Chap 14 : En faire des sacs

Par Achayre
Notes de l’auteur : Premier jet non corrigé - Ecriture semaine 12 de 2022

Changement notable : l'aura de Moïra est passée de dorée à blanche afin de correspondre aux recherches faites sur la signification des couleurs d'aura. Oui, c'est basé sur les infos fournies par un site de méditation douteux, mais je n'ai pas trouvé de source plus fiable.

Le 07/09/23 : Mise en ligne de la version corrigée

Un ballet permanent se jouait sous le ciel fissuré d’Arpentras. Toutes sortes d’oiseaux, communs ou monstrueux, sillonnaient l’azur par milliers. Certains d’entre eux, d’un noir ébène, traversaient le royaume de part en part dans le but de délivrer des courriers. Plus les corbeaux prenaient de l’envergure, plus les dresseurs pouvaient leur confier des charges importantes. Celui qui se dirigeait vers le Bois Sifflant, en cette belle matinée d’été, était presque aussi massif qu’une poule. Autour de son corps, un harnais parfaitement ajusté lui permettait de transporter quatre étuis destinés à recevoir des missives. Sur chacun d’entre eux, une étiquette indiquait le nom du destinataire, et les doigts trop curieux de vouloir fouiller dans le courrier d’un autre se voyaient pincés jusqu’au sang. Sous ses ailes, les deux boucles métalliques en forme de D signifiait que le volatile était en mesure de soulever un colis tant qu’il restait d’un poids modeste.

Le dressage des corbeaux allait de pair avec un sort de localisation, jeté sur leurs yeux juste avant d’être envoyés dans la nature. Ils étaient conditionnés à suivre ce fil de lumière bleue qui flottait dans l’air jusqu'à leur destination. Avec la fin de l’âge d’or des mercenaires royaux, des guildes s’étaient spécialisées dans l’envoi d’avis de recherche ou de requêtes vers les aventuriers qui en faisaient la demande. Beaucoup de mages profitaient de cette pratique pour arrondir les fins de mois, à défaut de trouver un employeur à plein temps. Sans y être directement affilié, Cyriaque Bribois faisait partie de la liste de diffusion d’une de ces guildes. Gérée par une ancienne camarade d’aventure, cette dernière s’assurait de lui adresser le tout-venant, ainsi que les demandes formulées spécifiquement à destination du Runard.

Loin sous le corbeau, un cercle sombre se détachait au milieu du paysage de champs dorés. Le blé était proche de la maturité, et les paysans valois débarqueraient bientôt par dizaines pour le faucher. Une mission, même insignifiante, serait la parfaite excuse pour fuir cette agitation saisonnière. En repliant l’aile droite contre son flanc, l’oiseau amorça une descente rapide. Il piqua droit vers la cime des arbres avant de ralentir en décrivant de larges cercles au-dessus de la maison. Taupin le regarda finaliser son approche du perchoir, les deux mains fermement refermées sur le manche de sa binette. Si le volatile se mettait en quête de ses mûres, il serait là pour le transformer en dessert.

Des bruissements d’ailes et trois puissants croassements sonnèrent l’appel. Cyriaque sortit de la maison, le pas encore souple pour son âge. Il glissa son index gauche entre les plumes du corbeau et lui gratouilla le poitrail. Ce à quoi l’oiseau répondit par une révérence. Le Renard ignora son pseudonyme erroné figurant sur l’étiquette et se concentra sur les quatre morceaux de papier tassés dans l’étui. Il fourra le premier sous son aisselle, chiffonna les deux suivants, mais accorda plusieurs relectures au dernier.

Les croassements avaient également attiré Moïra et Lev. Plus de deux ans s’étaient écoulés depuis leur rencontre et l’écart qui les séparait s’était réduit, aussi bien pour le talent que pour l’apparence. Moïra n’avait presque pas changé, son âge réel n’ayant fait que se rapprocher de cette vingtaine d’années qui lui semblait acquise pour longtemps. Lev, lui, avait poursuivi sa croissance, tandis qu’un début de moustache et un bouc se cherchaient une crédibilité sur son visage. Lors de ses rares passages, Ermanno avait tenté de lui enseigner l’art d’être beau et de plaire, mais Lev ne prêtait pas assez attention à la question pour l’avoir convenablement intégrée. À dix-sept ans, il était devenu un apprenti mage convenable, sans pour autant avoir fait beaucoup de chemin sur la route de la maturité. Pendant ces années, il n’avait pas quitté l’empreinte du bois. Malgré ses progrès, le maître rechignait toujours à l’emmener en mission.

— Comme des charognards sur la carcasse d’une chèvre !

Cyriaque accueillit ses deux apprentis avec cette ritournelle qui se voulait blessante, mais qui était surtout devenue rituelle. Moïra arborait un sourire franc. À l’aide d’un peigne qu’elle guidait avec son aura blanche, la blonde menue prenait soin de sa chevelure tout en marchant. Une seconde ramification maintenait un livre à sa droite, afin qu’elle poursuive sa lecture en cours. Lev aussi s’inspira des entrées théâtrales de son maître et voulut se mettre en scène. Quatre poids de cinq kilos écrasaient l’herbe en dessous du jeune homme. Ils faisaient office de pieds et permettait à Lev de se déplacer à un mètre du sol, les mains libres pour ses essais de gravure. Le vieux mage les détailla un instant.

— Rectification ! Voilà qu’approchent deux clichés prétentieux, se corrigea-t-il.

Taclés avec justesse, les deux adolescents, aux portes de l’âge adulte, perdirent de leur assurance. Un pincement de lèvres amer déforma le visage de Moïra. Plus fragile dans sa concentration, Lev se retrouva toujours en suspension, mais la tête en bas.

— L’originalité et la prestance sont pourtant au programme de votre formation. Vous n’aviez pas mieux à proposer que… ça ?

La pause entre les deux derniers mots de Cyriaque leur fit l’effet d’une flèche décochée en plein torse. Lui n’avait pas changé d’un cil. C’était comme regarder le temps s’écouler autour d’un roc, à ceci près qu’il remuait trop pour se couvrir de mousses. Déçu, il se plongea dans une énième lecture de la missive avant de reprendre la parole.

— Allez donc préparer vos affaires pour une expédition d’au moins un mois. Et, par pitié, n’emportez pas n’importe quoi ou je vous colle au récurage de la caisse à compost.

Les deux apprentis restèrent figés devant leur maître, affichant une mine soudainement sérieuse.

— Quoi ? grommela Cyriaque.

— Vous n’avez pas précisé lequel de nous deux vous accompagnerait, se permit Moïra, persuadée d’être une nouvelle fois choisie.

Lev rentra la tête dans les épaules. Sa tentative de démonstration ayant tourné au fiasco, elle ne pouvait pas avoir convaincu le vieux mage.

— Ai-je pour habitude de vouvoyer mes apprentis ? s’enquit le Renard.

— Non… reconnut la jeune femme.

— Donc quand je dis « vous », je m’adresse à qui ? s’agaça Cyriaque.

— À nous deux ! fit remarquer Lev, incapable de retenir les prémices de sa joie.

Cyriaque se contenta d’appuyer les propos de son élève en présentant sa paume gauche et le moignon qui aurait dû être la droite, mimant de façon exagérée un illusionniste qui dévoilerait une surprise.

— Mais… vous ne pouvez pas faire ça ! protesta Moïra. Et notre évaluation ?

— Premièrement : j’édicte, applique et amende les règles qui régissent ce lieu comme bon me semble, se fâcha le mage. Et, deuxièmement : vu vos entrées, vous en êtes arrivés à des niveaux comparables.

Le sourire avait changé d’équipe, s'étalant maintenant sur le visage de Lev.

— T’emballe pas. Ce n’était pas un compliment, le tacla Cyriaque. J’estime seulement que cette mission te concerne et que tu dois en être. Tu es loin d’être prêt.

— Une mission qui me concerne ? s’étonna l’adolescent.

Cyriaque en avait assez de cet échange où il ne faisait qu’allumer des torches pour éclairer des évidences, dans les esprits creux de ses apprentis. Il fourra le papier dans les mains de Lev et s’écarta du perchoir.

— Lis et tu comprendras, ordonna-t-il à son élève.

Le mage tendit son bras raccourci vers le corbeau qui s’empressa de s’y percher.

— Remercie Tally de ma part et dis-lui que nous nous mettrons en route dès l’aube.

Le corbeau croassa ce qui sonnait comme un accord, puis il prit son envol, et quitta le Bois Sifflant. Avant la nuit, il aurait rejoint sa maîtresse, loin au sud. La dénommée Tally disposait d’un talent des plus pratiques pour qui entretenait une importante correspondance : elle savait parler aux oiseaux. Cela arrangeait bien Cyriaque, dont l’écriture de la main gauche restait hasardeuse. Un comble pour un homme capable de graver une rune à la perfection sur n’importe quel support.

Lev regarda le mage regagner la maison sans plus de commentaire. Il sortit de sa torpeur lorsque Moïra, impatiente et vexée, chercha à lui prendre la missive. D’une bourrade du coude, Lev défendit sa page de lecture. Moïra dut se contenter de lire par-dessus son épaule.

À l’attention de Maître Runard,

Messire, j’espère que vos affaires sont florissantes et que votre santé de fer ne connaît pas les affres de la rouille. Ici, nous sommes débordés, ce qui est salutaire pour nos finances. Vous n’en montrerez rien, mais je sais que vous serez ravi d’apprendre qu’Oleg a fini par me demander en mariage. Qui sait, peut-être aurons-nous la chance de vous compter parmi les invités de ce bel événement ? Je ne vous noierai pas dans les banalités de ma vie. Je sais l’aversion que vous avez pour les discussions de convenance. Un sujet, plus que tout autre, monopolise votre intérêt et je pense avoir trouvé de quoi étancher un peu cette soif.

Plusieurs drames ont eu lieu dans le nord, au pied du Mont Rude. Le mal a coulé du ciel, dans les montagnes, et de plus en plus d’ouvriers disparaissent dans la région. Les témoignages recueillis parlent d’un fauve plus grand qu’un cheval. Des corps ont été déchiquetés aux abords d’un village, mais ce n’est pas cela qui me pousse à vous écrire. Quelqu’un d’autre est à l'œuvre, dans l’ombre de cette créature. Certains cadavres n’étaient pas mutilés. En revanche, ils semblaient avoir séché sur place. De plus, les dépouilles présentaient des traces de drainage comparables à celles que vous nous avez décrites.

Pourrait-il s’agir de l’homme que vous recherchez ? Mes informations sont fraîches, mais incomplètes. J’espère ne pas vous envoyer sur une fausse piste. Une personne travaillant pour moi est déjà sur place. Si votre intérêt se porte sur cette affaire, je lui demanderai de vous préparer un point de chute. Elle vous attendra dans le petit village du Loir-Gris, où elle s’est établie.

Avec le respect et l’affection qui vous sont dus, Tally Berger.

Les yeux de Lev étaient restés accrochés au nom de son point de départ. De toute son enfance, jamais un monstre ne s’était approché du Loir-Gris. Au pire, il arrivait qu’un ours défende son territoire et croque une paire d’étrangers trop téméraires, mais ça… Le jeune homme n’en revenait pas. Ses mains se crispèrent sur le papier lorsque son esprit, obnubilé par sa formation, lui rappela ce qu’il avait laissé là-bas.

— Ma tante habite dans ce village ! Je ne sais pas comment elle va, s’inquiéta-t-il auprès de Moïra.

L’élégante blonde desserra les dents. Insensible au sort de la famille de Lev, elle conclut aussitôt que son rival avait été convié à l’expédition uniquement parce qu’un de ses proches était en péril. Moïra estimait cela indu et irréfléchi, mais il arrivait à leur maître d’avoir des lubies de ce genre. Parfois, dans un sursaut d’héroïsme qui lui allait mal, Cyriaque changeait ses habitudes pour voler au secours de quelqu’un qui n’en valait souvent pas la peine. Du moins, aux yeux de la jeune femme. Ils se traîneraient donc le boulet jusque là-bas, pour qu’il puisse se rassurer en retrouvant sa tante.

— Je suis sûre qu’elle va bien, prétendit Moïra. Ça te fera une excuse pour la revoir. Elle devrait être contente de voir que tu n’as presque pas changé depuis ta fugue.

— Je n’ai pas fugué ! s’emporta Lev. Ma mère m’a demandé de venir ici. 

Dans un mouvement de colère, il projeta ses poids d'entrainement à trois mètres de leur position. Cela n'impressionna pas la blonde qui le toisait.

— Tiens… tu n’avais pas joué la carte du gentil fils à maman depuis un moment, lui fit-elle remarquer.

Lev s’avança d’un pas vers elle, les poings serrés. En réponse à sa tentative d’intimidation, Moïra accrocha son aura blanche au pic qui tenait une partie de sa chevelure relevée et vint le placer sous la gorge de l’adolescent.

— Contrairement à toi, je ne suis pas là pour me distraire de ma vie de bourgeoise, attaqua-t-il, malgré la pointe qui pressait contre sa peau.

— Si tu étais mon frère, tu…

— … serait bien emmerdé ! boucla-t-il la phrase, avant elle. J’ai un destin, moi. Une ambition qui dépasse ma propre personne. Je veux devenir un héros. Toi, tu rêves de tourner dans les galas. Une danseuse n’a rien à foutre ici !

Leur maître avait instauré une sorte de jeu auquel ils se livraient tous les soirs. Ses apprentis assis à chaque extrémité de la table, Cyriaque débutait les dîners en faisant rouler une pièce sur la tranche. Pourvue d’une rune Raidho au centre de chaque face, celle-ci devenait l’objet d’un duel d’auras. Qu’il faille l’accaparer ou imposer sa présence à l’autre, Moïra l’emportait toujours. Sa maîtrise de l’aura demeurait plus ferme que celle de son rival. Ce matin-là, le jeu avait cédé la place à un conflit sérieux. L’aura orangée de Lev recouvrait le pic à cheveux devenu arme et il cherchait à déloger la prise de Moïra, dans le creux de la gravure. C’était une guerre de volonté, disputée sur le tracé de la jugulaire de l’adolescent.

Cyriaque réapparu sur le pas de la porte, mais n’intervint pas pour les séparer. Indifférent à la lutte de pouvoirs qui aurait pu coûter la vie au plus maladroit, Cyriaque déposa sa besace en cuir râpé par les âges, devant la maison. Taupin lui apporta deux flacons depuis la réserve et le vieux mage en sélectionna un qu’il ajouta à son paquetage. 

— Nous avons un attelage à prendre demain matin, avant l’aube, se contenta de leur annoncer le mage. Libre à vous de gâcher votre temps pour déterminer qui parviendra à crever un œil à l’autre, mais, moi, je veux dormir en ville. Que vos sacs soient prêts ou non, je pars sur la route de Grand Val dans une heure.

Moïra abandonna l’affrontement. Plus raisonnable et moins passionnée que Lev, elle rétracta son aura blanche. Le jeune homme s’empressa d’affirmer son contrôle sur le pic, pour le retourner contre sa rivale. Distrait par l’illusion d’avoir pris le dessus, Lev pointa l’arme improvisée vers le vide qu’occupait Moïra la seconde d’avant.

— Mais… Hé ! Où tu vas ? pesta l’apprenti. On n’a pas fini !

— Moi, si, soupira la blonde fluette. Ces querelles ne mènent à rien. Je préfère te démontrer que la bourgeoise saltimbanque, que tu méprises tant, est plus qualifiée que toi pour protéger les gens.

— C’est quoi, encore, ça ? Un défi ? l’interrogea Lev. Tu veux poser une mise sur cette mission ?

— Tu es puéril, lui asséna-t-elle Je vais neutraliser la créature et, toi, tu me présenteras des excuses… Non ! Mieux que ça ! Tu reconnaîtras devant le Maître que je te suis supérieure et que je le resterai.

— Parfait ! s’exclama l’adolescent. Et, si je la tue avant toi, tu devras me saluer avec une révérence jusqu’au terme de notre apprentissage.

La jeune femme resta muette, mais leva les yeux au ciel pour manifester son désintérêt total envers la proposition de Lev.

— De toute façon, reprit-il. La seule chose importante dans cette mission, c’est l’autre menace. Avec le maître, nous avons notre propre objectif.

— Ne te fatigue pas à mal dissimuler le sens de tes propos, le rabaissa-t-elle. Je suis au courant pour la fin des Arcanes Royaux, ta mère, et les obsessions du maître. N’oublie pas que j’arpente les routes à ses côtés depuis longtemps. Tolen est mort depuis une éternité, et nous courrons après un fantôme. Ce n’est ni la première, ni la dernière fois que nous partons suivre une fausse piste à son sujet.

— Tu n’en sais rien… grogna le jeune homme. C’est important pour nous.

— Dixit le gamin qui a troqué une quête d’héritage contre une vengeance, du jour au lendemain. Le Maître a des qualités qui compensent ses lubies passéistes, pas toi.

Une fois de plus, les deux apprentis se séparèrent fâchés et persuadés de détenir la seule vérité. Leurs querelles s’étaient faites moins fréquentes avec le temps, mais explosaient de plus en plus fortes à chaque confrontation. Cyriaque redoutait qu’un jour ils ne deviennent ennemis au lieu de comprendre à quel point ils pourraient être puissants ensemble. Cela appartenait à leur avenir, la seule chose plus imprévisible que le légendaire Renard.

Moïra n’eut aucun mal à préparer son sac. À force d’expéditions, elle avait retenu les fondamentaux. Peu de vêtements, mais toujours des sous-vêtements de rechange. Aucune babiole précieuse qu’elle ne soit prête à perdre en fuyant ou à troquer contre un objet plus utile à leur mission. Pas de breloques qui pourraient offenser des villageois un peu trop versés dans l’obscurantisme. Des armes et des outils les plus variés possibles, afin d’assurer sa polyvalence quelle que soit l’urgence. Et, pour finir, garder de la place pour les provisions et les remèdes.

Taupin leur préparait des denrées sèches pouvant se transporter dans de simples linges pliés, afin de limiter le poids. Les onguents et autres potions étaient transvasés dans des récipients spécialement conçus pour se glisser à la ceinture ou dans les rares espaces vides de leurs paquetages. Cyriaque était un fou d’optimisation et de diversification. Le prendre au dépourvu semblait impossible tant il anticipait ses besoins.

Debout, perdu au milieu de sa chambre, Lev ne connaissait pas tout cela. La dernière fois qu’il avait eu à faire son sac… Des souvenirs l’assaillirent avec la brutalité d’un geyser trop longtemps retenu au fond d’un gouffre. En partant de chez Dolores, il n’avait rien emporté de très utile. Essentiellement des vêtements devenus trop courts avec l’âge. À cette pensée, il prit conscience du temps écoulé depuis son départ. Près de trois années passées dans le Bois Sifflants à tenter de devenir ce que le destin attendait de lui. Le sac suivant, c’était l’inconvenant Teemu Haden qui le lui avait préparé. Confortable et humiliante à la fois, cette prise en charge l’avait rassuré à l’époque. Depuis, il n’avait pas repris la route. Une première escapade qu’il avait partagé avec une fille qu’il n’aurait jamais pensé appeler, un jour, son amie.

Sans qu’il ne sache trop pourquoi, des larmes se mirent à couler sur ses joues. Si son esprit avait occulté de nombreuses choses pour maintenir sa concentration sur son objectif, le corps du jeune homme refusait d’être muselé plus longtemps. Lev espérait que son âme d’enfant était morte sous la charge de ses dix-sept ans, mais ce n’était qu’une illusion. Les années n’avaient servi qu’à ériger des murs autour d’elle. Au fond de son cœur, il était toujours ce petit garçon rêveur et naïf.

Lorsqu’il rejoignit Cyriaque et Moïra, Lev avait encore les yeux rouges d’avoir pleuré. Personne ne lui en fit la remarque. Son sac sur l’épaule, il savait que ce dernier débordait d’un fourbi majoritairement inutile. Qu’importe, il était sur le sentier qui menait à la sortie du Bois Sifflant. Le reste n’était que des détails que Lev conterait, avec amusement, en souvenir du jour où il prit le chemin de sa première aventure.

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Altaïr
Posté le 06/04/2022
Le titre est bien trouvé, il fait une bonne analogie entre la rivalité parfois ridicule des apprentis et les préparatifs de leur départ.
Ce chapitre est un passage clé, comme un seuil vers l’aventure. Lev va quitter l’innocence, pour retrouver qui et quoi … ?

// dans le but de délivrer des couriers (courriers). Plus le corbeau était gros, plus les dresseurs leur confiait (« lui confiait », ou juste « confiait ») des charges importantes. Celui qui se dirigeait vers le Bois Sifflant, en cette belle matinée d’été, était presque aussi massif qu’une poule//
* --> cet oiseau doit avoir de sacrées ailes pour soulever un corps de poule, je me suis imaginée un volatile plutôt amusant pour le coup, ça ne me semble pas correspondre avec le reste de la description.

*
Remarque à propos du passage suivant :
« Une petite étiquette indiquait le nom du destinataire, et il était risqué pour ses doigts de vouloir fouiller dans le courrier d’un autre »
--> Pour quelle raison est-ce risqué ? Un sort protège le courrier ? Ça pourrait être opportun de préciser.
*
// Le dressage des corbeaux allait de paire (pair) avec un sort de localisation, jeté sur leurs yeux juste avant d’être envoyé (de les envoyer) dans la nature. // lui adresser le tout venant (tout-venant) // Il glissa le premier son (remplacer par « sous ») son aisselle // les deux derniers mots de Cyriaque firent (fit) // s’étallant (s’étalant) maintenant sur le visage de Lev. // Lit (Lis) et tu comprendras, ordonna-t-il à son élève. // Remercie Tally de ma part et dis lui (dis-lui) // talent des plus pratique (pratiques) // aux pieds (au pied) du Mont Rude. // je lui demanderai (demanderais) de vous préparer un point de chute. //. ça (« ç » à mettre en majuscule) te fera une excuse pour la revoir // … serait bien emmerdé (emmerdée) // pour manifester son désintéret (désintérêt) // la seule chose plus imprévisible de (que) le légendaire Renard // c’était l’inconvenant Teemu Haden qui (ajouter « le ») lui avait préparé. Rassurante et humiliante à la fois, cette prise en charge l’avait rassuré (« contenté » ? pour éviter une répétition) à l’époque.
Achayre
Posté le 07/04/2022
Re !

Ne t'es tu jamais dit, en voyant un très grand/gros corbeau : "Bordel, on dirait une poule" ? C'est une private joke que j'aime partager ;)

Pour les doigts, il me semblait clair que les corbeaux ne laissait pas n'importe qui piocher dans n'importe quelle sacoche, mais il faut peut être que je reformule ce passage.

Nous partons pour plusieurs retrouvailles en assez peu de chapitres, cela m'inquiète un peu, mais ça va le faire :)
TiteTeigne
Posté le 30/03/2022
Un début très descriptif sur des détails entourant le dressage des corbeaux messagers et du paysage. On retrouve également tout au long du récit ce genre de passages comme les talents de correspondance de Cyriaque. Cela pourrait sembler anodin, et pourtant, c'est ce qui apporte du charme au discours et rend le texte beaucoup plus vivant.

Un certain nombre d'années est passé et tu rapportes assez bien l'évolution des deux apprentis (ainsi que l'absence de changement de Cyriaque. On ne change pas une vieille bourrique XD). Toujours un contraste saisissant entre les deux cependant. Ce n'est pourtant pas aussi évident en si peu de lignes mais le challenge est rempli. Evolution, ou peut-être pas, libre choix au lecteur d'attribuer plus de maturité ou non aux deux jeunes gens au vu des faits rapportés (mais j'en doute. Nous restons tous à notre manière de grands enfants :).

Moïra résume très bien le changement de mentalité de Lev suite à la lecture de la missive.
Je suis surprise qu'il ne pense qu'à son village natal et que seulement dans un second temps, il mentionne sa vengeance alors que c'est son principal let motiv à présent (alors que j'ai pensé à ce point personnellement en premier). Retour à la case départ avec peut être une vengeance à y accomplir ? Mais qui dit case départ, signifie-t'il vraiment qu'on y revient inchangé ?
Ce chapitre marque un nouveau commencement dans ton histoire. Cette missive met Lev fasse à son passé, tout ce qu'il a vécu jusqu'à présent mais le met aussi face à ce qu'il est devenu. La complexité de l'adolescence, découvrir qui on est. Encore plus délicat quand on est resté "confiné" sans vraiment interagir avec le monde extérieur (cela me rappelle les jeunes d'aujourd'hui qui ont vécu avec les confinements. Comment se découvrir quand on ne fait que rester cloitrer chez soi et apprendre sans échanges ou interactions). On trouve alors une certaine profondeur chez Lev, affronter les similitudes sans vraiment avoir le sentiment d'avoir évolué ou changé.

Et quelques coquilles relevées :
"délivrer des courriers" (couriers)
"plus les dresseurs leur confiaient" (confiait)
"le premier sous son aisselle" (son son)
"pour l'avoir intégréE"
Répétition du mot "bois" : "Pendant tous ces mois, il n’avait pas quitté l’empreinte du bois. Malgré ses progrès, le maître ne l’avait toujours pas emmené en mission hors du bois."
"reconnuT la jeune femme"
"Lis et tu comprendras" (lit)
"Cyriaque réapparuT"
"le déçut elle" (déçu-t-elle)
"explosaient de plus en plus forteS"
Achayre
Posté le 30/03/2022
Ma fidèle lectrice est de retour :)
Merci beaucoup pour ce commentaire toujours aussi complet. Content de voir que les principaux éléments que je voulais transmettre l'ont bien été. Plus j'avance et plus les chapitres deviennent des numéros d'équilibristes entre les éléments manquant que je dois enfin donner et ceux nécessaires à faire avancer l'intrigue.

Encore un énorme merci pour ta contribution à l'entretien de ma motivation :)
A très bientôt !
Vous lisez