Alors que nous observions un clan de Vampires se reposer pour la journée, Ju chuchota à mon oreille :
- Tu ne trouves pas qu'ils sont nombreux ? Si ça continue comme ça, ils vont finir par exterminer entièrement les humains et alors, de quoi nous nourrirons-nous ?
- Aies confiance en la nature, ma merveille. L'équilibre est la base de sa force, annonçai-je.
Je vivais depuis bien plus longtemps qu’elle. J’avais connu des temps anciens. J’avais foi en notre mère nature. Les saisons passant me donnèrent raison.
Les premiers Vampires s’étalèrent, s’éloignant les uns des autres. Au début, il s’agit avant tout d’une vie solitaire. Rarement, un duo se formait, souvent des gens proches dans leur vie humaine, amants, frères ou sœurs.
Leur nombre augmenta significativement. Dans le même temps, les humains commencèrent à raconter des histoires terrifiantes de tueurs nocturnes aux dents acérées. Les rumeurs enflèrent. Des légendes naquirent. La défense s’organisa. Quelques Vampires tombèrent, le cœur transpercé d’une lame, la tête tranchée ou brûlés vifs.
Nous observions cela avec détachement. Je scrutais ma merveille, craignant qu’elle ne vive mal le meurtre d’un membre de sa famille si chère mais non, elle semblait se complaire dans la situation. Visiblement, la perte de quelques-uns ne la dérangeait pas. Ils étaient si nombreux !
Lorsque le nombre de Vampires devint tel que la quantité de nourriture tomba sous le seuil critique, les prédateurs commencèrent à s’attaquer entre eux, à se sédentariser, s’octroyant les meilleurs territoires, luttant pour les conserver, jouant d’alliances et les trahisons devinrent monnaie courante. Seuls les plus forts survivaient, rendant chaque combat plus dangereux que le précédent. Les nouveaux nés peinaient à subsister. Parfois, plusieurs s’associaient pour abattre un ancien puis s’entre-tuaient. La vie de Vampire n’était plus de tout repos.
Les petits de ma merveille retrouvèrent seuls le cœur comme point faible. Bientôt, tous les Vampires furent au courant. Les ignorants ne survivaient pas. Même les humains le savaient ! Je grimaçai. Cette connaissance augmentait la menace.
- Les humains chasseurs de Vampire ne peuvent rien contre nous, s’amusa ma petite merveille.
Elle explosa d’un rire virevoltant. Je n’étais pas d’accord mais je décidai de ne pas argumenter. Les survivants Vampires devinrent rusés et stratèges, ils gagnèrent en vitesse et en puissance mais aussi en capacité de camouflage. Les humains s’organisèrent. Ils créèrent des groupes, s’entraînèrent, récoltèrent des informations, surveillèrent, apprirent de leurs erreurs, communiquèrent. La vie devenait rude.
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J’observai la technique de combat de deux jeunes Vampires. Du même âge, ils s’étaient croisés par hasard dans un coin sombre. La proie en avait profité pour s’échapper. De quoi alimenter un peu plus les chasseurs de Vampires.
Ils se toisaient, se jaugeant puis se jetèrent l’un sur l’autre. Aucun ne possédait la moindre compétence en combat. Je fus témoin d’une suite incongrue de coups de poing mal dosés, de pieds lancés dans le vide, de chutes, de glissades, d’empoignades de cheveux, de gifles à décrocher une tête humaine.
Je m’amusai de cette incompétence à se battre. Ils étaient mignons. Allaient-ils seulement réussir à se blesser ? Lequel finirait par attaquer pour tuer, et pas ce simulacre ridicule ? Je pariai sur le plus petit. Il avait la volonté de vivre dans le regard.
- Gi ! hurla ma merveille.
Je me détournai immédiatement du spectacle comique pour courir vers le cri de terreur. Je la savais en train de peindre. Elle créait elle-même son matériel, ses pinceaux, ses encres, ses toiles. Sa technique s’améliorait de jour en jour. Elle appréciait par dessus tout les crépuscules. Le moment était idéal. Je m’étais éloigné pour la laisser dans sa bulle artistique.
Et voilà qu’elle criait ? Que se passait-il ? Rongé d’inquiétude, je la rejoignis en un instant. Je constatai qu’un Vampire tenait son bras dans le torse de ma merveille. Je ne réfléchis pas. Sans attendre, j’arrachai le cœur de cet importun. Ma merveille fondit en larmes et se mit à trembler. Je la pris dans mes bras. Elle venait de frôler la mort. Je n’en revenais pas. Comment était-ce possible ?
Elle s’échappa soudain de mon giron. Je sus qu’elle venait de perdre le contrôle. La faim venait de la saisir. Elle revint quelques instants plus tard, pulsante d’énergie.
- Je ne l’ai pas attaqué ! s’exclama-t-elle. Je peignais, c’est tout !
- Les Vampires attaquent à vue. Un intrus sur leur territoire et paf. C’est la guerre, ma chérie. Certains acceptent une présence neutre. D’autres attaquent sans sommation, maugréai-je. Tu dois être prudente !
- J’ai besoin d’oublier ce qui m’entoure pour peindre ! geignit ma merveille.
Je hochais la tête. Baiser, peindre, ces deux activités entraînaient la même conséquence indésirable.
- Je ne quitterai plus tes côtés, promis-je.
- Je ne veux pas que tu me protèges, gronda ma merveille. Je veux qu’ils ne m’attaquent pas ! Je les ai crées ! Cette agression est intolérable !
- Ils ignorent qui tu es, ce que tu es, répliquai-je. Ce respect que tu demandes, ils ne peuvent pas te l’apporter.
- Il va falloir le leur dire, gronda-t-elle et son regard se fit glacial. Je suis leur créatrice. Ils sont ma famille. On ne s’attaque pas entre membres d’une même famille !
- C’est la guerre, répliquai-je. Ils sont obligés de tuer pour survivre.
- Je veux qu’ils sachent. Je veux qu’ils me reconnaissent.
- Ils sont trop nombreux !
- Pas tous, indiqua ma merveille qui réfléchissait visiblement en même temps qu’elle parlait. Quelques uns, des gouverneurs, qui auraient ma protection à leur charge. Des Vampires triés sur le volet, des forts, des survivants avec lesquels nous créerions une communauté solidaire et puissante.
L’idée n’était pas pour me déplaire. J’étais bien avec ma merveille mais l’idée de discuter avec d’autres gens m’amena un sourire.
- Il existe des clans dans le nord, commençai-je mais ma merveille me coupa.
- Non ! Je ne veux pas de cela. Ces clans où seul le patriarche peut se reproduire et possède l'autorité. Non ! Je veux une communauté libre où chacun pourra s'exprimer sans condition d'âge, de sexe ou d'ancienneté. Solidarité, écoute, partage, protection, soutien sont les maîtres mots de mon monde idéal.
- Comment choisirons-nous les élus ?
- Je m’en charge, si tu veux bien.
- Bien sûr, ma merveille !
C’était sa famille, ses petits, son envie, son besoin. Normal qu’elle s’en charge. Je l’aiderai, la soutiendrai mais qu’elle fut aux commandes me paraissait évident.
Nous nous promenâmes. Ma merveille scrutait les Vampires et enfin, elle en désigna un.
- Pourquoi accepterait-il de nous rejoindre ?
- Il fera tout ce que je lui demanderai, assura Ju.
Je fronçais les sourcils. Je ne comprenais pas. Nous nous approchâmes. Le Vampire blêmit et je le reconnus. C’était l’homme que ma merveille avait transformé, le premier avec lequel elle avait pris le temps, qu’elle avait baisé en le mordant.
Il se figea en la voyant puis tomba à genoux, toujours plus grand qu’elle malgré ce geste.
- Je m’appelle Ju, dit ma merveille. Voici Gi, mon mentor. Tu es mon petit.
- Je m’appelle Blaar. Ordonne et j’obéirai.
J’observais la scène, médusé.
- Je suis heureuse de te retrouver. Tu m’as manqué.
Elle ne me l’avait jamais dit. Elle semblait s’en rendre compte elle-même à l’instant.
- Je suis enchantée que tu aies survécu, annonça-t-elle.
- Ça n’a pas été facile, admit-il. Tu n’as pas vieilli, constata-t-il.
- C’est ma malédiction, pleura ma merveille.
Il fronça les sourcils, exacte réplique de ma propre expression de visage. Il semblait réellement vouloir prendre soin d’elle, autant que moi. Je n’en fus pas jaloux, juste interloqué. Après tout, il ne la connaissait pas.
- Comment puis-je t’être agréable ? demanda le Vampire à genoux.
- J’aimerais créer une communauté de Vampires, sans hiérarchie, avec un lieu commun où chacun pourrait venir à sa guise pour discuter, se poser, être enfin soi-même, un endroit sécurisé où nous n’aurions pas à nous cacher, sans guerre, en paix les uns avec les autres.
J’adorai le principe. Pouvoir vivre sans me cacher, retirer le masque, m’afficher sans risque, partager mon mode de vie, me sentir écouté et compris. Savoir également que malgré les lunes et les saisons, un endroit serait toujours là, accueillant, ouvert, hospitalier.
- C’est impossible, maugréa Blaar. Nous nous battrons toujours pour la nourriture.
- Pas si vous arrêtez de la gaspiller. Je t’apprendrai à mordre sans transformer et enfin, plusieurs Vampires pourront se servir sur la même proie. Quand elle dort, elle ne se rend même pas compte d’avoir été mordue, lui apprit Ju.
Il ouvrit de grands yeux ahuris. Il n’en revenait clairement pas.
- Ensemble, unis, nous serons plus forts, continua Ju. Les découvertes des uns profiteront aux autres. Partage, honnêteté, respect seront les maîtres mot. Nous formerons une famille, une fraternité, une sororité, l’étiquette placée n’a pas d’importance. Gi me l’a dit : c’est la guerre. Je voudrais créer un lieu de paix.
Blaar sourit, une fois encore en écho à mon propre geste. Elle parlait bien, ma merveille. Cela donnait envie. J’avais peur que cela ne fonctionne pas. Réunir des prédateurs au même endroit ? Cela risquait d’échouer. Comment ma merveille le prendrait-elle ? J’avais peur de la chute. Je choisis d’éloigner mes craintes pour la soutenir et l’accompagner dans ce chemin long et difficile, semé d’embûches.
- Des Vampires, avertis des dangers, avertis de la possibilité de se nourrir sans transformer, alliés, main dans la main, répéta Blaar.
- Averti, répétai-je. C’est un beau mot. Si nous étions les « avertis » ?
- J’adore, valida ma merveille. Tous égaux par la connaissance et le savoir partagé. Pas un qui sait quelque chose et le garde pour lui. Pas d’être supérieur qui décide pour les autres.
- Les avertis se respectent, se parlent, communiquent, se protègent les uns les autres, poursuivit Blaar.
- Pas de frontière. Tout averti peut se déplacer librement. Sur le territoire d’un averti, un autre est toujours le bienvenu. Si un averti appelle à l’aide, tout averti qui l’entend lui doit soutien et assistance, s’enthousiasma Ju.
Ça avait l’air tellement beau. Cela était-il seulement réaliste ? N’était-ce pas une chimère, une utopie ?
- Sans regard pour le sexe, l’âge, l’origine, murmura Ju. Tout le monde sera écouté et entendu. Son avis sera respecté. Les décisions seront prises communément.
Ju se tourna vers moi.
- Ces dernières années ont prouvé l’absence des quatre puissants. Ils n’ont jamais montré le bout de leur nez. Nous pouvons cesser de nous cacher et monter en puissance.
- Les quatre puissants ? répéta Blaar en fronçant les sourcils.
- Il faut que les avertis sachent tout. Aucun secret, insista Ju.
- Nous raconterons. Nous expliquerons. Tous les avertis sauront, promis-je.
Nous partîmes en chasse. Je restai en retrait, me contentant de regarder. Blaar et Ju désignaient des Vampires, échangeaient, discutaient, argumentaient. Ju ne cherchait pas à s’imposer, à prendre le dessus sur Blaar. Elle l’écoutait vraiment et respectait son opinion.
Un Vampire rejoignit notre groupe, puis un autre, puis encore un autre. Lorsque nous fûmes une dizaine vint le moment de choisir notre lieu de repli, ce paradis pour les Vampires, immuable, éternel, où nous serions libres d’être nous-même.
Ce lieu ne devait pas être paumé au milieu de nulle part : il nous fallait de la nourriture à proximité. Nous donnâmes tous des propositions, écoutâmes les autres, discutâmes, échangeâmes et finalement, tombâmes d’accord.
Au centre du continent, à égale distance du nord et du sud, se trouvait une civilisation sanglante. L’abondance de sacrifices humains rendait l’endroit très attrayant pour des Vampires. Les immenses temples proposaient des fondations souterraines inutilisées qui offriraient un refuge solide à l’épreuve du temps.
Nous investîmes les lieux, nous y trouvant à nos aises comme si nous avions toujours vécu là. Ma merveille et moi restâmes sur place, tandis que les avertis partaient recruter de nouveaux membres. Les nouveaux venus écoutèrent et apprirent, partagèrent et transmirent, mais…
Ma merveille se désolait. Les avertis, en dehors de Blaar, la fuyaient, détournaient le regard, se taisaient dès qu’elle s’approchait. Son apparence de fillette les gênait. Les membres de la communauté venaient volontiers vers moi, apprenaient, me racontaient leur journée. Si Ju s’approchait, ils gigotaient de malaise, bafouillaient pour finalement prétexter un rendez-vous urgent et s’éloigner.
Ma merveille le prit avec philosophie. Au moins avait-elle sa communauté. Ils étaient là, certains vivant sur place, d’autres ne passant qu’une fois de temps en temps. Ils se répartirent le territoire, discutant de la taille des zones. Chacun devait surveiller la sienne et donner des nouvelles régulières à ses voisins. L’entraide fut montée. Ju en était ravie. Elle observait de loin, un sourire radieux sur les lèvres. Elle comprit qu’elle ne pourrait jamais obtenir davantage et décida de s’en contenter.
- Crois-tu qu’un jour ils passeront outre mon apparence ? demanda-t-elle un matin en peignant une grassette de Moran.
- Les Vampires enfants sont rares et jamais aussi jeunes que toi, rappelai-je. Le cadet des avertis, Elijah, a sept ans et déjà, tout le monde trouve cela jeune. Les Vampires ne s'attaquent pas aux enfants. Pas assez de sang et souvent, les parents protègent leur progéniture. On voit rarement un enfant de quatre ans se promener seul la nuit. C'est plus simple de s'attaquer à un adulte solitaire et plus rentable. De ce fait, nos avertis n'ont pas l'habitude de cette situation. Tu restes un cas isolé.
- Je hais ce corps qui est le mien. Je veux grandir, être écoutée, être regardée, être désirée.
Je la trouvais magnifique mais n’en dis rien. Elle l’aurait très mal pris. Je l’aimais ainsi, ma petite merveille, mon amour, ma fée rousse. Je ne voulais pas qu’elle grandisse. Je la respectais ainsi. Ce n’était pas le cas des autres et elle en était blessée. J’essayais de parler en bien de Ju aux avertis, de leur décrire sa force, son intelligence, sa grandeur. Je crois que cela empira la situation.
Je fis la seule chose à ma disposition : passer du temps avec ma merveille, la complimenter sur ses peintures toujours plus belles, l’écouter, lui offrir mes bras pour des câlins tendres. Tout ça ne suffisait pas, évidemment, mais je n’avais aucune autre option à ma disposition.
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- Ce conseil missi est ouvert, indiquai-je.
Tous les cinquante ans, les avertis se réunissaient à Chitchen Itza. Je me tenais sur un fauteuil au fond d’une immense salle. Un averti, ancien architecte, avait crée cet endroit avec une résonance toute particulière. Quiconque se tenait sur l’estrade voyait ses paroles, même murmurées, être portées partout dans la pièce.
Ju avait grimacé en découvrant l’endroit. « Cela ressemble trop à une salle du trône. Tu n’es pas roi. » avait-elle argué. Je m’étais défendu. « Ce n’est pas moi qui ait choisi cela mais la communauté. Ils disent avoir besoin d’un guide, d’une personne vers qui se tourner pour centraliser les demandes avant de les redispatcher. » « Ça devrait être moi » avait-elle gémi. J’étais d’accord avec elle. Les avertis en avaient décidé autrement. Elle accepta leur décision.
- Qui souhaite s’exprimer ? proposai-je.
Blaar s’avança. Il venait rarement à Chitchen Itza. Je vis Ju sourire dans l’assistance. Lui la respectait et lui parlait normalement. Il avait poliment refusé de baiser avec elle et Ju s’était résignée.
- Croyez-vous possible qu'un Vampire découvre par lui-même le contrôle de la procréation ? interrogea Blaar.
- Comment crois-tu que Ju et moi-même l'avons obtenu ? Personne ne nous l'a enseigné ! répondis-je.
- Certes, mais vous avez eu des milliers d'années à votre disposition et aucun combat à mener chaque jour pour survivre.
- C'est vrai, admis-je. Peut-être qu'il a vu l'un de nous agir et en a tiré une leçon.
Blaar hocha la tête. C'était envisageable. Aucun averti ne se cachait pour se nourrir. Que l'un d'eux ait pu être aperçu en train de mordre puis de partir, la victime toujours bien vivante, était possible. Le Vampire, témoin de la scène, pour peu qu'il fut un tout petit peu intelligent, n'aurait pas pu rater la conclusion évidente. Ne restait ensuite plus qu'à s'entraîner. Cela avait dû prendre des siècles pour qu'il y parvienne sans mentor, sans guide, sans lieu sûr où s'exercer. La persévérance de ce Vampire méritait qu'on s'y intéresse.
- J'aimerais bien lui parler, annonça Ju, et lui proposer en personne de nous rejoindre. Cela fait longtemps que je ne suis pas sortie d'ici. Un peu d'air me fera du bien.
Je me figeai. Quitter les temples ? Je souris. L’idée me plut. Courir les chemins. Sentir le vent frais sur mon visage. Me promener avec ma merveille. J’en frémis d’extase.
Nous partîmes dès la fin du conseil missi. Blaar nous accompagna, nous faisant découvrir ses endroits préférés. Nous prîmes notre temps. Ju s’arrêta à chaque nouvelle fleur pour en capter la couleur, chaque essence d’arbre inconnu pour tenter de la transformer en support, chaque roche pour la tailler. Nous restâmes une saison entière sur le bord d’une rivière à regarder Ju s’émerveiller de la qualité de l’argile la bordant.
Nous n’étions pas pressé. Nous profitâmes de ce moment hors du temps. J’appréciais ma liberté retrouvée. Ju adorait nos regards, emplis de respect, si éloignés de ceux qu’elle recevait aux temples.
Nous fûmes reçus par le gouverneur de chaque zone que nous traversions, profitant d’orgies de sang ou simplement de découvrir des mets raffinés, de la musique, des danses, des spectacles grandioses. Ju fut chagrinée que toute l’attention soit tournée vers moi et non vers elle mais la marche à trois lui redonnait toujours le sourire.
Lorsque nous arrivâmes enfin sur le territoire de Blaar, le Vampire parvenu avait disparu. Pas moyen de mettre la main dessus. Blaar fouilla le moindre recoin, sans le trouver. Son territoire regorgeait de petits Vampires non avertis.
- J'aurais tellement voulu le rencontrer, lui parler, échanger avec lui. Après tout, il est comme nous. Il a appris tout seul. Quel dommage qu'il soit mort avant, maugréa Ju.
- Je doute qu'il soit mort, répondit Blaar. Il était bien trop puissant pour être tué par les petits Vampires qui ont pris sa place. Non, moi, je dirais qu'il est parti, tout simplement.
- Espérons qu'il refera surface un jour. Je vais dire à tout le monde d'ouvrir grands leurs yeux, annonçai-je.
- Je distribuerai sa description, promit Blaar.
La probabilité de le retrouver était minime mais je gardais espoir. S'il était vivant, il se montrerait bien un jour et ma merveille pourrait lui parler.
Nous prîmes la direction les temples par une autre voie, prenant à nouveau le chemin des écoliers.
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- Quel silence ! chuchota Ju alors que les terres mayas se trouvaient juste derrière l’horizon.
Je dus admettre que ma merveille avait raison. Nous aurions déjà dû entendre les bruits de la ville. Pourtant, rien, le désert auditif. Ju s’avança. Je la retins.
- Qu'y a-t-il ? Il faut bien aller voir ! s’exclama-t-elle.
- Oui, mais prudemment. Cela sent la mort.
Ju renifla profondément puis baissa les yeux. Nul doute que, comme moi, elle avait senti l'odeur nauséabonde des corps en putréfaction. Nous avançâmes en marchant à vitesse normale, tous les sens aux aguets.
Nous ne croisâmes personne. Les temples étaient vides. La ville abandonnée. Des objets traînaient ça et là. Les corps vidés de leur sang reposaient dans des positions étranges. Tous les cadavres étaient exsangues.
- Pourquoi ont-ils tué tous les habitants ? Ont-ils perdu la tête ! m'exclamai-je.
- Où sont-ils ? Où sont les avertis ? s'inquiéta ma petite merveille.
Son petit visage démis me fendit le cœur. Sa famille n’était plus. Sa communauté avait disparu, partie en fumée. Des siècles d’échanges, de rencontres, de fraternité, de sororité, disparus. J’activai mes sens à plein régime, cherchant quelque chose, n’importe quoi. Je trouvai.
- Écoute !
Je lui désignai l’endroit d’où venait un son léger, un grattement. Nous avançâmes silencieusement pour tomber sur un Vampire seul en train de déposer des cadavres dans un immense trou. J’observai la terre retournée tout autour. Ce charnier n’était pas le premier. Ce Vampire n’avait pas chaumé. De dos, il ne s’était pas aperçu de notre présence.
- Que s'est-il passé ici ? demandai-je.
Il sursauta avant de nous scruter, frémissant en détaillant ma merveille. Lorsque nous nous fûmes présentés, le Vampire, nommé Stiny, s’agenouilla puis nous raconta comment les mayas s’étaient dressés contre leurs prédateurs. S’en était suivi un massacre dont il était le seul survivant, son créateur lui ayant ordonné de fuir dès le début des altercations.
Je lançai un regard lourd à ma petite merveille. Elle qui répétait que les humains n’étaient pas une menace. Voilà qui remettait les choses en perspective. Nous décidâmes de rester sur place afin que le souvenir de ce drame reste dans nos mémoires.
J’admirai ma merveille. Malgré la douleur, elle ne pleura pas, avançant vaillamment, prévenant les avertis – dont Blaar – gouverneurs du continent, du massacre ayant lieu aux temples. Nous re-bâtimes. Je pris Stiny sous mon aile, le formant moi-même.
Désormais, en plus de la paix, de l’entraide et du partage du savoir, un nouveau socle de base fut rajouté : une attention toute particulière portée aux humains. Ne jamais s’exposer. Rester invisible. Éviter de se donner en spectacle. Tous sauraient le danger que représentaient ces petites fourmis prêtes à mourir pour anéantir le nid de dragons. Avertis, ils le seraient tous.
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- Il l’a tué, maugréa Ju.
- Ils se lassent, répondis-je. C’est chiant de former un petit. Il faut le surveiller sans cesse. Tant qu’il ne contrôle pas sa procréation, on se le traîne comme un boulet. J’en sais quelque chose.
- Et pourtant, tu as tenu bon. Stiny est un averti accompli, répliqua Ju.
- Je te l’ai confié quand j’en avais marre, rappelai-je.
- Proposition que je fais à qui veut l’entendre ! s’écria ma merveille.
Je lui envoyai un regard contrit. Aucun averti ne s’approchait de la petite fille aux yeux remplis d’une sagesse infinie. Ils la craignaient tous.
Stiny fut l’instigateur d’une idée fantastique. Il proposa qu’une partie du temple devienne une école. Les créateurs pourraient venir avec leur petit, échanger sur les méthodes et les laisser au soin des autres quelque temps, échange de bon procédé. J’approuvai.
Rapidement, il apparut que certains mentors ne revenaient jamais s’occuper de leur petit, probablement trop accaparés par leur liberté retrouvée. Des avertis se proposèrent de prendre en charge les petits et de les former.
- Ils sont encore moins patients avec les petits que leur créateur, remarquai-je alors qu’un tuteur venait encore d’arracher le cœur d’un petit qui venait d’échouer à se nourrir sans transformer.
- L’absence du lien en est la cause, annonça ma merveille.
- Le lien ? répétai-je.
- Un créateur et son petit sont liés pour la vie, assura Ju. Je peux déterminer les yeux fermés quels avertis parmi ceux présents ici j’ai transformé moi-même.
N’ayant jamais transformé que ma merveille et n’ayant aucune envie de renouveler l’expérience, je me contentai de la croire sur parole.
- Ce n’est pas forcément négatif, continua-t-elle. Les créateurs sont tellement liés à leurs petits qu’il leur est difficile de les rabrouer. Certains même ne parviennent pas à les tuer, les laissant courir les rues. Or je ne veux pas risquer que certains de ces Vampires forment une organisation adverse.
- Les nordiques ont leur propre famille, rappelai-je.
- Grand bien leur fasse ! Ils ignorent tout de nous et je souhaite que cela perdure. En attendant, l’impatience des précepteurs fout la trouille aux petits qui redoublent de volonté. Le temps de contrôle de la procréation a sacrément diminué.
- Parce que ceux qui échouent sont tués, maugréai-je.
- S’il le faut, répondit ma merveille en haussant les épaules.
Je grimaçai. Stiny avait beau ne pas être mon petit, je ne me serais pas vu lui arracher le cœur juste parce qu’il avait été lent à maîtriser son venin. Je gardai mes réflexions pour moi. Après tout, cette communauté était celle de ma petite merveille. Si cela lui convenait, je n’avais rien à y redire.
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- Gi ! dit un averti essoufflé. C’est grave ! Il y a…
- Calme-toi ! Tu es un Vampire. Tu n’as pas besoin de respirer. Reprends-toi ! lui dis-je.
L’averti se redressa et devint serein. Il ne respirait plus et se tenait droit. Je souris. C’était un jeune. « Grimald », me souvins-je, à peine sept décennies.
- Des bateaux ! Ils ont traversé l’océan, annonça Grimald.
Je ne réagis pas plus que ça. Cela se produisait souvent.
- Les intrus étaient nombreux et ils sont repartis pour revenir encore. Ils viennent de l’est. La traversée est longue. De nombreux Vampires sont montés à bord des embarcations pour disparaître.
- L’océan n’est plus un obstacle, compris-je en blêmissant.
- Crois-tu que les puissants vont venir ? demanda Grimald.
- Et même s’ils viennent ? répliqua Ju. Nous les attendons de pied ferme. Allons les trouver pour leur proposer un accord. Nous n’avons aucune raison de nous terrer. Nous sommes puissants, nous aussi.
J’espérais sincèrement qu’elle avait raison. Je tremblais en revoyant le regard acéré de leur chef. Il n’était pas homme à se laisser embobiner. Les négociations seraient rudes.
La traversée fut facile. Ces bateaux représentaient une merveille de technologie, à n’en pas douter. Nous apprîmes leur langue, leurs coutumes, leur histoire. Eux aussi connaissaient le mythe des Vampires, proche et à la fois différent de ceux de notre continent.
Pourtant, à notre arrivée et malgré nos nombreuses recherches, pas moyen de trouver un seul Vampire. Ces terres en étaient vides. Les Vampires ayant réussi à traverser s’en donnait à cœur joie. Les humains répliquaient et leurs armes faisaient froid dans le dos. Ils tuèrent mais jamais assez vite pour endiguer le flot continu. Il fallait dire qu’ils combattaient avec de l’eau, de l’ail ou des croix en bois. Nous trouvâmes cela ridicule mais ne cherchâmes pas à comprendre plus en avant.
- Ils n’existent plus, murmurai-je en parlant des puissants.
Si ce territoire avait été le leur, ils auraient réagi, non ?
- Depuis combien de temps ? chuchota ma merveille comme si elle avait peur de réveiller un démon en colère.
La culpabilité me rongea. Je l’avais empêché de procréer pendant tant de saisons ! Pour rien. Les puissants avaient disparu. Je craignais une chimère, des fantômes. Je serrai les dents tant de rage que de tristesse. Étrangement, leur disparition me fit mal puis la sensation passa. Nous avions du pain sur la planche.
- Les humains de ce continent sont bien plus virulents. Il faut dire à nos avertis de rester sur leur garde. Méfiance ! On observe et on progresse lentement. Il faut laisser les non avertis jouer les éclaireurs.
Le conseil fut dispersé.
- Tu veux découvrir ce territoire ? proposa Ju.
- Non, répondis-je. Laissons cela aux jeunes. Nous avons nos temples à gérer.
Ju sourit. Ma réponse lui plaisait. J’en fus transporté de joie. Nous rentrâmes de notre côté de l’océan pour y voir les humains massacrer les anciens habitants, les voler, les exterminer, les mettre en esclavage, leur prendre leurs terres.
Nous regardâmes cela de loin. Les affaires des humains ne nous concernaient en rien. Nous nous contentâmes d’apprendre à les connaître, prenant à cette occasion des noms plus d’époque. Je devins Gilles d’Helmer et ma merveille Juliette.
Nous apprîmes à utiliser leur technologie : médecine, arts, sciences, astronomie. Nous sourîmes aux découvertes des historiens, parfois tellement éloignées de la réalité. Juliette fut ravie de découvrir les méthodes artistiques de ces terres nouvelles et elle passa beaucoup de temps à contempler des œuvres d’art européennes, africaines ou asiatiques.
Je découvris avec bonheur le papier, l’encre et la plume. Immédiatement, je me mis à rédiger mes mémoires. Si la transmission orale avec des êtres à la mémoire parfaite ne posait pas de problème, pouvoir lire tranquillement, seul, dans son coin, apportait un réel bénéfice.
C’est ainsi que la première version du livre des origines vit le jour. L’imprimerie me permit d’éditer mon œuvre rapidement en plusieurs milliers d’exemplaires. Chaque averti put disposer de sa copie. Tandis que ma merveille développait ses talents artistiques, j’écrivais.
Le livre des origines devint un moyen de transmettre les connaissances, les nouvelles, les informations. Grâce à lui, les avertis le seraient régulièrement. Tout le monde fut conquis par cet apport.
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Puisses-tu me pardonner, ma merveille. Je cacherai cet ajout au livre des origines aussi longtemps que nous ne serons pas en sécurité. Je t’aime.
Baptiste venait de lire ces mots commençant une nouvelle page, mais pas un nouveau chapitre. La plume était la même, le papier également. En dehors de cette phrase, rien ne laissait supposer que ce texte soit différent des autres.
Il leva les yeux vers la brune qui s’était mise à sourire. Baptiste replongea vers le texte. Le moment était crucial. Ces lignes, nul en dehors de Gilles ne les connaissaient. Visiblement, elles contenaient des informations qui risquaient de créer une dispute entre leur ennemi et sa merveille.
Baptiste releva les yeux et la brune pétilla. Voilà la raison pour laquelle elle voulait qu’il lise à voix haute. Baptiste constata qu’un profond silence venait d’envahir les environs. Plus un son, plus un bruit, plus un mouvement. Probablement les avertis connaissaient-ils par cœur le livre des origines. Cette phrase n’aurait pas dû s’y trouver, ils le savaient tous.
Baptiste reprit sa lecture, conscient qu’il jouait le jeu de quelqu’un en agissant de la sorte, mais incapable de déterminer qui.
- Gilles ! Un message, annonça un porteur.
Je saisis le document.
« Avons saisi un Vampire correspondant à la description du parvenu aperçu sur le territoire de Blaar ».
Je n’en revins pas. Après tout ce temps, il refaisait surface ? Je me tournai vers Ju et lui annonçai la nouvelle. Accaparée par la réalisation de sa dernière sculpture colossale, elle m’annonça ne pas vouloir s’y rendre.
- Vas-y, toi, si ça t’amuse ! me lança-t-elle, espiègle.
M’éloigner d’elle ne me plaisait pas mais après tout, dans les temples, elle ne risquait rien. L’endroit était surveillé et de près. Je la quittai en lui promettant de revenir vite. Pas question de flâner cette fois. Je rejoignis à vitesse rapide l’endroit indiqué sur le document.
J’arrivai pour découvrir quatre avertis entourant un Vampire à genoux. La main de l’un des miens entourait le cœur du parvenu.
- Pourquoi faites-vous cela ? m'exclamai-je.
- Il ne s'est pas exactement laissé faire, expliqua Milo, la main caressant le cœur de sa proie. Il a tenté de nous tuer et disons qu'il est doué.
- Des dégâts ?
- Gracia a bien failli y laisser la vie. On l'a arrêté juste à temps. Elle est partie se nourrir. Sa sœur l'accompagne pour plus de sécurité.
- Il a fallu six avertis pour le mettre à genoux ?
Milo hocha la tête. Gilles frémit. Mieux valait ne pas sous-estimer l'adversaire. Le maître des avertis s'accroupit devant le Vampire et annonça :
- Je suis désolé pour la manière mais mes hommes devaient se défendre. Je suis navré que vous aillez pris peur. Je peux vous jurer que je ne vous veux aucun mal. Je désire simplement vous parler. Voulez-vous bien m'écouter ?
Le Vampire hocha doucement la tête. Je fis signe à Milo et l'averti retira sa main. Le trou béant dans le torse se referma et le Vampire fut libre. Il ne tenta pas de s'enfuir, parfaitement conscient que cela était vain. Il garda le silence, attendant la discussion promise.
- Je m'appelle Gilles d'Helmer. Je suis à la tête d'un groupe de plusieurs milliers de Vampires au contrôle de leurs capacités.
Je laissai quelques secondes passer mais le Vampire ne réagit en rien, gardant un visage neutre et indéchiffrable.
- J'aimerais beaucoup que vous nous rejoigniez. Vous y gagneriez énormément.
- J'en doute, dit le Vampire.
- Nous sommes une famille, un clan, un groupe soudé. Nous nous protégeons les uns les autres. Nous partageons le savoir. Notre refuge est immuable, éternel, immortel comme nous. C'est l'assurance d'un abri permanent quoi qu'il se passe là, dehors, finis-je en désignant l'espace autour de lui du menton.
- Que dois-je donner en échange de cette protection ?
- Vous ferez partie de la famille, répondis-je. Vous devrez donc protéger vos frères et sœurs et partager votre savoir.
- Vous jouez le rôle du père, n'est-ce pas ? On vous doit respect et obéissance. J'ai bon ?
Je grimaçai. Ma merveille aurait détesté cette réplique et pourtant, de fait, avec le temps, cela avait fini par ressembler à ça.
- Je n'impose rien. Mon associée Juliette et moi avons personnellement formé les avertis. Le respect qu'ils nous donnent ne leur a jamais été imposé, assurai-je. Nous l'avons gagné avec le temps et nous espérons qu'il en sera de même pour vous.
- Vous n'avez rien à m'apprendre, fit remarquer le Vampire.
- Vous êtes si jeune ! J’ai des centaines de milliers d'années d'expérience à transmettre.
Je vis mon interlocuteur pâlir le temps de cligner des yeux avant de se reprendre. Mon âge l'avait troublé.
- Prouvez-le, dit le parvenu. Apprenez-moi quelque chose que j'ignore.
Je souris. Le défi était amusant. Je n'avais aucune idée de ce dont mon interlocuteur était capable, en dehors du contrôle de la procréation mais il ignorait que je savais.
- Je serai honnête, assura le Vampire. Si je joue, ce n'est pas pour tricher.
Je le crus volontiers. Je décidai de commencer par la base. Ça serait une excellente façon de tester ce Vampire et de savoir ce dont il était réellement capable.
- Savez-vous utiliser vos capacités sans dilapider vos réserves d'énergie ?
- Oui, répondit le Vampire.
- Savez-vous boire sans tuer ?
- Amenez-moi de quoi vous le prouver.
Je demandai à Milo de m’apporter une proie. Quelques instants plus tard, une humaine terrorisée se trouvait sous les dents du Vampire. Il la mordit au cou puis retira ses dents. Il n'avait pas consommé une seule goutte de sang. Il plongea de nouveau ses crocs dans la chair tendre, but une lampée puis ressortit en souriant. Nous attendîmes un peu puis dûmes nous rendre à l’évidence. Elle ne se transformerait pas. Il s’agissait bien du Vampire désigné par Blaar. J’admirais ce parvenu. Réussir à apprendre cela tout seul en des temps aussi troublés. Il avait sacrément du mérite.
Je décidai de continuer à le mettre à l’épreuve.
- Quelle est la première chose que je vous ai dite ? demandai-je.
Usage de la mémoire parfaite. Cela faisait partie de la formation de base des avertis.
- "Je m'appelle Gilles d'Helmer. Je suis à la tête d'un groupe de plusieurs milliers de Vampires au contrôle de leurs capacités", répéta le Vampire.
Mon admiration monta d’un cran. J’avais une dernière chose à tester et ensuite, je devrai m’avouer vaincu.
- Les cinq sens, annonçai-je en regardant les avertis autour de moi.
L’un d’eux prononça un murmure à l'autre bout du quartier et le Vampire répéta ses mots à la perfection. Un autre, caché depuis le début, tira sur le nouveau avec un fusil. Le Vampire esquiva sans difficulté avant de désigner l'endroit d'où venait le tir. Suivre une piste olfactive s'avéra tout aussi facile pour le Vampire. Il dégusta de la nourriture humaine avec plaisir.
- D'accord, je l'admets, dis-je. Je n'ai rien à vous apprendre.
Mon interlocuteur tiqua. Ses yeux cillèrent un instant avant de reprendre forme neutre. Que venait-il de se passer ? Je venais d’échouer à un test que j’ignorais subir. Je détestai cela. Je venais de baisser dans l’estime de ce Vampire qui s’était repris pour arborer un visage lisse.
- Ai-je le droit de refuser de vous rejoindre ? interrogea-t-il.
Je me forçai à rester de marbre. Intérieurement, je priai pour qu’il nous rejoignit. Il y avait quelque chose avec ce Vampire. Il fallait que je découvre quoi.
- Nous ne forçons jamais personne, assurai-je. Seulement, si vous ne faites pas partie des nôtres, vous n'êtes pas sous notre protection. Si des découvertes sont faites, vous n'en profiterez pas. Ça serait dommage. Encore une fois, nous ne demandons rien en contrepartie. Vous êtes simplement assez puissant pour nous rejoindre alors nous vous le proposons.
- Je m'appelle Félix, se présenta-t-il en me tendant sa main droite.
- Oh le salopard ! s’exclama Paul. Putain de connard, ils se connaissent ! Je le savais que c’était un putain de traître !
Baptiste se plongea dans sa mémoire parfaite, se remémorant la narration de Félix, dans la pagode de Paul, à Hiroshima, juste avant que la bombe nucléaire ne tombe.
- Il a menti par omission, la seule forme de mensonge indétectable par les prêtresses du mal. Malika ne pouvait pas le savoir.
- Il savait comment les combattre parce qu’il en avait déjà croisé, dit Paul en levant les yeux sur la brune.
Celle-ci conserva le silence. Baptiste ne sut comment interpréter tout ça. Trop de pièces manquaient encore. Il espérait enfin savoir ce qu’il était advenu de Kol. Il reprit sa lecture. Autour des deux prisonniers, le silence était total, assourdissant. La ville entière retenait son souffle pour écouter l’histoire narrée par l’ennemi au fond de sa prison. Sa voix porta, écoutée par des milliers d’oreilles averties.
Je soupirai intérieurement. Il avait accepté ! Restait maintenant à l’interroger en douceur, mine de rien. D’un geste, je proposai aux avertis de retourner à leurs vies. Ils le firent. Je souris. Je me retrouvai seul avec Félix.
- Permettez-moi de vous guider jusqu’à notre refuge, proposai-je.
- Volontiers, répondit Félix.
- Je suis curieux, dis-je en marchant à vitesse humaine.
Félix me lança un regard interrogateur.
- Quel âge avez-vous ? finis-je par demander.
Après tout, Blaar l’avait vu pour la première fois cinq siècles plus tôt. Or une telle maîtrise prenait du temps. Rares étaient les Vampires aussi vieux. Rarissimes les parvenus atteignant cette longévité.
- Environ un demi-millénaire, m’apprit Félix.
J’en eus le souffle coupé – ce qui ne m’empêcha évidemment pas de vivre, n’en ayant pas besoin. En revanche, cela me priva de la parole. Je me repris.
- Vous avez découvert et maîtrisé seul le contrôle de la procréation en moins d'un siècle ?
- Seul ? répéta Félix. Non, on me l'a dit. Tout comme je savais par enseignement que les Vampires peuvent manger de la nourriture humaine, boire du sang sans tuer ni transformer, ou que le cœur est notre point faible.
- Vous avez eu un mentor.
Félix hocha la tête.
- C'est impossible, dis-je. Aucun averti n'a répondu à l'appel. Pourquoi me cacher…
- Mon mentor n'était pas un averti. Il ne savait même pas qu'il y avait des Vampires en Amérique.
Je me figeai. Une terreur serra mon cœur. Je blêmis.
- Ça ne va pas ? demanda Félix.
Je crus défaillir. Toutes mes angoisses ressurgirent d’un coup. Les spectres revenaient et me griffaient méchamment le visage. Ils étaient là, quelque part. Je regardai autour de moi. Ils se cachaient. Ils nous étudiaient, j’en fus certain. Je me forçai à reprendre le contrôle de moi-même.
- Votre mentor n'était pas américain ? demandai-je d’un ton tranquille.
- Non, et moi non plus, d'ailleurs. Je suis viking à l'origine, annonça Félix.
Je dus mal cacher ma terreur car il fronça les sourcils.
- Racontez-moi, suppliai-je.
- J'étais chef marin dans mon clan viking. Un jour, notre chef nous a dit qu'il fallait que nous traversions l'océan alors nous sommes partis à l'assaut des vagues. Une terrible tempête éclata et sembla ne pas vouloir cesser. Je restai à la barre, sans perdre courage, même si mes forces déclinaient. L'un des marins, plus résistant que les autres, parvenait à maintenir le bateau en état. Après quelques jours, alors que je venais de repérer une trouée dans les nuages, je suis tombé. J'ai cru mourir. La douleur a été insoutenable et pourtant, je me suis réveillé et je n'avais jamais été aussi bien. À côté de moi se tenait le marin brillant. Il m'expliqua qu'il s'appelait en réalité Seth et qu'il avait fait de moi un Vampire. Il me dit ce que cela signifiait et ce dont je serais désormais capable. Il a été un mentor pour moi. Après divers obstacles et difficultés, nous avons rejoint la terre. J'avais trop faim. Je me suis nourri. J'ai attiré l'attention des Vampires propriétaires de ces terres. Seth m'a protégé. Il est mort pour moi.
- Les autres Vampires ne vous ont pas pourchassé ? lançai-je, surpris.
- Bien sûr que si, mais j'avais un autre atout dans ma poche, quelque chose qu'ils ignoraient et vous aussi apparemment.
Nous y étions : le test que j’avais raté. Il savait quelque chose que j’ignorais, une information transmise par les puissants en personne. S’agissait-il de la clé de la victoire ?
- Je dois partager mon savoir, c’est ça ? continua Félix d’un ton espiègle.
Je hochai doucement la tête, fébrile à l’idée de recevoir ce secret terrible. Sous mes yeux ahuris, le corps de Félix se changea. La transformation fut douce, facile, aisée, naturelle, simple, souple. Félix devint mon jumeau, mon double, mon sosie parfait. Il aurait trompé n’importe qui.
La terreur qui me saisit fut insurmontable. Les puissants pouvaient faire cela. Je n’eus soudain plus confiance en personne. N’importe quel averti pouvait en fait être l’un d’eux, camouflé, infiltré. Les temples, lieu sécurisé par excellence, devenait un nid de vipères. Ils étaient là, j’en étais certain. Depuis combien de temps ? Combien ?
- Qu'est-ce que… ? bafouillai-je.
- Nous pouvons changer d'apparence à volonté, indiqua Félix en souriant. Comment faites-vous pour vivre au milieu des humains sans savoir cela ?
Félix revint à son apparence de base mais il semblait totalement humain. Il respirait et je pus constater à l'odeur que l'air expirée correspondait à celle d'un homme. J’entendais son pouls, ressentais sa tension et sa température corporelle haute. Félix clignait des yeux, sécrétait de la salive et des larmes. Ses cheveux et ses ongles poussaient. L'imitation était parfaite.
Je tremblai avant de sourire. Ma merveille allait enfin pouvoir grandir, se faire reconnaître et même, comble de joie, baiser !
- Est-ce difficile à maîtriser ? demandai-je en me rappelant que le contrôle de la procréation prenait parfois plusieurs siècles.
- J'ai réussi à le faire dans mes premières heures de vie, rappela Félix, mais dans mon cas, ce fut vital alors j'ignore si en temps normal, c'est aussi simple que ça.
Je tentai. J’y parvins dans l’instant. Mon corps m’obéit en douceur, sans difficulté. Ce fut comme voir ou entendre. Simple, naturel. J’en pleurai. Ces années de souffrance pour rien. Les puissants possédaient ce savoir. De ce fait, ils pouvaient être n’importe qui, y compris un simple humain, compris-je en frémissant. La terreur remonta d’un cran, oblitérant l’euphorie de cette découverte majeure.
Ils étaient là, j’en fus certain. Cachés, observant, attendant le bon moment pour frapper. Qui ? Où ? Depuis combien de temps ? Il fallait trouver un moyen de trier le bon grain de l’ivraie. Je pris ma décision. Pardonnez-moi, tous et surtout toi, ma merveille : j’ai décidé de garder le secret. Je devais garder cet atout dans ma manche pour les débusquer et les anéantir. Notre survie, notre liberté en dépendait. J’ai brisé le plus basique de nos serments : je n’ai pas transmis une connaissance majeure. Je vous supplie de me pardonner.
- Bon courage, s’amusa Paul en touchant son oreille.
Là-haut, le silence était ponctué de petits grognements de rage. Nul doute que tous les avertis venaient de tenter de changer d’apparence et d’y parvenir sans difficulté. Baptiste reprit sa lecture, les dents serrées. Il frappait l’ennemi en plein cœur, c’était certain. Gilles ne s’attendait probablement pas à ce que ses prisonniers lisent le texte à voix haute. Qui l’aurait fait ? Sauf que Baptiste agissait sur ordre de la brune qui elle-même était aux ordres de ? Malika ? N’était-elle pas morte à Hiroshima ? Quelqu’un d’autre ? Baptiste doutait et toujours pas de trace de Kol. Il reprit sa lecture à voix haute, secouant la tête de rage face à son impuissance. Lire un bouquin, voilà tout ce qu’il pouvait faire. Sauf que ces mots étaient une arme. Qui en tenait le manche ? Baptiste n’était pas certain de posséder la réponse.
- Ceci dit, le contrôle de l'apparence permet autre chose, annonça Félix, apparemment heureux de pouvoir enfin transmettre un savoir tenu secret depuis trop longtemps.
- Quoi donc ?
- Venez, vous allez comprendre, annonça Félix.
Je suivis mon nouvel ami jusqu'à un champ où travaillaient quelques paysans.
- Par contre, je ne suis pas très doué alors, le résultat ne va pas être stupéfiant, mais quand même ! précisa Félix en sautillant de joie.
Félix se tut et regarda les paysans en inspirant et en expirant fortement. Je n'avais pas la moindre idée de ce qu’il cherchait à faire. Après un très long moment de silence complet, je perdis patience. Je m’apprêtai à demander une explication lorsqu'un des paysans posa sa bêche et se dirigea vers nous. J’observai, incrédule, l’humain s'approcher puis offrir sa gorge à mon compagnon qui tua sa proie sans le moindre effort.
- Ça facilite vraiment la chasse, assura Félix.
- Comment ?
- Il faut… comment dire… ajuster son odeur à celle de la proie. C'est difficile à expliquer en fait, admit Félix.
- Il est venu à toi, bredouillai-je, incrédule.
- On peut contrôler ce que ressentent les humains, leur inspirer le dégoût, l'amour, la terreur ou la neutralité la plus totale. Cela facilite grandement la vie parmi eux.
Cela, je voulais bien le croire. Le contrôle des émotions, voilà un pouvoir que je pourrais transmettre aux avertis. Je cacherai la transformation mais avec ça, au moins mes compagnons pourraient vivre plus à leurs aises au milieu des humains. Les puissants aussi, pensai-je. Ils pouvaient prendre l’apparence de n’importe qui et contrôler les émotions de leur proie. À nouveau, l’angoisse fit disparaître la joie de cette découverte.
- Vous semblez encore plus remué que tout à l'heure, remarqua Félix.
- Votre mentor, Seth, vous a-t-il parlé d'autres Vampires en dehors de l'Amérique ?
Je devais obtenir un maximum d'informations afin de mieux cerner l'étendue de la menace. Félix se replongea dans ses souvenirs avant de citer Seth :
- Il m'a dit : « Normalement, on ne transforme pas quelqu'un qui ne le désire pas. Paul me tuera quand il l’apprendra. Caly va sûrement s’y opposer. » Donc, il devait y en avoir d'autres. Au moins deux.
- Votre mentor vous a-t-il dit, par hasard, l'âge qu'il avait ? interrogeai-je.
À nouveau, Félix dut utiliser sa mémoire infaillible pour pouvoir répondre :
- Environ mille ans, annonça Félix.
- Ce n'est pas une chimère.
Tous mes poils se hérissèrent. Cela confirmait mes craintes : ils étaient là, autour de nous, partout et nulle part à la fois.
- Quoi donc ?
- Les puissants… Ils existent… Ils sont toujours là, invisibles, intouchables, insaisissables. Vous dites qu’ils ne transforment pas sans l’avis de la victime ? Peut-être que cela les contraint à ne transformer que rarement. Peut-être sont-ils peu nombreux. Peut-être puis-je éliminer la menace… Il faut… Je dois être prudent, avancer mes pions avec stratégie et rigueur.
- Combien êtes-vous exactement ? interrogea Félix.
- Nous proposons à tout Vampire suffisamment puissant pour mériter de nous rejoindre de le faire. De plus, nous créons souvent des petits que nous formons. Notre nombre est en constante augmentation.
- Une approximation me suffira, précisa Félix.
- Il y a encore dix ans, nous étions mille trois cents quatre. Ces dix dernières années, le nombre de Vampires suffisamment puissants pour pouvoir nous rejoindre a drastiquement augmenté, si bien que nous sommes aujourd’hui mille cinq cent douze.
- À quoi est due cette subite augmentation ?
- Deux possibilités existent. D’abord, la découverte du nouveau monde semble avoir fait sortir des Vampires qui se terraient jusque-là. Ensuite, la libération de certains territoires a permis à nos gouverneurs de mieux observer leurs habitants.
- J’ai l’impression que vous êtes nombreux et puissants, annonça Félix en se penchant pour passer sous une branche. Je doute que quiconque puisse s’en prendre à vous aisément. Vous semblez craindre ces Vampires en particulier. Pourquoi ?
Je lui récitai le livre des origines jusqu’à notre rencontre, la version à ce moment-là distribuée et connue de tous. Félix écouta silencieusement tandis que nous marchions sous les arbres, entourés des chants d’oiseau, des feulements de félins, du bruissement des feuilles. Il ne pleuvait pas. Vu le ciel et la pression atmosphérique, cela ne tarderait pas.
- Ils ont attaqué sans raison, pleurai-je une fois son passé raconté. Nous ne faisions rien de mal. Nous baisions, c'est tout. Ils ont exterminé tout le monde.
- Je comprends que vous soyez en colère contre eux.
Étais-je en colère ? Oui, probablement que ma peur contenait une rage démesurée. J’aurais tant aimé vivre avec eux, apprendre d’eux, leur parler, échanger, discuter, partager. Ils avaient choisi la guerre. Pourquoi ?
Aujourd’hui, je n’avais plus de raison d’avoir peur. Les avertis me donnaient l’avantage. Ma terreur s’estompa pour laisser place à ma colère et je ne voulus qu’une seule chose : les voir souffrir.
- Vous désirer leur mort ? demanda Félix.
- Je ne sais pas, admis-je. Je manque d’information. Je voudrais déjà savoir où ils sont, combien ils sont, ce qu’ils font.
- Ça me plairait bien de jouer les espions, annonça Félix.
- Il s’agit de trouver des Vampires qui n’existent peut-être plus parmi des millions. Avez-vous la moindre idée de la manière dont vous allez pouvoir réaliser ce miracle ?
- Non, mais ce défi m’intéresse. Sans difficulté, pas d’intérêt, lança Félix en souriant.
- Très bien, je vous remercie.
- Cela me plaît de devoir faire cela. Je vous enverrai des rapports par courrier. Où dois-je les adresser ?
- À chichen Itza. C’est là que nos temples se trouvent. Vous ne voulez pas venir voir ?
- Non, merci. Je vais trouver vos puissants.
- Félix ! Attendez ! lançai-je.
Mon interlocuteur se figea.
- Où étiez-vous depuis des siècles ?
- Sous l’eau, répondit Félix. Des années de bonheur dans un monde splendide. On s'y sent vraiment libre. C’était très reposant mais un peu d’action me fera du bien.
- Sous l'eau ? répétai-je, incrédule. Pendant plusieurs siècles ?
Félix avait déjà disparu. Je restai un instant abasourdi. Je savais que le besoin de respirer n’existait plus mais il devait bien se nourrir ! Je retournai aux temples sacrés. Je m’enfermai dans mon bureau et rédigeai deux versions du livre des origines. Celle-là, la vraie, je la gardai précieusement enfermée, cachée, dissimulée. Je ne la livrerai qu’au moment où notre victoire serait assurée. Dans l’autre, je mentis, décrivant Félix comme un parvenu nous offrant deux nouveaux savoirs : le contrôle des émotions et la possibilité de vivre sous l’eau. Les avertis furent ravis. Tandis qu’ils m’encensaient, mon cœur se serrait à l’idée de les trahir de la sorte. Je n’avais pas le choix. Je devais me montrer prudent. Attendre que Félix me fasse son rapport. J’espérais avoir tort et que les puissants soient morts. J’espèrais avoir raison pour ne pas trahir les miens sans raison. Je n’ai pas eu à regretter mon choix. Ils étaient bien là.
- Encore un chapitre terminé, annonça gravement Baptiste en levant les yeux sur la brune qui souriait de toutes ses dents.
Le silence plombait la cité sous-marine, lui compressant le torse. Un étau se resserrait. La déchirure amènerait des violences, Baptiste le pressentait. La suite ne serait pas belle à voir. Il poursuivit sa lecture, conscient d’être écouté de tous.
Le chapitre est dense, mais plus facile à suivre qu’avant. Encore une fois, je trouve que les incises apportent vraiment un plus. Elles rappellent ce qui se passe et appuient les émotions des personnages. Et on comprend bien que Baptiste lit dans cette version, comparé à avant.
J’ai aussi trouvé l’épisode avec Blaar plus fluide et plus compréhensible dans cette version. Avant, je me souviens de la sensation d’aller-et-retour, voire de longueurs, qui ne sont plus présentes ici selon moi. C’est clair quoi.
Sinon, je me dis que Ju va être furieuse que Gi lui ait caché cette information de transformation, si importante pour elle.
Je me demande qui est cette brune. Un moment, j’ai cru que c’était Ju, mais elle ne maitrise pas encore la transformation donc c’est pas possible. Du coup, le mystère reste entier. 😊
On comprend bien que Baptiste est furieux de la trahison de Félix, ce qui se comprend. Mais celle de Malika… ça va être terrible !
Quelques notes et coquilles relevées au cours de la lecture :
« Parfois, rarement, un duo se formait »
> Je choisirais entre le terme « parfois » et « rarement » qui veulent plus ou moins dire la même chose
« Dans le même temps, les humains commencèrent à parler. »
> à parler des vampires non ? Il manque quelque chose. Les humains parlent depuis bien longtemps à priori.
« la perte de quelques uns ne la dérangeait pas. Ils était si nombreux !”
> “quelques-uns” et “étaient”
“Lorsque le nombre de Vampires devint tel que la quantité de nourriture devint critique »
> Attention au « devint… devint »
> Puis trois phrases après, un autre devint : « et les trahisons devinrent monnaie courante »
« S’en suivie”
> s’ensuivit
“S’en suivie une suite”
> Attention, avec « une suite », ça crée une répétition s’ensuivit/suite
« Allaient-ils seulement réussir à se blesser vraiment ? Lequel finirait par attaquer réellement, pour tuer »
> Un peu trop d’adverbes selon moi, trois ici, et tu as « immédiatement » peu après aussi
« ces deux activités amenaient la même conséquence indésirable. »
> « à la même… » ?
« exact réplique”
> exacte
“elle ne se rend même pas compte avoir été mordu »
> « d’avoir été » ?
« Il venait rarement à Chitchen Itza »
> Tu pourrais caser ce terme un peu avant, par exemple là : « Tous les cinquante ans, les avertis se réunissaient à Chitchen Itza. »
Là ça vient quelques paragraphes après et je me suis demandée, qu’est-ce que c’est que ça ?
« le danger que représentaient ses petites fourmis”
> « ces » ?
« - Ce n’est pas forcément négatif, continua-t-elle. Les créateurs sont tellement liés à leurs petits qu’il leur est difficile de les rabrouer. Certains même ne parviennent pas à les tuer, les laissant courir les rues. Or je ne veux pas risquer que certains de ces Vampires forment une organisation adverse.
- Les nordiques ont leur propre famille, rappelai-je.
- Grand bien leur fasse ! Ils ignorent tout de nous et je souhaite que cela perdure. »
> Là c’est bien, tu donnes de nouvelles informations intéressantes : le lien fort entre un géniteur et sa progéniture, la peur d’une organisation/famille adverse, mais aussi l’existence d’une telle famille dans le nord.
« Allons les trouver pour proposer un accord. »
> « …pour leur proposer… » ?
« des êtres à la mémoire parfait »
> Je me demande si tu ne devrais pas trouver un nom propre à cette mémoire parfaite.
« Baptiste reprit sa lecture, conscient que quelque chose se jouait. Il fut en revanche incapable de savoir de qui il jouait le jeu en agissant de la sorte. »
> Attention à la répétition de jouait.
« Je détestai cela immédiatement. “
> Sans l’adverbe, ce serait plus percutant : « je détestai cela »
« - Il savait comment les combattre parce qu’il en avait déjà croisé, dit Paul en levant les yeux sur la brune.
Elle conserva le silence. “
> Je pense qu’il faudrait mettre « celle-ci conserva le silence » car sinon le « elle » n’appelle rien, car le précédent sujet était Paul.
Un peu trop d’adverbes selon moi, trois ici, et tu as « immédiatement » peu après aussi
→ Si je relâche mon attention, mes mauvais travers reviennent au galop. Depuis que tu m’as fait remarqué que j’écrivais trop par adverbe, j’essaye d’y faire attention mais parfois, je rate. Merci beaucoup de relever les quelques moments où je chute encore;)
Là c’est bien, tu donnes de nouvelles informations intéressantes : le lien fort entre un géniteur et sa progéniture, la peur d’une organisation/famille adverse, mais aussi l’existence d’une telle famille dans le nord.
→ J’ai profité de cette ré-écriture pour mettre au clair certaines notions que nos échanges m’avaient laissé comprendre comme peu claires pour le lecteur. Je suis ravie que ça ait eu l’effet escompté.
« des êtres à la mémoire parfait »
> Je me demande si tu ne devrais pas trouver un nom propre à cette mémoire parfaite.
→ Hum… Je vais y réfléchir.
Les autres corrections sont faites.
Je suis contente de savoir que la ré-écriture apporte quelque chose car écrire à la première personne du singulier m’est réellement difficile. J’ai galéré à faire ça, je n’étais pas certaine de mes incises. Merci de me confirmer que je n’ai pas transpiré pour rien ;)