3 Grandes responsabilités

Notes de l’auteur : Chapitre assez court, toujours concentré sur Edmond (il était à la base regroupé avec le précédent et une partie du suivant). Peut-être possibilité de le faire plus long en ajoutant plus de description (notamment le passage dans la cuisine?), à voir ce que vous en pensez!
Le titre du chapitre fait bien entendu référence à un film de super héro bien connu (je n'ai pas trouvé mieux^^)

   Edmond se réveilla avec un mal de crâne épouvantable. Il avait l’impression d’avoir bu tout son saoul le jour précédent. De la veille, il ne se souvenait plus de ce qui c’était passé une fois que Charlotte était partie. Tous ses muscles étaient endoloris, après un marathon. En descendant l’étage, brinquebalant, pour prendre son petit déjeuner, sa mère, une femme grande et maigre, stoppa le touillage de sa casserole et l’interpella :

   — Tu vas mieux ? Tu es monté directement te coucher en rentrant hier soir.

   — Oui ça va ça va, un peu grippé, répondit-il. Sa voix était faible et profonde. J’ai dû choper un mauvais truc.

   La télévision passait des dessins animés que sa petite sœur regardait en rigolant ; un lapin poursuivit par un chasseur les mettait de sérieuses carottes dans le fusil.

   Charlotte était déjà en train de déjeuner dans la cuisine, engouffrant des céréales englobées de lait au fond de sa bouche. Elle portait un pyjama grenouillère avec des oreilles d’ours, ce qui lui donnait un air enfantin. Elle était en pleine forme, et comme d’habitude, débordante de joie.

   — Bah alors Dédou ! Ça va mieux ? En rentrant hier tu es parti directement te coucher ! Tu n’as même pas regardé le film avec moi ! Tu as vu les étoiles filantes hier ? Juste après que je sois partie ? C’était impressionnant !

   Le parler brusque de sa sœur était difficile à digérer au petit matin. Les informations remontèrent petit à petit dans son cerveau. Le souvenir de la météorite lui revint alors.

   — Oui, il y en a une qui est tombée pas loin je crois ! C’était impressionnant !

   Sa soudaine excitation amplifia son mal de crâne. Il se demanda s’il n’y avait pas un lien entre sa gueule de bois et cette météorite. Où alors était-il vraiment juste tombé malade ? C’était sûrement cela, à force de rester dehors tard le soir. La première solution était absurde. Mais cela piqua tout de même sa curiosité. Il ingurgita rapidement son petit déjeuner, et se rendit alors compte qu’il était en fait affamé et singulièrement déshydraté. Sa collation eut alors un effet plus que bénéfique sur lui : ses muscles étaient moins engourdis, sa migraine s’estompa. Il ne ressentit bientôt plus qu’un léger picotement dans son corps, comme si des fourmis l’astiquaient un peu partout. L’idée de retourner voir l’étoile filante écrasée lui traversa l’esprit. Ce jour là l’attendait la vielle mobylette se trouvant dans l’atelier de son grand-père pour quelques réparations ; et le champ où était tombée la pierre était sur le chemin. Charlotte étant toujours dans la cuisine, en train de nettoyer sa vaisselle dans l’évier, il lui demanda :

   — La météorite qui est tombée, tu veux aller la voir avec moi ? Je vais à l’atelier ce matin, et c’est sur le chemin.

   Sa petite sœur eut un sursaut de joie, et se retourna avec un grand sourire :

   — Ouais carrément ! Ça serait cool !-Et-si-on-peut-la-ramener-?-Je-me-change-et-on-y-va-?! dit-elle d’une traite sans le moindre arrêt pour respirer. Son enthousiasme débordant n’entacha pas la remonté physique d’Edmond. Au contraire, il aimait passer du temps avec sa petite sœur, et cela lui fit plaisir. Ses douleurs avaient de toute façon totalement disparues.

   Ils s’habillèrent rapidement, avec des vieux vêtements pour se promener et bricoler. Il faisait déjà très chaud ce matin, comme tous les jours depuis la début juin. Pour s’amuser un peu, ils coupèrent à travers les champs désespérément secs, passant près de la rivière qui coulait non loin, rafraichissant un début de journée qui s’annonçait être une des plus chaudes de l’année. En coupant de la telle sorte, ils arrivèrent très rapidement à l’endroit où la pierre était tombée. A sa grande surprise, en ayant retrouvé le souvenir de sa chute, le vacarme que cela avait produit ainsi que la production lumineuse effarante, Edmond s’attendait à trouver quelque chose d’extraordinaire. Mais en fait, ce n’était pas si gigantesque ; la météorite gisait là, dans un cratère relativement petit par rapport à la taille de l’objet, inerte et en nuance de gris-noir. Edmond la toucha, maculant le bout de ses doigts d’une suie noire, mais rien ne se passa. Charlotte aussi la toucha, sans pour autant déclencher le moindre évènement. Ils discutèrent alors un peu d’hier. Edmond lui raconta la chute, le bruit, la lumière, les reflets jaunes et les flammes bleues, et la sensation qu’il eut quand ses doigts l’attrapèrent, ainsi que son trou noir. Ce souvenir raviva les picotements dans son corps, qui se firent plus prononcés aux avant-bras et aux mains. Ce qu’il venait de dire inquiéta Charlotte, qui se demandait si son grand-frère ne délirait pas. Elle toucha son front, soucieuse, mais tout semblait normal.

   — Peut-être que j’ai juste choppé un coup de froid, finit par dire Edmond.

   Ils observèrent alors longuement la météorite. Elle était très belle. Sous la suie qui la recouvrait, elle était chromée ; parfaitement lisse, douce au touché. Le Soleil reflétait d’une drôle de façon dessus, lui donnant parfois l’aspect de l’or. Charlotte resta subjuguée devant elle. Elle la prit délicatement pour la ramener chez eux. Ils se séparèrent alors, Edmond allant vers l’atelier et Charlotte rentrant chez eux avec la météorite dans les mains.

   Il avait encore un kilomètre à parcourir à pied. Il transpirait déjà à grosses gouttes, le thermomètre devant maintenant frôler les trente degrés. Après quinze minutes, il apparut enfin le petit chemin de terre qui menait à l’ancien atelier de son grand-père. Le bâtiment était situé dans un champ à pommiers, pommiers qui affichaient déjà de belles fleurs blanches. Le terrain était assez vaste, et le bâtiment semblait un peu perdu au milieu de tout ça ; il était, du fait, partiellement à l’abri des regards indiscrets ; fait de bois, assez haut, ressemblant à une grange de far-West. Deux grandes portes coulissantes de plus de trois mètres de haut permettaient de rentrer dedans. Edmond ouvrit la grosse serrure, et fit coulisser les deux portes, non sans difficulté, le bois sec et déformé exerçant une pression sur les rails. Le bâtiment était assez sombre, ne comportant pas de fenêtre. Dans le fond, un vieux tracteur Vandeuvre couvert d’une bâche faisait encore parfois son œuvre dans les champs ; la vieille Simca 1100 TI couleur cuivre qui appartenait à son grand-père rutilait à côté. A sa droite, il y avait la propre voiture d’Edmond qui se reposait ici l’été, une vieille Peugeot 205 beige très banale.

   A l’entrée du bâtiment, près de la desserve à outils, la vieille mobylette d’Edmond l’attendait, couverte de poussière. Il ne l’avait pas acheté cher à l’époque ; elle était vieille, dans un état à désirer, mais elle était robuste et l’avait promené pendant plusieurs années, lui permettant d’aller voir ses amis des villages voisins. Alors elle méritait bien une petite santé et un gros nettoyage ; il tenait beaucoup à cette mobylette.   

   Le moteur devait être démonté afin de procéder à un décrassage, et la première étape, c’était de démonter le pot d’échappement. Edmond attrapa une clé de 10 et commença à le démonter. Pendant qu’il s’attelait a dévisser chaque boulon de sa main droite, il tenait le tube crasseux de la main gauche. Les picotements dans ses muscles reprirent, et il sentit comme une sensation de chaleur émanant du tube en aluminium, alors que le moteur n’avait pas tourné. Puis cette sensation se fit de plus en plus forte, monta dans son poignet, et repartit vers le métal. Soudain sortit un petit rond de fumée de l’échappement. Surpris, Edmond toucha le moteur : il était froid. Il continua à démonter, mais la même sensation arriva, suivit du même petit rond de fumée qui s’échappa de la fin du tube. Il débrancha l’antiparasite du moteur, mais rien n’y fit : dès que sa main était posée plus d’une quinzaine de secondes sur le pot d’échappement, un rond de fumée en ressortait un instant plus tard. Edmond pensa que le cumul de poussière et de calamine était tellement important que chaque secousse faisait ressortir des ronds de fumée du pot d’échappement.

   Quand ce dernier fut désolidarisé du reste, il le prit à deux mains pour l’entreposer ; là, la sensation de chaleur dans ses poignets se fit encore plus forte, et cette fois-ci, un rond de fumée plus puissant vint s’éclater contre le mur de l’atelier, s’étouffant en un panache gris. A la fois abasourdi et amusé, Edmond recommença à prendre ce tube à pleine main, ressentant toujours cette douce chaleur, ce picotement indescriptible dans ses membres, et envoya voler des ronds de fumées à travers le garage, qui s’évaporaient aussi promptement qu’ils apparaissaient. La vibration provoquée par ces ondes se répercutant sur le mur fit tomber une clé du haut d’une armoire ; celle-ci, plutôt que de venir se fracasser sur son crâne, lui rebondit dessus sans lui causer le moindre mal, et retomba au sol dans un bruit métallique. Son étonnement se fit plus grand. Ces ronds de fumées, est-ce que cela venait de lui ? Les picotements ? Et la clé qui venait de lui rebondir dessus sans lui faire de mal ?

   Mais qu’est ce qui m’arrive ?

   Il reprit peu à peu ses esprits, posa le manche sur l’établi le plus proche de lui. Il y avait-il un rapport avec cette météorite ?  Regardant le pot devant lui, il le reprit dans la main, et se concentra ; il ressentit de nouveau le picotement, la chaleur, et une petite onde sortit dans un panache de fumée. Il jeta le pot d’échappement sur l’établi, de peur. Tout cela devenait confus dans sa tête, ce qui fit renaitre sa migraine. Cela l’avait-il vraiment infecté ? Est-ce que c’était dangereux ? Il y avait-il un risque pour sa santé ? Il commença à avoir des sueurs froides, des vertiges. Mais il se reprit, et sa migraine s’apaisa. Peut-être n’était-ce qu’un effet passager ? Cela allait sûrement partir. Et puis, si il cela ne partait pas, il pourrait toujours consulter plus tard. Non, il ne valait mieux pas en parler pour l’instant. On allait le prendre pour un fou. Tout allait bien. Il s’en persuada. Reprenant le démontage de sa mobylette, il ne retoucha pas une seule fois au pot d’échappement. De tout l’été.

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ADemonDrop
Posté le 23/08/2020
Bonjour, j'espère ta journée se passe bien.
Concernant le chapitre, il est très bien, ni trop court ni trop long. La description des pouvoirs naissants d'Edmond et sa réaction sont vraiment bien décrites !

On peut sentir le personnage s'amuser avant de se rendre compte du problème. J'ai aimé la description précise mais tout en laissant une part de flou, sans décrire entièrement les pouvoirs. Les sensations physiques que tu écris permettent de se faire une idée juste de l'état du personnage.

Je n'ai pas vraiment de critique, le texte est bien et fluide, cela s'enchaine naturellement. Moi qui avait un peu de mal à m'identifier à Edmond (la veine romantique n'est pas trop mon truc ) ce chapitre m'a permis de mieux le comprendre, avec sa famille.
(Et merci de m'avoir appris la première étape du démontage d'un moteur :D )
Laurence Acerbe
Posté le 23/08/2020
Bonjour, merci beaucoup pour ton commentaire, cela me fait vraiment plaisir :).
J'ai conscience que les romances ne plaisent pas à tout le monde ;). Mais dans mes écrits, rien n'est gratuit, et la romance à un (plusieurs) intérêts :p
ADemonDrop
Posté le 23/08/2020
Je peux comprendre, je ne suis pas contre la romance (juste un peu de mal à m'identifier au premier abord).
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