Chapitre 17 : La colère du capitaine.


 

  Dans un petit café pas loin du commissariat, l'inspecteur Peter Rodes est en train de prendre son petit-déjeuner, quand le lieutenant Hank Dawkins passe devant lui, il le voit, il le rejoint et s’assoit avec lui.

 

   Rodes : — Si tu ne te dépêches pas, tu vas être en retard.

 

   Dawkins : — Y’a rien qui presse. On y sera dans dix minutes et puis on aura qu’à dire qu'on faisait une réunion de travail sur notre affaire. D’ailleurs, si je me rappelle bien tu ne devais pas résoudre notre cas en dormant ?

 

   — J’y ai bien cru mais ça n'a rien donné.

 

   — Qu’est-ce que tu veux dire ?

 

   — Cette nuit, après avoir fait un drôle de rêve, je me suis dit que peut-être je savais qui était notre tueur.

 

   — Vraiment ! T’as eu une illumination ! Laisse-moi deviner ! Il faisait partie de notre liste des suspects ?

 

   — Non, j’ai suivi mon intuition sur un gars qui travaille dans une boîte de nuit. J'étais persuadé qu'il était relié à notre affaire. Alors ni une ni deux j’ai été le voir sur son lieu de travail, je lui ai commandé une boisson et j’ai rapporté le verre qu'il m'a servi au laboratoire. J’ai même demandé à Jameson de faire l’analyse des empreintes en urgence.

 

   — Et t’as eu les résultats ?

 

   — Jameson m’a envoyé les résultats il y a dix minutes.

 

   — J'ai compris, ce n’est pas concluant.

 

   — En tout cas, ça fait un suspect en moins.

 

   — Pas vraiment, il n’était pas sur la liste.

 

      Jameson sort du commissariat, il passe devant le café et voyant ses collègues il leur fait signe puis les rejoint.

 

     Jameson : — Salut les gars, je serais vous, je resterai hors du commissariat. J'ai dû trouver une excuse pour sortir de là.

 

     Dawkins : — Pourquoi ? Y’a quelque chose qui cloche ?

 

    — J’irai pas jusque là. Votre capitaine est terrifiant ! Je ne sais pas si c'est son tempérament habituel mais il m'a l'air dans un état de nervosité incroyable.

 

     Rodes : — Il a dû crier un peu, quand on n’est pas habitué ça peut surprendre, mais c'est probablement rien.

 

   — Je ne pense pas, je lui rapportais seulement la liste de nos dernières dépenses quotidiennes.

 

   — Ça n’a pas dû lui plaire !

 

   — Non, je lui ai déjà apporté ce genre de nouvelles, il n’avait jamais réagi de cette manière et le budget est relativement stable.

 

   — Tu n’as rien remarqué de spécial ?

 

   — À part le fait qu'il venait de raccrocher violemment, je n'ai rien à signaler.

 

   — Peut-être a-t-il reçu un reproche de la part du maire.

 

   Dawkins : — Je ne crois pas !

 

   — Que crois-tu qu’il soit arrivé ?

 

   — J’en sais rien ! Allons voir le capitaine ! On verra bien.

 

   — Donc si j’ai bien compris, tu veux affronter sa colère sachant qu’il doit certainement nous reprocher quelque chose et qu'on n’a pas de bonne nouvelle à lui présenter.

 

   — Je n’ai pas peur d’affronter un homme en colère et comme me disait mon instructeur à l’école de police :     « Face to face, out in the heat. Hanging tough, staying hungry. They stack the odds til we take to the street. For the kill with the skill to survive. »

 

     Jameson et Rodes chantant ensemble : — It's the eye of the tiger.

 

   — Alors on y va la chorale ?

 

   Jameson : — J’ai réussi à me sortir de la gueule du loup, je ne vais pas y retourner. Désolé mais je passe mon tour pour cette fois, en plus j’avais un truc de prévu.

 

   — C’est quoi ce truc ?

 

   — Je vais à une conférence sur les nouvelles techniques scientifiques qui aident la police à résoudre des crimes.

 

   Rodes : — Ça semble intéressant ! Je devrais peut-être t’accompagner. Je ne crois pas que j’apprendrais grand chose mais j’évite les problèmes tant qu'on a rien de neuf.

 

   Dawkins : — Je pensais t'avoir convaincu avec mon speech.

 

    — Pas vraiment, j’ai vu l’œil du tigre et même avec cet œil, le gagnant du match était dans un piteux état à la fin.

 

    — En tout cas moi, j’y vais.

 

    — Bonne chance. Et cette conférence, c'est où ?

 

     Jameson : — C’est pas très loin d’ici, vingt minutes à pied.

 

    — Une bonne marche, ça me va, un peu d’exercice me fera du bien et puis si j’ai un coup de mou, je pourrais toujours faire la sieste pendant la conférence.

 

    Ils se séparent laissant Dawkins seul retourner au commissariat pour affronter la colère du capitaine. Dawkins frappe à la porte du bureau de Walker.

 

     Walker : — Entrez !

 

    Dawkins : — Bonjour monsieur.

 

     — Bonjour Hank. Au fait, vous avancez un peu sur le cas Martin ?

 

     — Pas vraiment, on progresse lentement mais ça suit son cours, je venais juste pour vous saluer.

 

     — Vous avez rien de mieux à faire ?

 

     — Si, je retourne à mon enquête tout de suite.

 

     — Et que fait Rodes ?

 

     — Il accompagne Jameson à une conférence sur la résolution des crimes.

 

     — Ils ont vraiment besoin d’y aller à deux ?

 

     — Il faut bien se tenir au courant des dernières méthodes d’investigations.

 

     — Et pourquoi vous n’y êtes pas allé avec eux ?

 

     — J’utilise la vieille méthode, elle me suffit amplement.

 

     — Je ne sais pas, je ne la trouve pas si efficace que ça votre méthode. Vous n’avancez pas dans votre affaire !

 

     — Je n’ai aucun doute ! Nous allons résoudre le cas Martin.

 

     — Quand allez-vous le faire ?

 

     — Je n’ai plus beaucoup de suspects, si j’arrive à mes fins je dirais avant la fin de cette semaine.

 

     — Je suis sûr que cela va encore nous coûter une petite fortune. L’argent c'est toujours ce qui nous manque.

 

     — Nous aurons certainement des frais supplémentaires, je pense rester raisonnable néanmoins j’aurais besoin d’avoir carte blanche.

 

     — Qu’on ne me parle plus de cartes !

 

     — Pourquoi ?

 

     — Je ne devrais pas vous le dire.

 

     — Vous pouvez tout me dire, ceci restera entre nous. Je suis votre ami.

 

     — C’est si embarrassant et frustrant.

 

     — Je vois que cela vous mine, vous devriez en parler.

 

     — J’ai juste cassé quelques stylos.

 

     — Et vous avez déchiré pas mal de papiers.

 

     — Ah ça ! Ce ne sont que de vieux rapports qui allaient finir dans un placard. Personne ne les relit jamais de toute façon. Ils restent dans ces placards des années jusqu'à ce qu'on les archive.

 

     — Toute cette paperasse est déjà informatisée, selon certains, c'est plus facile à retrouver sur l’ordinateur.

 

     — Je déteste ces maudites machines.

 

     — Je ne suis pas un grand fan non plus, mais ils nous aident parfois.

 

     — Croyez-moi, ils ne causent que des ennuis.

 

     — Qu’est-ce qui vous tracasse ? Dites m’en plus !

 

     — C'est une longue histoire.

 

     — J’ai bien quelques minutes à vous accorder. Vous savez que vous pouvez tout me dire. Je suis là pour vous capitaine.

 

     — Très bien ! Comme vous le savez, je vois souvent mes neveux. Depuis des années ça m’a souvent fait du bien, ça change du quotidien de la vie de policier. Je me rappelle du bon vieux temps, quand ils étaient petits, je faisais souvent le baby-sitter pour ma sœur, elle avait l’habitude de me laisser plusieurs heures avec eux. Pour être honnête quand je les gardais, je les laissais regarder la télé pendant des heures et malheureusement un jour, un de mes neveux me balança à ma sœur. Suite à cela, elle me fit la morale sur ce que je devais faire avec les enfants et elle me dit que les enfants ne devaient pas regarder la télé que je devais jouer avec eux, les emmener au parc, enfin ce genre d’activités épuisantes. J’ai bien essayé au début de jouer au ballon avec eux, de dessiner avec eux, mais les heures ne passaient pas assez vite alors j'ai eu une idée pour faire passer le temps, je leur ai appris à jouer au poker.

 

   — Apprendre le poker à des enfants !

 

   — Ce n’est pas si aberrant que ça. Mon père avait fait la même chose avec moi, à l’époque je n’ai pas vu le mal et puis je ne jouais pas avec de l’argent, quand ils jouaient avec moi, il n’y avait qu’à gagner des cookies et des bonbons.

 

   — Et alors ?

 

   — Alors mes neveux ont grandi, on ne peut pas tout le temps leur offrir des bonbons et des jouets bon marché. Il y a quelques années, j'ai offert un ordinateur à l’aîné pour son anniversaire.

 

   — C'est vraiment généreux de votre part.

 

   — Non, on ne peut pas vraiment dire ça, je l’ai eu au rabais à une des reventes d’objets confisqués que l’on fait suite à une perquisition chez un malfrat, ce jour-là j’aurais mieux fait de lui prendre une console.

 

   — Que s’est-il passé avec l’ordinateur ?

 

   — Il a commencé à jouer au poker en ligne et il s’est gravement endetté.

 

   — Tous les jeunes ont des petits problèmes, ce n'est pas nécessairement votre faute.

 

   — Je ne sais pas, je me sens tout de même responsable surtout quand je repense à l’année dernière, je lui ai offert un appareil photo numérique.

 

   — C'est un cadeau anodin.

 

   — Il s’en est servi pour faire des photos de lui inappropriées et avec elles, il s’est prostitué sur des sites pour payer ses dettes de jeu.

 

   — Maudite technologie, il n’en sort jamais rien de bon.

 

   — C’est bien ce que je pense.

 

   — Vos autres neveux s’en sortent certainement mieux que l’aîné !

 

   — Oui le cadet est encore étudiant, il se débrouille pas mal et grâce à mes contacts j'ai réussi à trouver un travail pour ma nièce.

 

   — Elle fait quoi ?

 

   — Je ne sais pas trop, j'ai demandé au maire si il connaissait quelqu'un qui pouvait l’embaucher.

 

   — Et elle travaille pour qui ?

 

   — Pour la boîte du frère du maire, ils ont toujours besoin de nouveaux employés selon le maire.

 

   — À ce propos, j’aimerais vous dire deux mots.

 

   — Qu’est-ce qu'il y a ?

 

   — On aurait des soupçons sur les activités du frère du maire.

 

   — Quelles activités ?

 

   — Criminelles.

 

   — C’est une plaisanterie ! Je veux tout savoir, tout de suite !

 

   — Pour résumer, il ferait partie d’un cartel avec son frère et maître Maxime Gardin.

 

   — Qui est le quatrième ?

 

   — Un gars qui serait à l’étranger.

 

   — Ma sœur va me tuer !

 

   — Si ça se trouve votre nièce n’a aucun rapport avec leurs activités criminelles, elle peut faire des choses anodines comme de la paperasse.

 

   — Vous rêvez, ces gars sont loin d’être des idiots, ils ont dû impliquer ma nièce dans leurs trafics, pour avoir un moyen de faire pression sur moi.

 

   — Capitaine, nous allons sortir votre nièce de leur organisation, ensuite on les fera payer pour tout ce qu'ils ont fait.

 

   — Ça ne sera pas simple.

 

   — Nous y arriverons !

 

   Du côté de la conférence, Rodes et Jameson marchent côte à côte. Des gens les saluent et leurs sourient, on entend même plusieurs personnes dire : « Salut Nick ».

 

   Rodes : — T’es une vraie star ici !

 

   Jameson : — Non, j’ai rien d’une star. Ici t’es au royaume des nerds, on forme une petite communauté d’habitués qui viennent à ce genre d’événements, à force de voir toujours les mêmes visages, on finit par être reconnu.

 

   — Et pourquoi, ils t’appellent tous Nick ?

 

   — Tu croyais vraiment que je m’appelais Jameson !

 

   — Il faut dire que tout le monde t’appelle comme ça.

 

   — C’est qu’au laboratoire au début on appelle les gens par leurs titres suivis de leurs noms de famille et puis après quelques temps on oublie les titres, ce qui fait qu'il ne reste plus que le nom de famille.

 

   — Tu veux que je t’appelle par ton prénom, mon pote.

 

   — On est pote maintenant !

 

   — Ouais, après cette conférence, on peut bien dire qu'on a dépassé le stade de simple collègue. Tu peux m’appeler Peter si tu veux maintenant.

 

   — Non, ne changeons rien, ça me va si tu m’appelles Jameson. Viens ! On va voir la vraie star de cette conférence, je l’ai surnommée la bête. C'est une vraie merveille !

 

   — C'est quoi ce monstre !

 

   — Cette beauté est ce qui se fait de mieux. Si j’avais cette machine au laboratoire, je gagnerais des heures.

 

   — On dirait l’ordinateur de la batcave.

 

   — Et comme pour la batcave, il faut être milliardaire pour y avoir accès.

 

   — Mais tu n’as pas à peu près la même chose à notre laboratoire ?

 

   — Comment puis-je t’expliquer cela ! La bête va à la vitesse de la lumière pendant que notre laboratoire avance péniblement comme un chariot tiré par un poney avec une roue abimée.

 

   — T’exagères pas un chouia !

 

   — À peine. Tu peux me prendre en photo ?

 

   — Tu veux faire croire que tu travailles avec la bête ?

 

   — Non, c’est juste un souvenir et puis je la posterais peut-être sur mon site.

 

   — Tu passes beaucoup de temps sur ton site, je l’ai vu, il est mis à jour quotidiennement. Comment fais tu avec ton boulot ? Tu passes tes journées au laboratoire.

 

   — Une fois qu’on lance une analyse, on laisse faire la machine, alors en attendant les résultats on a généralement pas mal de temps, ce qui fait que j’ai tout le temps de lire un livre, de regarder ce qui se passe sur le net et évidemment j’en profite pour mettre à jour mes différents sites.

 

   — T’en as plusieurs !

 

   — Oui si tu veux je te les montre.

 

   — Avec plaisir.

 

    Trois heures plus tard, Rodes et Jameson rentrent au commissariat, ils sont accueillis par le lieutenant Dawkins.

 

    Dawkins : — C’était bien cette conférence ?

 

    Rodes : — Contrairement à ce que je pensais, on s’est bien amusé. L’humeur du capitaine s’est améliorée ?

 

   — Non, mais j'ai eu le temps de concocter un plan que je dois fignoler pour résoudre tous nos problèmes d’un seul coup.

 

   Jameson : — Vous avez besoin de moi pour votre projet.

 

   — Évidemment et j’aurais besoin de toute votre équipe, je vous enverrai les détails plus tard.

 

    Rodes : — Tu vas utiliser les grands moyens.

 

   — On n’a pas vraiment le choix, le cartel est allé trop loin.

 

   — Tu as la preuve que le cartel a fait tuer Janis Martin.

 

   — J’aimerais bien, mais non. Néanmoins mon plan devrait démêler les choses.

 

   — T’auras besoin de moi ?

 

   — Que ferais-je sans toi Pluto !

 

   — Et le capitaine, que va-t-il dire de ton plan ?

 

   — Le capitaine n’a rien à nous reprocher, il n’a donc pas besoin de connaître les détails de mon plan. Si tu veux tout savoir au sujet de sa mauvaise humeur, ça n’a rien à voir avec nous, il a des problèmes de famille, il va les résoudre, c’est tout.

 

   — Du moment qu'il ne nous crie pas dessus. Moi ça me va.

 

   — Si tout marche comme prévu et que tu ne fais pas de bourde, ça devrait aller.

 

   — Je ne fais pas de bourde !

 

   — Tiens, tu vois cette enveloppe dedans il y a la liste de toutes tes erreurs.

 

   — N’importe quoi ! T’as vraiment du temps à perdre pour faire ce genre de liste.

 

   — Je ne vais pas à des conférences moi. Il faut bien que je m’occupe. T’as appris au moins quelque chose d’utile à cette conférence ?

 

   — Tout le monde aime Batman.

 

   — Vous êtes allés voir un film ?

 

   — Non, mais maintenant que j’y pense, la prochaine fois qu'on séchera le travail, j’emmènerai Nick au cinéma.

 

   — Qui est Nick ?

 

   — Mon pote.

 

   — T’es pas croyable ! Je te laisse, j’ai besoin de calme si je veux boucler cette affaire au plus vite.

 

   — On se voit demain alors. Au fait, où est le capitaine ?

 

   — Il est rentré plus tôt car demain il voit sa nièce, il doit lui parler de choses sérieuses et aussi je t’informe qu’on ne se verra pas demain. J’ai pris un jour de congé.

 

   — Si c’est comme ça, je rentre aussi.

 

   — Mais t’as rien fait de la journée !

 

   — T’as raison, ce soir je vais consulter un spécialiste.

 

   — Qui ?

 

   — Batman.    

 

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