Avorian revint environ une demi-heure plus tard dans le jardin. Le soleil commençait à décliner. L’étrange lune beige, elle, poursuivait son ascension vers les cieux.
En regardant le mage avancer vers moi, presque avec un sourire, je me sentis révoltée. Je réfléchissais à la manière de formuler les choses. Je n’arrivais pas à trouver mes mots. Comment faire preuve de tact, en de telles circonstances ? Je lui en voulais tellement ! J’annonçai brutalement :
– Ça y est ? Vous m’avez gommée de la surface de la Terre ?
– Oui. Je suis vraiment désolé, Nêryah, crois-moi.
Je défiai Avorian du regard, la rage au ventre. Incapable de le soutenir, le mage préféra détourner ses yeux des miens, visiblement confus. Il recula de quelques pas, l’air abattu, le visage et le dos courbés sous le poids de son embarras.
– Joli piège : en effaçant la mémoire de mes proches, je n’ai pas d’autre choix que de rester sur Orfianne…
– Je ne l’ai pas fait pour t’obliger à rester… mais pour que ta famille ne souffre pas de ton absence. Tu as donné ton accord, Nêryah.
C’est vrai. Mais moi je me souviens de tout…, pensai-je.
Après un long moment de silence, il ajouta :
– À ton retour, on annulera le sort. Tout le monde se souviendra de toi. Je te ramènerai le plus loin possible dans le passé, on trouvera une excuse plausible pour expliquer ta disparition.
Je ne savais pas quoi en penser. Toute ma vie sur Terre, balayée en un clin d’œil, comme si je n’avais jamais existé. Mes pauvres parents. Quelle tragédie ! Avorian était-il certain de pouvoir leur rendre la mémoire ? Et surtout, allais-je véritablement un jour rentrer sur Terre ? Comment en être sûre ?
J’avais l’impression de devenir le pantin de la chorégraphie que j’avais créée pour la danse.
Chorégraphie que je ne ferai jamais… quel gâchis !
– La nuit va bientôt tomber, rentrons.
Une fois revenus à la maison par l’étrange ouverture invisible, Avorian me conduisit à ma chambre. Il me proposa de me laver et de me changer avant de dîner. Le soleil se couchait. Une boule de lumière jaune pâle, de la grosseur d’un ballon, éclairait la pièce, comme un petit astre, suspendue au milieu du plafond. Rien à voir avec une lampe. Cela m’évoqua tout de suite un procédé magique.
Je m’approchai de la fenêtre ronde, sans vitre, et touchai le vide. Des cercles concentriques se formèrent sous mes doigts. Cette fois, je ne sentis aucun courant d’air. Cette forme de magie isolait sans doute la maison, et devait probablement disparaître pour l’aérer selon les envies de ses habitants.
J’observai ma chambre. La couleur jaune pâle des murs se mariait joliment au sol en bois vernis. Le mur du fond prenait la forme d’un arc de cercle, dessinant une courbe élégante. La salle de bain, cachée par un simple rideau ocre, jouxtait l’entrée de la pièce (elle aussi isolée par une tenture en tissu). Une large baignoire en pierre grise trônait au fond. On aurait dit qu’elle avait été taillée directement dans un rocher, et posée là, sans finitions. J’imaginais son poids insoulevable. Peut-être Avorian l’avait-il emmenée par des moyens magiques ? Un autre récipient en pierre faisait office de lavabo. Je trouvai une serviette et des savons sur une petite étagère en bois. Comment remplir mon bain ? Je ne voyais aucun robinet. J’effleurai le rebord de la pierre et… incroyable ! L’eau se mit à jaillir miraculeusement du fond de la baignoire ! En quelques secondes seulement, un bon bain chaud s’offrait à moi, avec une température idéale, comme si cette maison devinait mes pensées ! J’en profitai un long moment – l’eau ne se refroidissait même pas !
Enfin propre, je découvris une jolie robe bleue sur mon lit.
Je retrouvai facilement le chemin jusqu’à la salle à manger, éclairée par une boule lumineuse identique à celle de ma chambre. Affamée et fourbue, je lorgnais les plats alléchants étalés sur la table. Nous dégustions les fruits et légumes Orfiannais. Certains ressemblaient tant par l’aspect que par leur goût au melon, à la carotte, ou encore à du concombre. Ce menu végétarien me convenait parfaitement, mais rien ne pouvait remplacer les délicieux petits plats de ma mère.
Lorsque je lui demandai pendant le repas comment la baignoire pouvait se remplir toute seule d’eau chaude, Avorian m’expliqua qu’il s’agissait d’un sort très astucieux réalisé par les fées – oui, j’avais bien entendu, les fées !
– Avorian, depuis mon arrivée ici, je me sens vraiment mal, comme si mon corps me pesait. J’ai tout le temps la migraine et ça fourmille partout dans mes membres.
– C’est tout à fait normal. Ton corps doit peu à peu s’habituer aux vibrations d’Orfianne. Cela ira mieux de jour en jour, rassure-toi. Comprends-tu maintenant pourquoi tu ne peux pas revenir sur Terre ? Traverser le portail entre les deux mondes s’avérerait fatal.
Je croquai dans un fruit juteux, la mine soucieuse.
– Demain, nous commencerons ton entraînement, m’annonça-t-il.
– J’imagine que c’est le seul moyen de contrôler mes pouvoirs…, répliquai-je.
Le mage grignota une galette de céréale. Il s’arrêta de mâcher et releva la tête. Son regard se fit intense.
– Nêryah… j’ai guéri ta mère de sa stérilité, déclara-t-il d’une voix douce. Elle est désormais féconde.
– Oh, merveilleux ! ironisai-je, l’applaudissant lentement, le regard noir.
– Je ne recherche pas ta gratitude, Nêryah. Je sais que tu es en colère contre moi, et c’est légitime. J’essaie de faire au mieux, pour tout le monde…
Avorian se redressa, recula un peu sa chaise et se leva. Il fit le tour de la table pour me retrouver. L’homme sans âge prit doucement ma main ; je la retirai d’un geste brusque. Je bondis de ma chaise et pris congé dans ma chambre.
Malgré mes questionnements, mes doutes, je sombrai sans m’en apercevoir dans un sommeil profond, harassée par toutes ces mésaventures.
Et l'apprentissage de Nêryah s'annonce passionnant.
Tu as vraiment beaucoup d'imagination.
Es-tu bien certaine que tu ne viennes pas d'un autre monde également ?
Haha, eh bien, petite je parlais une autre langue et répétais sans cesse que je venais d'un autre monde ^^
Neryah ne s'interroge plus du tout sur son passé, c'est bizarre non ?
On a l'impression qu'Avorian l'entraîne pour la guerre à tout lui apprendre tout d'un coup, je ne pense que cela soit bon signe^^
A bientôt !
Pour répondre à tes suggestions + des idées que j'ai eu : il n'y a plus de potion (Nêryah garde la mémoire), les entraînements sont plus loin et espacés dans le temps, l'ordre est un peu différent
J'espère que ce sera plus pertinent ainsi. Hâte d'avoir ton avis (je sais que tu seras débordée par ton histoire ce mois-ci ^^ moi c'est par les concerts ;) )