Chap.21 : Bonadan

« Est-ce bien nécessaire tout cela ? » lança Lewis sur un ton sceptique.
Spencer ne releva même pas la tête de sa caisse lorsque son capitaine lui fit cette remarque, sortant une ceinture sur laquelle elle pouvait attacher deux blasters et d'autres armes plus légères qu'elle jugeait nécessaire pour cette mission.
Elle avait bradé son uniforme d'amiral pour un uniforme d'intervention plus pratique pour le combat à distance ou rapproché. Cette planète était probablement l'une des plus hostiles du système et il était hors de question d'y afficher son grade militaire.
« Je vous rappelle où je suis sensée me rendre, Lewis ? » lança-t-elle sur un ton plus sec que d'habitude.
Il haussa les épaules, Lewis avait essayé de plusieurs façons d'en savoir plus sur son entretient avec Snoke et sur sa rencontre avec Kylo Ren. Mais elle était demeurée muette et fermée comme une huitre. Une chose était certaine à ses yeux, c'est que l'amirale semblait prisonnière d'une grande angoisse.
« Je vous confie le commandement Lewis. » Lança-t-elle en achevant de s'armer.
« Ne voulez-vous pas que je vous accompagne ? »

Elle marqua une hésitation, évidemment, elle aura largement préféré se rendre là-bas avec l'entièreté de son équipage et prendre Lewis comme second, mais le Suprême Leader en avait décidé autrement et ce choix ne dépendait pas d'elle.

Et elle détestait ça.

« Je préfère vous savoir ici. » souffla-t-elle en hochant doucement la tête négativement. « Vous serez bien plus utile sur Sentinelle, j'en suis persuadée.
- Et à quelle autorité dois-je répondre ? »
Spencer se tut, le regard fixant un point dans le vide, pensant à l'idée de partir loin d'ici pour une période dont elle ignorait la durée.
Espérant même revenir un jour.
« A Hux. » souffla-t-elle.

Elle se rendait compte de ce qu'elle venait de dire. Un jour, Hawkins lui avait parlé de l'étrange lien qu'un amiral tissait avec son vaisseau. Il lui disait que les bons chefs tissaient une relation particulière avec la machine. Ce n'était plus un simple vaisseau, c'était leur maison, leur famille, leur point de repère. Et si à l'époque elle l'avait pris pour un fou, aujourd'hui elle réalisait à quel point il avait raison et à quel point le Donnagher avait pris une place importante dans sa vie.

Le Donnagher et son équipage étaient devenus sa seule et unique famille.
Et elle confiait tout cela au général Hux.

Lewis demeura silencieux, inclinant légèrement la tête en signe d'approbation. Spencer savait qu'il ne prenait pas la nouvelle de gaité de cœur et qu'au moment où elle lui parlait, c'était son mépris pour Hux qui avait le dessus. Pour lui et pour tout ce qu'il représentait. A ses yeux, il était un parvenu, un tricheur et ne vivait que de manigances et de vengeances.

Il était, en vérité, son radical opposé.

Elle espérait cependant que les deux hommes parviendraient à mettre leurs différents de côté pour le bien être du Premier Ordre, et pour cela, elle faisait confiance à Lewis.
« Rapportez-moi ce que vous découvrirez ici, dans l'analyse complémentaire des débris que vous avez récupérés après la bataille.
- Entendu, mais vous partez sans un seul allié ? » la voix de Lewis semblait être un mélange d'inquiétude et de surprise.
« Non, j'embarque avec moi le lieutenant Brant et des Stormstroopers de nos bataillons.
- Brant ? » répéta Lewis surpris.
« J'ai lu son dossier, j'ai envie de savoir s'il est fiable. »
Lewis eut un hoquet tandis qu'il croisait les bras.
« Vous vous posez vraiment la question Madame ?
- Allons, Lewis, si vous vous étiez fié uniquement à ce qu'on disait de moi, serions-nous ami aujourd'hui ? »
Il se tut, devant bien admettre que l'amirale venait de marquer le point décisif.
« Revenez entière, beaucoup se bousculeraient pour votre place sur le Donnagher, et pour tout vous dire, je n'en apprécierais aucun. »
Elle leva son pouce vers le ciel tout en regardant Lewis, un sourire se dessinait sur ses lèvres alors que Spencer s'éloignait déjà en direction de l'aire de décollage. Lewis la salua rapidement et se retourna en direction de la station, ne voulant pas que son visage trahisse son inquiétude.

Alors que l'agitation battait son plein, Spencer restait immobile, seule, contrastant avec le mouvement constant autour d'elle. Au loin elle apercevait la corvette qui avait été mise à disposition de Kylo Ren pour partir sur Bonadan, il l'attendait de pied ferme. Dos à elle, les bras croisés, il regardait les soldats chargés le matériel nécessaire dans la soute tandis que ses troopers se tenaient au garde à vous, attendant l'ordre d'embarquer. Beaucoup de choses se bousculaient dans sa tête, notamment l'idée de retourner là-bas et la façon dont elle allait le vivre. En réalité, elle ignorait complètement si ce retour aux sources allaient avoir un impact sur elle, mais s'inquiétait davantage de la présence de Kylo Ren en qui elle n'avait aucune confiance. Comment se fier à un homme qui se cache derrière un masque et des pouvoirs aux origines obscures ?
« Je vous sens tendue Amirale... »
Perdue dans ses pensées, elle n'avait pas perçu la présence qui s'était élevé derrière elle et la voix grave et suave qui avait prononcé ses mots la fit sursauter.
L'homme qui se tenait à côté d'elle était grand, sa mâchoire bougeait au rythme du chewing-gum qu'il mâchait et ses yeux bleus la regardait d'un air amusé.
Tournant les yeux vers lui, ses yeux de azur lui lancèrent un regard électrique, ce n'était absolument pas le moment pour lui faire ce genre de remarque.
« Je vous ai demandé votre avis, Lieutenant Brant? » répliqua-t-elle sur un ton méprisant.
Il haussa les épaules, ses lèvres faisaient une moue étrange et il semblait s'amuser de la situation.
« C'est l'apprenti sorcier au masque noir qui vous fait flipper ou c'est autre chose ? » continua-t-il, se fichant totalement du ton agacée qu'elle avait pris en lui répondant.
Enael ne put contenir un soupir d'agacement, se demandant si elle n'allait pas le laisser là, sur le pont.
« Êtes-vous conscient que pour moins que ça, la plupart d'entre nous vous aurait déjà collé un blaster sur la tempe ?
- Oh, mais je suis sûr que vous, vous êtes bien plus indulgente n'est-ce pas ? »
Elle grimaça, surprise par la réplique facile de Brant.
« Indulgente ? » reprit-elle sur un ton méprisant.
« Ouais, j'ai cru comprendre que tout le monde était content de bosser avec vous sur le Donnagher, alors je suppose que si c'est comme ça, c'est que vous êtes peut-être un peu moins inhumaine que tous les autres. »

Surprise par de tels propos, elle ne savait que répondre. Était-ce cela que pensait son équipage ? Était-ce pour cette raison qu'elle avait toujours été respectée dans ses choix ?
Les paroles que Lewis lui avait dites un jour où elle avait douté d'elle raisonnait à nouveau dans son esprit.
Moins inhumaine que les autres ?...
« Vous me sous estimez Lieutenant ! » siffla-t-elle, profitant de l'occasion pour balayer ses pensées.
Brant la regarda avec un sourire espiègle, continuant à mâchouiller son chewing-gum de manière bruyante
« Relax, j'essayais juste de détendre l'atmosphère, moi aussi j'ai envie d'en finir avec ce petit safari !
- Ravie de l'entendre. » commença-t-elle « Et cessez de mâcher de la sorte ! »
Sans attendre la moindre réponse, elle s'élança vers le vaisseau qui semblait désormais sur le point de décoller. Brant quant à lui, resta un instant immobile sans pour autant cesser de jouer avec son chewing-gum haussant les épaules en soufflant bruyamment, il finit par lui emboiter le pas. Décidément, pensa-t-il, cette nouvelle cohabitation ne serait pas des plus simples.

Quand Spencer arriva au niveau du chevalier noir, elle n'eut aucun mal à sentir son regard pesant sur ses épaules, elle refusa cependant de baisser les yeux devant lui.
« Vous êtes presque en retard, amirale. » lança Kylo Ren d'une voix métallique.
« Oh, Seigneur Kylo, vous n'auriez eu aucun scrupule à partir sans moi, j'en suis sure. » lança-t-elle sèchement. Elle balaya une nouvelle fois l'aire de décollage, cherchant une silhouette réconfortante, en vain.
« Qui dirigera les opérations ? » demanda-t-elle sur un ton monocorde.
« Nous devons le décider par nous-même. »
Elle haussa les sourcils à la réponse de Ren se demandant si le chevalier noir n'avait pas perdu la tête. Comment allaient-ils pouvoir se départager afin de décider qui de l'un ou de l'autre serait le plus apte à diriger les opérations ?
« Est-ce une blague ?
- Ai-je l'air de blaguer, amirale Spencer ? » siffla-t-il agacé. « Le Suprême Leader l'exige. »
Elle ne répondit pas, en vérité, il n'avait jamais l'air de blaguer vraiment. Pourquoi Snoke n'avait-il pas imposer de leadership pour cette mission ? Lui qui avait toujours aimé mettre en rivalité ses officiers semblaient cette fois s'être mis en retrait, pour quelle raison ?
« Je n'ai aucune envie de m'imposer et ...encore moins de dépendre de vous, Ren, mais vous restez l'apprenti du Suprême Leader et... »
Elle hésita un instant, puis soudain elle semblait avoir compris le but de Snoke et pris le risque de proposer son idée.
« Collaborons. »
Ren tourna la première fois la tête vers elle et une aura brulante emmena de lui, un instant, elle crut avoir déclencher sa colère légendaire.
« Je ne pense pas que ça soit une formule de choix. » lança-t-il finalement, visiblement bien plus calme qu'il ne semblait le montrer.
« Si je puis me permettre, je pense que si, justement. Bonadan est un milieu hostile que je connais très bien et si j'ai mes compétences vous avez...les vôtres. »
Ren demeura silencieux, pourquoi n'explosait-il pas de colère en voyant qu'elle lui tenait tête ? Elle s'attendait à sentir à nouveau l'intense pression sur sa gorge et l'horrible sensation de ne plus trouver d'oxygène. Mais il n'en fit rien.
« Vous et moi n'avons aucune envie de nous éterniser dans cette mission. » Ajouta-t-elle face au mutisme du chevalier noir.
« Pour une fois, amirale Spencer, je suis d'accord avec vous. » rétorqua-t-il d'une voix monocorde.
« Nous verrons sur place comment les choses se dérouleront. » conclu-t-il en montant dans le vaisseau, il laissa alors le champ de vision derrière lui libre d'accès visuel et Spencer se raidit.
Elle l'avait vu.
Hux était là, bien plus loin sur l'aire de décollage et il regardait dans sa direction. Un court instant, elle crut capter ses yeux, mais il était bien trop loin pour le savoir vraiment. Et tandis qu'elle montait les escaliers d'embarquement de la corvette, elle ne put détacher ses yeux de lui, jusqu'à ce qu'il quitte son champ de vision.

Il régnait un silence lourd dans la corvette.
Spencer avait préféré ne pas chercher à entrer en contact avec qui que ce soit, plongée dans la carte holographique qu'elle avait demandé à Ren, elle étudiait le plan minutieusement. Selon les informations, ils allaient atterrir à environs cinq kilomètres du lieu présumé du dépôt et une équipe déjà sur place se chargerait de leur transfert. Le lieu exact était encore à déterminer une fois sur place. En toute logique, cette mission ne serait pas très longue, il s'agissait de vérifier le dépôt et d'analyser la provenance des matériaux, quant à savoir s'ils avaient un lien ou non avec ce qui s'était passé sur sentinelle, elle se laissait du temps pour l'envisager.
En quittant cette planète, Enael s'était jurée de ne plus jamais y remettre les pieds, refusant même catégoriquement d'en entendre parler. Cet épisode de sa vie faisait partie du passé et après plusieurs années à vivre hantée par ses fantômes, sa formation académique lui avait permis de mettre ces souvenirs de côté.
Jusqu'à maintenant.
Depuis qu'elle avait appris son départ en mission, les voix et les cris de tous ces gens qu'elle avait croisé là-bas lui revenait continuellement en tête.
La guerre la hantait, encore et toujours, et elle avait la conviction que son cœur était mort là-bas.
« Nous arrivons. » la voix métallique de Ren s'était élevée dans le compartiment et elle s'était hâtée de les dans le cockpit de pilotage.

Ce qu'elle vit à travers la fenêtre lui glaça littéralement le sang.

La guerre avait beau être finie depuis plusieurs décennies, Bonadan n'avait jamais cessée de flamber. Mitraillée aux canons ioniques et bombardée à outrance par les rebelles, ce qu'elle vit devant elle n'était plus qu'un champ de ruine piégé dans des flammes perpétuelles. Le ciel n'était pas teinté de rouge à cause du crépuscule, mais bien à cause de l'incandescence de l'horizon.
Combien de personnes étaient mortes ici ?
Mais alors qu'elle songeait aux morts, l'idée que des personnes puissent vivre et surtout survivre en ces lieux la terrifiait bien davantage.

« J'aurais aimé ne jamais revoir ce monde... » souffla-t-elle doucement. Ren tourna la tête vers elle, si ces mots n'auraient pas dû être entendu, l'apprenti Sith les avaient captés et cela faisait échos à ce que Snoke lui avait dit au sujet de l'amirale Spencer.
Se pouvait-il qu'elle ait traversé l'enfer ici ?

« Finissons-en rapidement amirale, et vous n'aurez pas à le supporter bien longtemps. » lui lança-t-il et Spencer hocha la tête en signe d'accord. En hauteur, il était difficile de déterminer si les reliefs du sol étaient dus aux bombardements ou causés par la nature elle-même.
« En recherche d'un lieu d'atterrissage. »
Elle scruta l'écran devant elle, difficile de déterminer un lieu propice à l'atterrissage d'un tel vaisseau. Même en simulation, elle n'avait jamais eu à faire à un terrain du même type que celui de Bonadan. Pourtant, son dévolu se jeta sur une zone visiblement moins accidentée que les autres, et elle l'indiqua du doigt au pilote. « Essayez à 30 degrés Est... » souffla-t-elle finalement en indiquant la position du doigt sur le cadran.
« Mauvaise idée. » Lança le lieutenant Brant en se retournant vers elle. « Ce type de terrain est certes facile, mais trop à vue. Mon expérience me permet de dire que si nous devons être mal accueilli c'est là que ça arrivera. Facile d'accès, facile de fuir une fois le méfait accompli. Non, ici, plus au Sud, c'est plus vallonné mais praticable et à l'abri des regards indiscrets.
- Votre expérience ? » répéta-t-elle sur un ton trahissant son mépris.
« Je suis pilote amirale, et disons que je me débrouille pas trop mal. » lui lança-t-il en agrémentant ses paroles d'un clin d'œil.
« Et modeste en plus de ça. »
Brant lui lança un regard de défi avant de conclure par un clin d'œil et de se retourner sur le poste de pilotage.
« Dois-je suivre les indications du lieutenant Brant, Madame ? » lança le pilote, hésitant.
Spencer lança un regard à Kylo Ren qui semblait avoir perdu sa langue, celui-ci hocha légèrement la tête en signe d'approbation et elle comprit qu'il avait décidé à sa place.
« Faites, et si par chance nous survivons, j'espère pouvoir l'exécuter moi-même. »
Brant grimaça tandis que la corvette avait amorcé sa procédure d'atterrissage à l'endroit qu'il avait suggéré et l'opération se passa sans encombre, Ren avait déjà ordonné aux Troopers de se tenir près d'un signe de main et tous s'étaient rassemblés près de la porte de sortie.
« Madame, vous devriez porter un masque... » lança le technicien qui la retenait par le bras alors qu'elle s'engageait elle aussi dans le sas de sortie. Face à son regard surpris, il poursuivit.
« Suite à la guerre, l'atmosphère de Bonadan n'est plus des plus pure... »
Il était vrai qu'à la fin de la guerre, les rebelles avaient voulu en finir avec la résistance impériale et avaient ordonnés l'annihilation totale des lieux aux tirs ioniques. Cela avait duré une éternité, au point même que l'atmosphère en avait été considérablement modifiée et partiellement toxique.
« On fera avec. » répondit-elle en faisant fit du masque.
Spencer observa le paysage désolé autour d'elle en descendant de la corvette, rien ne semblait suspect de prime abord. Les alentours ne présentaient que peu de signe de vie et hormis l'un ou l'autre baraquement en tôle, tout semblait désert et stérile. Un stormtrooper stationné là leur fit signe de s'avancer vers lui.

« Seigneur Kylo Ren » commença-t-il en s'inclinant légèrement. « Amirale Spencer, bienvenues sur Bonadan.
- Peut-on vraiment dire que ce mot est approprié ? » répondit-elle doucement en portant une main à son visage pour se protéger d'une bourrasque de vent sec.
Le trooper ne prêta pas attention à la remarque et leur fit signe de la tête de les suivre.
« Nous avons peu de temps, venez, la navette de transport est juste là, droit devant. »
Ils avancèrent à la hâte, Brant resté derrière l'amirale, observait cette navette d'un air moqueur.
« Vous avez-vu ce vieux coucou ? » susurra-t-il à l'oreille de Spencer, il était visiblement le seul à rire de la situation.  «Vous pensez qu'on va devoir pédaler ?
- Silence Brant ! » siffla-t-elle. Mais elle devait bien reconnaître que le lieutenant avait raison.
En effet, la navette qui allait les véhiculer jusque là ressemblait à ce qu'on faisait en matière de transporteur terrestre il y a bien vingt ans, minimum.
Kylo Ren, lui, ne semblait pas du tout prendre la situation de la même manière que Brant.
« Êtes-vous bien sur que cette...chose, nous amènera jusque-là ? » lança-t-il très agacé au trooper.
« He bien, monseigneur, c'est notre seule option, il n'y en a pas d'autres...
-Comment est-ce possible ? Vous étiez censés avoir réquisitionné les transporteurs à votre arrivée ici ! » siffla-t-il en colère.
« Sabotage, Seigneur Ren, la population locale ne nous porte pas spécialement dans son cœur et...
- Vous n'êtes pas ici pour être appréciés ! » Coupa-t-il avant d'ouvrir la marche vers la navette.
Soudain un projectile vint s'échouer sur la carrosserie de la navette et les firent sursauter, il s'agissait d'une pierre pas plus grosse qu'un poing serré et elle venait de percuter le métal du vaisseau. Spencer tourna la tête vers la direction d'où était arrivé le projectile et aperçu une femme vêtue d'une robe en lambeau, les cheveux ébouriffés sur sa tête ressemblaient à un amas difforme et elle leur lançait un regard mauvais.
« Autorisation d'exécuter ? » lança le trooper en dégainant son arme.
Spencer fut saisie d'un vertige. Elle repensait alors à ce qu'elle avait vécu ici il y a quelques années. Ces gens-là, les rebelles, exécutaient tout ce qu'ils trouvaient sur leur passage, civiles compris.
Etaient-ils comme eux ?
« Non ! » S'exclama-t-elle en bloquant le stoormtrooper de sa main. « Vous ne levez pas la main sur un civil, jamais ! »
Le trooper s'exécuta sans un mot et l'amirale sentit le regard pensant de Ren sur ses épaules.
« Vous êtes bien trop clémente pour une Tarkin... » souffla-t-il de sa voix métallique.
« Je ne suis pas mon grand-père et vous n'êtes pas le vôtre ! » cracha-t-elle agacée d'entendre à nouveau qu'on faisait référence à sa filiation.

Ren resta un moment sans dire un mot, puis, embarquant sur la navette, il tendit la main à Spencer pour qu'elle le suive à son tour.
« C'est ce que nous verrons... Amirale. »
Hésitant un instant avant de saisir la main du chevalier noir, elle lui lança un regard glacial tandis qu'elle embarqua sur la navette, le bruit assourdissant du moteur fit vibrer tout ce qu'il y avait autour d'eux.
Partout où ils passaient, le paysage n'offrait que désolation. Rien ne semblait avoir résisté à la guerre. Le gout métallique de l'atmosphère titillait sa langue tandis qu'elle essayait de se rappeler de ce qu'était Bonadan avant. Un havre de paix où il lui arrivait parfois d'admirer le ciel étoilé bercé par le bruit sourd de la vie qui grouillait dans les rues animées de sa capitale.

Aujourd'hui, c'était l'antre des damnés.

Sur les habitants qu'ils restaient, la guerre avait laissé des traces indélébiles qui se transmettaient de génération en génération. Et si certains semblaient boiter, d'autres étaient recouverts d'étranges brulures ou arboraient des blessures bien pires encore.
Tout cela à cause de la guerre.
« Nous y sommes. » lança le trooper et Spencer sortit de ses songes, le moteur de la navette s'était en effet tut pour de bon.
Aidée par Ren, elle posa un pied au sol et leva les yeux. Devant elle se tenait l'énorme bâtiment dont avait parlé l'informateur du chevalier noir. Constitué en grande partie de tôles rouillées et fondues, il s'élevait sur plusieurs étages et donnaient la sensation de toucher le ciel.
Inspectant les alentours, elle remarqua plusieurs bâtiments de hauteurs similaires et estimait que le danger pouvait donc venir de partout. Il serait nécessaire d'être sur ses gardes bien plus qu'à l'accoutumé au vu de la position stratégique du lieu. Son regard s'attarda sur une des parois où demeuraient encore écrites à la peinture rouge, des insultes à l'attention de l'empereur Palpatine.
Elle ne sentit par la présence de Ren s'avancer vers elle et observer ce même mur.
« Une époque révolue. » lança-t-il simplement, d'une voix semblable aux autres fois.
Une époque révolue ? Elle n'en était pas certaine. Si Bonadan était tombée aux mains des rebelles et qu'ils avaient pu inscrire ce genre de phrase, cela pouvait se reproduire, pour eux cette fois.
« Nous ne sommes pas à l'abri, seigneur Ren.
- Nous avons appris de nos erreurs, le Suprême Leader sait désormais ce qui a fait chuter Palpatine. Nous ne retomberons pas dans les mêmes pièges. »
L'amirale ne répondit pas aux affirmations de Ren, n'étant pas persuadée qu'ils aient réellement appris de leurs erreurs. D'autant que la population semblait bien différente de celle qu'avait connu l'empereur Palpatine.
« Soldat, quelles sont les informations dont vous disposez sur ce bâtiment ? » demanda-t-elle au trooper qui les avait amenés ici.
Il activa son holonet et commença son explication bien hasardeuse.
« Pas grand-chose amirale. On sait qu'autrefois il s'agissait d'un centre médical de l'empire, mais il a été converti en entrepôt pour stocker des générateurs de boucliers déflecteurs. Après, on sait juste qu'il a fini par tomber en ruine et à l'abandon.
  -Un propriétaire actuel ? » lança Ren d'une voix monocorde.
« Aucun de connu Monseigneur... »

Le chevalier noir sembla songeur.
« Avez-vous surveillé ce bâtiment comme je vous l'ai ordonné ? »
Le trooper hocha la tête hâtivement.
« Oui, sans relâche depuis que l'ordre a été transmis par le Suprême Leader. Et nous n'avons vu personne. »
« Il faut toujours rester prudent... » souffla Spencer Le vent chaud balaya ses cheveux sur son visage tandis qu'elle contemplait le supposé dépôt. Elle n'arrivait pas à s'expliquer pourquoi elle était partagée entre l'envie d'en finir et l'impression que quelque chose posait problème.
« Est-ce possible que vous ayez été surveillés pendant tout ce temps ?
- Euh... Eh bien... Oui Amirale, mais comme nous l'avons dit, nous n'avons rien vu. De plus, nous avons posé des tireurs d'élite à différents endroits. » Le Stormtrooper indiqua les toits de plusieurs bâtiments situés à côté de l'entrepôt. L'ambiance qui régnait ici était lugubre et pesante.
Elle lança un rapide coup d'œil sur le chevalier noir, celui-ci semblait vouloir lui laisser le champ libre pour cette partie de l'opération.
« Brant, avons-nous des droïdes éclaireurs à disposition ? » lança-t-elle à l'attention de son lieutenant qui, surpris d'être personnellement demandé, sursauta à l'écoute de son nom.
« Eh bien, pas grand-chose, deux AC tout au plus et...
- Cela suffira. » trancha-t-elle. « Envoyez-les en éclaireurs et prenez avec vous des hommes pour sécuriser les lieux. »
Brant hocha la tête sans discuter avant de désigner quatre Stormtrooper et d'entrer dans le bâtiment. Sans plus attendre, l'amirale activa l'écran du droïde sonde et un paysage lugubre apparu devant elle sur l'écran parsemé de parasite. Il n'y avait là que de la tôle rouillée, des cages d'escaliers à moitié détruites et, malgré l'air poussiéreux, il paraissait régner sur place une humidité importante. Tandis qu'elle analysait les images retransmises, Ren semblait impatient et faisait les cent pas derrière elle en attendant le verdict du lieutenant.
« Rien à signaler seigneur Ren, l'amirale et vous pouvez nous rejoindre au bout du couloir, c'est là que sont outils de comm' ! Je vous envoie un droïde. » lança la voix de Brant.
Spencer dégaina un blaster presque instinctivement.
« Inutile » commença Ren. « Votre lieutenant affirme que nous avons le champ libre. »
Enael lui lança un regard en biais, en vérité, rien n'était une certitude sur Bonadan.
« Je ne suis jamais trop prudente. » lança-t-elle en désignant un deuxième blaster à sa ceinture.

Laissant là les derniers troopers en leur ordonnant d'établir un périmètre de sécurité, ils entrèrent dans l'entrepôt et rejoignirent rapidement Brant et ses hommes qui étaient situés à une quarantaine de mètres de la dernière porte coulissante qui les séparaient du dépôt.
D'un geste, Ren ordonna à Brant d'envoyer la sonde parcourir les derniers mètres et de la suivre avec son escouade. Spencer quant à elle, était restée en retrait et les observait avancer vers la porte coulissante et lorsque la sonde revint intacte, Brant leur fit signe d'avancer.
C'est alors qu'Enael sentit le bras de Ren se dresser devant elle pour la retenir.
Il avait senti quelque chose, son instinct, sa Force semblait avoir perçu que quelque chose clochait. Et maintenant qu'elle y prêta réellement attention, elle avait la conviction qu'une menace pesait sur eux.
« La sonde n'a rien vu ? » lança la voix métallique de Ren.
« Non, rien Seigneur Ren. »
Sa respiration raisonnait à travers son casque et Enael l'observa, elle avait en effet la sensation qu'il n'était plus avec eux.
« Quelque chose... » souffla le chevalier noir d'une voix lugubre.
Cette phrase accentua son sentiment d'inquiétude et elle chercha à comprendre pourquoi l'instinct de Ren s'était soudainement réveillé. Elle repensait à tout ce qu'elle avait vu sur l'écran, visiblement, ce dépôt recouvrait plusieurs étages car les sondes avaient toujours fait le même genre d'itinéraire à travers les escaliers et terminaient toujours leurs courses dans une impasse, comme ici. Continuant ses réflexions, les paroles du trooper décrivant le bâtiment quelques instants plus tôt lui revinrent à l'esprit.
Un centre médical... un générateur de bouclier déflecteur.
Comment avaient-ils pu être aussi stupide ?
« Seigneur Ren, arrêtons tout, ce n'est pas l'entrée principale ! »

Un éclair de détermination avait allumé son regard de glace. Il était strictement impossible de faire entrer de tel générateur dans un bâtiment comme celui-ci et encore moins qu'il puisse avoir été assemblé sur place.
Il n'y avait donc qu'une seule solution.
« Ce matériel de comm' ne peut pas avoir été transporté ici par tous ces escaliers, cela relèverait de la stupidité ! » Elle leva son doigt vers le ciel. « La seule solution pour amener de tels matériaux, ce sont les airs ! » Elle marqua une pause avant de reprendre d'une voix grave « Il y a un accès par le toit dans cette pièce et il se peut que derrière cette porte coulissante se terre une embuscade et qu'un piège nous attendent. »
Un brouhaha de stupéfaction s'éleva autour d'elle tandis que les toopers avaient déjà dégainé leurs armes tandis qu'une seule et unique question tournoyait dans son esprit.

Qui leur avait tendu un piège ?

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Il avait vu s'éloigner la corvette tout en étant incapable de savoir pourquoi une vive tension lui tordait l'estomac. Un étrange sentiment de frustration s'était emparé de lui et l'idée d'avoir été mis de côté au profit de l'amirale Spencer lui semblait être la seule justification possible.
Se détournant de l'air de décollage lorsqu'il vit le vaisseau passer en vitesse lumière, il se dirigea vers le poste de commandement et aperçu le capitaine Lewis debout devant l'escalier.
« Général Hux... » souffla-t-il, inclinant légèrement la tête en signe de respect. « Le Donnagher et son équipage sont sous vos ordres en l'absence de l'amirale Spencer. »
Il ne répondit pas directement à Lewis, hochant la tête en signe d'approbation, sachant à quel point cette phase avait dû lui couter. Il dissimula pourtant un étrange sourire à l'idée que Spencer lui ait clairement confié le Donnagher.
« Nous ne devons pas perdre de temps dans nos investigations. » Lança-t-il en faisant signe à Lewis de le suivre.
« Il nous faut impérativement trouver la provenance des vaisseaux qui ont attaqué sentinelle.
- Dois-je comprendre que l'analyse complémentaire des débris est notre priorité ? » demanda Lewis d'une voix lente tandis qu'il marchait aux côtés du général.
« Totalement !
- Vous me semblez bien déterminé Monsieur...
- Lewis, contentons-nous de collaborer et gardez vos psychanalyses pour l'amirale Spencer.» Siffla-t-il. Refusant évidemment de reconnaitre que le capitaine avait raison. Savoir d'où provenait les vaisseaux était presque devenu une affaire personnelle.

Il voulait prouver à Ren que son enquête faisait fausse route.
Il voulait s'assurer que Spencer n'était pas tombée dans un piège.

Soudain un sergent s'avança vers lui, essoufflée, la jeune femme s'arrêta nette pour saluer les deux officiers.
«Messieurs, je...je m'excuse ! J'ai un vaisseau amirale qui demande à accoster sur l'aire de stationnement.»
Pour une fois, Lewis et Hux s'échangèrent une regard intrigué et surpris.
«A-t-il révélé son identité?» pesta Hux visiblement agacé d'être dérangé de cette manière.
La jeune femme hocha la tête.
«Oui Monsieur, il s'agit du Fleur de Lys »
A nouveau le regard des deux hommes se croisèrent.

Ils savaient tous les deux ce que cela signifiait...