CHAPITRE 1

Par Taranee

PRESENT : JIO

 

- Jio. Nethan s’est fait capturer par les chasseurs de prime.

            Le monde devint flou et les paroles d’Elijah ne furent plus que des sons indistincts dans la masse de pensées qui parcourraient l’esprit de Jio. Et ce mot, qui revenait, clignotant. Capturer. Capturer. Elle s’est fait capturer. Nethan n’était pas ici, elle n’était pas avec Elijah. Elle était… Autre part. Capturée. Jio avait envie de rire, envie de pleurer, envie de frapper et de crier. Ses yeux noirs se portèrent sur le jeune homme aux yeux d’or, devant lui.

- Elijah. Dis-moi que c’est une blague.

- …

- Dis-moi que c’est une blague ! répéta-t-il en poussant un rire hystérique.

- C’est pas une blague, ok ? Elle est plus là !

Jio secoua la tête, puis serra les dents, braqua son regard sur son interlocuteur. Un regard froid et calme, un regard de bombe à retardement.

- Et toi, Elijah… Tu étais où pendant ce temps ?

L’interrogé ne répondit pas.

- Tu étais où, Elijah ? Où étais-tu quand on l’a capturée ?! Dis-moi, où étais-tu ?

- Je ne sais pas ! À côté d’elle, sûrement, ou alors juste devant ! Je n’étais pas loin !

- Alors pourquoi tu ne l’as pas protégée ?! s’écria l’adolescent en saisissant l’autre par le col de son t-shirt : Pourquoi tu n’as rien fait, si tu étais là ?

- J’ai essayé ! J’ai essayé de la sauver !

- Tu es à peine blessé, tu as dû t’enfuir comme un lâche et l’abandonner à son sort ! C’est ça, hein ?

Sans qu’il ne comprît pourquoi, Jio se retrouva soudainement plaqué contre un mur, en position de faiblesse, face à Elijah qui, même s’il était plus petit que lui, n’en restait pas moins menaçant par son expression coléreuse.

- M’enfuir ? Parlons-en, de ça ! Toi, Jio, qui t’es toujours débiné face à tes problèmes, toi qui m’as abandonné, tu me parles de s’enfuir ? Et toi alors ? Est-ce que tu as été là pour Nethan ? Pas autant que moi en tout cas ! C’est moi qui l’ai consolée quand elle a pleurée après s’être fait attaquer, c’est moi qui ai parcouru tout le dédale pour la sauver quand je croyais que les Libellules l’avaient capturée, c’est moi qui l’ai portée jusqu’à notre première cachette quand le LERM a explosé, et c’est moi qui ai tué le médecin qui l’a menaçait ! Et toi, tu as fait quoi, au juste ? Tu as fait partir un parasite de sa tête et après tu as disparu ?

Jio ne comprenait pas un traître mot de ce que disait Elijah. Et pour cause : il n’était, effectivement, pas là quand tout ça était arrivé. Il aurait voulu répliquer, repousser cet homme avec force et lui dire qu’il avait tort, qu’il avait été là, mais qu’avait-il fait, au juste, à part discuter quelques fois avec Nethan ? Il aurait voulu répondre, oui. Mais c’est Elijah qui le devança.

- Tu n’as rien fait, Jio ! Et pourtant tu es là, je ne sais ni comment, ni pourquoi tu es venu ici, mais si tu avais un moyen de venir, alors tu aurais dû le faire plutôt ! Tu aurais dû le faire pour moi, moi qui t’ai attendu, désiré, quand j’étais en détresse ! Et Nethan, tu aurais dû la protéger aussi ! Au lieu de ça, tu lui as dit que celui qui avait attaqué son esprit allait revenir ! T’as même pas été fichu de l’éjecter pour de bon !

- Tais-toi, TAIS-TOI !

Jio se retenait de le frapper, Elijah pleurait. Les nuages s’assombrissaient, comme en réponse à leur dispute.

- Alors, Jio. Dis-moi : Pourquoi tu es venu ici ? Pourquoi tu ne viens que quand ça t’arrange, quand il est déjà trop tard ?

- Je t’interdis de dire ça !

La magie était sortie sans même qu’il ne l’eût voulu. Les ombres étaient là, dans son poing formant une dague à laquelle il fit décrire un arc de cercle violent. L’arme ne termina pas sa course.

Un pied apparut dans sa trajectoire et vint s’écraser sur l’avant-bras de Jio. Ensuite, on le bouscula avec violence et il tomba. Il sentit un poids sur son corps, il vit le visage d’une jeune femme métissée, les cheveux courts, dont les yeux noisette le toisaient avec sauvagerie. Derrière elle, une autre femme, une jeune fille, plutôt, le regardait avec inquiétude.

- T’es qui ? Tu sors d’où ? demanda la jeune femme avec agressivité : Qu’est-ce que tu lui veux, à Elijah ? T’es un chasseur de primes ?

- Lâche-moi ! s’exclama Jio en se cabrant pour essayer de la faire tomber.

Sans succès. Elle se cramponna à lui, le saisit au col, leva la main et…

- Abigail ! Arrête !

Elle s’arrêta, se tourna vers Elijah qui venait de parler.

- C’est pas un chasseur. C’est… Une connaissance.

- Je n’ai pas besoin de ton aide pour me sortir de cette situation !

- Toi, tu devrais être reconnaissant qu’il te sauve la mise ! dit celle qui devait s’appeler Abigail avant de se lever.

Jio se leva à son tour, jetant un regard noir à son agresseuse avant de s’approcher d’Elijah.

- Je n’en ai pas fini avec toi.

Puis il se tourna vers les deux jeunes femmes et leur sourit presque avec gentillesse, quoiqu’avec aussi un peu de crispation.

- Excusez-moi, j’ai dû vous effrayer en m’avançant de manière aussi brusque vers Elijah. Je m’appelle Jio. Je suis une connaissance d’Elijah, et, peut-être, un ami de Nethan. Enchanté.

Il n’avait certainement pas envie de perdre son temps avec ces deux femmes mais il le fallait bien, sans quoi il ne pourrait jamais avoir la paix ni être seul à seul avec Elijah. La plus jeune des deux s’avança. Elle était mignonne, toute fluette.

- Je m’appelle Evvy. Et voici Abigail. (l’intéressée poussa un grognement qui ressemblait à un « Enchanté » peu accueillant.) C’est vrai que tu nous as surpris. Mais on dirait que tu ne veux pas vraiment de mal à Elijah. En plus, il t’a défendu tout à l’heure. Mais je voudrais quand même savoir d’où tu viens et si on peut te faire confiance.

- Je viens de loin. répondit l’adolescent sans plus s’attarder sur la question. Il n’allait certainement pas commencer à dévoiler sa vie personnelle : Quant à savoir si vous pouvez me faire confiance, il ne tient qu’à vous de prendre cette décision.

- Pourquoi tu menaçais Elijah ? demanda Abigail : Vous vous disputiez ?

- On réglait nos comptes, disons.

- Quels comptes ?

C’est à ce moment que les yeux de Jio se mirent à pétiller de malice. Il y avait quelque chose de méchant dans son regard, quelque chose de pervers, et quand il sourit, sa bouche sembla se tordre en un rictus disgracieux.

- Oh ? Elijah ne vous a pas mises au courant ?

Le jeune homme en question fit un pas en avant, la bouche ouverte, prêt à répliquer. Mais Abigail le prit de court.

- Qu’est-ce que nous devrions savoir ?

- Vous connaissez certainement la petite Nethan. Hé bien figurez-vous qu’elle a été capturée par ceux que vous appelez les chasseurs de prime ! Et vous savez quoi ? Elijah était juste à côté et n’a pas été en mesure de la protéger !

Elijah esquissa un nouveau pas en avant et ses muscles se contractèrent, comme s’il se retenait de frapper le garçon. Jio ne savait pas pourquoi il faisait ça. Il ne savait pas pourquoi il était méchant, pourquoi il avait posé une bombe pareille au sein de ce groupe qui semblait uni. Il avait juste eu envie d’être méchant, envie de briser une amitié, un lien de confiance. Il avait fait ça pour son propre plaisir, par pure envie de faire le mal. Cela faisait-il de lui un salaud comme Allisen ? Peut-être. Peut-être qu’il avait fini par lui ressembler, avec les années. Peut-être qu’il ne valait pas mieux que lui, finalement. Mais là n’était pas le problème. Il venait de réduire à néant sa seule chance de se rabibocher avec Elijah. Il les regarda, tour à tour. Elijah retenait sa colère et cachait son sentiment de culpabilité, Abigail fronçait les sourcils, Evvy maintenait sa bouche entrouverte sans qu’aucun son n’en sorte. C’est Abigail qui prit la parole en premier, articulant avec peine.

- Nethan s’est fait quoi ?

- Capturer, oui. répondit Elijah. Puis, continuant avec empressement : Mais ce n’est pas ce que tu crois !

- Comment ça : « Ce n’est pas ce que tu crois ? ». Tu vas me dire que les chasseurs l’ont emmenée pour boire un thé avec elle ? Qu’ils t’ont demandé ton avis avant ? Et toi, tu étais où ? Qu’est-ce que tu faisais ?

- J’ai essayé de les en empêcher, je te le promets Abby, j’ai essayé. Mais ils étaient trop, et trop forts. Je… Je n’ai rien pu faire, ils l’ont emmené avant que ne réussisse à me libérer de ceux qui essayaient de m’attraper.

La jeune femme soupira. Elle avait l’air fatiguée.

- Je ne sais même pas quoi répondre Elijah. Elle était sous ta responsabilité. Et toi… Bref. Et toi ? Comment tu es au courant ? demanda-t-elle à Jio.

- C’est un peu long à expliquer. Mais vous devez déjà savoir que je veux allez sauver Nethan.

Elle hocha la tête, se tourna vers sa camarade. Elles échangèrent quelques mots et Jio put saisir un « Qu’est-ce qu’on fait ? ». Il attendait. Il ne savait pas ce qu’il attendait, au juste, mais quelque chose le retenait ici. Peut-être était-ce le regard insistant que lui portait Elijah… Au bout de quatre ou cinq minutes de débat, les deux femmes se tournèrent vers Jio.

- Est-ce que tu es un mage ?

- En quoi est-ce que ça vous regarde ?

- Jio, réponds s’il te plaît. Souffla Elijah qui ne devait plus supporter cette atmosphère tendue.

- Oui, j’en suis un. dit-il avec réticence.

Il ne savait pas s’il pouvait leur faire confiance. Leur révéler des informations sur lui ne pouvait pas lui être bénéfique.

- Bien. Reprit la jeune fille : Dans ce cas-là, tu vas nous suivre.

Une menace ? ou une demande ? Jio recula instinctivement d’un pas, sentit la main d’Elijah lui effleurer l’épaule, se dégagea brusquement. Il était tombé dans assez de pièges pour tout une vie. Ce « Tu vas nous suivre » ne lui inspirait pas confiance, il n’avait aucune envie de les écouter. La fille qui avait parlé leva les mains en signe paix.

-  Hé. On ne va pas te faire de mal. Si tu veux aussi sauver Nethan, on doit en parler avec quelqu’un. Sinon, tu es libre de repartir, peu importe d’où tu viens. Mais tu n’as pas l’air d’être très au courant de ce qu’il se passe à Nirim.

- Je sais que certains mages vont dans un laboratoire et qu’on pratique des expériences sur eux.

- Oui : les mages sont traqués puis capturés. Mais ce n’est pas tout. Une maladie se répand en ville : une maladie qui tue les mages en faisant disparaître leur magie. Honnêtement : nous sommes une de tes meilleures chances de survie ici.

La pluie commençait à tomber. Evvy l’observait, essayait, peut-être, de le sonder. Jio détourna le regard. Il n’aimait pas être examiné.

 

 

PASSE :

 

            L’homme s’arrêta un mètre plus loin, alors qu’il venait de passer devant lui. Il se retourna, avisa les guenilles trempées de l’adolescent. La pluie était torrentielle, Jio était trempé jusqu’aux os. Il avait froid, il tremblait. Il n’avait pas mangé depuis trois jours, seulement bu. L’homme était grand. Il devait avoir quarante ans, ou cinquante. Ses habits de bonne qualité montraient sa richesse par leurs dorures et les motifs stylisés qui étaient cousus sur sa cape.

- Eh, petit. Je te vois traîner dans le coin depuis un petit moment maintenant. D’où tu viens ?

Un coup de vent souligna l’absence de réponse de Jio.

- Tu as des parents ? Comment es-tu arrivé à Poralguar ? Et depuis combien de temps ?

Il s’était rapproché en disant cela et Jio recula machinalement. Qui était cet homme ? Que lui voulait-il ? Pourquoi s’arrêter aujourd’hui, alors qu’il était toujours passé sans rien dire, sans même lui jeter un regard ?

- Je m’appelle Erlein Nowise. dit-il, comme en réponse à sa question : Et toi ?

- Jio.

- D’accord, Jio. Tu veux bien me suivre ?

Il tendit la main, Jio s’écarta encore et en profita pour se relever, se tenant prêt à s’enfuir.

- Je ne vais pas te faire de mal.

De la bouche du garçon sortit un rire ironique.

- C’est toujours ceux qui ne veulent pas faire de mal qui en font le plus.

- Très bien alors. Je te laisse ici, sous la pluie, affamé.

Et l’homme commença à partir, bien au chaud, drapé dans sa cape.

- Attendez ! l’interpella Jio.

Erlein Nowise se retourna, l’ombre d’un sourire accroché sur ses lèvres.

- Vous me laisseriez manger quelque chose ?

- Tout ce que tu voudras.

Tant pis pour la confiance. L’adolescent rejoignit l’adulte d’un pas pressé.

 

***

 

Alors qu’il avalait goulument sa soupe et son pain chaud, Erlein Nowise l’examinait. L’homme semblait constaté, déploré, le teint pâle du garçon, ses cernes, ses joues qui commençaient à se creuser. La fatigue se faisait ressentir dans chacun de ses traits. Au bout d’un moment, l’adolescent cessa de manger. Il leva les yeux, plonges son regard de jais dans celui de l’homme. Ils restèrent là, à s’observer, pendant de longues minutes. Et malgré tous les efforts de Jio, l’homme ne baissait pas le regard. Enfin, insupporté par ce petit jeu, il parla.

- Qu’est-ce que vous me voulez ?

- Pourquoi es-tu si méfiant, petit ?

- Vous êtes passé devant moi, et sûrement devant d’autres enfants des rues, des dizaines de fois. Vous ne vous êtes jamais arrêté.

- C’est un reproche ?

- Une constatation. Alors ? Vous n’avez pas répondu à ma question.

- Tu es plus bavard que tout à l’heure.

Jio se tût. Sa main se crispait sur son bol de soupe, il s’impatientait. Il avait envie de lui jeter le liquide bouillant à la figure, de le secouer pour qu’il réponde à sa question au lieu de la contourner. Mais il ne devait pas. Il ne fallait pas qu’il perde le contrôle maintenant, alors qu’il avait une chance de s’en sortir. Il se contenta donc de se terrer dans son mutisme, de jeter un regard buté à son interlocuteur qui, cette fois, s’impatienta le premier.

- Tu m’intéresses.

- Je n’ai pas toujours intéressé les bonnes personnes.

- Je ne suis pas une bonne personne ?

- Je ne le sais pas encore.

Erlein Nowise rit.

- Tu es malin, Jio. Mais je vois où tu veux en venir.

- Et ? Ça vous dérangerait d’aider un enfant dans le besoin ?

- Veux-tu de mon aide ?

Chacun des deux jouait avec les mots, jonglait avec les expressions détournées, les sous-entendus, c’était comme une danse, un concours silencieux où chacun des deux partis évaluait l’autre. Jio fronça les sourcils. Nowise rit de nouveau.

- Tu ne m’as pas l’air du genre à te laisser marcher sur les pieds.

Silence buté.

- Que dirais-tu d’entrer à mon service ? En tant que valet, par exemple.

- …

- Tu serais nourris et payé.

- Et logé.

- Et logé si tu le veux !

- D’accord, dans ce cas.

 

PRESENT :

 

- Alors ? demanda Evvy, sortant Jio de ses pensées.

Il essuya les gouttes qui coulaient devant ses yeux.

- Je vous suis. dit-il.

Evvy lui sourit gentiment et l’invita à les suivre. Abigail prit la tête du groupe et les guida jusqu’à un tunnel, quelques mètres plus loin. Jio remarqua qu’Elijah et Evvy l’encadraient tout de même, comme s’il allait s’enfuir à tout moment.

            Ils entrèrent dans les galeries souterraines et Jio crut ressentir une certaine tension chez Elijah. Tension qu’il trouva pitoyable et qui accrut le dédain qu’il ressentait pour le mage de soin en ce moment. Les tunnels étaient spacieux et on pouvait y entendre les échos du vent et de la pluie qui venaient de l’extérieur. L’endroit semblait regorger de souvenirs. Par deux fois, ou peut-être trois ? Ils passèrent à côté de ce qui semblait être des quais. La jeune fille du groupe, Evvy, expliquait avec excitation qu’ils se trouvaient dans ce qu’on appelait « les voies du Transport magique inter zone » et que ça faisait la cachette idéale avec le réseau immense et labyrinthique de galeries qui rendait presque impossible le fait de retrouver le repère des Libellules. Et puis Jio avait cessé d’écouter, se concentrant sur des choses plus importantes. Nethan, Soö, qui devait le chercher, ou le Duc Nowise qui le surveillait peut-être. Finalement, il entendit qu’on l’appelait et tourna la tête.

- On est arrivé. Lui indiqua Elijah.

Devant eux, une porte blindée qu’Abigail sembla ouvrir sans difficulté (était-elle une mageresse de développement des sens, comme Maz ? Ou peut-être avait-elle un pouvoir de force ?). Elle laissa passer tout le monde puis entra elle-même et referma la porte. Des tubes lumineux éclairaient le long couloir qui s’étendait là et le groupe continua son cheminement souterrain pendant ce qui parut à Jio être une éternité avant d’arriver devant une autre porte, simple. Abigail l’ouvrit sans toquer et y entra, suivie de sa jeune camarade puis des deux garçons. À l’intérieur, un bureau, des chaises, des fauteuils, un tapis, et un homme d’une vingtaine d’années ou peut-être un peu plus. Il les accueillit chaleureusement, bien que son sourire semblât crispé, et les invita à s’asseoir sur les fauteuils. Jio et Elijah restèrent debout. L’homme les rejoignit bientôt puis, examinant le mage d’ombres, il dit :

- Et toi, tu es qui au juste ?

- Un mage de passage. Il semblerait que je doive m’adresser à toi pour réaliser mon objectif.

- Et quel est ton objectif ?

- Oh, ça… Vous pouvez le demander à Elijah.

L’homme leva un sourcil interrogateur et porta son œil valide sur l’intéressé dont la machoir se crispa.

- Jake, il va falloir lancer le plan, dans une semaine, au maximum. Il y a eu… Un problème. Nethan s’est fait choper.

Le dénommé Jake parut soudain comme paralysé. Il recula d’un pas, s’appuya contre un mur, peut-être pour éviter de perdre l’équilibre. Puis son expression changea. Ses pupilles se rétrécirent, un sourire s’agrandit sur ses lèvres, il passa la main dans ses cheveux châtain clair en riant. Et Jio le trouva alors aussi instable que Soö.

- Nethan s’est fait quoi… ? articula-t-il en détachant chaque syllabe, rendant sa question menaçante : Nethan s’est fait quoi ?

- Je sais, tu dois être en colère, mais c’est pour ça qu’on doit réagir maintenant. Elle est en danger ! Elle doit déjà être enfermée quelque part au labo, à cette heure.

- Mais dis-moi, Elijah : Comment Nethan a pu se faire capturer si elle était ici, au repère ?

Jio sentit un voile de culpabilité recouvrir la salle. Tout le monde parut détourner le regard et Jake en profita pour se lever et s’approcher d’Elijah, le dominant de sa taille.

- Alors Elijah ? Tu as quelque chose à me dire ? Comment est-ce que c’est arrivé ?

- Jake… commença Evvy : Elijah n’avait pas le moral alors avec Nethan on s’est dit que, peut-être, il aimerait sortir…

- Vous êtes sortis sans mon autorisation ?

- Oui, mais…

- Vous êtes sortis sans mon autorisation et sans escorte pour vous protéger, c’est ça ? Et vous vous êtes fait attaquer par les chasseurs. J’ai raison ?

Ses mains tremblaient, il serrait les poings. Mais lorsqu’Elijah affirma ses dires dans un filet de voix ténu, il ne se retint plus. Sa main fusa, dangereuse, vers le visage d’Elijah qui rentrait sa tête dans ses épaules. Le corps de Jio réagit sans même que son cerveau ne lui dictât quoi faire. L’adolescent saisit le poignet de Jake juste avant l’impact.

- Je ne crois pas qu’il y ait besoin de faire usage de violence.

Ils restèrent là, à s’observer, pendant une poignée de secondes, à se combattre, et puis Jio réussit enfin à abaisser de force la main de l’attaquant. Jake eut un reniflement frustré et il toisa le mage d’ombres.

- Tu sais te battre. affirma-t-il : Et tu en as l’habitude. Tu as sûrement déjà tué quelqu’un, vu le regard que tu m’as adressé.

- C’est vrai. répondit Jio, immédiatement.

Un frisson parcourut la salle. Il regrettait déjà ses aveux irréfléchis et n’avait désormais qu’une envie : partir d’ici.

- Ok, j’ai eu tort, je me suis emporté. (Jake leva les mains en signe de paix) : Désolé Elijah. Je suppose que tu es aussi là pour Nethan, monsieur l’assassin ?

Jio ne releva pas le surnom. Il ne fallait pas causer de nouvelles tensions.

-  Ouais. Je suis là pour ça. Alors ? Tu peux m’aider ?

- Ça se pourrait, oui. Après tout, tu as entendu notre ami Elijah : On a un plan pour évacuer les mages prisonniers du LERM.

- Je me fiche complètement des autres mages. Celle qui m’intéresse, c’est Nethan.

Cela fit rire l’homme qui porta brièvement la main au cache-œil qu’il portait.

- Je vais voir ce que je peux faire. En attendant, on va te donner une chambre au repère.

 

 

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