussite. Je ne pourrai jamais être à la hauteur des autres, je n'ai pas la beauté, je n'ai pas le talent, je n'ai pas la capacité de m'intégrer dans les bals ou de voir une cour à mes pieds de jeunes hommes prêts à se battre ne serait-ce que pour toucher ma main. J'ai revu à la baisse mes envies dès lors que j'ai compris que je ne valais pas le ravissement d'une jeune femme de mon âge. 

— C'est une bien triste vision des choses. Qu'est-ce qui a pu vous arriver pour que vous soyez aussi apathique quant à votre situation ?

— Ce qui m'est arrivée? Je ne vous croyez pas aussi naïve au point de ne même pas avoir remarqué cette vérité, s'irrita Mary 

— Enfin Mary, nous avons grandi ensemble. Je l'aurai su si vous aviez été maltraitée ou aviez subi une horreur, dit Kitty perdue 

— Vous m'avez forcé à prendre cette place que personne ne voulait. Chacune de mes soeurs m'a poussée à me retirer, à me cacher et devenir que futilité aux yeux des autres. Vous et vos caractères si appréciables, si délicieux, si vivifiant. Même Lydia m'a éblouie et m'a faite me ranger. Personne ne m'a laissé une chance de prouver que j'avais de l'importance ou un intérêt. Trop invisible pour être comme mes aînées ou trop fade pour être comme mes cadettes. Voila ce qui m'est arrivé chère Kitty. Alors faites votre révolution pour contredire père et mère mais ne vous attendez pas à ce que je porte votre drapeau, conclut Mary en partant de sa chambre les larmes aux yeux. 

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Grisélidis80
Posté le 30/09/2021
J'espère que Mary ne se laissera pas aller à sa morosité et qu'elle trouvera un moyen de faire mentir son très agréable paternel.
Je vais lire le chapitre suivant.
M. de Mont-Tombe
Posté le 29/04/2021
Mrs Bennet est en forme ^^. Je trouve que tu es très fidèle au personnage. Je me demande bien combien de fois tu as lu le roman (ou vu les films?) pour avoir un tel rendu ! (Encore une toute petite faute: "Cabriolet" et pas "cabriolé")
Freyja
Posté le 09/02/2021
Ah ce Mr Bennet, il est bien maladroit dans ses paroles...C'est très blessant d'entendre son père dire de telles choses. Et en même temps, Mr Bennet a toujours été très réaliste sur ses filles (et oui, il a clairement une chouchoute).
Je relève je crois une heure, quand Mary dit que Wickham a eu de l'aide de Mr Darcy. J'imagine que tu parles d'aide financière. Parles-tu du moment où Darcy résout tout afin que Wickham épouse Lydia et qu'elle ne soit pas déshonorée? Parce que Darcy ne voulait pas que ça se sache. Elizabeth l'apprend après coup, et je crois qu'elle le dit à son père lorsque Darcy fait sa seconde (!) demande mais je ne crois pas que qui que se soit d'autres soit au courant. Après, je n'ai pas relu Orgueil et Préjugés depuis un moment, donc je me trompe peut-être.
A part ça, je suis curieuse de voir quelle va être la vie de la famille Bennet, avec trois filles en moins. C'est que cette maison était très animée!
rroulietta
Posté le 09/11/2020
Me revoilà pour le deuxième chapitre ! Mary peut s'exprimer et laisser aller son caractère, c'est une bonne chose ! On a envie de savoir ce qu'il va lui arriver, si elle va changer et trouver son bonheur !
J'ai retenu les mêmes erreurs dans les dialogues que je t'avais dites dans mon premier commentaire (il manque des points en fin de phrase et les majuscules aux verbes de dialogue). De plus, la dernière partie du chapitre m'a plu par la férocité des dialogues, le fait qu'on retrouve le dialecte de l'époque, les longues phrases bien piquées, mais j'avoue que le fait d'enchaîner juste les tirets et les tirades m'a aussi un peu dérouté, du fait qu'il y ait peu de descriptions. Je ne sais pas si c'est un choix de ta part ?

A bientôt !
Justinspiration
Posté le 12/11/2020
Je dois bien avouer qu'employer le dialecte de l'époque est assez difficile car ça nécessite des recherches et des remises en questions constantes pour que ça puisse coller le mieux possible.
J'avais envie de rendre Mary un peu plus féroce et sur d'elle. Encore une fois, dans le livre, comme elle est invisible, ça la rend transparente et froide. Ce qui dénote complètement avec ses soeurs qui ont mine de rien toutes une bonne dose de caractère.
Pour ce qui est du peu de description, c'est à la fois volontaire et involontaire. C'est un de mes défauts, je ne fais que très peu d'analyse, il faut que j'y remédie !!! Et aussi parce que je ne voulais pas couper le dialogue assez profond entre Mary et Kitty. Mais je comprends totalement que ça puisse manquer.
Loïse V.
Posté le 02/11/2020
Salut,
On en connais un peu plus sur les personnages. Mary a un caractère bien trempé il me semble.
C'est toujours aussi agréable.
Quelques fautes :
<< Vous accepter votre sort sans le moindre pincement? >> << Vous acceptez votre sort sans le moindre pincement ? >>
<< Ce qui m'est arrivé? >> << Ce qui m'est arrivée ? >>
<< à vous occuper d'eux jusque'a à la fin de leur jours >> << à vous occuper d'eux jusqu'à à la fin de leur jours >>
Bon, je l'admets, je chipote, mais quand on met un point d'interrogation, il faut mettre un espace avant et après. ^^
Bonne continuation.
Justinspiration
Posté le 02/11/2020
Oui je ne voulais pas décrire Mary comme un personnage mou et apathique.
Merci pour ta correction, je suis toujours preneuse.
Bonne journée
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