Suite à ce premier essai infructueux, Athénaïs ne chercha pas à poursuivre l'entraînement et Rhéane lui en fut reconnaissante. À la place, elle lui proposa une partie de Petteia, un jeu de pions et de stratégie qu’elle connaissait bien. Rhéane accompagna l’enchanteresse jusqu’au patio. Elles s’assirent à l’ombre d’un olivier en fleurs. Athénaïs déposa le plateau sur la table en pierre et elles commencèrent à jouer avec les oiseaux en fond sonore et les roulements des vagues en contrebas. Le cadre était apaisant et Rhéane sentit la pression accumulée sur ses épaules lentement se dissoudre. Peu à peu son esprit fut accaparé par le jeu.
Pour chaque coup, Rhéane prenait son temps. Elle élabora plusieurs tactiques pour capturer les pions de son adversaire. Cela lui rappelait ses parties avec son père. Il avait toujours aimé les jeux de stratégie certainement, car il avait plus de marge de manœuvre que dans la vraie vie.
— Tu as l’habitude. Avec qui joues-tu ? lui demanda Athénaïs alors qu’elle récupérait un nouveau pion.
— Je jouais avec mon père.
Rhéane se mordit la lèvre inférieure. La réponse avait filé comme une évidence.
— Il est mort ?
— Oui, depuis quelques années.
— Quel métier faisait-il à la fin de sa vie ? Sculpteur ? Poète ? Politicien ? Marchand ?
— Comédien. C’était un comédien.
Elle préféra dire la vérité pour ne pas risquer de s'emmêler dans ses mensonges.
— Intéressant.
— J’ai gagné, déclara Rhéane en subtilisant le dernier pion.
Athénaïs fit une moue contrite.
— Il me faut ma revanche ! s’écria-t-elle.
Rhéane lui sourit et engagea un nouveau duel. La deuxième partie fut plus corsée, Athénaïs réussissait à parer tous ses pièges. Alors qu’elle commençait à prendre confiance, Athénaïs bloqua deux de ses pions et les captura. Rhéane grimaça, déçue de ne pas avoir anticipé les actions. Un mince sourire se dessina sur les lèvres de l’Enchanteresse.
— Alors, on est bloqué ma belle amie ?
Rhéane réfléchit. Comment avait-elle fait pour se laisser piéger ? Elle déplaça le galet d’une case pour tenter de sortir de l’encerclement, mais elle se rendit compte trop tard de sa mauvaise manœuvre.
— Tu ne peux plus te déplacer ! J’ai gagné !
Athénaïs se mit à rire en voyant sa mine déconfite et se leva. Rhéane fut tentée de tricher en rajoutant un pion, mais cette méthode ne fonctionnait qu’avec ses frères.
Elle devait s’avouer vaincue. Athénaïs gloussa.
— Je constate que tu n’aimes pas perdre !
— Pas du tout, rétorqua Rhéane en se forçant à détendre les traits de son visage pour lui prouver le contraire.
Athénaïs s’esclaffa encore plus fort, nullement dupe. Elle riait toujours lorsque Sylviène traversa la terrasse et s’arrêta à côté d’elles.
— Madame. Le Polémarque Alcénor est là. Est-ce que vous souhaitez le recevoir ?
Athénaïs leva les yeux au ciel.
— Bon, oui, laisse-le entrer. Nous avons fini.
Sylviène s’exécuta. Quelques instants plus tard, deux hommes s’avancèrent sur la terrasse d’Athénaïs.
Le premier était âgé, très grand, avec de longs cheveux blancs et une barbe tressée. Des sourcils broussailleux surmontaient des yeux bridés et perçants. Sa tunique mélangeait des bandes de cuir avec du lin et des rouleaux d’écriture étaient accrochés à sa large ceinture. Ses doigts étaient tachés par de l’encre ainsi que ses manches. Il s’avança de quelques pas et Rhéane remarqua qu’il boitait.
Le second, en retrait, était un jeune homme d’une vingtaine d’années. Il avait un air de rat des champs avec une peau tannée par le soleil, un nez mutin, des cheveux blonds comme la paille et des petits yeux noisette. Quel rôle avait-il ? Était-il l'équivalent des ménines, mais pour les hommes ?
Les invités se courbèrent et attendirent qu’Athénaïs leur dise de se redresser. Ce qu’elle fit d’un geste lasse.
— Rhéane, je te présente Alcénor. C’est le premier polémarque de sexe masculin de notre confédération.
— Je suis enchantée de vous rencontrer, déclara-t-elle.
— J’aimerais que ce sentiment soit réciproque, mais je vous avoue que je dois gérer en ce moment même, les répercussions de votre tremblement de terre et cela ne m’enchante guère.
— Comme tu le vois. Alcénor n’a pas la langue dans sa poche. Un trait de caractère qui lui a valu plusieurs ostracismes. Que puis-je pour toi ?
— J’aimerais avoir accès aux archives de la capitale pour recenser les habitants et dénombrer les victimes. Vous êtes bien en charge de ce district ?
— Oui.
Athénaïs marqua un moment de pause puis reprit :
— Cela ne peut pas attendre ?
— Si vous êtes occupée, je peux faire ma demande à son éminence Isaline.
— Non. Ce ne sera pas nécessaire, grommela Athénaïs.
L’enchanteresse se leva, ferma les yeux et demeura immobile. Après quelques secondes, un halo doré de plusieurs coudées apparut dans la pièce. À travers la fenêtre, Rhéane discerna une vaste bibliothèque.
La bibliothèque de l’acropole ! Une vague d’espoir la submergea. Elle devait s’y rendre pour récupérer le livre de comptes du marchand d'esclaves ! Athénaïs traversa le portail, suivie de près par sa ménine et elles disparurent dans les rangées d’ouvrages. Rhéane se demanda où se trouvait une telle salle ; l’endroit lui paraissait immense.
Une toux artificielle détourna son attention de la bibliothèque. Alcénor la dévisageait avec insistance. Son observation la déstabilisa. Était-il intéressé par sa personne, car elle était nouvelle ou parce qu’elle était responsable du tremblement de terre ?
— Puis-je vous transmettre un message de votre mari ?
— Bien entendu, répondit Rhéane, un peu surprise par la demande.
Le polémarque s’approcha et lui tendit un morceau de papyrus. Rhéane le déroula et en lut l’inscription : Entretien ce soir au coucher du soleil, quartiers des archontes, fontaine du sphinx. Alcénor est avec nous.
Rhéane se força à ne rien laisser transparaître sur ses traits. Elle hocha seulement la tête et rangea le message dans la poche de sa toge. Qu’avait voulu dire Aleksander par “Alcénor est avec nous” ? Lui avait-il révélé leur subterfuge ? Non. Elle n’espérait pas. Et pour quelle raison se joignait-il à eux ?
Le polémarque recula lorsque les silhouettes d’Athénaïs et de sa ménine se matérialisèrent. Elles revinrent dans ses appartements avec des rouleaux en main.
— Voilà. Je pense que vous allez être occupé pour les deux prochains mois.
— Merci beaucoup, répondit Alcénor en récupérant les précieux documents des mains des deux femmes.
Il rangea les manuscrits à sa ceinture et s’inclina.
— Je ne vais pas vous déranger plus longtemps. J’ai du travail. Philis, nous y allons.
Le serviteur qui attendait près d’un oranger rejoignit son maître.
— Attendez, les arrêta Athénaïs.
D’une démarche lente et suave, l’enchanteresse s’approcha du jeune serviteur et tournoya autour de lui comme une abeille. Le ménin se mit à rougir brutalement.
— Cher polémarque, vous n’êtes pas contre le fait que je garde votre ménin quelques heures ?
Alcénor fixa la mage puis son apprenti. Il émit un bruit de bouche désagréable qui témoignait de son irritation.
— Non, mais essayez de me le retourner avant le milieu d’après-midi. J’ai besoin de lui.
— Bien entendu, assura Athénaïs avec un sourire. Merci beaucoup.
L’enchanteresse passa un doigt sur les épaules du jeune homme dans un mouvement sensuel et commença à sillonner son torse. Un sentiment de malaise envahit Rhéane.
Athénaïs sembla soudain se rappeler qu’elle n’avait pas congédié ses invités et s’arrêta.
— Rhéane, très chère, convoque ta ménine pour qu’elle t’accompagne jusqu’au réfectoire. Je t’y rejoindrai plus tard.
Rhéane acquiesça et réalisa une petite pression sur son cristal de Nimbe. Celui-ci se mit à scintiller.
— Vous pouvez y aller, Alcénor.
Le polémarque s’inclina puis tourna les talons. Rhéane, qui ne tenait vraiment pas à rester dans la même pièce qu’Athénaïs et Phillis, s’empressa de le suivre. La démarche claudicante du politicien le rendait particulièrement lent et elle n’eut pas de mal à le rattraper. Ils demeurèrent muets en traversant les appartements de l’Enchanteresse. La sévérité qui se dégageait du polémarque l’impressionnait, elle sentait qu’il n’était pas un homme à se laisser faire par les femmes.
— Vous connaissez donc mon mari ?
— Oui.
Rhéane attendit qu’il développe, mais elle n’obtint aucun autre éclaircissement. Il gardait les yeux rivés vers la sortie.
Lorsqu’ils passèrent le portail, ils tombèrent nez à nez avec Théodora. Un mince sourire se forma sur les lèvres du vieil homme.
— Théodora. Comment vas-tu ? demanda-t-il.
Rhéane nota que son ton était nettement plus chaleureux que lorsqu’il s’adressait à Athénaïs ou elle-même.
Théodora se courba devant l’archonte supérieur. Une révérence bien plus longue et bien plus respectueuse qu’elle ne lui témoignait. Une fois redressée, elle murmura en jetant un regard en biais à Rhéane.
— Je… Je survis…
Ils se connaissaient bien. Même très bien.
— Où est Philis ? Il n’est pas avec vous ? s’enquit sa ménine.
— Il est resté avec Sibylle Athénaïs.
Les sourcils de Théodora se haussèrent sous la surprise, sa bouche s’arrondit dans une exclamation muette.
— Il ne sera pas libre avant le milieu d'après-midi, précisa Alcénor.
Rhéane eut l’impression que cette information était d’une grande importance pour eux. Théodora hocha la tête et se tourna vers elle.
— Venez, Madame. Les autres Enchanteresses vous attendent.
Rhéane porta immédiatement ses doigts à son vêtement et se mit à le triturer. Elle suivit sa ménine dans un silence de plomb. Celle-ci la devançait et elle repéra plusieurs marques récentes de griffures rouges sur ses bras ainsi que des bleus. L’avait-on battu pour son mauvais comportement ?
Elle n’osa pas l’interroger de peur d’entrer en conflit avec sa ménine.
Elles arrivèrent au réfectoire pour l’heure du déjeuner. La salle était vaste, dotée d’une voûte en berceau. Une multitude de fenêtres perçaient les murs et laissaient entrer la lumière du jour en nuée. Un brouhaha chaleureux régnait dans la pièce jusqu’à ce que les sibylles remarquent leur arrivée. Rhéane sentit une constellation de regards sur son être et son courage se liquéfia. Sans l’insistance de Théodora, elle serait restée immobile au milieu de la pièce. Alors qu’elles s’approchaient de l’immense table rectangulaire, l’une des sibylles lui adressa la parole.
— Alors, Rhéane, comment s’est passé ce premier entraînement ?
— Surprenant ! J’ai l’impression de me redécouvrir.
Rhéane sourit avec toutes ses dents, comme le faisait sa mère quand elle était fière d’elle-même. Elle ajouta :
— Je suis vraiment estomaquée par les lieux ! Quelle magnificence ! Quelle grandeur !
Des rires amusés lui répondirent.
— Asseyez-vous, son éminence Isaline ne va pas tarder, proposa une autre sibylle.
Rhéane s’installa sur un fauteuil molletonné, en bout de table alors que Théodora s’éloignait du banquet. Jamais Rhéane n’avait vu autant de nourriture. Elle reconnut des dattes de Hieriopolis, du vin de Nimbie, des mets traditionnels de Zoumar, et des tourtes d'Hellespont. Tous ces mets lui mirent l’eau à la bouche et elle se servit copieusement. Plusieurs enchanteresses lui posèrent des questions sur sa cité natale puis sur ses passions. Elle raconta sa vie tranquille à Iona, ses voyages en tant que marchande et ses visites. Ses réponses eurent droit à des sourires polis. Alors que les plats étaient remplacés par des desserts, elle en profita pour observer les enchanteresses. Sibylle Olga, à sa droite, n’avait pas touché à un seul de ses plats. Son allure d’ascète, sa stature rigide et son regard froid la mettaient mal à l’aise. Bien qu’elle soit assise, la mage gardait sa canne près d’elle. De la sculpture couleur ambre émanait une lueur diffuse. Rhéane comprit enfin qu’il s’agissait de sa création de couronnement.
Quelques chaises plus loin, deux mages discutaient comme si le monde n’existait pas autour d’elles. Leurs doigts entremêlés, les regards tendres qu'elles échangeaient, les plats qu’elles se faisaient goûter : tout portait à croire qu’elles formaient un couple heureux.
— Qui sont-elles ? osa-t-elle demander à sa voisine.
— Celle qui est borgne se nomme Calypso. Nejemet est celle qui a les cheveux rasés. Elles sont ensemble depuis des années, rien ne peut les séparer. Tu devrais les rencontrer bientôt. Elles vont te former.
Rhéane acquiesça.
— Quelles formes du Nimbe maîtrisent-elles le mieux ?
— Tu le découvriras.
Rhéane mordit ses lèvres de frustration. Son regard s’arrêta sur un visage jeune parmi les sibylles. Certainement une ménine. L’une des enchanteresses embrassa la femme devant tout le monde avant de la congédier. Rhéane détourna les yeux, gênée par cette démonstration. À bien y réfléchir, elle avait rarement vu autant de décontraction dans les relations amoureuses. Dans leur Confédération, seuls les couples âgés s’affichaient publiquement. Toutes les histoires mythologiques portaient en triomphe l'amour des Aînées, considérées comme le centre de tous les désirs autant pour les hommes que pour les femmes. Le fait que cette mage s'affiche avec une jeune femme montrait qu'ici, ces considérations avaient peu cours.
— Est-ce que beaucoup de sibylles sortent avec leurs ménines ?
Sa voisine éclata de rire.
— Prends-tu chaque cas particulier pour des généralités ?
Rhéane bafouilla :
— Bien sûr que non.
— À l'acropole, nous sommes libres de vivre la vie qui nous plaît, sans jugement. Les relations se font et se défont et les ménines ne restent pas jeunes si longtemps !
Rhéane acquiesça et enfourna une part de gâteau au miel dans sa bouche pour éviter de prononcer une nouvelle question idiote. A bien réfléchir, elles n’avaient jamais vu sa mère et son père s’embrasser, ni même se tenir la main. Elle se demanda si son existence même ne provenait pas d’un simple besoin de main-d'œuvre gratuite.
Peut-être que le désir sexuel n’arrivait qu’à partir d’un certain âge et que ses parents ne l’avaient pas encore atteint ? Les sibylles autour d’elles avaient l’air épanouies. Sa théorie se tenait donc.
L’Actoria Isaline entra dans le réfectoire alors que le repas se terminait. Comme à son habitude, elle resplendissait. Un halo lumineux entourait sa tiare et rehaussait son teint doux et clair tel de l’eau de roche. Elle portait une robe pourpre en partie échancrée aux jambes et un bustier ciselé de fils d’or qui mettait en valeur sa chevelure opaline. Rhéane demeura persuadée que même en haillons, elle rayonnerait. La mage était suivie par six ménines d’âge différent. Les sibylles se levèrent pour saluer leur cheffe et se courbèrent respectueusement.
Une sibylle lui donna un coup de coude et Rhéane se rendit compte que, hypnotisée par la scène, elle était toujours assise. Elle se redressa d’un bond.
Dans la précipitation, son bras heurta son verre de vin et le contenu se répandit sur la table en bois. Son visage devint un masque d’horreur alors qu’elle croisait le regard amusé de l’Actoria. Mais quelle maladroite ! pensa-t-elle. Par toutes les sibylles, elle avait vraiment envie de se donner des gifles. Non, elle méritait des gifles.
L’Actoria s’installa en face de Rhéane et lorsqu’elle s’assit, le reste des convives l’imita. Les discussions reprirent, mais furent plus calfeutrées avec des propos moins tapageurs comme si toutes avaient peur de se faire réprimander. L’Actoria déjeuna chichement : les ménines lui apportaient les mets avec une cadence digne d’un métronome. L'Actoria Isaline ne commandait rien, pourtant les ménines savaient exactement ce qu’elle voulait et ce dont elle avait besoin : du sel, des épices, un dessert. Aucun ordre.
Lorsque son assiette fut vide, que ses plats furent desservis, ses mains lavées et soigneusement essuyées, l’Actoria prit la parole.
— Chères sibylles, la sécheresse touche durement notre Confédération ce printemps. Hestia, Danaé, j’ai besoin que vous partiez pour Hellespont en renfort aux sibylles du district. Il n’y a pas eu de pluie depuis quatre mois : la population commence à être en difficulté.
— C’est entendu Votre Éminence, répondit la voisine de Rhéane.
— Je souhaiterais aussi que vous passiez sur l’île d’Anafi. Il paraît qu’une importante tempête a fait de nombreux morts. Vous pourriez guérir les blessés. Pensez à noter votre mission dans le Chirographe.
— Bien entendu, confirma la deuxième mage désignée.
Les deux femmes se levèrent et se dépêchèrent de former un portail dans lequel elles disparurent. Rhéane observa le cercle lumineux se dissoudre alors que les bavardages reprenaient. Elle sentait le regard l’Actoria sur ses épaules et elle n’osait rencontrer ses yeux.
— Rhéane ? Comment te sens-tu ? lui demanda l’Actoria.
Rhéane avala sa salive avant de parler.
— Je vais bien.
— Tu vas continuer tes cours avec Athénaïs cet après-midi puis tu poursuivras ta formation avec Olga dans quelques jours.
Rhéane accepta d’un signe de tête même si elle n’avait aucune envie de quitter sa préceptrice actuelle. Elle jeta un coup d'œil à Olga : son visage ressemblait à un masque de théâtre figé dans une expression neutre. Vraiment, elle n’avait aucune hâte de poursuivre sa formation avec cette Enchanteresse.
Le repas se termina dans le calme et une à une les sibylles rejoignirent leurs quartiers. L’Actoria termina son repas par une infusion puis quitta la table. L’une des Enchanteresses l’informa que sa ménine l’attendait en cuisine. Rhéane la remercia et se décida à se mettre à la recherche de sa ménine dans l’espoir que celle-ci la ramène aux quartiers d’Athénaïs.
Elle traversa un long corridor qui semblait mener aux cuisines. Alors qu’elle s'apprêtait à rebrousser chemin, elle entendit les bruits sourds d’une conversation provenant d’une pièce à quelques mètres. Intriguée, Rhéane s'approcha et s'arrêta devant une porte entrebâillée.
— Je ne pensais pas ça de toi, Philis ! Je suis choquée !
Rhéane reconnut la voix de Théodora et comprit qu’elle parlait au ménin d’Alcinor.
— Écoute, je suis ravi qu’elle m’ait choisi. Je ne pensais pas avoir un jour cet honneur.
— La moitié des politiciens et des ménins sont invités à rester dans les appartements d’Athénaïs, je ne suis pas sûre que cet honneur soit si rare.
— C’est juste que tu es jalouse !
— Moi, jalouse ? Mais garde Athénaïs. Je n’en ai rien à faire.
— Tu préfères ta nouvelle maîtresse, peut-être ?
— C’est vrai qu’elle est magnifique. Insupportable, mais magnifique.
La remarque de Théodora provoqua le rire de son interlocuteur. Le feu monta aux joues de Rhéane. Sa ménine la trouvait magnifique ! Incroyable !
— Par contre, je t’assure qu’elle n’est pas comme les autres. Il y a quelque chose de bizarre chez elle…
Rhéane déglutit. Ses doigts vinrent froisser automatiquement sa tunique.
— C’est-à-dire ?
— Je ne peux pas t’expliquer, c’est juste une sensation.
Un moment de silence se fit avant que le ménin reprenne.
— Vu tes bleus, tu y es retournée ?
— Ça me fait du bien.
— C’est dangereux, Théo. Tu devrais arrêter. Ta mère n’aimerait pas ça.
— Ne parle pas d'elle.
— Désolé.
La porte s'ouvrit et Rhéane se retrouva face à face avec sa ménine. Théodora la dévisagea avec stupeur.
— Madame ? Mais qu'est-ce que vous faites là ?
Rhéane se sentit rougir. Se ressaisir, se ressaisir. Tout de suite.
— Je... je… te cherchais, bégaya-t-elle.
Pathétique réponse.
— Ah. Très bien...
— Pourrais-tu me reconduire aux quartiers d’Athénaïs ?
— Oui, suivez-moi.
Sa ménine fit un signe à son ami et réalisa une courbette grandiloquente pour lui montrer le chemin.
— C’est par ici…
j'avais pas grand chose à dire dans l'absolu sur les deux derniers chapitres, et c'est un peu pareil ici, je trouve que tu as un bon rythme de croisière, la lecture est fluide, et les personnages que tu introduis le sont assez clairement et avec assez de mystère pour donner envie de poursuivre. J'aime beaucoup les petites infos que tu distilles sur leurs dynamiques, sans l'expliciter, ça donne vraiment envie de les voir poursuivre leurs interactions et comprendre ce qui les relis (je pense particulièrement à Alcenor/Théo Alcenor/Aleksander Théo/Phillis Calypso/Nejemet)
Le passage sur les relations amoureuses et comment elles se traduisent au sein de le corporation, en parallèle avec celle que Rhéane à vu de ses parents jusqu'à présent est super intéressante, et je pense, mérite d'être creusée !
Bon, comme tout le monde j'ai été pas mal gênée par le passage où Athénaïs pécho en force le pauvre bb Phillis. J'ai vu que ça avait été pas mal soulevé en commentaire et du coup j'ai vu ton dilemne, et c'est clairement pas facile à gérer étant donné le point de vue interne... Je vais réfléchir, si je trouve une piste qui peux t'aider je te fais un petit message. Je ne sais pas si tu pourrais te servir de ce même questionnement qu'à Rhéane lorsqu'elle découvre que certaines sybilles sont en couple avec leurs ménines, et que ça lui paraît étrange...?
Autre chose ; j'ai beaucoup aimé, dans le chapitre où Athénaïs forme Rhéane, qu'elle ne soit pas capable d'invoquer d'émotions positives, et je crois que j'aurais aimé que le poids de ce qu'elle a vécu reste un peu omniprésent aussi dans ces chapitres. Je dis ça du point de vue de quelqu'un qui aime beaucoup entrer dans la psychologie profonde des persos et faire des paragraphes de flonflons autours de leurs états d'âmes hahahah, or j'ai bien remarqué que tu es nettement plus factuelle dans ta façon d'aborder la narration, du coup c'est un regard très subjectif de ma part, mais je le soumet quand même sait on jamais !
Et la dernière chose : je me suis demandé rétrospectivement si le contexte de la formation de Rhéane n'allait pas un peu vite, dans le sens où j'ai l'impression que ça va vraiment de soi, un peu comme si elle était étudiante dans une école qui l'a reçoit et hop, elle commence ses cours, alors que sa situation est plus complexe... Je me suis demandé si ça ne mériterais pas une scène largement en amont, où on la réceptionne pour lui dire mdr meuf tu viens d'où tu es qui tu fais s'effondrer la ville, on va t'expliquer tes options. Je ne sais pas ce que tu en penses ?
En tout cas j'ai super hâte de comprendre quelle relation Alcenor entretient avec Aleksander. Je suis méga drivé par ça je te préviens. Ne me déçois pas. (je rigole bien entendu)
je poursuis ma lectuuuure des bisous !!
En tout cas, ça m'a fait super plaisir de lire tes retours en vacances :)
Bon, déjà, ravie que la lecture te plaise et que tu trouves le tout fluide !
1) Je note pour approfondir le passage sur les relations amoureuses
2) Pour le passage avec Phillis, je pense que je vais l'enlever. ça m'agace de devoir tout expliquer au lecteur en jeunesse/young adult donc autant l'enlever si ça peut être mal-interprété.
3) Je note pour développer les ressentis de Rhéane vis à vis des épreuves. J'ai un peu peur de perdre en rythme mais je pense que c'est nécessaire.
4) Je ne vois pas trop ce que tu veux dire avec le contexte de formation de Rhéane. Tu envisages une cérémonie ? Est-ce que ce n'est pas seulement la temporalité qui te gêne ? Si je dis que ça fais plusieurs jours qu'elle attend par exemple ?
Je pense qu'il faut que je fasse quelques ellipses surtout, ce sentiment partirait peut-être...
Alcénor et Aleksander, je n'ai pas eu le temps de travailler leur relation, tu risques d'être déçue XD
Merci pour toutes tes remarques !
Pleins de bisous <3
très chouette ce chapitre, ça a l'air plutôt fun et décomplexé chez les Sibylles x)
Très chouette pour les nouveaux mystères qui se déroulent petit à petit, j'ai vraiment hâte de comprendre cette Théodora !
J'ai juste une remarque mais qui est assez importante à mes yeux :
Je suis choquée par l’attitude d'Athénaïs ! Elle a autorité sur Phillis et ça renvoie vraiment l’image d’un viol, donc je suis étonnée que Rhéane ne soit pas plus choquée que ça elle aussi… Pour Théodora et Alcénor ça ne me fait pas ça car ont ressent l’idée de consentement, mais Phillis par contre a l’air bien obligé de s’y coller sans avoir son mot à dire ! Bref si c’est voulu qu'Athénaïs soit une prédatrice dans ce cas j’aurais besoin que Rhéane soit davantage choquée, et sinon il faut que je ressente que Phillis est consentant.
À très vite !
Oui, c'est plutôt décomplexée chez les sibylles XD
C'est normal que tu sois choquée par l'attitude d'Athénaïs. J'étais très mal à l'aise en l'écrivant et je réfléchis à trouver un moyen de faire comprendre aux plus jeunes lecteurs que c'est tout de même anormal. Ton idée de montrer au lecteur que Philis est consentant dès le début serait une bonne idée. Je vais voir comment l'ajouter !
Merci de ta remarque en tout cas :)
Il faudrait que Rhéane trouve un moment pour aller faire un point avec Aleksander, il en sait sûrement plus qu'elle !
Je suis d'accord, le point avec Aleksander est nécessaire !
Pleins de bisous <3
Effectivement, un chapitre très différent de la première version !
Sympa ces précisions sur le passé de Rhéane, son ancienne vie avec ses parents
Très sympa cette arrivée d’Alcénor, et leurs petits complots avec Aleksander ;
Et toutes ces cachoteries entre Théodora, Alcénor et son Philis, c’est chouette !
Au début je me suis dit : peut-être que Théodora est amoureuse de Philis (à la fin du chapitre je vois que j’avais vu juste !!!) , et que Alcénor et elle sont impliqués dans la mort de son ancienne maîtresse (Lyana je crois ?)
Triste que Théodora ait été battue… je me demande par qui, et c’est dommage que Rhéane n’ose pas la questionner !! Pauvre Théodora !!
Côté relecture :
Ponctuation : attention, dans cette phrase ta ponctuation change le sens que tu voudrais donner : « Il avait toujours aimé les jeux de stratégie certainement, car il avait plus de marge de manœuvre que dans la vraie vie. » il faudrait mettre la virgule avant certainement, pas après (moi j’aurais mis probablement, pas certainement, mais c’est toi qui vois 😉 )
Pour cette phrase, ça dépend du sens que tu veux donner « Ce qu’elle fit d’un geste lasse »
J’aurais mis « d’un geste las » plutôt
Ponctuation : « mais je vous avoue que je dois gérer en ce moment même, les répercussions de votre tremblement de terre et cela ne m’enchante guère » pas de virgule après « même », il ne faut pas couper ici
Ponctuation toujours « Comme tu le vois. Alcénor n’a pas la langue dans sa poche. » enlever le point et mettre une virgule avant Alcénor
Voilà ! C'est toujours aussi bien écrit, j'ai eu plaisir à retrouver la scène du festin :)
On a envie de découvrir la suite, et surtout ce qui se passe pour Théodora (pour moi c’est elle l’héroïne à mes yeux, haha)
Tes hypothèses sont très intéressantes, tu verras par la suite quelle direction, je prends ;).
Merci pour ton relevé sur la ponctuation, il faut vraiment que je fasse des lectures à voix haute !
Ahahah, c'est marrant que tu dises que Théodora est l'héroïne à tes yeux ;). C'est un personnage que j'aime beaucoup et dans ma réécriture, j'essaie de lui donner plus de place !
Merci encore de ta lecture attentive <3
Pour le moment, Alcénor m'intrigue pas mal ^^ Le fait qu'il puisse se permettre autant de "libertés" alors que c'est un homme, ça m'intrigue pas mal, qu'est-ce qu'il a fait pour mériter cet honneur ? Et pareil, "il est avec eux", mais dans quels sens ? Et pourquoi surtout ? Bref, je vieux bougon est très mystérieux pour le moment et je suis très curieuse d'en savoir plus pour le moment =D
Phillis me met un peu plus mal à l'aise. Enfin, pas lui, mais le fait qu'il ait une vingtaine d'année, Athénaïs 60 ans au minimum, ça fait une sacré différence d'âge et ça me chafouine un peu x) Après, je comprends l'idée de montrer une société où les femmes âgées sont très libres. Mais bon, mon coeur de contemporaine qui parle là ^^' Mais sinon, pas grand chose à dire sur lui pour le moment.
Sinon, Théodora cache bien des choses visiblement. Quand Phillis fait référence à sa mère, c'est une Sybille ? Quelque chose que me dit que sa mère est tout sauf anodin x)
Pas mal de gaffes dans ce chapitre pour Rhéane. Pour le moment, j'ai l'impression qu'on lui passe pas mal de choses parce que "le dépaysement" doit changer des trucs, mais ça va finir vraiment par devenir louche pour de plus en plus de monde, je me demande combien de temps sa couveture va tenir ^^"
Bon courage pour la suite =D
Aloooors pour le passage avec Phillis et Athénaïs ! C'est normal que tu sois mal à l'aise ! C'est super malaisant ! XD
Moi j'étais super mal à l'écrire ! Le souci c'est qu'au début, j'avais fait réagir Théodora, qui quand elle l'apprenait, était dégoûtée. Ainsi le jeune lecteur comprend que ce n'est pas normal. Or, compte tenu de ma société basée sur la beauté des personnes âgées, elle ne peut pas réagir comme ça. C'est normal dans ce monde que les jeunes souhaitent être avec les Aînées. Je pense qu'un adulte comprend totalement que c'est tout de même glauque mais un jeune, je ne suis pas sûre... Pour l'instant, je laisse comme ça mais j'imagine qu'on me demandera de nuancer si je le publie pour des ados/jeunes adultes. Qu'est-ce que t'en penses ?
"Sinon, Théodora cache bien des choses visiblement. Quand Phillis fait référence à sa mère, c'est une Sybille ?"=> Je ne dirai rien mais tu en sauras plus bientôt ! hihihi
Rhéane fait des gaffes mais ce ne sont pas de grosses gaffes pour le moment :p
Merci beaucoup pour ta lecture rapide ! :)
A bientôt
Bon petit chapitre. Pour répondre à ta question, pour l'instant je ne pense pas grand chose des deux nouveaux personnages. Trop peu vu et assez neutres dans leur intervention pour me faire une idée :)
En revanche, que de révélations sur les coutumes de cet antre sacré ! Un vrai paradis féminin où chacune peut s'épanouir comme bon lui semble sans que quiconque n'ait rien à en redire. On sent notre "jeune" Rheane bien intimidé par tout ça. Je sens qu une de ses collègues va bientôt lui mettre la main dessus, elle risque d'être assez mal à l'aise, ça va être marrant de voir ça :)
Jai bien aimé la partie où elle se dit que ses parents ne l'ont eu que pour avoir de la main d'oeuvre gratuite, et tout ce questionnement autour du désir en fonction des âges. Est elle naïve et peu éduquée ou dans ton monde est ce vraiment les personnes âgées qui s'épanouissent dans tous les domaines?
Au plaisir de lire la suite
Merci pour la coquille ! C'est corrigé :)
C'est vrai que pour l'instant, on vient juste de les rencontrer mais ils vont prendre de l'importance (en particulier Alcinor).
"Je sens qu une de ses collègues va bientôt lui mettre la main dessus, elle risque d'être assez mal à l'aise, ça va être marrant de voir ça :)" => Ahahah, tu verras :P
"Est elle naïve et peu éduquée ou dans ton monde est ce vraiment les personnes âgées qui s'épanouissent dans tous les domaines?"=> Non, globalement, les jeunes n'ont pas la possibilité d'être éduquée sur ce sujet. Ils travaillent et servent les adultes et donc sont globalement assez naïfs et découvrent un peu par eux-mêmes. Cee sont vraiment les personnes âgées qui s'épanouissent dans tous les domaines !
Merci pour ton retour rapide :)
A bientôt !