👑 CHAPITRE 19 👑

Il y a des moments pour lesquels nous nous pensons prêts. Des moments que l’on attends sans jamais les voir venir. Et puis, quand ils arrivent, nous nous retrouvons comme pétrifiés, la boule au ventre, la gorge sèche, le cœur battant. On peut sentir l’intégralité de notre être étant dans la plus grande des détresses car malgré tout ce que l’on a pu se dire pour faire pour se convaincre que tout irait pour le mieux, une infime partie de nous reste persuadée du contraire. Cette infime partie capable de tout remettre en cause et de bouleverser le moindre de nos plans en se basant seulement sur un «Et si... ?»

Le discours que j’ai tenu au Duc n’existait pas seulement pour le convaincre de croire en mon génie pour les devinettes, mais plus pour m’assurer que j’avais vu juste et que malgré ce fait indéniable que je suis actuellement dans une situation des plus délicate, j’arriverais à m’en sortir. Parce que j’ai toujours réussi à m’en sortir. D’une manière ou d’une autre, j’ai toujours réussi alors pourquoi avoir peur ? Pourquoi redoutais-je tant ce départ ? Je n’en avais pas la moindre idée. Ou peut-être que j’en savais les causes, mais que je refusais de les admettre. A l’heure actuelle, tout ce que j’ai pour moi ce sont deux ou trois neurones fonctionnels et un quotient de chance qui frise le ridicule. Celestia ? Je m’y attendais. A vrai dire, le cas contraire m’aurait profondément chagriné, mais même si j’ai de folles idées, ce ne sont pas ces dernières qui nous assureront notre survie une fois sur place. Il fallait que je trouve autre chose, que je réfléchisse à autre chose et que je le fasse le plus rapidement possible car le départ est là.

Que ressentent les soldats quand ils partent à la guerre ? Ont-ils peur ? Sont-ils emplis d’appréhensions et de doutes comme je le suis ? Ont-ils toutes ces questions qui leur traversent l’esprit ? Je ne sais pas ce que je suis censée ressentir et même si le Duc s’est voulu rassurant et même confiant, il se pourrait qu’il soit tout simplement meilleur acteur que je ne le suis. Son assurance apparente n’était-elle pas qu’une façade pour ne pas m’inquiéter de la suite des événements ?

Maintenant que le jeu a commencé, lui comme moi n’avons rien ni personne pour nous protéger si ce n’est nous-mêmes et honnêtement, je ne sais pas si cela suffira pour affronter mes aînés. Byron et Ivory tâcheront probablement de s’installer le plus rapidement possible profitant de leur vitesse pour prendre les devants sur les autres. Cybele et Kybele joueront la carte de la sécurité en tâchant de mettre des plans de secours en place. Gavin, Isidora et Chester... je ne peux guère prévoir. Ayant passé une majorité de leur enfance en dehors du palais, je ne les ai que très peu côtoyés ce qui m’a rendu mes rapports avec eux que plus compliqués. Gavin est plutôt solitaire tandis que Isidora et Chester sont plutôt ouverts sans vraiment être amicaux. Peut-être pourrais-je me rapprocher d’eux ? De toute évidence, il est primordial de considérer de possibles alliances si l’on veut réussir à tenir face aux aînés.

Mais qui de ces sept là serait assez fou pour accepter une alliance avec moi ? Je n’ai rien à offrir. Rien à échanger et rien à rapporter.

Visiblement, il allait falloir que je trouve non pas seulement un Plan B, mais également un Plan C et D pour parer à toutes éventualités et notamment la plus improbable qui est, pour moi le pire scénario : Affronter mes sept frères et sœurs les uns après les autres. Je ne gagnerais jamais le jeu ainsi. Je le sais. Ils me passeront dessus bien avant que je n’ai eu le temps de reconquérir ma propre province et honnêtement, il serait plus que désobligeant de constater qu’en plus d’être la dernière née, je sois la première à sortir du jeu. Je refuse ce cas de figure. Si je dois sortir, du jeu, c’est au moins en ayant sortis six d’entre eux.

Non... Je ne dois pas sortir. Je gagnerais. Je gagnerais le Ruler Game. Je gagnerais ce stupide et infâme jeu et le trône qui va avec.

Je serais alors la première et la plus jeune des reines ayant marqué l’histoire de Nettivia.

Et pour arriver à ce résultat-là, je vais devoir me battre sans foi, ni loi.