14 Le retour de la Walkyrie

Notes de l’auteur : Alcool, drogue, violence.
Tel est le quotidien des policiers de Meudon la forêt.

Non en réalité le chapitre contient vraiment des scènes avec de la drogue et de l'alcool, et surtout une violence exacerbée. Alors, à ne pas mettre devant tout les yeux

   Alice déroula le scotch gris dans un grincement, et coupa le morceau entre ses dents. Les bras du vigile fermement harnachés, elle les relia à ses pieds, puis entoura sa bouche sur plusieurs tours. Ensuite, elle attrapa l’inconscient de plus de cent kilos, qu’elle déposa sur son épaule comme un chiffon, et le cacha tant bien que mal derrière un des buissons qui décorait l’entrée. Ce con là était si grand qu’il dépassait des deux côtés. La Walkyrie se tapota tout de même les paumes l’une contre l’autre, l’air satisfait.

   Dans le noir, ça sera suffisant.

   Après tout, elle-même était habillée de son costume immaculé, les plumes blanches de son manteau d’épaule tombant comme des ailes, lui donnant l’air majestueux d’un ange. Son masque ivoire remontait comme une couronne à trois pics au dessus de son front, entouré de ses cheveux blonds comme les blés. S’il y avait quelque chose à repérer dans cette pénombre, c’était elle. Heureusement, personne ne trainait dans le quartier.

   A travers la fenêtre, Alice écouta le raffut. Les occupants de la maison étaient bruyants ; musique électronique à fond, pieds de meubles qui grincent, parfois un rire ou une exclamation. Des flashs lumineux de toutes les couleurs éclairaient les vitres en flashs en couleurs criardes, dans une ambiance épileptique qui sentait bon les abus en tout genre.

   Alice se glissa jusqu’à la porte d’entrée, jetant un œil au cas où un autre garde serait posté. Il n’y en avait pas et ça ne l’étonna guère, sinon il se serait montré bien plus tôt, lorsqu’elle avait mit hors d’état de nuire le premier. Elle s’appuya sur la poignée de porte et comme elle l’imaginait, celle-ci était fermée.

   Ce n’était pas un problème pour elle.

   Alice empoigna la clenche, et d’un coup sec, fit passer la serrure à travers la porte blindée. Le brouhaha étouffa le bruit, à son grand soulagement. Les longs couloirs étaient assombris par l’absence de lumière, ce qui n’empêchait pas de voir le luxe de la maison de ville sur trois étages, aux meubles en bois brut, aux lustres dorés et tape-à-l’œil. L’opulence du lieu lui donna des haut-le-cœur, et Alice glissa le long du couloir en se remémorant son objectif. Au vu du vacarme, elle ne prit même pas la peine d’adopter une position furtive. Elle ne croisa personne jusqu’à la salle où se tenait la petite fête.

   A l’entrée de la pièce, juchée sur un piédestal, Alice s’empara d’une lourde statue en bronze représentant une divinité grecque. Elle passa discrètement la tête dans l’ouverture de la porte, et observa l’intérieur.

   Deux gardes, aussi larges et hauts que celui de dehors, étaient postés dans deux coins opposés. Un des deux se trouvait à l’entrée, les bras croisé sur sa ceinture, observant son protégé entouré de ses amis. Alice renifla en remarquant deux jeunes femmes à genoux près de la table basse, passablement éméchées. L’une d’elle releva la tête d’un coup, euphorique, le bout du nez saupoudré de poudre blanche. Elles s’égosillaient des bêtises que racontaient les garçons en face d’elles, qui remplissaient leurs verres plus que de raison. Assis sur le canapé, Alice reconnut la tête blonde du fils du député Faquin ; il portait toujours cet air condescendant et supérieur. Son arrogance fut bien moindre la première fois qu’il se trouva en face d’elle.

   L’autre garçon devait être un ami à lui, car il semblait du même acabit hautain. Alice serra les crocs. Elle releva la tête, et fit un pas pour pénétrer dans le salon.

Le garde du fond la vit rapidement, mais elle dégaina la statue avec une telle force et une telle vivacité qu’il n’eut le temps de rien faire ; l’objet percuta avec force sa tête et il tomba lourdement à terre. Elle arrêta avec une facilité déconcertante l’autre garde qui se précipitait sur elle, d’une seule main. Elle lui empoigna le col, lui assena un coup de poing dévastateur, et le plaqua au sol comme s’il n’était qu’un vulgaire ballon de rugby. Il retomba avec un bruit sourd qui surpassa la musique, et les deux filles crièrent de peur en se redressant.

   Les deux garçons bondirent du canapé et se retournèrent. Les yeux du fils du député s’écarquillèrent, et il devint plus blanc que les plumes que portait Alice. Alice pointa du doigt les jeunes filles, puis fit un signe du pouce derrière elle.

   — Dégagez, leur dit-elle d’un ton sec.

   Les deux jeunes femmes en robes chics ne se firent pas prier, même si l’une d’entre elle prit quand même le temps de sortir un petit sac plastique et d’y fourrer le reste de poudre blanche qui enfarinait la luxueuse table.

    Désolant.

   Les deux jeunes filles passèrent de chaque côté d’Alice en tortillant leurs chevilles sur leurs talons aiguilles qui tapaient sur le sol dans un cliquetis désagréable.

   Les deux garçons étaient immobiles de l’autre côté du canapé, déglutissant tant bien que mal.

   — A nous deux, dit Alice en s’adressant au fils du député.

   — Non ! répondit celui-ci avec un semblant de courage. Pas cette fois ! Tu ne sais pas qui je suis ! Tu en subiras de lourdes conséquences !

   — C’est bien cela le problème, répondit-elle d’un ton glacial. Je sais exactement qui tu es, et cela ne te donnes aucun droit. AUCUN DROIT. Je suis la justice et tu vas payer de tes crimes.

   Les deux comparses firent un bond derrière la table basse, l’ami attrapant un couteau de chasse sur un meuble au passage, tandis que le fils s’empara d’une bouteille de Gin plutôt épaisse.

   Alice se tenait à trois mètres d’eux, entre le canapé et la table basse. Elle fit deux pas en avant, le martellement de ses chaussures renforcées résonnant sur le sol en bois par-dessus la musique. Ils firent deux pas en arrière, menaçant Alice avec leurs armes tenues mollement.

   Alice attrapa l’accoudoir du canapé, et d’un geste ample, le fit valdinguer à l’autre bout de la pièce, le divan s’écrasant avec fracas dans un meuble rempli de vaisselles en porcelaine. L’ami se recroquevilla alors comme un fœtus par terre, et le fils se laissa aller, mouillant son pantalon. La commissure des lèvres d’Alice monta en un rictus.

   — Aller, viens par là toi !

    Elle attrapa le fils Faquin par le col de son polo, qui craqua dans l’effort, et utilisa une clé de bras pour le maintenir au sol. Le jeune homme, pourtant de fort belle carrure, ne put nullement se débattre. Elle ressortit son gaffer, attachant ses mains et ses pieds, puis lui couvrit les yeux et le bâillonna. Elle le plaça alors sur son épaule dans les geignements du garçon et partit du salon.

   Sur le pas de la porte, un grand cri vint la heurter et l’ami dont elle ne s’était pas occupée lui planta son couteau dans l’épaule. Alice poussa un cri de douleur, laissant retomber sa victime au sol qui geignit de plus belle. Elle se retourna vers son assaillant, ses yeux bleu-glacier bouillonnant de rage, lui donnant un air dément.

   Elle saisit la poignée du couteau qui dépassait toujours de son épaule, et le retira d’un coup sec dans une effusion de sang qui macula ses ailes blanches. Elle observa la lame ensanglantée, longue d’une bonne dizaine de centimètres, et la laissa tomber sur le sol où elle se planta. L’ami comprit son erreur, mais c’était trop tard.

   La Walkyrie lui sauta dessus, attrapant sa main droite qu’elle serra dans la sienne. Chaque os craqua dans un bruit horrible, l’étau broyant chaque parcelle de sa main. L’homme hurla de douleur, les larmes dégoulinant des yeux. Alice se saisit de l’autre main, et effectua le même châtiment. L’homme expulsa un cri de gorge, et de douleur, tomba dans les vapes. Alice se toucha l’épaule blessée, méprisant l’homme évanoui de toute sa hauteur.

   — Ça fait mal putain ! lui cria-t-elle après.

   Elle se retourna, cherchant sa victime terrorisée par les cris qui tentait de s’échapper en faisant l’asticot, et de son bras valide, l’attrapa par le scotch et le traîna dehors. Son épaule gauche la faisait terriblement souffrir, et elle vit quelques fois blanc. Elle arriva derrière son vieux Kangoo bien fatigué, ouvrit la porte arrière et jeta sa victime dans le coffre. Elle s’assit alors lourdement dans la voiture en poussant un cri de douleur. Son épaule ruisselait d’un rouge épais, tachant en rivière son costume en temps normal complétement blanc. Elle attrapa une bouteille d’alcool, qu’elle vida sur sa plaie en serrant les dents, puis, pansa le trou béant avec un torchon et du scotch en refreinant ses cris ses élancements.

   Pense à être moins conne la prochaine fois.

   Derrière, sa victime se débattait, essayait de crier ; mais personne ne l’entendait. La nuit était noire et Alice l’avait choisie pour cela. En général, c’était les mardis où il y avait le moins de monde qui circulait dans la ville.

   Alice alla bon train vers le palais de justice, et se gara à quelques rues, dans un endroit encore plus sombre et désert, entre deux containers de poubelles. Elle s’empara du fils du député, toujours s’égosillant de peur, ainsi que du dossier qu’elle avait préparé sur son siège. Elle tacha de ne croiser personne, et emmena sa victime jusqu’au palais de justice, où elle la fixa sur une des colonnes à l’aide de son gros scotch. Enfin, elle ouvrit le dossier, contenant toutes les preuves de la culpabilité de l’homme dans son affaire d’agression sexuelle. Elle les accrocha un peu partout autour de lui, sur les piliers et sur les murs.

   Enfin, elle utilisa une bombe de peinture rouge et écrivit sur le sol, devant sa victime :

   Que sa culpabilité soit reconnue de tous. Nulle ne m’échappera, soyez prévenus.

   Puis elle signa « Justice ».

   Elle murmura un « adieu » dans l’oreille de sa victime, et repartit comme elle était venue : sans se faire repérer.

   Le travail était accompli.

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