Chapitre 10

Le temps sembla se suspendre.
Mes muscles se crispèrent et plus aucune pensée ne filtra mon esprit. J'étais tétanisée et la seule chose que j'étais capable de faire était d'être effrayée.
Un loup-garou. Un loup. Un lycanthrope.
J'avais à multiples reprises imaginé ma première rencontre avec l'un des leurs. Je n'avais aucun grief à leur égard, alors j'avais toujours pensé que je resterais impassible, ou peut-être que je serais surprise, fascinée, tout au plus.
Mais pas tétanisée.
Il était là à environ un mètre de moi, éclairé uniquement par la lune. Ses yeux jaunes me fixaient mais je n'eus pas l'impression qu'il allait m'attaquer.
Cela doit être la raison pour laquelle je me détendis. Je fermai les yeux un instant en tentant de me reprendre. Et en les rouvrant, je m'attardai d'avantage sur son regard. Une patte encore levée, j'en déduisis qu'il était en train de se promener sur le toit lorsque je l'avais surpris. Il était figé dans la même position et je vis dans son regard qu'il était choqué. Choqué et paniqué.
Je ne sais pas si c'est en voyant cela ou en remarquant ses oreilles baissées, mais je cessai d'avoir peur.

Nous restâmes plusieurs minutes à nous fixer, et je décidai finalement de faire le premier pas.
Lentement, je tendis la main vers lui en commençant à me baisser. Tout en gardant le contact visuel, je posai un genou à terre. Et lentement, baissai ma main levée sur ma cuisse. Puis après quelques instants, baissai la tête en guise de soumission.
Je ne savais pas pourquoi j'avais fait cela, ni pourquoi toute crainte avait disparue. Mais ce qui me surprit le plus, fut lorsque je sentis ce dernier s'assoir.
Je levai la tête et vis qu'il était apaisé. Je retins un sourire malgré moi et tentai de me rapprocher sans l'effrayer, chose qu'il fit également. Nous nous approchâmes l'un de l'autre jusqu'à être assez proche de lui pour sentir son souffle chaud et de distinguer les nuances blondes sur ses poils blancs. Il était magnifique. Et même s'il était plus grand que moi, et qu'il pouvait me dévorer, l'envie de le caresser me prit, et je tendis la main vers lui.
Je la laissai suspendue dans les airs, à quelques centimètres de sa joue, attendant de voir sa réaction lorsque, tout en me regardant, appuya sa tête dessus.
Je le touchai timidement pour sentir les poils durs et la couche de duvet plus doux par-dessous. Il appuya d'avantage sa tête contre ma main comme pour me dire que je pouvais y aller, et j'enfonçai mes doigts  dans sa fourrure. Sa peau était si chaude que j'avais l'impression de poser mes mains engourdies sur un radiateur. Mes mains froides devaient être tout aussi agréables  car il ferma les yeux  et poussa un étrange son que j'interprétai comme un ronronnement.
Je lâchai un rire étouffé, ce qui lui fit ouvrir les yeux. Il rapprocha son énorme museau de moi et commença à me renifler le visage, je le laissai faire sans me défaire de mon sourire.

— Je suis désolée d'avoir eu peur de toi, lui dis-je. C'était pas sympa.

    Il poussa un grognement que j'interprétai comme un : Ce n'est pas grave.

— Même si je suis sûre que tu as d'excellentes raisons de te promener sur le toit d'une académie de vampires qui veulent ta peau, je pense que tu devrais t'en abstenir à l'avenir. Tu as eu de la chance d'être tombé sur moi.

Pour toute réponse, il (ou elle) remua la queue, ce qui me fit à nouveau sourire.
Je m'installai plus confortablement par terre, mes genoux me lançant à cause du contact avec les tuiles. En levant les yeux au ciel, je remarquai que la lune n'était pas totalement pleine peut-être un jour ou deux avant la pleine lune. Alors pourquoi cette personne s'était-elle transformée ? Je ne voulais pas me mêler de ce qui ne me regardait pas, et de toute évidence, ce loup-garou ne voulait de mal à personne. Mais cela voudrait-il dire que c'était un étudiant ou un professeur de l'académie ? Ou peut-être même un gardien ?  Non, ce serait absurde. Dans le cas contraire, pourquoi aurait-il pénétré l'enceinte de l'établissement ? Peut-être que je me trompais sur ses intentions, il était peut-être là en reconnaissance ? Prévoyait-il d'amener ses compagnons ? Etaient-ils plusieurs ? Allaient-ils prendre l'académie d'assaut cette nuit ? Comment allons nous évacuer tout le monde ?
Je secouai la tête afin de chasser ces pensées de mon esprit. Il était impossible qu'un lycanthrope puisse se dissimuler parmi nous sans se faire remarquer.

Il était certes magnifique avec ses beaux yeux ocres et sa fourrure alpestre d'une douceur séraphique, mais une voix raisonnable dans ma tête m'ordonnait de me relever et d'assister à ce maudit cours d'arts dramatiques. Bien que je me sentais étrangement bien en sa compagnie, il ne fallait pas oublier qu'une personne se cachait sous ce tas de fourrure. Et ma réaction devait être quelque peu gênante. Un peu comme une folle aux chiens qui n'en avait jamais eu.

— Bien, dis-je en me relevant à contre cœur, ce qui le fit se relever également. Il faut que j'y...
— Qu'est-ce que c'est que ça ?! s'exclama une voix qui nous fit sursauter et qui manqua de m'arracher le cœur.

Je me retournai et une agréable odeur emplit mes narines, une fois encore.

— Jess...? demandai-je prudemment.

Il était caché dans la pénombre, mais lorsqu'il se rapprocha sa beauté m'aveugla et l'idée de me jeter du toit me parut soudain attrayante. Lorsqu'il me vit j'eus droit à un regard noir qui balaya d'un revers cette attirance que j'avais pour lui.

— Qu'est-ce que... (il se mordit la lèvre en passant son regard du lycanthrope à moi) qu'est-ce que c'est que cette merde ?

J'eus un instant l'impression qu'il s'adressait au loup plutôt qu'à moi mais il poursuivit immédiatement :

— Qu'est-ce que tu fous avec un loup-garou ?! T'es complètement demeurée ? Ou stupide ? Ou peut-être que tu cherches juste à te faire remarquer comme une pathétique petite croqueuse d'hommes ?

Je voulais lui dire de ravaler son ton de chef de chantier s'il ne voulait que je lui fasse voir la structure de la bâtisse de plus près. Qui plus-est, quel rapport entre le fait d'être une "croqueuse d'hommes" ?  Puis je me souvins d'un détail : N'avait-il pas dit ça à cause du jour où, ivre, je m'étais jetée sur lui ? Il avait peut-être appris que j'avais eu un rencard avec son frère ? Enfin ça n'en était pas un mais tout de même. Ou peut-être avait-il dit ça à cause du type de la soirée ? Parce que je fréquentais Sydney ? A cause de Darren?

Oh et puis peu importe, qu'il aille se faire voir ! Ce n'était pas parce que je perdais mes moyens dès que je le voyais que ça lui donnait le droit de prendre ses aises avec moi comme il le ferait avec une de ses nombreuses groupies.

Alors que j'étais sur le point de répliquer j'entendis un grondement ainsi qu'un bruit de grincement puis je me rendis compte qu'il s'agissait en réalité d'un grognement et que le contact des ongles sur les tuiles émettaient un désagréable bruit. Je baissai les yeux et vis que la bête, babines retroussées, pattes écartées s'était mise en position de défense (ou d'attaque ?). Il n'avait visiblement pas aimé la façon dont Monsieur le Séducteur-dont-je-ne-pouvais-visiblement-pas-résister m'avait parlé.

Ce dernier baissa les yeux vers mon garde du corps et j'arrivai tant bien que mal à distinguer sa mâchoire contractée.

— Fais gaffe à ce que tu fais, dit-il.

La bête émit un grognement plus sourd en se positionnant d'avantage devant moi.

— Eloigne toi d'elle, menaça-t-il croyant sûrement qu'il allait m'attaquer. Tout de suite.

J'eus d'abord l'idée de me placer devant le loup afin de lui montrer que celui-ci ne me voulait aucun mal, mais peut-être aurait-il interprété cela comme une tentative de fuite prouvant que le lycanthrope était dangereux ?

Alors je décidai de ne pas bouger et de lui expliquer la situation de là où j'étais.

— Il ne me fera pas de mal, lui expliquai-je doucement en ravalant mon sentiment d'amertume à son égard (sans parler d'autres sentiments qui n'avaient pas lieu d'être). Le seul danger à ses yeux ici, c'est toi.

Jess releva ses yeux azurins vers moi et je déglutis.

— Tu parles le chien maintenant ? cracha-t-il.
— Il faut bien que je te parle, répondis-je sans réfléchir ce qui n'aida pas à pencher la balance en ma faveur.

Ce dernier me lança un regard noir et fut sur le point de répliquer mais il fut interrompu par d'étranges sons étouffés.

— Tu te fous de ma gueule en plus ? cria t-il  presque en fusillant mon nouvel ami du regard.

Je levai les yeux au ciel espérant que cela ait allégé l'atmosphère. Mais en voyant l'expression de Jess, je compris qu'il n'en démordrait pas si facilement.

— Enfuis toi, me dit cette voix familière.

Quoi ? Pourquoi ?

— Il gagne du temps, il va t'attaquer. Et s'il le fait, il te pistera jusqu'à t'avoir.

Je baissai les yeux vers l'animal qui était toujours devant moi et qui campait sur ses positions.

— Ne te fie pas aux apparences.

Puis soudain, la voix d'Isaac résonna dans mon esprit : "Les gens ne sont pas tes amis, peu importe ce qu'ils essaient de te faire croire. Ne te fie pas aux apparences."

Il savait que je rencontrerai un loup-garou ? Parlait-il des gens en général ? Il fallait que je l'appelle, que je le lui demande.

— VA-T-EN.

Mais, et Jess ?

Perdue dans ma discussion astrale je le sentis avec de le voir, la bête bondit devant émettant un grognement hargneux alors que Jess courait vers moi.

— TOUT DE SUITE.

Sans demander mon reste ni même savoir où j'allais je m'enfuis a toute jambes à travers le toit, c'était tout sauf courageux. Mais je me dis que si cette voix voyait tout ce que je faisais, elle devait savoir que j'étais la meilleure combattante de l'académie. Alors si elle me disait de m'enfuir, je devais le faire.

Je risquai un regard en arrière et réalisai soudain d'où mon surnom "The Fasty" tenait sa source. Je n'avais fais que quelques pas et j'étais trop loin pour pouvoir les entendre. Tout en continuant ma course je voyais les deux ennemis se battre, Jess empêchant le loup-garou de m'approcher.

— Ne te fie pas aux apparences, ai-je pensé en sautant vers le bâtiment adjacent avant d'atteindre la fenêtre voisine donnant sur le couloir et de m'y glisser, prenant soin de vérifier si j'étais suivie.

Moi qui avais toujours voulu rencontrer un loup-garou. Ca avait bien foiré.

Morose, inquiète, et complètement retournée je pris mon portable et appuyai machinalement sur le contact "Isaac" en oubliant complètement que je me ferai écorcher vive par les gardiens (en plus du loup-garou) s'ils me surprenaient.

Il répondit presque tout de suite. A croire qu'il attendait mon appel.

— Rachel ?
— Je me suis faite attaquer par un loup-garou, dis-je à brûle pour point.

Plusieurs secondes passèrent et je me demandai s'il était toujours là. Je portai mon téléphone devant mes yeux afin de vérifier et vis que les secondes défilaient toujours.

— Quand ça ? demanda-t-il prudemment.
— Tout de suite.
— Où est-ce...
— Sur le toit, l'ai-je coupé. J'ai voulu prendre un raccourcis, alors je suis allée sur le toit, l'ai-je devancé avant qu'il ne me pose la question.
— Il t'a blessée ?
— Non, quelqu'un m'a aidé, dis-je en m'arrêtant près d'une fenêtre afin de vérifier s'il y'avait encore une quelconque activité sur toit.
— Quelqu'un ?! s'écria-t-il presque. Un professeur était là ?

Je fis la grimace et regardant le combiné.

— Sois pas stupide. Tu crois vraiment que je serais en train de te parler si un professeur m'avait surpris les mains dans la fourrure d'un lycanthrope ?
— J-je... t-tu... Que... bégaya-t-il. Tu as dit qu'il t'avait attaquée. Alors comment se fait-il que tu avais les mains dedans ?

Je souffla bruyamment comme si c'était de sa faute s'il n'avait pas tous les éléments.

— Tout se passait bien, je le caressais, il me reniflait, ronronnait comme un gros chien et puis... c'est une bête voilà tout, lançai-je soudain en ayant l'impression d'entendre ma mère.

Isaac resta à nouveau silencieux mais j'ajoutai tout de même, pensive.

— Pendant un instant j'ai cru qu'il me défendais. C'est bête mais... ça m'a fait plaisir, finis-je doucement.

Mon ami renifla.

— De quoi ? demanda-t-il.
— Jess, un nouveau, c'est lui qui est venu, expliquai-je. Il m'a manqué de respect et c'est là qu'il s'est mis en colère. Et puis il y'a eu cette...

Je m'interrompis et frappai mon front avec ma main. J'étais à deux doigts de lui avouer qu'une voix dans ma tête m'avait prévenue qu'un loup allait me bouffer. J'étais peut-être bizarroïde mais je comptais bien le garder pour moi.

— ...colère qui a changé de destinataire, me rattrapai-je.
— Tu comptes en parler à la proviseure ?

J'étouffai un rire, tant cette idée me paraissait invraisemblable.

— Jamais de la vie. Ca fait des années qu'elle veut se débarrasser de moi, je ne vais pas prendre le risque de passer pour une demeurée, parce qu'elle ne croira pas un seul mot de ce que je dirai. Elle dira que ç'a été une hallucination provoquée par l'altitude. Et m'enverra à Blume House*.

Je m'attendais à ce qu'il me prenne la tête en m'obligeant à discuter avec la Colmane, un peu comme toute personne sensée l'aurait fait. Mais... non.

— Tu as raison, ne lui en parle pas. Est-ce qu'il est toujours là ? demanda-t-il.

Je me tournai à nouveau vers la vitre à la recherche d'un quelconque mouvement sur le toit, en vain.

— Non, je ne le vois pas, dis-je. J'irai voir Jess (en espérant ne pas perdre mes moyens ou ne pas l'insulter, à voir) pour qu'il me dise le fin mot de l'histoire. De toute façon il en parlera à quelqu'un sans que je n'aie besoin de le faire. (Je grimaçai en me pinçant l'arrête du nez) Et passer pour une lâche ensuite.

Je cognai mon front contre la vitre en fermant les yeux, honteuse.

— J'ai détalé comme un lapin, c'était pathétique. Je suis convaincue d'être plus forte que lui mais j'ai pris mes jambes à mon cou.

J'entendis au bout du fil le bruit d'une serrure puis d'une porte qui s'ouvre, j'en déduis qu'Isaac venait d'arriver chez lui.

 Tu habites pas loin de l'académie ? ai-je demandé.

Je l'entendis ensuite balancer ses clés sur un meuble probablement en bois avant de me répondre :

— Un peu quand même, a-t-il dit. Mais on m'a déposé. (Il s'éclaircit la gorge) Écoute, Rose. Je sais pas trop quoi te dire là, c'est quand même gros ça. On dit que la nuit porte conseil, alors je me réveillerai peut-être avec une solution miraculeuse. Si un loup-garou se balade, il faut qu'on l'attrape. Avant qu'il ne s'en prenne à quelqu'un, ajouta-t-il sinistrement.
— Mmh, dis-je peu convaincue, ayant du mal à imaginer cette sublime créature déchiqueter quelqu'un.
— Il a essayé de te tuer, me rappela-t-il.
— OK Sherlock, capitulai-je. Nous devons mettre ce criminel derrière les barreaux.

L'image du lycanthrope s'imposa à nouveau dans mon esprit, et ses merveilleux et innocents yeux jeunes allant avec.
Je ne voulais en parler à personne parce que je ne voulais pas que cela se transforme en chasse à la bête. Malgré cela, je n'arrivais toujours pas à considérer les loups-garous comme des ennemis potentiels (peut-être que si j'avais perdu une jambe cela aurait changé la donne...?). Étais-je stupide ? Inconsciente ? Sûrement. Mais ils étaient avant tout des personnes, comme nous. Mon loup y compris.
Mais Isaac ? Je ne savais pas pourquoi il était allé dans mon sens. Sur le moment cela ne m'avait pas interloquée plus que cela. J'étais juste contente qu'il ne m'y force pas.

— Bon... On en radicutra dama, dit-il en baillant. On en r'discutera demain. Enfin, à la fin de la journée pour toi. Ou... enfin bref. Quand je me serai réveillé. Jusque là tiens toi tranquille. Et garde tes mains dans tes poches.

Je levai les yeux au ciel mi-amusée mi-agacée.

— Oui papa.

Après quelques secondes supplémentaires de discussion nous raccrochâmes et je me dirigeai finalement vers mon court d'Art. Ô joie. Sonnée comme je l'étais, je craignais le pire.
Je me promis d'en parler à Ariadne dès que je la verrai. Je lui avais caché pas mal de choses ces derniers temps et j'en avais horreur, c'était ma meilleure amie et je savais que je pouvais lui faire confiance quoiqu'il arrive.
Après m'être retournée une dernière fois vers la fenêtre de la cour, j'essuyai la sueur qui perlait sur mon front en me frottant les yeux. Sûrement une grippe, ai-je pensé. J'ouvris la porte de ma salle de classe avant de m'y engouffrer.

Mme Cadwallader, une gentille petite dame blonde et raplapla me sourit en me rappelant l'importance de l'assiduité. Elle nous poussa à étudier nos "sombres facettes" en prenant pour référence Dr Jekyll et Mr Hyde. Le but étant de se placer face à un camarade, l'un incarnant le bien (en l'occurrence Dr Jekyll (je n'étais pas tout à fait d'accord avec ce point de vue mais soit) et l'autre Mr Hide. J'étais - à mon plus grand bonheur - en binôme avec Ariadne. Elle incarnait la bonne facette et mon but en tant que vilaine Jekyll était de suivre les mouvements qu'elle effectuait afin de ne pas perdre le contrôle.

Durant tout le long du cours et jusqu'à la fin de la journée je ne cessai pas de penser à ce qui m'étais arrivé avec le Loup Garou et Jess. Allait-il bien ? Il était fort probable que non et je culpabilisais de l'avoir laissé là et de n'avoir prévenu personne. S'il allait effectivement bien, ce ne serait pas étonnant qu'il soit allé prévenir un adulte responsable.

Je soupirai pour la énième fois ce jour là en essayant tant bien que mal de me concentrer sur le cours, un mal de tête s'étant ajouté à la fièvre que j'avais commencé à avoir.

J'avais hâte de tout raconter à Ariadne mais à chaque fois que je réfléchissais à comment tout lui avouer, la Voix me faisait clairement comprendre que c'était une mauvaise idée. J'essayais évidemment de l'ignorer mais elle revenait à la charge. Je devais à tout prix savoir ce qui m'arrivait et pourquoi je l'entendais, mais je ne savais pas par où commencer ni à qui en parler qui ne dérangerait pas Monsieur la Voix infernale.

Tout ce stress, ces questions et cette fatigue mis de côté, j'avais encore ces rendez-vous : Avec Taya et Sydney d'un côté, et Beth, Cal, Alisson, Connor et Natasha de l'autre.

J'étais allongée sur un banc avec Ariadne, l'esprit tournant à cent à l'heure, attendant l'appel de Sydney. Cela l'avait d'ailleurs surprise que je passe, une fois encore, du temps avec elle. Je la soupçonnais d'être jalouse. Mais après tout, Ariadne restait Ariadne : La Bonté à l'état pur.

— Je trouve ça vraiment génial que vous vous entendiez bien, me dit-elle en souriant. Évidemment, j'aurais bien aimé vous accompagner mais cette journée m'a épuisée.

— Dis plutôt qu'Adrian va t'épuiser, la taquinai-je.

— Rachel ! s'écria-t-elle en piquant un fard.

Je pouffai et esquivai habilement son coup de poing.

— Ça, lui-dis. C'était méchant.

Elle leva les yeux aux ciel avec un sourire en coin.

— Mais mérité.

— Très probablement.

Je sentis une gêne m'envahir suivie d'un instinct un peu trop protecteur. Je fronçai les sourcils et mordillai ma joue.

— Adrien et toi, commençai-je. Est-ce que vous avez déjà...?

Ariadne piqua un nouveau fard en détournant le regard. Sa pudeur était adorable.

— Non, pas encore, répondit-elle. On attend juste le bon moment, tu comprends ?

Je haussai les épaules.

— Je ne comprends mais je peux toujours essayer. Te connaissant tu as dû choisir une date précise, ricanai-je.

Quelque chose d'étrange passa dans son regard, si vite que je cru l'avoir imaginé puis elle me répondit :

— Une date significative serait plus exact, me sourit-elle en se grattant la tête.

— Tu ne peux vraiment pas te libérer pour tout à l'heure ? Cela fait longtemps qu'on n'a pas passé de temps toutes les deux.

Je levai les yeux vers le ciel sombre qui contrastait avec la clarté de la Lune. Aussitôt je me mis à repenser à ce qui s'était passé plusieurs heures avant.

— Et puis, Sydney remonte dans mon estime. Elle pourrait te voler la vedette, continuai-je avant que mon esprit ne recommence à vagabonder.

Ariadne éclata de rire comme si elle n'y croyait pas une seule seconde et cela me fit sourire.

— Tu ne pourrais pas me remplacer même si tu le voulais !

— C'est parce que nous sommes liées par une sorte de pacte de sang, dis-je avant de me rendre compte qu'à peine prononcé ces mots, le rire de mon amie s'était stoppé.

Je la sentis se tendre et me redressai afin de lui faire face.

— Un problème ? Quelque chose ne va pas ? m'inquiétai-je.

— N-Non, dit-elle en détournant le regard. J'ai juste... cru voir quelqu'un passer, dit-elle en regardant droit devant elle.

Je suivis son regard mais n'arrivai à rien distinguer dans la pénombre.

— Qui ça ?

— Comme si on nous espionnait.
Elle secoua la tête et se retourna vers moi.
— Je débloque, tu sais comment je suis !
Ma langue devint pâteuse et une crainte s'insinua en moi : Et si c'était lui ? Le Loup ? Et s'il m'observait en ce moment même ? S'il avait tué Jess et qu'il avait l'intention de me faire subir la même chose ? Non ! Il fallait que je me calme, le stress et la grippe que je commençais à avoir me faisait délirer !
— Rachel ? m'interpella Ariande. J'ai sûrement rêvé je te dis !
Je secouai la tête. Peu importe, il fallait que j'en parle à Ariadne, je l'avais dit à un type que je connaissais à peine. Et ce n'était pas la voix de ma folie mentale qui allait m'en empêcher.
— Ariadne, tout à l'heure, sur le toit j'ai vu...
Un violent mal de crâne me saisit, comme si l'air faisait pression à l'intérieur. J'aperçus quelque chose du coin de l'œil et fermai les yeux. Il me sembla avoir entendu Ariadne m'appeler mais l'horrible bourdonnement que j'entendais prenait le dessus sur tout le reste.
Je serrai les dents en tentant de ne prêter aucune attention à la douleur. Cela me réclama beaucoup d'efforts, mais une concentration intense me permit d'apaiser la douleur.
Tout en luttant contre cette horrible migraine, je réussis à laisser place à ma conscience. Cette douleur était arrivée lorsque j'avais essayé de parler à Ariadne, et malgré la souffrance, je réussis à trouver la force de me mettre en colère. Je crois avoir poussé un hurlement mais tout me paraissait flou.
Je serrai encore plus la mâchoire et dans un dernier élan de courage, tentai de tout déballer en une phrase.
— Tout à l'heure, tentai-je. Sur le toit, j'ai vu un loup-gar...
Ce fut alors que cela se produisit.
Mon univers éclata, ma migraine empira, bien au-delà de ce que j'aurais cru possible. J'eus l'impression qu'on m'ouvrait le crâne.
Mais ce ne fut que le début. Soudain, je vis un visage apparaitre, fantomatique, translucide, effrayant. Je rouvris les yeux, espérant le faire disparaître, mais plusieurs autres apparurent. Il y'en avait partout, au point que je ne distinguais plus l'environnement qui m'entourait. Ces visages avaient la bouche ouverte et il me sembla qu'ils avaient tous des crocs. Des crocs de loups.
Ils se pressèrent autour de moi, de plus en plus nombreux, leurs yeux éclairés de plusieurs couleurs; rouge, jaune, vert, bleu. Même si aucun d'eux ne parlait vraiment, j'entendais un bourdonnement continuel de plus en plus puissant. Lentement, tous levèrent leurs index vers leur visage : "Chut"
Je me mis à hurler.
Ils devenaient nombreux, de plus en plus nombreux. Ils ne me touchaient pas, mais ils étaient di près que j'en suffoquais. Je me levai en me débattant, avec des gestes affolés. Ils se pressèrent encore plus la douleur et le bourdonnement s'intensifiant au fur et à mesure et je continuai à battre des bras pour les chasser en appelant à l'aide et en suppliant qu'on fasse cesser ce cauchemar.
Un visage retira son doigt, je ne voyais pas son visage mais la lueur rouge sans son regard était terne comme s'il était triste et désolé. Il porta la main à son coeur en secouant la tête.
— Faites quelque chose ! hurlai-je. Arrêtez-les. Arrêtez ça.
Mais il ne pouvait pas m'aider, personne ne le pouvait. Cette souffrance qui mon consumait continuait à m'envahir au fur et à mesure que ma vision s'obscurcissait. Je sentis que j'allais m'évanouir et m'en réjouis. Je ne distinguai bientôt plus rien et sentis mes jambes se relâcher. Quelqu'un dû me rattraper car une chaleur m'enveloppa aussitôt.
Lorsque les visages eurent disparu, la douleur et le bourdonnement en fit autant, tandis que les ténèbres apaisantes m'engloutissaient.
Après cela, tout devint flou. J'eus l'impression de reprendre conscience dans les bras de quelqu'un qui courait dans un couloir et d'entendre mon prénom.

 

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
A.W. Zephyrus
Posté le 12/05/2021
"— Ça, lui-dis. C'était méchant." --> "— Ça, lui-dis-JE. C'était méchant."
"— Je ne comprends mais je peux toujours essayer." --> "— Je ne comprends PAS mais je peux toujours essayer."

"— C'est parce que nous sommes liées par une sorte de pacte de sang, dis-je avant de me rendre compte qu'à peine prononcé ces mots, le rire de mon amie s'était stoppé."

Ici, "arrêté" me semble mieux.

"Lentement, tous levèrent leurs index vers leur visage : "Chut" "

Votre attention s'il vous plaît. Un point est demandé à la fin de cette phrase
le rapidement possible, merci.

"Ils devenaient nombreux, de plus en plus nombreux. Ils ne me touchaient pas, mais ils étaient di près que j'en suffoquais. Je me levai en me débattant, avec des gestes affolés."

Ici le "di" est sans doute un "si" et la première phase est déjà mise quelques lignes plus haut.

"Ils se pressèrent encore plus la douleur et le bourdonnement s'intensifiant au fur et à mesure et je continuai à battre des bras pour les chasser en appelant à l'aide et en suppliant qu'on fasse cesser ce cauchemar."

Il manque une virgule après le "plus".

"Un visage retira son doigt, je ne voyais pas son visage mais la lueur rouge sans son regard était terne comme s'il était triste et désolé."

Je pense que la virgule devrait être un point, que le "sans est une faute de frappe et que "son visage" devrait être remplacé par "ses traits".

"— Faites quelque chose ! hurlai-je. Arrêtez-les. Arrêtez ça."

SI elle hurle, je trouve qu'il faudrait plus de points d'exclamation.

"Cette souffrance qui mon consumait continuait à m'envahir au fur et à mesure que ma vision s'obscurcissait."
"Je ne distinguai bientôt plus rien et sentis mes jambes se relâcher."
"Lorsque les visages eurent disparu, la douleur et le bourdonnement en fit autant, tandis que les ténèbres apaisantes m'engloutissaient."

Attention fautes de frappe. Quand je te dis de relire tes chapitres Sybel…
SybelRFox
Posté le 12/05/2021
Merci cher Zephyrus. Ca me sera utile le jour où je me déciderai à tout relire (ou à embaucher un esclav-euh correcteur).

Oui je sais... Voilà ce qui arrive quand on écrit sur téléphone. Et qu'on publie le chapitre à la seconde où on écrit le dernier mot.
Vous lisez