23. Nulle part vous n'aurez refuge

Par Romane

 

Les feuilles d’automne achevaient de pourrir sur les trottoirs de la Traverse. Bientôt, ses rues seraient recouvertes d’un manteau blanc immaculé qui dissimulerait les pavés sales couverts du charbon que les mineurs du Field, à l’ouest de la ville, traînaient sous leurs chaussures, et qui formaient des mares noirâtres là où il se mélangeait avec les eaux grasses des cuisines jetées à même la rue. Mais pour l’instant, le quartier baignait dans sa crasse et son désordre…Le chaos semblait à Fid bien plus prégnant que d’ordinaire. Lorsque l'histoire de Viya était sortie dans la presse, on avait assisté à une ruée sur les kiosques à journaux, si bien que des files d’attente encombraient les rues. Aujourd’hui, les gens se massaient autour des placards, où avait été affiché un texte édité par la Confrérie des Légendiers, qui, si elle reconnaissait les faits, affirmait qu’ils appartenaient au passé. Depuis l’aube, on spéculait et on attendait fébrilement le prochain rebondissement. Alors qu’il s’enfonçait dans les ruelles tortueuses, Fid tentait de maîtriser sa colère et son dégoût.

Le Légendier déboucha enfin dans la rue où Viya et lui avaient été attaqués. Il sortit avec une grimace une fiasque d’alcool de sa poche et en ingurgita une rasade pour faire taire la douleur trop familière qui envahissait sa jambe. Le commerçant qui le lui avait vendu la boisson avait insidieusement tenté d’en savoir plus sur l’affaire en cours. L’ancien Orateur l’avait remis à sa place d’une répartie cinglante et avait gagné le lieu de la fusillade, en tentant d’ignorer les badauds qui s’écartaient sur son chemin. Il aurait dû se reposer, mais il était trop inquiet pour demeurer alité. L’eau-de-vie, ferait en attendant un palliatif acceptable. Si Viya avait dormi le plus clair du temps, lui avait cogité.

« Quand on ne sait plus où va l’histoire, il est toujours bon de revenir en arrière. »  La jeune fille lui avait communiqué mot pour mot les dires d’Eugénia. Il était clair que cette dernière voulait jouer avec eux. Elle, et ses complices : l’Oratrice avait employé le « nous ». Fid avait alors retracé mentalement durant une journée entière le cours des événements, à la recherche d’un indice, en vain. Irrité, il était sorti. En passant devant une librairie, il était tombé sur un ouvrage d’Igane : L’horloge à rebours. Il avait trouvé la coïncidence troublante et l’avait acheté. C’était l’histoire d’une vieille femme dont la montre, soudain, s’était mise à tourner à l’envers. L’objet lui était précieux, bien que son grand âge lui ait fait oublier en quelles circonstances elle l’avait acquis. Elle était alors allée trouver un horloger, qui s’apprêtait à prendre une retraite bien méritée, mais avait accepté de jeter un œil à la montre capricieuse. À l’instant où il avait posé ses doigts sur le mécanisme, la femme s’était souvenue que c’était l’artisan qui lui en avait fait cadeau, dans leur jeunesse, et tout ce qu’ils avaient partagé leur revenait en mémoire, succession de rires échangés, de baisers tendres, de crises, de larmes… La plume d’Igane était bien plus belle et entraînante que le souvenir qu’en avait Fid. Celui-ci en avait été agacé, d’autant plus qu’il n’avait rien appris. Il avait bu pour noyer sa contrariété, et dans son ébriété naissante, il avait eu une idée : revenir en arrière, sur les lieux de la fusillade.

Alors qu’il posait un premier pied dans la rue, une pique de souffrance se ficha soudain dans son genou droit et lui fit serrer les dents. Il raffermit sa prise sur sa canne pour compenser sa démarche que la boisson rendait chancelante et avança. On avait nettoyé les pavés des douilles qui les jonchaient. Des impacts de balles criblaient les murs. Il y passa les doigts. « Revenir en arrière ». Avait-il manqué quelque chose ? Et quoi ?

Des bruits de pas sur le pavé mouillé retentirent derrière lui. Il faillit ne pas prêter attention à ce qui devait être un passant, puis une voix familière résonna dans son dos :

– Bonsoir, Fid. Je vois que vous avez décrypté mon indice. Nous allons pouvoir continuer à jouer.

Fid aurait dû ressentir de la peur, mais l’alcool tenait déjà un peu trop loin de lui-même.

– Je ne suis pas d’humeur à jouer, grogna-t-il. Et j’ajoute que je trouve très peu divertissant qu’on ait tenté de nous tuer, Viya et moi.

— Pourtant, vous jouerez.

Le Légendier se retourna. Igane le dévisagea avec un sourire satisfait et ajouta :

— Vous n’auriez pas envoyé votre protégée confronter Eugénia si la curiosité ne vous tenaillait pas. La petite tenait pourtant à peine sur ses jambes. L’idée de revenir au 26 Place des Orpailleurs vous effraie-t-elle donc à ce point ? Ou bien étiez-vous trop ivre ?

Fid laissa ces piques glisser sur lui. Il se garda bien de lui dire que son élève avait agi sur un coup de tête. Igane ne devait rien savoir de leurs querelles, il était assez fourbe pour s’en servir contre eux, même si le Légendier ignorait encore ses desseins. Il ne tarderait pas à les connaître. L’Écrivain se montrait volontiers volubile.

— Je sais à quel point vous tenez à votre famille. Vous ne supportez pas qu’on l’attaque, elle, la seule qui vous ait accueilli, vous, vos démons et le sang sur vos mains.

            — Une famille que vous aimeriez détruire, n’est-ce pas ? Je suppose que vous êtes le commanditaire du trucage des Joutes, qui avait pour but de nous salir. Eugénia n’était que votre bras armé et vous l’avez protégée.

Igane acquiesça, avec une lueur de satisfaction dans le regard.

Fid sentit malgré lui son estomac se tordre. Il le pressentait depuis que Viya avait évoqué les rumeurs colportées par l’Écrivain lors de son procès, mais avait refusé de l’envisager. La situation était grave. Igane vouait aux Légendiers une haine farouche, et par-dessus tout, il le détestait, lui.

– Et la fusillade ?

— D’après vous ?

Avec ses cheveux lissés en arrière et sa barbe bien taillée, Igane ne ressemblait guère à un meurtrier. Et pourtant…

— Je ne sais pas ce qu’Eugénia vous a mis en tête, mais je peux vous assurer que la Confrérie n’a aucun projet d’alliance avec le Prieuré et que Viya ne nous servira pas d’intermédiaire. Sa mort aurait été une grave erreur.

Fid s’attendait à ce que son adversaire soit déstabilisé, surpris par le fait qu’il ait compris son plan. Mais Igane lui jeta un regard déçu.

— C’est vraiment tout ce que votre brillant esprit a trouvé pour justifier mon attaque d’il y a deux jours ? J’aurais bassement assassiné votre protégée car je craindrais son influence au sein du Prieuré ? Eugénia m’avait informé de votre conclusion, mais j’espérais que vous aviez révisé votre position.

Le Légendier blêmit. Soit Igane avait une merveilleuse maîtrise de lui-même ; soit Fid devait s’avouer avoir fait fausse route.

– Pour quelle autre raison auriez-vous tenté de tuer Viya ?

Igane eut un sourire de délectation.

— Par pragmatisme. Les morts n’ont pas d’orgueil et ne tentent pas de démentir ce que l’on dit d’eux. J’exècre tout de votre Confrérie misérable, mais elle a raison sur un point. La vérité est dans les Légendes. Le pouvoir appartient à ceux qui les écrivent et j’en ai conçu pour vous une toute nouvelle. C’est ce que je fais de mieux, après tout : écrire des histoires.

– Vos capacités doivent donc être fort limitées pour tout le reste.

La répartie s’était glissée entre ses dents avant même qu’il n’ait le temps de la penser.

L’Écrivain leva les yeux au ciel.

– Toujours cette verve prétentieuse ! Vous savez quel est votre problème ? Vous êtes si sûr de pouvoir briser votre adversaire en l’espace de quelques phrases que vous ne voyez pas plus loin. Vous faites des merveilles lorsqu’il s’agit de jouter, mais vous ne sauriez pas tenir sur une longue bataille.

Igane eut un soupir.

– Et par-dessus tout, vous continuez à me prendre pour un incapable.

– Parce que je crois fermement que vous en êtes un.

Le Légendier se mordit si fort la langue que le goût métallique du sang se diffusa dans sa bouche. L’alcool le désinhibait. Les mots s’échappaient de lui comme des chevaux fous, incontrôlables.

– Vous voyez ? Des petites piques assassines. Mais comme je vous le disais, je pense sur le long terme. Vous comprenez à quoi je fais référence ? Votre oreille de conteur l’entend-elle déjà murmurer ?

– Quoi donc ?

Igane fit un pas en avant, les yeux rétrécis, et expliqua d’un ton joyeux :

– Mais la rumeur, Fid ! L’histoire dont vous serez le protagoniste ! Les premières lignes sont déjà écrites. L’intrigue vous happera très bientôt. Vous allez tenter d’y résister. Vous allez devoir vous battre longtemps. Et vous perdrez.

Fid se figea. Les événements récents se pressèrent à sa mémoire, s’agencèrent les uns après les autres. « Quand on ne sait plus où va l’histoire, il est toujours bon de revenir en arrière. »  Le Légendier pensait que l’usage du mot n’était qu’une pure référence à son métier de conteur, mais c’était bien davantage.

L’Écrivain ne souhaitait pas empêcher une prétendue alliance entre la Confrérie et le Prieuré. Il voulait que son art tutoie les sommets. Il désirait infuser toute sa science narrative dans une intrigue grandeur nature, créer son histoire parfaite faite de scandales, de procès, de drames. Une histoire qui tiendrait Hydendark en haleine et qui détruirait la Confrérie.

Le romancier lui offrit un sourire victorieux.

– Dans mon récit, Fid, les Légendiers ont truqué les Joutes. Viya a menacé la pauvre Eugénia de Stalte pour qu’elle se dénonce. Votre protégée se défendra en disant que Mademoiselle de Stalte l’a humiliée, mais c’est faux : le talent d’Eugénia n’a fait que mettre en évidence sa propre médiocrité, ce qu’elle n’a pas supporté. Et ce n’était là que le début. Quand la pauvre Eugénia a tenté de montrer aux yeux du monde le vrai visage de Viya, cette dernière l’a attaquée. Car votre protégée est prête à tout pour cesser d’être une perdante.

– C’est un mensonge, souffla-t-il.

– Les histoires sont des mensonges, Fid. Vous devriez le savoir. Des mythes, des illusions, dont nous nous entourons pour rendre notre vie plus supportable. Pour que cela fonctionne, il suffit que le récit soit vraisemblable, et cette histoire-ci l’est, n’est-ce pas ? Vous m’avez toujours méprisé parce que j’écris des romans d’amour. Je donne pourtant aux gens la chance de vivre par procuration le temps de quelques heures une existence différente de leur quotidien misérable. Rien de tout ça n’est réel. Ils le savent au fond d’eux et ils s’en moquent. C’est l’illusion qu’ils veulent.

Igane eut un petit rire.

– Vous m’avez toujours pris pour un moins que rien, mais je suis passé maître dans l’art de divertir. Je leur offre une nouvelle histoire. Une légende de sang et de drame. Peut-être certains lèveront-ils le voile et découvriront-ils le mensonge. Ils le redéposeront aussitôt. Savez-vous pourquoi ?

Fid fut saisi d’un vertige qui ne devait rien à l’alcool. Il dut s’appuyer contre le mur derrière lui, sous le regard triomphant de son adversaire.

– Je sais que vous le savez, l’encouragea ce dernier. Nous pensons pareil, vous et moi.

– Parce que le plus grand nombre aimera l’histoire que vous leur raconterez et les autres ne pourront pas lutter.

– Bien ! répliqua l’écrivain du ton qu’on emploie quand un élève a correctement récité sa leçon. Imaginez un peu : une jeune fille qui vient de la Sororité, promise à un destin exceptionnel, mais qui n’est désormais plus qu’une gamine insignifiante et qui se transforme en monstre pour tenter de redevenir quelqu’un.

— Ne vous approchez pas d’elle, gronda Fid.

Guy Igane lui adressa un sourire odieux.

— Oh, je n’ai plus besoin d’elle. Elle a joué son rôle. L’intrigue suivra.

Le Légendier eut un rire méprisant. Une pure façade. Il ne parvenait pas à deviner le coup suivant. Igane avait dévoilé le passé de Viya, et ensuite ? Le Conseil n’avait pas donné suite. Comment l’homme procéderait-il ?

—Vous pensez vraiment que tirer profit de son passé avec la Sororité suffira à nous salir ?

L’autre conserva un silence narquois.

Le Légendier l’empoigna par le col et le tira à lui avant de pivoter pour le plaquer contre la paroi.

— Que projetez-vous ? hurla-t-il.

– Oh, Fid… Ce que vous pouvez être stupide. Tiens, comme c’est amusant. Fid. Stupide. Dites-moi, vous qui êtes féru de poésie, pensez-vous que la rime fut choisie à dessein par vos parents ? Oh, mais, c’est vrai ! vous les avez sans doute trop peu connus pour le savoir…

Guy Igane n’avait pas cessé de sourire et le coup de poing que lui décocha le Légendier fit à peine vaciller son rictus.

L’écrivain cracha entre ses dents un filet de sang. Il levait les mains sur le côté de sa tête, se refusant par là à se défendre, à le repousser, comme s’il était loin au-dessus de tout ceci. Comme s’il était le vainqueur, et qu’aucune action de Fid ne pouvait rien y changer.

Le Légendier arma son bras une deuxième fois. Le rictus d’Igane s’élargit, comme pour l’inviter à frapper. Fid se figea.

On était humilié. On perdait son sang-froid, on commettait un acte immoral. Et Igane instrumentalisait celui-ci pour créer un climat de défiance.

C’était ce qui s’était produit pour Viya. Le pamphlet rédigé contre elle l’avait faite déraper, comme lui, Fid, était en train de glisser malgré lui dans le costume de monstre que l’homme avait taillé pour lui. Il aurait tous les Légendiers ainsi, un à un.

– Viya n’aurait même pas dû faire partie de mon armée de monstres, expliqua tranquillement le romancier. Je ne pouvais pas prévoir qu’elle serait évincée de chez les Orateurs et tomberait sur vous, Fid. Je n’aurais pas non plus parié sur votre soudain élan d’altruisme. Mais, pour une pièce rapportée, elle s’est très bien intégrée à leurs rangs, je dois dire. Elle a donné du piquant à l’intrigue. Grâce son passé tragique, certes…

Igane posa sa main sur la nuque de Fid et s’avança pour murmurer à son oreille des mots qui contractèrent tant les mâchoires du Légendier qu’on entendait ses dents grincer.

— … mais surtout grâce au lien qui l’unit à vous. Si avez survécu tous deux à la fusillade c’est parce que vous l’avez protégée de votre corps. On ne pouvait la tuer sans vous atteindre, or, je vous veux en vie. J’ai été contrarié que votre élève soit toujours de ce monde, au début. Mais au final, tout cela est si romanesque. Regardez comme vous tenez à elle. Regardez-vous ! Cette rage dans vos yeux… Elle fait sortir le monstre en vous.

– Vous êtes le monstre, siffla-t-il.

Guy Igane se détacha de lui avec une moue déçue. La répartie manquait de force, Fid en avait lui-même conscience, mais comment pouvait-il réfléchir en cet instant ? Les phrases de son ennemi furent elles des lames de scalpel qui entaillèrent une à une son esprit paralysé par l’horreur.

– Ce n’est pas ce que dit l’histoire, Fid. Elle raconte que fatigués de leur petitesse, les Légendiers ont décidé de bafouer toutes les règles. Ils vont faire régner la terreur sur Hydendark. Ils vont prendre par la force ce que leur incompétence ne leur permet pas d’obtenir par l’esprit. Les Légendiers ont toujours été des hurluberlus qu’on regarde passer en souriant, avec une certaine indulgence. Ils vont devenir des monstres, les mêmes monstres que ceux que leurs histoires cachent sous les lits des enfants.

– Pourquoi vous confessez-vous ?

Igane haussa les épaules.

– On se confesse quand on a fauté, ce n’est pas mon cas. Je ne fais que mon devoir.

Le Légendier serra les mâchoires. Son interlocuteur continua, imperturbable :

– Mais au fond de vous, vous comprenez pourquoi je vous raconte tout cela, n’est-ce pas ?

Il pinça les lèvres, se refusant à répondre. Bien sûr qu’il comprenait. Oh, par tous les livres, évidemment…

– Je veux que vous sachiez que ce sont ces mots que vous chérissez tant qui vont vous tuer. Vous. Viya. Et vos ridicules amis conteurs.

Fid expira doucement. Ses mains tremblaient encore sous l’effet de l’adrénaline, mais son esprit venait de s’apaiser. Igane était si fier de lui qu’il avait commis une erreur. Il avait divulgué la fin de son histoire. Mais quel plaisir prendrait le peuple d’Hydendark s’il en connaissait déjà le dénouement avant qu’elle ne commence ? L’art du bon conteur était de savoir dissimuler sa chute.

Son changement d’attitude n’échappa pas à Igane, dont le front se plissa.

— J’imagine que le Conseil sera ravi d’apprendre que vous avez comploté pour détruire la Confrérie, asséna le Légendier.

L’Écrivain éclata de rire, toute crainte envolée.

– Fid, vous êtes tellement décevant. Moi qui pensais que vous aviez trouvé une faille dans mon intrigue… Parce que vous pensez que le Conseil écoutera ?

– Oui.

– Et qui écoutera-t-il ? L’ancienne apprentie Oratrice qui a ridiculisé l’Ordre et a de surcroît été condamnée il y a quelques jours à peine ? Un homme qui m’a porté un coup voilà moins d’une minute et tient à peine sur ses jambes tant il a bu ?

Fid perdit un bref instant conscience de lui-même. Sans qu’il comprenne comment, sa main enserra soudain le cou d’Igane. L’homme eut un soupir navré, nullement indisposé de se retrouver ainsi à sa merci.

– C’est l’image que les gens ont de vous, Fid. Celle d’un homme violent doublé d’un raté, qui a perdu la raison en revenant de la guerre et ne l’a jamais tout à fait retrouvé. Il n’y a rien que vous puissiez faire pour la changer. Alors, allez-y. Tuez-moi. Parachevez-la.

Le Légendier fut saisi de nausée. L’alcool, la panique, la terreur de se savoir acculé. Igane avait raison. Le Conseil n’écouterait pas, parce que c’était trop tard. Il était devenu le monstre et personne à Hydendark n’avait assez à cœur la recherche de la vérité pour chercher au-delà.

Mais y avait-il autre chose, d’ailleurs ? Il buvait. Il était cynique et désabusé. Avec Viya, il n’avait cessé d’être rude et distant.

Il desserra sa prise. Oui, il était autre chose que la bête qu’Igane faisait de lui. Peu importe si une ville entière l’ignorait, lui le savait.

– Oh… Vous essayez de me prouver que vous avez malgré tout de l’honneur ? Cela ne rend votre chute que plus palpitante !

– Je n’ai rien à vous prouver.

Il lâcha Igane et tourna les talons. Son sang battait à ses tempes. Il devait rentrer à Dreamyard Alley, retrouver les siens. Il amorça un pas. La voix d’Igane le figea à nouveau.

– Non, car quoi qu’il arrive, vous allez tomber. Hydendark va être bouclée. Elle sera votre arène, vous ne pourrez pas la fuir. Nulle part, vous n’aurez refuge. Vous ne pourrez même pas prendre la mer pour retrouver ceux qui vous sont chers sur l’Archipel des Légendiers. Les eaux profondes vous effraient, je le sais depuis que je vous ai vu sortir tremblant de la barque qui vous a mené au Palais-Citadelle. Je sais la moindre de ces faiblesses que vous vous évertuez à cacher. Celles de vos confrères et consœurs aussi.

Fid frémit, serra les lèvres pour ne pas l’agonir d’injures, s’obligea à marcher pour ne pas le frapper.

– N’oubliez pas que vous et votre Confrérie êtes des professionnels du divertissement ! hurla Igane alors qu’il s’éloignait. Je compte sur vous pour que le spectacle de votre déchéance soit mémorable ! Mettez-y du vôtre, vous nous devez bien ça !

Son cri se perdit dans un rire. Fid serra les mâchoires et accéléra. Le vent faisait claquer les pans de son manteau. Maintenant que le feu de l’alcool s’était dissipé, l’air lui glaçait les os. Il avait mal, au ventre, au cœur, à l’âme.

Une larme roula sur sa joue qu’une bourrasque polaire chassa. C’était un froid d’hiver, un froid qui donnait envie de mourir. Une deuxième larme glissa jusqu’à son cou. Elle se logea cette fois entre sa peau et le tissu de son écharpe, comme un secret. Il se voyait rebrousser chemin et rouer Igane de coups, mais ç’aurait été cédé au monstre, ç’aurait été lui donner raison. Alors, il ne pouvait avancer, encore et encore, vers le 12 Dreamyard Alley, en tentant de ne pas hurler face à l’horrible certitude qui s’emparait de son être tout entier.

La Confrérie allait tomber et lui, Fid, n’avait aucune idée de comment l’empêcher de se briser.

Il le faudrait, pourtant.

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Edouard PArle
Posté le 22/02/2024
Wow ! Mais quel chapitre...
Coucou Romane !
Alors là, beaucoup de choses s'éclaircissent. Igane confirme son statut d'antagoniste et ses machinations. Mais c'est pas vraiment là la force du chapitre. Ce qui est très fort, c'est que son plan est une "histoire" dans ton histoire qui parle des histoires. Son point de vue apporte des éléments de réflexion hyper intéressants sur l'écriture, les histoires, la fiction, le pouvoir des mots. C'était passionnant à lire !
L'autre avantage, c'est que les enjeux sont désormais hyper clairs pour Fid et Viya. Et ça donne beaucoup d'intérêt aux prochains chapitres. Je dois dire aussi que je trouve Igane hyper crédible dans ses réparties, et vraiment redoutable. C'est la première fois que l'on voit Fid aussi en difficulté et ça inquiète et ajoute de la tension pour la suite. Ca ajoute aussi de l'intérêt au personnage : il n'est plus qu'un mentor désabusé, mais aussi un leader impuissant...
J'attaque la suite !
Louison-
Posté le 12/07/2021
Coucou !
Alors déjà, je voulais noter la superbe description en tout tout début de chapitre. Ca faisait plusieurs jours (je crois?) que je t'avais pas lu et me replonger dans ton histoire de la sorte, c'était un pur plaisir. L'ambiance était lancée.

Pour la suite et l'aveu d'Igane : alors, merci. Merci pour ton idée. Haha, non mais pour m'expliquer : déjà, j'adore les mises en abime. Et là, on a une mise en abime double, pourrait-on dire ? Puisqu'Igane fait un récit grandeur nature DANS un récit (ton roman) et bref, rien que sur ce point, je suis comblée. Mais surtout, ça me donne juste l'impression que tout s'emboite parfaitement. C'est comme si ton idée de roman, celle de base, celle de traiter des récits et des histoire, était poussée à son bout avec cette seconde mise en abime. Et troisièmement, le plan d'Igane offre des réflexions trèèèès intéressantes sur la fiction, le fait de manier les mots, sur le mensonge, sur la réalité qui se raconte, tout le temps, et en gros : j'aime que tu exploites différents pans de cette thématique autour de la fiction. Ton roman, tu vois, c'est pas juste un roman qui raconte l'histoire de types qui racontent des histoires. Au contraire, c'est l'histoire de types vicieux qui ont conscience du pouvoir des mots et qui vont jusqu'à faire une histoire grandeur nature. Donc oui, je trouve l'idée très forte, belle poétiquement, et puis originale, aussi. On n'est plus dans le schéma : gnian je te déteste je veux te tuer parce que t'es mon ennemi. Ca va au-delà de ça.
Enfin voilà. Moi ça me fait bien réfléchir ton histoire, on sent ton âme de philosophe derrière et ça me plait, ça me plaît rudement la direction qu'a pris ton histoire ! J'adhère à tes idées.

Sinon, petite remarque malgré tout : j'ai été un poil déçu par Fid qui perdait de sa répartie. Bien sûr il est tout ramolli par la boisson, mais j'ai été surprise qu'il ne se défende pas davantage et qu'il soit aussi terrorisé par Igane. Il me paraissait assez démuni et c'était pas le Fid que je connaissais. Alors bien sûr, le rendre Fid-tout-puissant serait une mauvaise chose, donc surtout n'enlève pas le fait qu'il soit saoul, par exemple, mais j'aurais aimé de lui qu'il garde néanmoins un peu de sa superbe, malgré qu'il soit assez raplapla. Mais bon, ce n'est que mon ressenti. A toi de voir comment tu veux rendre cette scène ! Après tout, c'est peut-être juste moi qui ai été triste qu'il ne se défende pas davantage (la lectrice meuuuurtrie, et c'est bien quand les persos montrent des faiblesses dans le fond !). Et puis en fait, c'est beau aussi, qu'il soit rendu plus "sobre", comme plus "authentique". Donc regarde de ton côté ^^

Voilà, sinon merci pour ce chapitre fort en émotion et en tension <3 A très vite !
Romane
Posté le 13/07/2021
Bonjour Louison !

merci pour ton retour sur ce chapitre, qui a été particulièrement ardu à écrire ! Pour tout te dire, je me suis longtemps demandé si cette histoire dans une histoire était une bonne idée. En partie parce qu'elle me faisait frémir... Et puis, je me demandais si elle était crédible, parce que j'ai un immense respect pour les auteurs et je n'en vois pas un faire une crasse pareille xD
Mais comme tu le soulignes, elle permet d'aborder un aspect important : ce qu'on peut faire dire aux mots, comment on peut tordre la fiction pour lui donner l'apparence du réel, et surtout, comment les gens vont préférer adhérer à un récit pluôt qu'au réel.
Et puis, j'aime bien quand les méchants collent à l'univers, quand les choses sont très reliées entre elles, quand la menace est inhérente au monde lui-même. J'ai remarqué que parfois en fantasy, la menace surgit de l'extérieur. J'aime bien l'idée qu'elle soit immanente au fonctionnement du monde lui-même.

Pour Fid : peut-être qu'il y a moyen de rendre cela plus cohérent, mais pour moi, il est clair que pour Fid, se faire "tuer" par une histoire, par des mots, c'est le pire du pire qu'il puisse lui arriver. D'où le faite qu'il soit raplapla à la fin. Mais peut-être le trouves-tu trop démuni au début ?
Louison-
Posté le 13/07/2021
Oh alors moi je trouve vraiment que cette histoire dans une histoire est une bonne idée, et puis j'aime quand tu suis l'idée d'une menace immanente au fonctionnement du monde, et non pas d'une menace qui proviendrait de l'extérieur <3

Pour Fid : oui je comprends cette idée d'être "détruit" par une histoire et des mots, alors garde son côté raplapla <3 Peut-être que retravailler le début de la conversation est une bonne idée, effectivement, pour qu'on sente bien qu'il tombe toujours plus bas et qu'il soit rendu de plus en plus démuni !
Contesse
Posté le 21/06/2021
Wow. C'est un chapitre très puissant, plein de tension et d'angoisse, qu'on ressent aisément à travers le malaise, le mal-être de Fid.
Igane est vraiment pas sympa xD Je me doutais bien que c'était pas Eugénia la vraie méchante, et d'ailleurs je pense qu'elle ne suivra pas son plan jusqu'au bout parce qu'elle n'est qu'un pion et elle va s'en rendre compte (c'est ma nouvelle théorie) :D

Par contre, bon, je suis d'accord le plan d'Igane, d'écrire une histoire pour détruire les Légendaires, bon c'est pas sympa je suis d'accord ! Mais, soit j'ai pas tout à fait bien compris tout ce que ça impliquait (ou alors c'est normal, peut-être que ça fait partie de la surprise), mais je trouve que le gars est un peu drama queen quand même xD Je veux dire, oui l'histoire peut faire des dégâts... mais détruire une confrérie et ses membres ? Je ne sais pas, je suis sceptique ! Peut-être parce que je n'imagine pas encore les conséquences, mais je trouve vraiment qu'Igane est très très prétentieux de penser pouvoir réussir à faire tout ça rien qu'avec un récit !
Et que Fid soit aussi effrayé me parait étrange aussi. Après, on n'a peut-être pas encore toutes les infos ;) A voir !

A bientôt pour la suite ;)
Contesse
Posté le 21/06/2021
LÉGENDIERS* évidemment, pas Légendaires (pardonne mon correcteur xD)
Romane
Posté le 22/06/2021
Merci pour ta lecture !

Alors, ça se clarifiera peut-être par la suite, mais je te donne quelques infos pour Igane, parce que je n'ai pas eu ce retour des autres lecteurs : En gros, il ne veut pas écrire un livre, mais écrire une narration grandeur nature, en s'appuyant notamment sur la presse, et manipuler l'opinion. C'est une "histoire" dans la mesure où il va désormais doser le suspens, les révélations etc, pour que les gens se passionnent pour son intrigue, et achever les Légendiers par ce biais.
En gros, il fait à l'échelle d'une ville ce que certaines personnes peuvent faire de nos jours sur les réseaux sociaux : de la désinformation et de la diffamation. Sauf que dans mon monde, il n'y a pas vraiment d'instances neutres pour l'arrêter puisqu'une large partie du Conseil est déjà hostile aux Légendiers et qu'il n'y est pas interdit de diffamer. De plus, Igane bénéficie d'un indice de confiance plus élevé que Fid au sein de la population (parce qu'il est plus populaire). Bref, ça me donne l'occasion d'aborder un thème qui me tient à coeur : la façon dont on peut manipuler la vérité grâce aux mots et la manière dont les gens souscrivent à cette réalité alternative, parce qu'elle leur est narcissiquement satisfaisante.

Bon, après Igane est aussi un peu drama-queen sur les bords... Donc la question de savoir s'il va y parvenir ou non demeure ouverte !
Contesse
Posté le 22/06/2021
D'accord ! Je te remercie pour les détails ! En effet, je n'avais pas tout à fait compris ça ! J'avais plutôt penser qu'il comptait écrire une histoire, sous la forme d'un article, d'une chronique ou d'un roman et la faire diffuser... mais j'avais pas compris cet aspect "histoire grandeur nature", donc merci de l'explication ;)
Après j'imagine que tu le détailles par la suite, donc ça apparaîtra vite plus clair !

À bientôt !
dodoreve
Posté le 14/06/2021
J'adore le premier paragraphe et les enjeux portés par ce chapitre ! C'est vraiment intéressant de voir le personnage de Fid se décomposer dans son affrontement à Igane, et le parallèle avec Viya et Eugenia est intéressant.

J'ai une petite réserve, mais c'est du chipotage (tout me plaît toujours énormément) : je trouve en effet que Fid réagit un peu trop comme Viya, justement. C'est intéressant parce qu'ils ont des similarités, mais je crois que l'on pourrait ressentir davantage ce qui les distingue, et que tu pourrais par ailleurs exprimer davantage la virtuosité que l'on te connaît avec les mots, la répartie et la mise en scène de la réflexion. Je te rassure, on est globalement servi de ce point de vue, mais je crois que le moment qui me surprend un peu est celui des révélations :
"Une famille que vous aimeriez détruire, n’est-ce pas ? Je suppose que vous êtes le commanditaire du trucage des Joutes, qui avait pour but de nous salir. Eugénia n’était que votre bras armé et vous l’avez protégée."
Je ne sais pas si du point de vue du scénario et des enjeux narratifs tu avais pensé à l'écrire différemment, mais je ne trouve pas ce moment de révélation à la hauteur de ce à quoi tu nous as habitués. Est-ce toutefois un symptôme de la faiblesse de Fid, qui se contente de "subir" les mots qui composent cette révélation ? Peut-être bien. En tout cas je crois effectivement que je m'étonne de sa réaction et de sa manière de répondre à cette révélation.

Mais comme je disais, c'est pour chipoter, et sans doute parce que je savoure trop ton histoire pour pouvoir me retenir de demander "plus" dans ce qui fait ses qualités. Ceci dit, et comme je le remarquais en conclusion, ça peut aussi être symptomatique des tensions en jeu entre les personnages et dans ce cas là pourquoi pas (je crois toutefois qu'on pourrait avoir davantage conscience de ce qui distingue Fid de Viya).

Autrement j'ai adoré ce que ces révélations portaient et la nature de ce complot, dont on n'a pas encore tout à fait conscience des ficelles (l'équilibre entre révélation et part d'ombre est bien mené). Le Prieuré se tient-il si à part dans cette histoire qu'Igane prétend écrire ? Je remarque par ailleurs que c'est très brillant et pas lourd du tout de nous présenter ces enjeux narratifs d'une manière qui nous évoque forcément une mise en abyme de ta propre histoire (je vis pour ces petits plaisirs d'écriture, aussi simples et gratuits soient-ils). Et ça donne un peu plus de profondeur au personnage d'Igane, car au contraire d'Eugenia dont on a maintenant compris les motifs, on ne savait pas ce qui "animait" véritablement ses actes.

Fid en parlera-t-il avec Viya ? Je dirais que oui, mais je me demande quelle sera la réaction de celle-ci. Son état physique s'est tout de même aggravé et je me demande comment les morceaux se recolleront entre son histoire chez les Légendiers et son passé lié au Prieuré... Et plus globalement, Fid en parlera-t-il aux autres ? Il a un besoin très fort de revenir parmi les siens, mais une partie de ce conflit qui l'oppose à Igane est si personnel que ça ne me surprendrait pas qu'il gère celui-ci ou de manière collective, ou de manière individuelle. Je ne lui souhaite pas de choisir cette dernière option, ceci dit...

Hâte de lire la suite, comme toujours <3

Quelques petites choses relevées mais qui tiennent sans doute plus de l'incertitude :
"la Confrérie des Légendiers, qui, si elle reconnaissait les faits" La virgule avant le "qui" n'est-elle pas en trop ?
"Le commerçant qui le lui avait vendu la boisson" Le "le" est en trop
"L’eau-de-vie, ferait en attendant un palliatif acceptable." La virgule est en trop aussi, à moins qu'il manque un bout ?
"Fid aurait dû ressentir de la peur, mais l’alcool tenait déjà un peu trop loin de lui-même." l'alcool le* tenait ?
"Le pamphlet rédigé contre elle l’avait faite déraper, comme lui, Fid, était en train de glisser malgré lui" et* comme lui + virgule en trop après Fid ?
Romane
Posté le 14/06/2021
Hello !

Merci pour ton commentaire !
Je note ta remarque pour Fid. Peut-être que la réplique que tu as pointé pourrait être plus flamboyante, en effet. Au moins celle-là. Après, c'est voulu qu'il soit un peu faiblard, un peu sonné. Mais je peux peut-être rendre ça plus graduel. En fait, ce que tu voudrais, c'est que cette révélation saisisse davantage ? Si c'est ça, je dois pouvoir y remédier. J'ai beaucoup réécrit ce chapitre, (qui a été un petit numéro d'équilibriste pour que tout soit parfaitement lisible) et j'ai peut-être précipiter la rédaction de certaines répliques.


Les morceaux avec le Prieuré vont se recoller, tu verras ;-) J'avais un peu peur que les lecteurs ait déjà deviné, je suis assez contente de voir que ce n'est pas encore le cas... Mais ça va venir ;-)


Je note et corrige tes remarques de formes ! Merci pour ta lecture <3
dodoreve
Posté le 14/06/2021
"En fait, ce que tu voudrais, c'est que cette révélation saisisse davantage ?" À la lecture de ta réponse, je crois que tu vois bien ce à quoi je pouvais m'attendre : sans doute plus flamboyant et plus saisissant, mais autant comme le spectacle que peut être la répartie de Fid, que comme moment de finesse et de subtilité qui est la tienne lorsque tu traites les enjeux de ce monde et globalement de l'intrigue. Je ne doute pas un instant que les choses se peaufineraient d'elles-mêmes quand tu y reviendras avec un peu de recul, mais après tout, je ne doute pas non plus de ton intrigue du tout et cette remarque était vraiment de l'ordre du chipoti !
Au plaisir de lire la suite <3
Isapass
Posté le 13/06/2021
Oh la la, mon petit cœur de lectrice à souffert en lisant ce chapitre ! Tu n'épargne pas ce pauvre Fid en le réduisant ainsi à cette impuissance qu'on ressent très fortement ! Il ne sort pas vraiment grandi de la confrontation puisqu'on le découvre perdu, tenté par la violence, mené en bateau... Et le pire c'est qu'il semble presque avoir perdu sa combativité. Et même si Igane est détestable, on sent qu'il vise juste sur plusieurs points.
En tant que relectrice, je trouve ça très courageux et très intéressant d'avoir osé confronté ton héros à une telle situation. Et c'est très bien fait : je n'aurais pas ressenti tout ça si tu n'avais pas mené la scène de main de maître.
Je ne sais pas comment tu vas sortir les Legendiers de tout ça, mais bravo pour la prise de risque !
J'aime beaucoup l'introspection de Fid sur son identité de monstre.
A+
Romane
Posté le 14/06/2021
Bonjour Isa ! Ton retour me fait très plaisir ! C'est un chapitre central, que j'ai réécrit un bon nombre de fois et je suis contente de savoir qu'il fonctionne !
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