chapitre 2

Le policier riait à chaudes larmes. Assises en face de lui, le visage de Thomassine virait à l’écarlate. Comme tous les gens présents ce soir là à l’Opéra, elle avait été convoquée au commissariat pour raconter tout ce qu’elle avait vu, entendu ou noté d’étrange ce soir là. Dès qu’elle finit son récit et livré son avis sur le rôle de l’homme au béret et l’homme masqué, le policier avait craqué.

Elle se triturait les mains pour éviter que l’une d’entre elle ne finisse dans la figure du brigadier. Lucienne regardait sa fille changer de couleur et lui posa une main sur l’épaule pour l’inciter à se calmer. Après quelques instants d’hilarité, l’homme repris le contrôle.

-Mademoiselle, il est évident que vous avez eut un choc à la tête. Vos hommes sont sans doute ce Monsieur appelé le Persan et un comédien encore en tenue de scène.

-Ho oui, ma chérie, tu étais sous le choc. Ma pauvre enfant, perdu toute seule dans ce lieu terrifiant.

Thomassine roula ses yeux dans leurs orbites. Elle aurait volontiers hurlé sur sa mère d’arrêter de la traiter comme une gamine de quatre ans.

-Monsieur. L’événement fut traumatisant pour la jeune personne que je suis. Cependant, je sais bien ce que j’ai vu et vécu (elle insista sur ce mot) ce soir là. Et tout ce que je viens de vous dire n’est pas le fruit de mon imagination.

-Très bien mademoiselle dit-il avec condescendance.

Il ne nota rien de ses déclarations avant de prendre congé d’elle et ses parents. Tous deux avaient également témoignés mais leurs affirmations ne soutenaient (ni n’infirmaient) ceux de leur fille. Une fois à l’extérieur, Thomassine explosa.

-Non mais c’est quoi cet abruti ! Il me traite de menteuse et me traite comme une imbécile.

-Allons, calme-toi. Cela ne va pas faire changer les choses de t’énerver.

-Oui, ma chérie, ne fais pas ton hystérique. Tu as sûrement eu des hallucinations après cet horrible événement, renchérit sa mère.

-Non mère, je n’ai PAS eu d’hallucination ! Je sais ce que j’ai vu !

-Thomassine ne me parle pas sur ce ton ! Monsieur l’agent sait ce qu’il fait, c’est son métier.

Excédée, la jeune femme s’engouffra dans la voiture paternelle en vociférant tout le mal qu’elle pensait de la police. Au fond d’elle, une petite voix lui disait que si le policier ne l’avait pas cru, c’est parce qu’elle était une femme. Le comportement de l’officier et le peu d’attention qu’il lui avait accordé à elle et sa mère avait été flagrant. Il s’était montré bien plus focalisé sur Lucien et s’attendait à ce qu’il fût son seul interlocuteur. Sa parole n’avait-elle donc aucune valeur ? La frustration qui l’habitait ne la quitta pas jusqu’à la fin de la journée. Seul le sommeil endormit son tempérament de feu.