Cécil Huskior

Notes de l’auteur : Un peu plus court celui-ci.

Le rythme continu d’un tambourinement cadencé me sort de mon maigre sommeil. Par le concert virtuel au deuxième étage du navire, au-dessus de nos quartiers respectifs, la vibration au sol me bouscule. L’euphonie et les instruments de musique se répètent dans un vacarme contrôlé au début. Tourasin Morok, mon compagnon Oumarus, ne peut pas s’empêcher de lever le son durant le refrain de son morceau favori. Bizarrement, mon confrère poilu fait souvent la grâce matinée, mais pas cette fois-ci. Très massif par sa taille, il aime mieux s’amuser que dormir durant les heures de nuit. Quand on installe un petit-couvre, les différents mouvements dans son lit font vibrés le sol par son incapacité de pouvoir dormir selon cette heure choisie. Ce drôle d’habitude me sort des formules protocolaires de mon éducation sévère dans mon université d’Oze.

Loin du Régime militaire d’Egoria ou encore des exigences scientifiques sismantistes, les universités d’Oze sont extrêmement minutieuses durant notre formation scolaire. Sur mon perchoir, je me suis pris dans les mauvaises habitudes de m’endormir plus tardivement que les heures prévues. Depuis ma rencontre avec Tourasin, un jeune Oumarus, mes anciennes habitudes professionnelles sont devenues caduques.

À mon perchoir métallique, mes griffes ressentent le tremblement du navire par la musique bruyante de mon compagnon. Bien endormi au début, j’ai tenté, sans réussite, de rester sur mon barreau métallique afin de prolonger mon sommeil. L’une de mes pattes, toujours aussi droite, maintient mon équilibre, pendant que l’autre est rangé entre mes différentes plumes. 

Mais lorsque Tourasin, toujours aussi jeune et fougueux, se dandine sous sa musique, les tambours de sa chorégraphie pleuvent. Discret et gêné de pratiquer le chant ou la danse devant moi, il adore le concrétiser lors de ses discrétions dans la salle du commandement. Atypique comme genre artistique, plusieurs instruments de musiques sont joués où la parole des chansons se limite souvent par une répétition excessive d’un seul mot. Ainsi, les musiques Oumarus favorisent le jeu du rythme des instruments, que la poésie lyrique du chant.

J’ai déjà entendu Tourasin écouté du style Nsono, dont même des genres musicaux de l’Ancien de l’Empire du Feu-Rouge, rivaux depuis des siècles avec les Oumarus. Mais au grand jamais, il ne se soucie des paroles ou des créateurs de ses œuvres. Le plus important pour ses petites oreilles rondes, c’est le refrain d’une musique entraînante, l’amenant à créer des petits tremblements de terre à travers tout le navire d’exploration par ses danses endiablées.

Le seul moyen d’arrêter la chorégraphie assourdissante de mon cher compagnon, c’est par un battement de mes ailes sur mon perchoir. Dès cette manœuvre, la musique s’abaisse et sa danse s’arrête brutalement. Craintif de recevoir un jugement autour de son immaturité, il préfère garder son ballet explosif pour lui. Contrairement à mon large camarade ensommeillé plus tôt hier soir, j’ai passé plutôt une grande partie de ma veillée à envoyer des messages à ma sœur, expliquant ainsi mon réveil tardif.

Son nid de recherche a eu la mission corsée de faire un rapport gouvernemental sur les raisons autour des petites apparues dans les drones d’observations et des satellites du secteur de Mariz-1. Ma sœur m’a envoyé d’abord des photographies et des vidéos du système du solaire avant de m’expliquer le problème. Enthousiaste de m’en parler avec son langage très technique, son incertitude se fait ressentir par le manque de réponses autour de ces interruptions.

Devant l’inconnu, je lui ai présenté mon propre ressenti devant cette problématique. Heureusement pour moi, notre trajet spatial nous permet des communications écrites simultanées. Dans certains cas de notre exploration spatiale, nous sommes dirigés dans des systèmes solaires, démunis de satellite de communication pour rejoindre le réseau central. Hier, j’ai profité de cette rare connexion pour parler de ma théorie avec ma sœur. La raison, la plus logique de tels dysfonctionnements, doit venir de l’usure des systèmes locaux.

Empoté sur mon perchoir, je me sors de ma torpeur en discernant mon holophone s’illuminé sur le bureau au voisin du gigantesque lit de Tourasin. Sur le petit cylindre métallique, une petite lumière discontinue m’annonce un message non-lu. Je pose délicatement ma deuxième patte sur le perchoir. Curieux de lire ce nouveau message, mes deux ailes s’ouvrent pour faire quelques mouvements. Après ce petit exercice, j’entends automatiquement la musique de Tourasin baissé. Avec l’ouïe exceptionnelle de mon compagnon, il peut entendre un seul battement de mes plumes afin de me dégourdir.

Je saute après de mon perchoir métallique pour arriver au sol, tout en donnant un coup avec mes ailes, orange et bleues, pour ralentir la descente. Passant ensuite mes pennes sur mon bec en signe de fatigue, je prends ensuite mon Holophone pour lire le nouveau message reçu de ma sœur. La dernière réponse me laisse perplexe au sujet de la panne analysée :

« Bonjour, frérot,

Je viens juste te faire un petit retour sur ta dernière hypothèse autour des pannes dans mon secteur. Sans surprise, nous avons vérifié cette théorie autour de l’ancienneté des satellites et des drones dans le secteur. Elle a été l’une des premières hypothèses suggérées par mon nid de recherche, incluant les problèmes de triangulation et la surcharge d’informations. Ce sont les trois hypothèses les plus logiques, donc nous les avons étudiés en profondeur. Malheureusement pour nous, il est impossible de faire un lien entre ces déconnexions aléatoires et ces trois principales théories. De plus, j’ai eu une confirmation des archives locaux que leur satellites, que les drones et que les détecteurs ont été changés en Septembre 780. Donc, on peut éliminer l’âge des machines pour expliquer ce problème.

Sans aucune donne valable pour expliquer ces pannes, nous résignons à analyser toutes ces anomalies qui tournent autour du Secteur Mariz-1 en restant sur place. Nous avons eu la permission de la Confédération Jumarienne, mais nous voulons l’aval du Gouvernement de Restauration de Relly avant de nous installer avec notre vaisseau de recherche dans le système solaire. Ce secteur n’appartient pas uniquement à nos étoiles, elle est partagée avec le Gouvernement des Oumarus. Mariz-1 fait parti d’un long cheminement de cohabitation entre les deux puissances. Et nous ne sommes certainement pas sur place pour imposer nos recherches scientifiques, malgré ce que plusieurs recteurs des universités Oze prétendent. Je vais te tenir au courant de nos prochaines avancées. 

Outre ce contrat du Département, j’ai eu le temps de visiter la colonie des Oumarus et des Atmoris pour chercher des informations sur les archives. Et j’ai une très bonne nouvelle. Est-ce que tu peux dire à Tourasin que j’ai enfin trouvé un enregistrement de son holofilm préféré, disparu depuis des décennies : Une vie de miel?

Oui. Je l’ai enfin trouvé. Un vieil commerçant Oumarus possédait cette richesse culturelle. Dans son petit magasin, j’ai aussi acheté de nombreux souvenirs de l’ancienne culture de Tourasin. En espérant lui rendre un nouveau sourire avec cette nouvelle, j’ai l’espoir de vous retrouver bientôt pour lui donner directement la boite pour lire son holofilm préféré.

Dans les dernières données de géo-localisation, j’ai remarqué votre proximité spatiale sur les territoires autonomes de Belgrum dans tes derniers messages. Alors, faites-moi signe si votre prochain trajet s’arrête proche de Mariz-1. Je vais pouvoir vous rejoindre pour aller manger avec vous et prendre de vos nouvelles.

Soyez prudents dans vos aventures.

Ta sœur, Kelina. »  

Confus de cette réponse sur les machines dysfonctionnelles, j’hésite de répondre de nouveau à ma sœur. Les lourds pas de Tourasin m’interrompent dans cette intention. Prudent, son poids ne me trompe pas : Il se dirige vers les chambres, et surtout vers moi. La dernière soirée a été extrêmement prometteuse, lorsqu’on a reçu les résultats atmosphériques et climatiques de la planète habitable dans ce système solaire. Obnubilé avec les discussions de ma sœur, j’ai oublié les détails sur cette future planète à étudier.

Avant d’éteindre mon holophone pour m’habiller de mon uniforme scientifique, je remarque une notification d’actualité sur mon Holophone. Sans l’ayant lu entièrement la nouvelle, le mot « pannes » dans le titre m’a fait tiquer. Ainsi, le média Oze et Recherches s’affiche dans mes notifications :

« Diverses pannes légères sur le territoire de la Confédération ont été signalés par le DISJ -Département d’Ingénierie Spatiale Jumarienne.- »

Pensif à cette actualité, une nouvelle théorie me vient en tête. La dysfonction existe peut-être par un phénomène cosmique unique. Cette cocasserie locale doit se répandre dans les systèmes solaires voisins. Dans mon prochain message envers ma sœur, je vais lui faire mention de cette hypothèse.

Enfilant mon petit uniforme au couleur jaune en majorité, mais entouré de petites lignes blanches autour de mes quatre membres, je salue Tourasin de la tête. Bien plus grand que moi, le jeune Oumarus fait environ deux mètres et trente centimètres. Totalement brun, Tourasin porte un costume similaire au mien. Il est déjà prêt à poser le navire sur cette planète. 

Le petit navire peut habiter entre quatre à cinq êtres. La spécialité de ce vaisseau s’établit dans sa vitesse, dans son autonomie et dans son déplacement facile. Je l’ai acheté bien avant de connaître Tourasin. Dans mes premières années de recherche, j’ai visité les colonies originales des Oze. Pour la suite de cette mission exceptionnelle, j’ai étudié les planètes telluriques dans leur système solaire respectif. Durant mon début dans la recherche d’exploration spatiale, j’ai fait connaissance avec Y-678, un modèle très évolué d’intelligence artificiel.

Affranchi et constant, une grande partie des intelligences artificielles sur le territoire de la Confédération Jumarienne a gagné leur indépendance après leurs aides contre l’Empire Akhanien. D’inventions originaux Oze, ils se sont adaptés aux différentes planètes après. Dans les livres scolaires de la jeune histoire spatiale de mon peuple, nous les mentionnons souvent comme l’un des peuples fondateurs de la Confédération Jumarienne. Cependant pour d’autres espèces, où on retrouve une importance encore de la spiritualité, ils excluent ces modèles synthétiques.

Y-678 est de couleur noir avec quelques éléments grisâtres à proximité de son visage métallique. D’une apparence humanoïde, le modèle Y possède souvent des fusées dans le dos pour rester dans des origines de leurs créateurs. Notre vol a été d’une telle essence pour notre culture qu’il s’est intégré dans nos premiers modèles d’intelligences virtuelles, et ensuite dans nos intelligences artificielles. Bien plus silencieux que Tourasin et que moi, il est toujours au poste dans le centre de commandement, recevant toujours les nouvelles données sur nos planètes ou sur les systèmes solaires visités.

« Je t’ai réveillé ? » demande Tourasin en arrivant, tout en me fixant de ses yeux, nerveux.

« Non, pas du tout. » réponds-je aussitôt pour établir un innocent petit mensonge afin de réconforter mon compagnon.  

Sa voix est plutôt immature, comparativement à celle des Oumarus plus âgés. Pour plusieurs membres de son espèce, il fait parti des jeunes générations. À cent-cinquante ans, il peut vivre encore le triple de son âge. Il doit cependant faire attention d’éviter ses habitudes des nomades, loin des centres d’hôpitaux.

Nerveux à notre première rencontre, Tourasin a visité doucement une lune appartenant à l’une des provinces des Atmoris, étudiés pour nous deux. Guidé par une carte holographique mystérieuse, tous les Oumarus, loyaux à la mission du Gouvernement de Restauration de Relly, possèdent l’une de ses mystérieuses technologies. Leurs cartes holographiques s’affichent après un casse-tête élaboré d’un cube étrange. Les origines de ses cubes sont encore très mystérieuses, où de nombreuses communautés ne croient pas à une élaboration d’Oumarus. Mais malgré tous les préjugés autour de l’intelligence de cette immense espèce, je ne doute pas de leur adaptation pour créer de telles technologies.

À coup de probabilité et de cartes spatiales d’anciennes civilisations, ils peuvent faire des miracles dans cette démarche. Cachetier et nerveux, Tourasin peut représenter parfaitement le trait de caractère de cette espèce. De leur grande truffe innocente, rien ne présage ce type de craintes. Leurs petits yeux sont très expressifs, mais on remarque souvent leurs griffes et leurs crocs pour identifier leurs dangerosités. De formidable combattant, ils sont maintenant lancés dans une aventure cosmique imprévisible. À notre rencontre avec Tourasin, il s’est toute suite montré très craintif envers notre présence.

Tout ce comportement s’explique par la peur de lui voler le dernier cadeau de son grand-duc – son grand-père -. En évitant les critiques sur mon réveil impromptu par sa faute, le sourire de Tourasin s’agrandit :

« Alors, tu es prêt pour descendre sur la planète ? » m’interroge-t-il avec le sourire, avant de continuer sur des bonnes nouvelles : « Y m’a dit que l’atmosphère est parfait pour nos biologies! Donc, pas besoin de porter de casques! Et peut-être que si le climat est modéré, tu vas pouvoir voler. En tout cas, cela me semble extrêmement prometteur. »

Mon sourire accompagne ce suivi de bonne nouvelle. Tourasin fait tout pour trouver des nouvelles colonies pour son peuple. Cette mission  a été adressée à tous les explorateurs du Gouvernement de Restauration de Relly.  Dans cet objectif final, on a décidé de mettre nos talents en commun pour travailler ensemble. De mon coté, je poursuis mes études scientifiques sur de différentes planètes, alors que lui continue une mission primordiale pour son Gouvernement : Celle de trouver des planètes afin de pouvoir de les coloniser.

« J’arrive dans cinq minutes. Tu peux donner le signal de commencer les préparatifs pour la descente à Y. »

Cette planète est déjà extrêmement prometteuse selon les premières analyses. Plusieurs critiques et moqueries des Oumarus sont souvent injustes. Oui, leurs anciens dirigeants ont été d’une folie sans noms.

Devant les éventuelles chutes de l’Empire Akhanien et l’Empire du Feu-Rouge, ils ont tenté de monter au sommet de l’intergalactique. S’innovant dans des Flottes ingénieuses et surpuissantes, ils ont formé aussi des armées de terre considérables. Cependant, leur plus grand revers se retrouve dans leurs ambitions de démystifier une arme ancienne gigantesque. L’amenant dans leur système solaire, ils l’ont activé pour finalement provoquer la destruction totale de leur système solaire.

De grandeur militaire à zéro, ils ont tout perdu. Relly, étant une partie de leur capitale spirituelle, politique et démographique, le lendemain de cette catastrophe hors-du-commun, l’espèce de Tourasin a été annoncée en voie d’extinction. Plusieurs plaisantent énormément de cet accident tragique, alors que pour ma part, je la trouve tragique. Même aujourd’hui, Tourasin doit payer pour les tentations mégalomanes du passé.

Même né sur une colonie à l’extérieur d’Ozeya, je n’imagine pas le choc de perdre toute ma civilisation par les choix extrêmes de dirigeants insensés. Le père de Tourasin et ainsi qu’une partie de sa famille ont perdu leurs civilisations par une décision militaire et non-raisonnée de leurs élites. Devant la perte de tous leurs repères, ce comportement de survivance étatique m’étonne toujours autant. Surtout avec une telle connaissance de leurs propres histoires, je me demande comment ils font pour supporter un tel deuil, encore aujourd’hui? Soupirant à cette pensée, je me concentre sur mon uniforme scientifique. Mes plumes fouillent dans la boite à outil avant de renforcer cette armure avec un tournevis.  

Faisant les dernières préparations pour visiter cette prometteuse planète, je resserre par le tournevis mécanique les boulons de mon uniforme. Même avec les analyses encourageantes de notre intelligence artificielle, je préfère me préparer pour un éventuel climat rigoureux. Les vibrations du moteur et des propulseurs me font accélérés mes pas, me perdant souvent dans mes diverses pensées. Notre petite navette commence sa descente vers l’astre de la planète. Mais avant de poser mes premières griffes sur cette terre, je me dirige vers la salle de commandement.

La rentrée dans l’atmosphère est souvent d’une violence par ses secousses. Les sièges de sécurité pour de telles transitions se retrouvent dans la salle de commandement. On peut ainsi s’attacher et contrôler la conduite en cas de péripéties durant cette descente dangereuse. Dans mes dernières préparations, je range mon holophone dans l’une de mes poches internes. Inutile outil, je vais pouvoir au moins prendre quelques photographies de la planète si c’est la bonne.

Après cette courte préparation, les bruits de la machinerie me font bougés l’étage de la navigation. Dans la salle de commandement, je retrouve Tourasin déjà attaché sur son siège et Y, connecté par deux  petites cordes métalliques sur le vaisseau. Debout, l’intelligence artificiel me présente ses premiers mots :

« Salutation, Cécil. »

Je lui renvoie ces salutations robotiques en levant l’une de mes ailes vers le grand robot. Allant m’asseoir aux cotés de Tourasin, je pose un petit regard sur le tableau de bord et sur la manette de conduite. Tournant mon bec vers mon compagnon Oumarus, je m’attache avec les ceintures de sécurité pour enfin donner le dernier signal de notre descente sur cette planète par une simple parole :

« Tu vas peut-être enfin trouver ta planète pour installer ta taverne, Tourasin. »

Le rire de l’Oumarus accompagne la descente automatisée par Y-678. Malgré quelques secousses prévisibles, le tableau de bord ne montre aucune anomalie. Ce début se passe énormément bien. Selon les coordonnées prévues, on doit arriver éventuellement sur une plaine. Percevant une partie de la planète par le pare-brise, ses nuages violets, mélangés par le ciel bleu, ébahissent mes yeux de cette magnifique nature. Les terres vertes et brunes sont d’une normalité fracassante, mais d’une grande beauté pour une éventuelle colonisation. Il reste encore beaucoup d’analyses à concrétiser avant d’envoyer nos résultats aux gouvernements respectifs, mais le tout est très encourageant.

En rentrant dans la troposphère, les secousses s’arrêtent et tout devient régulier dans la beauté de ce monde unique. Les vents ne sont pas trop violents pour notre navire. Le soleil est visible au-delà du ciel et le décor spatial s’imprègne de ses milles beautés. Dans un vol contrôlé à la perfection de mon compagnon robotique, nous continuons notre chemin en direction vers les plaines pour éviter que les petites pattes du navire s’abîment par des arbres ou un terrain accidenté.

Aucunement radin, le coût de réparation peut devenir extrêmement élevé dans les centres de maintenance proche de Belgrum. Cette raison m’a justifié de toujours chercher des plaines ou des bords de plage pour éviter des mauvaises surprises à l’atterrissage.

La descente finale se passe sans accrocs. Nous atterrissons en toute sécurité sur la piste d’atterrissage prévue. Tourasin, enthousiaste, décroche sa ceinture de sécurité au plus vite pour aller à proximité de la rampe descendante, juste derrière la salle de commandement. Encore commandé par Y, celui-ci fait une deuxième vérification des instruments extérieurs pour éviter de mauvaises surprises autour de l’oxygène. Après une dizaine de secondes, le mécanisme du navire déplie la rampe. Cette vue nous permet d’identifier immédiatement un décor végétal somptueux. Sur cette longue plaine de grandes herbes vertes, nous pouvons percevoir à une vingtaine de minutes de marches une grande plage, avec une vision sur l’océan presque infini.

Dans cette utopie verte, Tourasin est déjà sur la plaine en train de tâtonner le sol avec ses grandes pattes. Il se penche devant une petite fleur mauve pour la renifler. Délicat, il l’enlève avec ses petits griffes pour le garder en souvenir de cette première visite. Tourasin et Y sont d’une grande vitesse pour faire les analyses élémentaires autour. Le jeune Oumarus plante rapidement les poitrons au sol pour vérifier ces éléments.

Quelques kilomètres loin de moi, je remarque en arrière une petite forêt en pleine santé en majorité, sauf…

Un feuillage déroge de cet idéalisme idyllique vert. Mon regard se concentre sur des arbres plus loin, où les variations de couleurs s’obscurcirent, rentrant en contraste avec cette atmosphère paisible. Mon regard se focalise ensuite sur les petits animaux au loin, d’une forme plutôt unique et irrégulière, leurs squelettes sont légèrement tordus. Cette adaptation biologique est plutôt rare et une tonne de question se multiplie dans ma tête.

Cette concentration se casse par un léger tremblement de terre, causé par Tourasin. Ses grandes pattes se coursent vers moi pour présenter des premiers résultats fabuleux. 

« Le sol est parfait pour l’agriculture dans cette zone. Je n’ai pas encore les chiffres sur la remontée des eaux, mais rien ne nous n’empêche de croire à cette abondance sur les autres terres. En plus, l’atmosphère est parfaite pour nos deux espèces. Cette future colonie va pouvoir accueillir des membres de toutes les espèces. »

Presque trois fois plus grand que moi, il se penche pour montrer ces conclusions favorables sur le petit ordinateur portatif, dissimulé dans l’avant-patte de son uniforme scientifique. Je penche mon bec de haut en bas après l’annonce de ces confirmations d’une riche terre. Quand Tourasin revient vers ses poitrons, Je tends ensuite mes oreilles vers la forêt. Les oiseaux sont bien en train de chanter délicatement, bien moins bruyants que sur plusieurs planètes habitées. Malgré l’excès de bonnes nouvelles, quelque chose me chicote sur cette planète.

D’un pas décidé, je me dirige vers Y-678 pour tenter de répondre aux quelques mystères qui s’entremêlent dans ma tête. À quelques centimètres de mon compagnon robotique, la petite musique du début, assez cliché, me donne exactement l’idée de la provenance de l’appel. Le cor, le trombone et les bugles Oumarus ne me trompent pas. Le Gouvernement de Restauration de Relly a souvent pris l’habitude d’envoyer des messages automatiques aux membres de leur espèce.

« Citoyens et Citoyennes du Gouvernement de Restauration de Relly, aujourd’hui est un grand jour pour notre espèce. Grâce à l’Explorateur Yamarin Collum, nous avons pu découvrir une nouvelle planète viable dans le système solaire D-679-320. Cette planète peut accueillir environ deux milliards d’êtres au maximum de ses ressources. Par la Péjorative de l’Amiral en Chef Joudarin Torik, il sera peut-être possible d’ajouter des habitats maritimes.

Nous attendons actuellement l’aval de la Huitième République pour la colonisation, vu que la planète est proche de leurs frontières. Par cette découverte, nous pouvons reprendre espoirs et nous sommes maintenant à vingt-deux planètes habitables pour la renaissance de Relly.

Malheureusement, Yamarin Collum est mort durant l’analyse de cette planète. Nous allons honorer la mémoire de ce grand explorateur pour son sacrifice en nommant cette Terre à son nom. Mangeant une fleur mortelle de la planète découverte, il décéda quelques heures plus tard, mais il apporte une nouvelle maison afin de reconstruire notre grand peuple. »

 « Quel courage! » s’écrie Tourasin après le communiqué, me laissant abasourdi devant la mort curieuse de l’explorateur Oumarus.

Dans cette désolation entre absurde et avancée, je ne peux pas m’empêcher d’émettre des doutes devant une telle annonce, surtout dans le devoir civil voulu par ce gouvernement. Tourasin range ensuite son holophone dans ses poches pour continuer de ramasser et d’analyser les échantillons de cette planète. Quant à moi, je m’arrête devant Y, mais je me positionne en face de la florissante forêt avant de présenter ma requête.

« Est-ce que tu peux lancer deux sondes de recherche? Une aérienne et une sous-marine, s’il te plaît? »

Dans une cette démarche scientifique, mes yeux se fixent sur les grands arbres où le chant de petit oiseau permet de croire à la continuité d’un monde magnifique. Le bras droit de Y se tends vers notre vaisseau scientifique. Un léger bruit mécanique fait ouvrir un petit rond de deux mètres sur le toit, proche des détecteurs spatiaux et aériens. Une seconde passe puis, un petit vrombissement s’alourdit à l’intérieur du navire. La détonation éjecte deux rapides sondes comme prévus dans ma demande, une qui se dirige vers le ciel et l’autre qui traverse notre regard pour descendre vers une partie profonde de l’océan voisin.

Mes yeux restent cependant fixés sur les arbres. Le bruit ahurissant me permet de réaliser une nouvelle observation curieuse. Une trentaine de petits oiseaux, habitant dans les branches des arbres, s’envolent par peur de cet éclat. Devant cette frayeur, je découvre un phénomène plutôt curieux sur leurs membranes ou encore sur leurs colonnes vertébrales, tordus anormalement par des adaptations écologiques évolutives particulières. Comme les petits animaux au sol, ces modifications biologiques leur permettent peut-être de s’échapper de grands prédateurs. Cette maigre observation me laisse pantois. Je dois visiblement annoncé des mauvaises nouvelles pour une éventuelle colonisation en péril à Tourasin.

Par cette interprétation scientifique, je me théorise l’idée que d’énormes rapaces sortent la nuit pour chasser ces petits animaux. En réaction et dans une longue évolution, leur morphologie a changé pour s’échapper de ces dangereux animaux. Intrigué de cette constatation originelle, je lance un petit regard sur Y. Les résultats prennent plus de temps qu’à la moyenne d’arriver dans les algorithmes de mon compagnon robotique. Après environ une minute, son cou mécanique se tourne vers moi pour me partager ces dernières analyses.

« Confirmation d’animaux marins probablement dangereux dans l’océan. Il est donc impossible d’installer des habitats maritimes vu leurs habitudes alimentaires à la surface des océans. En outre de cette information, sur l’autre continent de la planète, j’ai trouvé des indices d’irruptions imminentes de volcans extrêmement dangereux. » Réponds Y avec sa voix toujours aussi neutre.

Perdu dans mes pensées pendant quelques secondes, je lui demande une nouvelle question autour des dangerosités planétaires :

« As-tu trouvé la présence de créature aérienne ou terrestre dangereuse sur les autres continents ? »

« Négatif. Mais, de nombreux trous immenses ont été récemment creusés. Selon des probabilités autour des réactions d’animaux sauvages normaux, il est probable que leurs instincts de survies », dit-il en pliant ces deux mains robotiques sur l’utilisation du concept d’instincts, non-fondés scientifiquement pour une majorité d’espèces civilisées ou animaux, « les ont fait réagir de cette façon, face à l’éveil éventuels des volcans. » 

Malheureusement dans tous les cas, Y me confirme les informations basiques, mais essentiels pour barrer cette malheureuse planète d’une future colonisation. Devant ces terribles nouvelles, je m’avance vers mon compagnon poilu pour lui annoncer ce revers. Bec baissé, Tourasin remarque rapidement mon changement d’attitude. Perdant immédiatement une partie de son sourire, il renonce tout d’un coup de planter un dernier Poitron dans le sol.

« Désolé mon ami. Cette planète est trop imprévisible par ces volcans et ces prédateurs pour installer une partie de nos peuples ici. Mais, évitons de voir uniquement le négatif autour de cette planète, » poursuis-je en entendant les pas de Y s’avancé vers nous : « On a enregistré plusieurs informations autour des mutations évolutifs et aléatoires des animaux sur une planète aussi hostile. Ces données vont beaucoup aider les départements liés à ces recherches. »

Je comprends très bien l’importance de Tourasin de trouver une planète habitable et paisible pour son peuple, mais nous ne pouvons pas permettre cette planète. Malheureusement pour lui, chacune de nos visites infructueuses lui semble douloureux. Après un silence de mon compagnon, il lève sa truffe vers moi. Sa grande expression faciale affiche un sourire de dérision :

« Ce n’est pas grave, » débute mon intrépide compagnon. « Il n’avait pas assez de place pour construire ma taverne de toute façon. »

Son humour réussit à relativiser la situation. Il replonge ensuite l’une de ses pattes dans sa poche pour sortir le petit cube des Oumarus. Mon compagnon tend ce bijou de technologie à Y-678. 

« Alors, c’est quoi notre prochaine destination, Y ? »

Les doigts mouvementés sont imperceptibles de l’intelligence artificielle. On ne voit que le cube changés de couleurs à chacun de ses mouvements. Bougeant rapidement les cotés entre eux, chaque couleur du cube devient entier sur chaque surface de cette mystérieuse technologie. La carte holographique s’active ensuite.

« Notre prochaine destination est U-451-907. Selon les dernières estimations de notre navette, nous allons éventuellement manquer de ressources. Il faut donc s’arrêter dans un centre de maintenance pour nous remettre à niveau. Avec vos accords respectifs, je vous suggère de nous arrêter sur la lune d’Astrophox de Constantinox. Nous allons peut-être s’inviter dans un léger trafic vu les funérailles de Léon Thibault, emblème héroïque de cette planète, mais c’est le centre d’assistance mécanique le plus proche pour le modèle de notre vaisseau. »

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Lydasa.
Posté le 15/07/2020
Pouik!
Un bébé chapitre, j'ai été un peu surprise sur le coup. Mais comme tu le dis dans les autres commentaire il est ton mouton noir.
Pourtant voici enfin les Ouramarus, l'espèce qui te ressemble le plus. Leur histoires est très interessante, ils sont attachant et on a envie de leur faire un câlin fluff.
Je pense que ce qui pêche ici et que tu n'as pas fait contrairement au autre, c'est décrire un peu plus l'environnement. On est sur une planète mais on ne sais même pas a quoi ressemble les oiseaux qu'ils croise.
Un petit chapitre tout de même sympa et j'imagine trop la grosse tête du Ouramarus. Ta plus elle ne change pas toujours aussi jolie.
Je passe a la suite héhé
Lydasa.
Posté le 18/07/2020
La version réécrite est beaucoup mieux et apporte tout ce que tu n'avais pas développé. C'est beaucoup mieux.
Knaaki
Posté le 18/06/2020
Oh, les personnages commencent à s'entrecroiser ! Hé hé !

Tu as un petit passé simple au début de l'avant-dernier paragraphe, sinon c'était parfait ! Pour le coup, la présentation d'univers a un peu plus de sens dans ce chapitre, vu l'aspect scientifique des personnages, mais je ne suis pas totalement convaincue par touuuute la présentation ! xD Enfin, bon, c'est peut-être plus subjectif qu'objectif, donc je ne vais pas m'étendre sur ce point !

On va voir la suite, comment ça se présente, mais le fait d'avoir potentiellement les personnages qui se rencontrent me branchouillent bien !
BearOmega
Posté le 18/06/2020
Merci big Knaaki!
arno_01
Posté le 09/06/2020
Plein d'espèce, de personnages, de situations. Dès le début du livre on préssentait que ton univers était riche. Tu as tenu ton paris. On découvre des nouveautés avec plaisir à chaque chapitre.

A plus tard lors de la suite
BearOmega
Posté le 10/06/2020
Merci beaucoup pour ton commentaire. Très gentil et j'espère que la suite va encore plus te plaire. ;)
SollyR
Posté le 09/06/2020
Coucou !

Bon ! l’histoire a assurément son utilité, car elle est liée à Léon, je pense.

Je n’ai pas bien compris la différence entre Oze et Ouramarus. De plus, les Tourasin c’est une espèce ou une personne ? Je dois t’avouer que cette partie m’a un peu confus. Car il a un dialogue à la fin.

Ensuite qu’est-il arrivé à leur planète actuelle ? Pourquoi sont-ils à la recherche d’une nouvelle ?

Mis à part ça, tout m’avait l’aire bien construite. De plus, j’aurais trouvé ça désolant que la planète soit inhabitable si j’avais su la raison de leur quête, je crois.

Sur ce, bonne continuation ! Gros bisous d’Ourse !
BearOmega
Posté le 09/06/2020
Oui, c'est un peu mon chapitre défaut.
Je vais éventuellement le changer pour le rendre meilleur par une grosse écriture.
Merci de ton commentaire.
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