Carte de la Semaine 10

Notes de l’auteur : Premier essais de DLP !
N'ayant pas réussi à mettre la main sur la carte ayant inspiré l'écris, voici une description sommaire faite par Allie Oster : "Une statue à trois tête: l'une crache des serpents, l'autre un couteau et la dernière des oiseaux. Il s'y trouve un marcheur emmitouflé et ça se situe dans le désert. "

La Route

 

Le soleil rouge teintait d’ocre et de cuivre le sable qui s’étendait en une mince bande incongrue entre les deux grandes vallées herbues qui, à cette altitude, abritaient surtout des petites communautés agricoles. A cet endroit, la bande sableuse était large d’une cinquantaine de mètres à peine, son tracé s’arrêtant sagement au raz de l’herbe sans qu’aucun grain ne vienne s’y perdre, même lorsqu’un Marcheur s’en approchait. Il fallait dire que des années d’enseignement et d’entraînement permettait à ces derniers de marcher d’un pas si léger que c’était à peine s’ils laissaient de traces. Que le vent qui ne soufflait que sur la Route se chargeait bien vite d’effacer.

Assise à l’ombre du verger, ses pieds nus à quelques millimètre du sable du sable qu’elle n’avait pas le droit de fouler, Hanna attendait.

Elle attendait que le soleil passe tout à fait derrière l’une des hautes montagnes entourant la vallée. Que ses rayons rasants effleurent la Route et s’engluent dans ses grains. Elle savait qu’à ce moment là, et qu’à ce moment là seulement, les Ombres commenceraient à venir.

Minuscules d’abord. Juste… une ondulation un peu plus marquée que les autres au-dessus du sable rendant la chaleur emmagasinée durant la journée. Une fois cette dernière repérée, il suffisait de la fixer avec attention tout en élargissant sa vision périphérique de la route, et le spectacle pouvait commencer…

Là.

La voilà.

L’ondulation discrète, se trouvait légèrement sur gauche, l’obligeant à tourner la tête. Toute fine mais persistante, elle resta un long moment à simplement s’agiter au-dessus du sable brûlant avant d’esquisser un mouvement. Pas un simple déplacement, comme poussée par le vent, non, mais un vrai mouvement, comme un être doué de conscience. Un froissement d’air, un battement d’aile, une forme qui se dessine, plus précise… Hanna capta la forme de l’oiseau avant qu’il ne prenne tout à fait forme, premier d’un ballet aérien qui se promettait d’être spectaculaire.

Ouvrant grand les yeux, l’observatrice – qui n’était plus tout à fait une enfant mais pas encore une jeune fille non plus – obligea son esprit à la discipline, atteignant rapidement cet état de sérénité si proche de la transe qui lui permettrait de réellement voir les mirages de la Route.

Contrairement à ses camarades de jeux, Hanna n’avait jamais vraiment eu besoin de faire des efforts pour les percevoir. Oh, ç’avait bien été un peu difficile, au début, quand, petite fille d’à peine 4 ans, elle avait été alignée avec les autres au bord de la route, un chaud soir de la mi-saison alors que passait le premier Marcheur qu’elle voyait de sa vie. Il y avait tellement d’agitation, tellement de mouvements ! Bien trop de distractions pour une petite fille curieuse. Jusqu’à ce que ses grands yeux bruns ne se fixent sur le serpent. Sa petite bouche s’était ouverte pour béer tandis qu’un immense serpent à plume volait au raz du sable, évitait le Marcheur, puis partait s’enrouler avec grâce autour de la Tour. Elle avait vivement tourné la tête vers sa mère, montrant l’apparition du doigt, mais cette dernière avait disparue…

Et dans les yeux des adultes quelque chose s’était allumé.

A partir de ce soir là, Hann, Ruth et Gail avaient eu le droit de venir passer les heures du crépuscule près de la Route. Si Ruth s’en était rapidement désintéressée, plus curieuse d’apprendre l’art d’entretenir les vergers que de découvrir les mystères du Sable, Gail et elle avaient continué de venir. Irrégulièrement d’abord, parfois ensemble, parfois seuls, puis de plus en plus souvent. Et de plus en plus longtemps.

Et chaque soir, la Route leur révélait ses secrets.

La Tour, d’abord, qui ne se percevait qu’aux dernières heures du jour. Blanche et somptueuse, située pile au milieu des vallées et de la Route, avec en son sommet ses cinq visages aux expressions changeantes. C’était l’apparition la plus facile à percevoir : même les adultes sans la moindre affinité avec la Route en devinaient la silhouette. De nombreuses offrandes de fleurs et de fruits étaient d’ailleurs disposés de chaque côté de la bande de sable dans l’alignement de ses fondations. Puis les Ombres. Aux multiples formes, et surtout aux multiples couleurs quoi que puisse en dire Gail, qui lui maintenait qu’elles étaient en noir et blanc. En sépia, à la rigueur, mais certainement pas en couleurs ! Et pourtant, c’étaient bien une débauche de rouges, de jaunes, de bleus et de vermeilles que déployaient les oiseaux-mirages sous ses yeux. L’un d’eux frôla sa frange de son aile, manquant de la faire sortir de sa transe sous le coup de la surprise : jamais encore un mirage ne l’avait approché d’aussi près. Jamais ils ne lui avaient parus aussi réels.

Du coin de l’oreille, elle perçu la voix de Gail, devenue grave avec la mue, qui grommelait des jurons, et son cerveau enregistra distraitement que le jeune homme s’était laissé surprendre. Pas plus de spectacle pour lui ce soir… c’était fort dommage pour lui, car un gigantesque serpent aux épais anneaux or et vermillon venait de sortir de la bouche d’un des visages de la Tour et descendait paresseusement autour de celle-ci jusqu’au sable, où il se volatilisa, provoquant une nouvelle envolée d’oiseaux multicolores. La préadolescente sourit à ce spectacle et… tendit les doigts.

Ces derniers franchirent la limite invisible entre sable et herbe.

Et touchèrent.

La douceur froufroutante des plumes. La gifle sèche de l’aile qui bat. La brûlure d’une entaille, là, juste sur la pulpe du bout des doigts.

Et puis soudain, la sensation, chaude, d’une autre main dans la sienne.

Encore embrumée de transe, Hanna leva lentement la tête, ses yeux brun accrochant la lueur, bleue pâle, d’un regard délavé par le soleil.

Accroupit face à elle, ses pieds légers marquant à peine le sable, un Marcheur la regardait, de petits poissons verts et frétillant, picorant son habit rouge et orange.

Sa longue main brune était étonnamment fraîche dans celle d’Hanna, comme si la chaleur de la Route ne l’avait pas du tout impacté. Les yeux bleus, seule partie du visage visible au milieu du drapé de son vêtement, pétillaient d’un bon sourire et soudain, la petite fille su qu’elle voulait se lever. Sa main libre poussa sur l’herbe verte de la vallée, y arrachant un minuscule brin qui vint se coincer dans les plis de sa robe, ses pieds nus foulèrent le sable, le soleil couchant embrasa sa peau. Le Marcheur hocha positivement la tête, visiblement ravis de son élan, et esquissa un mouvement au-dessus d’elle. Aussitôt, la chaleur cessa de l’incommoder, et elle se permis un sourire auquel les yeux bleus répondirent.

Alors, sans un mot, ils prirent la Marche en direction de la Tour, en direction de toutes les Routes de sable sillonnant la planète, traversant bien des vallées, des plaines, des mers, des océans et des montagnes. Au milieu de l’envol coloré des oiseaux, la robe frustre d’Hanna pris le vert de l’herbe fraîchement coupée, ses cheveux ternes s’habillèrent d’un voile aussi bleu que le ciel de printemps, ses yeux pâlirent de contempler trop de merveilles et sa peau brunie d’être exposée au soleil surnaturel de la Route. Mais son coeur et son esprit étaient en paix, transportés par les merveilles qui viendraient s’offrir à elle.

Et Gail, qui assista à son départ pour êtret revenu la chercher parce que la nuit tombait, pu, pour la première et dernière fois de sa vie, Voir la Route en couleurs…

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mirjerao
Posté le 15/08/2020
Wow ! Je dois avouer que c'est une belle découverte. Ta plume est super agréable à lire (et cette descritpion est d'une qualité que j'apprécie grandement), l'histoire est belle et même en peu de mots tu arrives à transporter le lecteur, je dis bravo :p J'ai hâte de lire plus d'écrits de ta part
VavaOmete
Posté le 01/02/2021
Coucou Mirjerao !
Toutes mes excuses pour mon retour de réponse à ton gentil commentaire ! Avec le confinement etc, j'avais déserté PA depuis début août ou presque et je viens juste d'y revenir... ton commentaire me touche beaucoup et me motive à fond pour reprendre l'écriture de façon active !
Merci !!!
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